mercredi 4 avril 2018

Saint ISIDORE de SÉVILLE (II), archevêque, confesseur et Docteur de l'Église



Bartolomé Esteban Murillo  (1617–1682), Saint Isidore de Séville, 1655

Saint Isidore de Séville 

Archevêque et docteur de l'église catholique -  saint patron de l'Internet 

vers 560 - 636 



De fide catholica ex Veteri et Novo Testamento contra judæos 

(Sur le même thème de l'annonce de l'Evangile à nos frères bien aimés de religion juive, on peut lire l'excellent Dialogue avec Tryphon de Saint Justin)



I. VIE. 

1° Sa jeunesse.


1. Sa famille. On ignore la date exacte et le vrai lieu de sa naissance ; les précisions données plus tard par les auteurs espagnols ne sont que des conjectures. Ses parents étaient catholiques de race hispano-romaine. Son père Sévérien dut occuper un rang distingué à Carthagène : lequel ? Sobre de détails sur sa famille, saint Isidore, en parlant de son frère dans son De viris illustribus, XLI, se borne à cette phrase : Leander genitus patre Severiano, carthaginensis provinciæ. Sévérien était-il duc de Carthagène, comme l’ont soutenu dans la suite certains écrivains espagnols ? Ni saint Isidore, ni aucun témoignage contemporain n’autorisent à l’affirmer ; ce titre, en tout cas, ne lui a pas été donné dans les offices de l’Eglise de Tolède. Lors de l’invasion d’Agila, l’an 587 de l’ère espagnole, c’est-à-dire ne 549, Sévérien dut fuir sa cité d’origine, ruinée par les Goths ariens : il se réfugia à Séville. Il eut quatre enfants, tous inscrits au catalogue des saints. Les deux premiers, Léandre et Florentine, étaient nés certainement à Carthagène ; les deux autres, Fulgence et Isidore, naquirent vraisemblablement dans la capitale de la Bétique, le dernier vers l’an 560. Le père et la mère, morts peu après, avaient confié aux soins des deux aînés le plus jeune et le plus aimé de leurs enfants ; et c’est ainsi qu’Isidore, devenu orphelin, fut élevé par son frère Léandre, qui devint archevêque de Séville, et par sa sœur Florentine, qui embrassa la vie religieuse.

2. Son éducation.

Léandre, en effet, traita toujours dans la suite Isidore comme son fils, et veilla avec sa sœur à son instruction et à son éducation. Florentine ayant manifesté un jour le désir de revoir les lieus de son enfance, Léandre l’en dissuada, parce que Dieu avait jugé bon de la retirer de Sodome. Malum quod illa experta fuit, lui écrivit-il en parlant de leur mère, tu prudenter evita ; ce sol natal, du reste, avait perdu sa liberté, sa beauté et sa fertilité. Mieux valait don, ajouta-t-il, qu’elle restât dans son nid et qu’elle veillât tout particulièrement sur le plus jeune de leurs frères. Regula, XXI, P. L., t. LXXII, col. 892. Isidore fut confié, tout enfant, à l’un des monastères de la ville ou des environs, où il fit des fortes études et puisa des connaissances vraiment étonnantes pour l’époque et dans le milieu où il vécut. Il n’est pas, en effet, d’auteur sacré ou profane, surtout parmi les latins, dont il n’ait lu et mis à profit les ouvrages. Mais il n’étudia pas uniquement pour le vain plaisir de savoir ; il poursuivit un double but : celui d’être utile à son pays pour le soustraire à la barbarie et celui de faire triompher la foi catholique contre l’hérésie arienne.

3. Son prosélytisme.

L’Espagne presque toute entière était au pouvoir des Goths ariens, et la difficulté était de ramener ces hérétiques à la vraie foi. Il y eut une lueur d’espoir, lorsque le fils aîné du roi Léovigilde (569-585), Herménégilde, qui avait épousé la fille du roi Franc Sigebert et de Brunehaut, passa au catholicisme. Il est vrai qu’il dut aussitôt s’enfuir à Séville ou qu’il y fut exilé. Mais là, loin des menaces paternelles, et très vraisemblablement sous l’inspiration de Léandre, il chercha à former un parti pour la conversion de l’Espagne. Il sollicita le concours du lieutenant de l’empereur de Byzance et envoya Léandre en mission à Constantinople ; c’est là, en effet, que Léandre se rencontra [col.98 fin / col.99 début] avec le futur pape saint Grégoire le Grand, qui lui écrivait plus tard : Te illuc injuncta pro causis fidei Wisigothorum. Moral., epist., I, P. L., t. LXXV, col. 510. Durant cette mission, Isidore, alors âgé de plus de vingt ans, crut le moment propice pour faire œuvre de propagande en combattant ouvertement l’arianisme. Ce ne fut pas sans horreur qu’en 585 il apprit le guet-apens tendu à Herménégilde et le meurtre qui en fut la suite. Mais survint presque aussitôt la mort du roi persécuteur, suivie de l’avènement de Recarède, qui, comme son frère, abjura l’arianisme et entraîna par son exemple la conversion en masse de tout le royaume goth. Ce grand évènement, si conforme aux vœux d’Isidore, fut célébré au IIIe concile de Tolède, en 589n où siégea et signa, comme métropolitain de la Bétique, saint Léandre. Isidore rentra dès lors dans le cloître, comme clerc, ou comme moine, pour y continuer la lecture attentive des auteurs et enrichir de plus en plus sa collection d’extraits.

2° Son épiscopat. 

1. Il remplace son frère Léandre sur le siège de Séville. A la mort de Léandre, du temps de l’empereur Maxime († 602) et du roi Recarède († 601), donc au plus tard en 601, Isidore fut élu pour remplacer son frère sur le siège métropolitain de la Bétique ; c’est la date consignée par un contemporain et un ami d’Isidore, saint Braulio, évêque de Saragosse, dans sa Prænotatio in libros divi Isidori, P. L., t. LXXXI, col. 15-17. Saint Ildefonse ajoute qu’il occupa ce siège une quarantaine d’années, De viris illustribus, IX, P. L., t. LXXXI, col. 28 ; exactement jusqu’au début du règne de Chintilla en 636, comme a eu soin de le préciser un disciple d’Isidore, qui a raconté la mort édifiante de son maître. P. L., t. LXXXI, col. 32. Ce long épiscopat fut consacré par Isidore aux intérêts de son siège, de sa province et de l’Espagne ; il ne fut pas sans fruits ; n’en retenons que les faits principaux. 

2. Il signe à un synode de la province de Carthagène. En 610, se tint à Tolède, à la cour du roi Gondemar, un synode de la province carthaginoise, où il fut décidé que le titre de métropolitain de cette province n’appartiendrait plus au siège de Carthagène, amis à celui de Tolède, la capitale du royaume. Bien qu’étranger à cette province, Isidore, alors l’hôte du roi, fut invité à signer le premier ce décret ; c’est ce qu’il fit en ces termes : Ego Isidorus, Hispalensis ecclesiæ provinciæ metropolitanus episcopus, dum in urbem Toletanam, pro occursu regis, advenissem, agnitis his constitutionibus, assensum præbui et subscripi. 

3. Il convoque lui-même des synodes. Par deux fois, en 619 et en 625, Isidore convoqua à Séville les évêques de la Bétique pour régler certaines affaires litigieuses et délicates. Dans le premier de ces synodes, il trancha d’abord le différend survenu entre son frère Fulgence, évêque d’Astigi (Ecija), et Honorias, évêque de Cordoue, au sujet de la délimitation de leurs diocèses ; puis il traita l’affaire de l’évêque eutychien Grégoire, de la secte des acéphales, qui, chassé de la Syrie, avait trouvé un refuge en Espagne. Pour couper court à toute suspicion et à toute propagande d’erreur de sa part, Isidore exigea de lui une abjuration formelle de l’hérésie monophysite et une confession de foi orthodoxe. Dans le second, il déposa le successeur de Fulgence, Martianus, et le remplaça par Habentius. Cf. Florez, España sagrada, t. X, p. 106. 

4. Il préside le IVe concile international de Tolède. A titre du plus ancien métropolitain de l’Espagne, Isidore eut à présider, en 633, le IVe concile national, qui est resté le plus célèbre de la péninsule, à cause des décisions qui y furent prises tant au point de vue religieux et ecclésiastique qu’au point de vue civil et politique ; il en fut vraiment l’âme.


a) Au point de vue religieux. Le concile commença d’abord par promulguer un symbole ; puis il imposa à [col.99 fin / col.100 début] toute l’Espagne ainsi qu’à la Gaule narbonnaise l’uniformité pour le chant de l’office et les rites de la messe : Ut unus ordo orandi atque psallendi per omnem Hispaniam atque Galliam conservaretur, unus modus in missarum solemnitate, unus in matutinis vespertinisque officiis, can. 2. Il régla ensuite plusieurs points de discipline et de liturgie, 7-19. Il rappela aux prêtres l’obligation de la chasteté, can. 21-27, et aux évêques le devoir de surveiller les juges civils et de dénoncer leurs abus, can. 32. Il déclara tous les clercs exempts de redevances et de corvées, can. 47.

b) Relativement aux juifs. La question juive, en 633, n’était pas nouvelle en Espagne et ne devait pas de sitôt recevoir une solution définitive, mais elle s’imposait à l’attention du pouvoir civil et ecclésiastique dans l’intérêt de la paix et du bien public. Déjà, en 589, le IIIe concile de Tolède s’en était occupé. Il avait interdit aux juifs : toute fonction qui leur aurait permis d’édicter des peines contre les chrétiens ; toute union avec une femme chrétienne, soit comme épouse, soit comme concubine, les enfants nés d’une telle union devant être baptisés ; tout achat d’esclaves chrétiens, ceux-ci ayant droit à l’affranchissement gratuit s’ils avaient été l’objet de quelque rite judaïque ; autant de mesures sages qui, sans léser les juifs, protégeaient les chrétiens. Quelques années plus tard, Sisebut obligea les juifs à recevoir le baptême ; c’est ce que note simplement Isidore dans son Chronicon, CXX, P. L., t. LXXXIII, col. 1056, mais ce qu’il blâme avec raison dans son Historia de regibus Gothorum, LX, ibid., col. 1093, où il dit de Sisebut : Initio regni judæos in fidem christianam promovens æmulationem, quidem habuit, sed non secundum scientiam, potestate enim compulit quos provocare fidei ratione oportuit. Aussi, ayant lui-même à s’occuper des juifs, maintint-il tout d’abord les décisions prises au IIIe concile de Tolède, mais il eut soin de faire décréter qu’on ne forcerait plus désormais aucun juif à se faire chrétien. Les juifs restaient exclus des emplois publics et ne pouvaient plus posséder d’esclaves chrétiens ; si l’un d’eux avait épousé une femme chrétienne, il était mis en demeure ou de se séparer d’elle ou de se convertir. Restait à liquider le passé et à prendre des mesures pour l’avenir ; car la plupart de ceux qui avaient été contraints sous Sisebut à recevoir le baptême étaient retombés dans le judaïsme ; ceux-là devaient être ramenés de force à la vraie foi ; leurs enfants, s’ils étaient circoncis, devaient être soustraits à leur autorité pour être confiés à des communautés ou à des fidèles recommandables, et leurs esclaves, s’ils avaient été circoncis par eux, devaient être affranchis aussitôt. Désormais tout juif baptisé, qui viendrait à renier son baptême, serait condamné à la perte de tous ses biens au profit de ses enfants, si ces derniers étaient chrétiens, can. 57-66.

c) Relativement à l’Etat. C’était là, à vrai dire, l’un des points plus importants à traiter, car on était au lendemain d’une révolution : il s’agissait de mettre un terme aux discordes civiles et d’assurer la paix, en tranchant le différend survenu entre Suinthila et Sisenand. Sisenand, en effet, avait pris les armes pour détrôner le roi régnant, et Suinthila, devant la révolte triomphante, avait dû abandonner le pouvoir. Sisenand, intéressé à se faire reconnaître, s’était montré plein de déférence à l’égard de l’épiscopat et ne ménagea pas les promesses. Loin d’être inquiété pour sa révolte et son élection, qui avaient tous les caractères d’une usurpation, il fut acclamé et solennellement reconnu comme roi légitime. Quant à Suinthila, il fut condamné à la dégradation et à la perte de tous ses biens. Le concile, disposant ainsi des affaires de l’Etat, menaça d’anathème quiconque attenterait aux jours du nouveau roi, le dépouillerait du pouvoir ou usurperait son trône, et décida qu’à la mort de Sisenand son successeur serait [col.100 fin / col.101 début] élu par tous les grands de la nation et par les évêques, can. 75. Ainsi s’affirmait, en Espagne, l’action politique du clergé et l’union étroite de l’Eglise et de l’Etat.

d) Relativement à l’instruction et à l’éducation du clergé. Isidore, qui avait tant profité de son séjour dans les écoles monastiques et qui comprenait l’importance capitale de l’instruction et de l’éducation pour le clergé, avait fondé à Séville un collège pour les jeunes clercs sous la direction d’un supérieur qui fût à la fois un magister doctrinæ et un festis vitæ. C’est là que fut élevé saint Ildefonse. Il eut soin en outre de faire décréter qu’un établissement semblable serait institué dans chaque diocèse, can. 24. Voir les canons du IVe concile de Tolède, dans Hefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, Paris, 1909, t. III, p. 267-276.

3° Sa mort. 

Isidore ne devait survivre que trois ans au IVe concile de Tolède. Déjà vieux et "sentant approcher sa fin", raconte son disciple, P. L., t. LXXXI, col. 30-32, il redoubla ses aumônes avec une telle profusion que, pendant les six derniers mois de sa vie, on voyait venir chez lui de tous côtés ou une foule de pauvres depuis le matin jusqu’au soir. Quelques jours avant sa mort il pria deux évêques, Jean et Eparchius, de le venir voir. Il se rendit avec eux à l’église, suivi d’une grande partie de son clergé et du peuple. Quand il fut au milieu du chœur, l’un des évêques mit sur lui un calice, l’autre de la cendre. Alors, levant les mains vers le ciel, il pria et demanda à haute voix pardon de ses péchés. Ensuite il reçut de la main de ces évêques le corps et le sang du Christ, se recommanda aux prières des assistants, remit les obligations à ses débiteurs et fit distribuer aux pauvres tout ce qu’il restait d’argent. De retour à son logis, il mourut en paix le 4 avril 636. " Cf. Ceillier, Histoire générale des auteurs sacrés et ecclés., t. XI, p. 711 ; Leclercq, L’Espagne chrétienne, Paris, 1906, p. 310.

4° Sa célébrité. 

L’opinion des contemporains. Très renommé pendant sa vie, Isidore est resté l’une des gloires de l’Espagne. Déjà son ami, Braulio, évêque de Saragosse, prit soin d’insérer son nom dans le De viris illustribus d’Isidore lui-même et d’y dresser la liste de ses principaux ouvrages. Il y vante son éloquence, sa science, sa charité ; il le considère comme le plus grand érudit de son époque, comme le restaurateur des études, comme l’homme providentiellement suscité par Dieu pour sauver les documents des anciens, relever l’Espagne et l’empêcher de tomber dans la rusticité. Prænotatio librorum divi Isidori, P. L., t. LXXXI, col. 15-17.


2. Sa vaste érudition. Cet éloge enthousiaste était mérité en grande partie ; car, sans être un homme de génie, Isidore fut un grand érudit. Il connaissait une grande partie des œuvres de l’antiquité sacrée et profane, et il y puisa à pleines mains, transcrivant textuellement, au fur et à mesure de ses multiples lectures, tout ce qui lui paraissait digne d’être retenu, et amassant ainsi pour ses futurs travaux des extraits précieux qu’il n’avait plus qu’à mettre en ordre. Il fut surtout un compilateur, comme le montre l’étendue encyclopédique de ses citations. 

Ayant ainsi recueilli tout ce qui touche à l’exégèse, à la théologie, à la morale, à la grammaire, liturgie, à l’histoire, à la grammaire, aux sciences cosmologiques, astronomiques et physiques, Isidore se contenta, quand il eut à traiter à traiter du sujet, d’utiliser la collection de ses notes, exprimant ainsi, comme un écho fidèle, moins sa propre pensée que celle de ses devanciers. Et telle fut constamment sa méthode ainsi qu’il a eu soin à plusieurs reprises d’en prévenir loyalement ses lecteurs, P. L., t. LXXXII, col. 73 ; LXXXIII, col. 207, 737, 964 ; si bien qu’il aurait pu écrire en tête de chacun de ses nombreux ouvrages ou qu’il a mis dans la préface de ses Questiones in [col.101 fin / col.102 début] Vetus Testamentum : Lector non nostra leget sed veterum releget, P. L., t. LXXXII, col. 209.


3. Son titre de docteur de l’Eglise. 

Traduisant la pensée des contemporains, le VIIIe concile de Tolède, en 653, parle d’Isidore en ces termes : Doctor egregius, Ecclesiæ catholicæ novissimum decus, præcedentibus ætate postremus, doctrina et comparatione non infimus et, quod majus est, in sæculorum fine doctissimus. Mansi, Concil., t. X, col. 1215. 

C’est ce même titre de docteur que lui donne encore le concile de Tolède de 688. 

Aussi l’Eglise de Séville n’hésita pas à insérer dans l’office de son saint évêque l’antienne : O doctor optime, et dans la messe l’évangile propre à la fête des docteurs : Vos estis sal terræ : office et messe qui reçurent, pour l’Espagne et le pays soumis au roi catholique, l’approbation de Grégoire XIII (1572-1585). 

Finalement ce titre fut reconnu pour toute l’Eglise, le 25 avril 1722, par Innocent XIII. 

Cf. Benoît XIV De beati sanct., l. IV, part. II, c. XI, n. 15. 

Comme ses deux frères, Léandre et Fulgence, et comme sa sœur Florentine, Isidore a été inscrit au catalogue des saints ; sa fête est fixée au 4 avril. Acta sanctorum, aprilis, t. I, p. 325-361.


II. ŒUVRES.

Durant son long épiscopat, Isidore composa un grand nombre d’ouvrages, dont quelques-uns ne sont point parvenus jusqu’à nous. Braulio, en effet, après en avoir signalé 17, ajoute ces mots : sunt et alia multa opuscula. Prænotatio, P. L., t. LXXXI, col. 17. Ceux qui restent sont caractéristiques quant au genre et à la méthode du saint. Ils roulent sur les matières les plus variées ; car, ainsi que l’a observé Arevalo, Isidoriana, part. I, c. I, n. 3, P. L., t. LXXXI, col. 11, il n’est pas de sujet qu’Isidore n’ait abordé : nil intentatum reliquit. Laissant de côté tout ce qui a trait au droit canon et à la la liturgie, et qui trouvera sa place dans les dictionnaires consacrés à ces deux sciences, nous nous bornerons à parcourir succinctement ses œuvres, non dans leur suite chronologique, car il n’y en a guère que quatre ou cinq que l’on puisse dater approximativement, mais dans l’ordre des matières adopté par Arevalo, le dernier et le meilleur éditeur des ouvrages de saint Isidore. 

Etymologie. C’est le plus long et le principal ouvrage du saint. Isidore y travailla longtemps sans pouvoir l’achever comme il l’aurait voulu. Mais sollicité plusieurs années de suite par Braulio pour qu’il le lui envoyât complet et en ordre, il finit par céder, vers 630. Il l’expédia à son ami avec une dédicace, mais tel qu’il était encore, inemendatum, en lui laissant le soin de l’amender lui-même. Son titre général est celui d’Etymologiæ, sous lequel Isidore le désigne plusieurs fois ; mais comme il est qualifié dans la préface d’opus de origine quarumdam rerum, Margarin de la Bigne et du Breul lui ont donné aussi le titre d’Origines. Sa division actuelle en vingt livres est-elle due à Isidore ou à Braulio ? C’est ce qu’on ne saurait dire, car les manuscrits varient et pour le nombre et pour l’ordre de ces livres. 

En voici le résumé : le Ier livre traite de la grammaire ; le IIe de la rhétorique et de la dialectique ; ces deux livres sont plus développés dans les Differentiæ, mais dans le même esprit, selon le même plan et la même méthode ; le IIIe, de l’arithmétique, de la géométrie, de la musique et de l’astronomie ; le IVe, de la médecine ; le Ve, des lois et des temps : celui-ci est un résumé ou Chronicon, ou abrégé de l’histoire universelle, en six époques, depuis les origines du monde jusqu’à l’an 627 après Jésus-Christ ; le VIe, des livres et des offices de l’Eglise : il y est question du cycle pascal et il est plus développé dans le De officiis ; le VIIe, de Dieu, dans anges et des différentes classes de fidèles : c’est un abrégé de théologie ; le VIIIe, de l’Eglise et des sectes ; le IXe, des langues, des peuples, des royaumes, des armées, de la population civile, des degrés de parenté ; le Xe, des mots : c’est un index alphabétique des plus curieux ; le XIe, de [col.102 fin / col.103 début] l’homme et des monstres ; le XIIe, des animaux ; le XIIIe, du monde et de ses parties : c’est une sorte de cosmologie générale ; le XIVe, de la terre et de ses parties : c’est une géographie ; le XVe, des pierres et des métaux ; le XVIe, de la culture des champs et des jardins ; le XVIIe, de la guerre et des jeux ; le XIXe, des vaisseaux, des constructions et de costumes ; le XXe, des mets et des boissons, des ustensiles de ménage et des instruments aratoires. 

Il y a là, comme on le voit, une sorte de d’encyclopédie. Tout y est traité d’une manière uniforme, l’étymologie des mots servant à l’explication des choses. Mais il y a l’étymologie secundum naturam et l’étymologie secundum propositum. A défaut de la première, Isidore recourt à la seconde. Or, quelque ingéniosité qu’on y déploie, il y a toujours place alors pour l’arbitraire. Aussi, à côté d’étymologies pertinentes et parfois fort remarquables, combien qui prêtent à sourire ou même semblent ridicules ! Isidore, il est vrai, ne les a pas inventées, mais alors à quoi bon les transcrire sans tenir compte de leur invraisemblance, ni même de leur contradiction ou de leur absurdité ? Arevalo a vainement essayé de l’en excuser, quand il a écrit : Scriptores collectaneorum magis excusandi sunt, si quædam aliquantutum absurda aut minus credibilia proferand. Propositum enim illis erat, non tam ut vera a falsis discernerent, quam ut aliorum dicta congererent et aliis dijudicanda proponerent. Isidoriana, part. II, c. LXI, n. 10, P. L., t. LXXXI, col. 386. Un choix plus judicieux s’imposait. A vrai dire, dans une œuvre de ce genre, Isidore n’a pas été plus heureux que Platon chez les grecs, Varron chez les latins et Philon chez les juifs. Mais telle quelle, sa compilation n’en fut pas moins, pour tout le moyen âge, une mine de renseignements et un manuel à la portée de tous. 

2. Differentiæ, sive de proprietate sermonum. Isidore dit avoir eu en vie ici le traité correspondant de Caton, mais il a aussi emprunté à d’autres. Il a divisé son travail en deux livres. Le Ier, De differentiis verborum, disposé par ordre alphabétique, comprend 610 différences, quelques-unes subtiles et bien approfondies ; par exemple : entre aptum et utile ; aptum, ad tempus ; utiles, ad perpetuum ; entre ante et antea ; ante locum significat et personam ; antea, tantum tempus ; entre alterum et alium ; alter de duobus dicitur ; allius, de multis, etc. Le IIe, De differentiis rerum, en 40 sections et 170 paragraphes, marque la différence des choses, comme par exemple entre Deus et Dominus, Trinitas et Unitas, substantia et essentia, animus et anima, anima et spiritus, etc. C’est en fait, un vrai petit traité de théologie sur la Trinité, le pouvoir et la nature du Christ, le paradis, les anges, les hommes, le libre arbitre, la chute, la grâce, la loi et l’Evangile, la vie active et la vie contemplative, etc. 

Allegoriæ. Ouvrage dédié à Orosio, personnage inconnu, ou plutôt Orontio, qui fut métropolitain de Mérida avant 638, ces Allégories forment une suite d’interprétations ou d’explications spirituelles, d’à peine quelques lignes chacune, sur des noms, des caractéristiques, des personnages de l’écriture : 129 pour l’Ancien Testament, d’Adam aux Machabées ; 121 pour le Nouveau, la plupart de celles-ci concernant les paraboles et les miracles du Sauveur. Hæc, dit Isidore dans sa préface, P. L., t. LXXXIII, col. 97, non meo conservavi arbitrio, sed tuo commisi corrigenda judicio. Même esprit et même méthode que dans les Etymologiæ. 

De ortu et habitu Patrum qui in scriptura laudibus efferuntur. C’est une série de très courtes notices biographiques sur 64 personnages de l’Ancien Testament, d’Adam aux Machabées, et 22 du nouveau, de Zacharie à Tite. Son attribution à saint Isidore, dans sa forme actuelle, n’est pas acceptable, dit Mgr Duchesne, [col.103 fin / col.104 début] S. Jacques de Galice, p. 156-157, dans les Annales du Midi, 1890, t. XII, p.145-179. C’est là que se trouve, en effet, De ortu, LXI, P. L., t. LXXXIII, col. 151, le passage interpolé qui, de saint Jacques le Majeur, frère de saint jean, fait l’apôtre de l’Espagne, l’auteur de l’Epître et la victime d’Hérode le Tétrarque. Or saint Jacques le Majeur n’a pas écrit l’épître en question et fut mis à mort à Jérusalem par Hérode Agrippa Ier. 

In libros Veteris ac Novi Testamenti proæmia. Très courtes introductions à plusieurs livres de la Bible, y compris Tobie, Judith, les Machabées, précédées d’une introduction générale également très courte. A remarquer simplement que, dans la liste des livres du Nouveau Testament, les Actes sont placés à la fin de l’Epître de saint Jude et l’Apocalypse de saint Jean, Proæmia, XIII, P. L., t. LXXXIII, col. 160 ; c’est du reste la même place qu’Isidore leur assigne dans son De officiis ecclesiasticis, I, XI, P. L., t. LXXXIII, col. 746. 

Liber numerorum qui in sanctis Scripturis occurunt. Il est question dans ce petit traité de divers nombres qui se trouvent dans l’Ecriture, à savoir de 1 à 16 de 18 à 20, puis des nombres suivants : 24, 30, 40, 46, 50 et 60. Isidore en donne une explication mystique qu’il clôture en faisant remarquer, à la suite de saint Augustin, que le nombre de 350 est la somme des dix-sept premiers chiffres. Or 153 est le nombre est le nombre de poissons pris dans le coup de filet de la pêche miraculeuse. 

De Veteri et Novo Testamento quæstiones. D’un intérêt plus relevé que le précédent, cet opuscule, quoique beaucoup plus court, quatre pages à peine dans Migne, fait passer sous les yeux, dans une suite de 41 questions, la substance et l’enseignement de l’Ecriture. Dic mihi qui est inter Novum et Vetus Testamentum ? Vetus est peccatum Adæ, unde dicit Apostolus : Regnavit mors ab Adam usque ad Moysen, etc. Novum est Christus de Virgine natus ; unde Propheta dicit : Cantate Domino canticum novum ; quia homo novus venit ; nova præcepta attulit, etc. Quæstiones, I, P. L., t. LXXXIII, col. 201. 

Mysticorum expositiones sacramentorum, seu quæstiones in Vetus Testamentus. Dans ce traité assez étendu, Isidore donne une interprétation mystique des principaux évènements rapportés dans les livres de Moïse, de Josué, des Juges, de Samuel, des Rois, d’Esdras et des Machabées : il y voit autant de figures de l’avenir. C’est, selon sa constante méthode, une série d’emprunts, que tantôt il abrège ou modifie, et auxquels il ajoute parfois. Veterum ecclesiasticorum sententias congregantes. . veluti ex diversis prati flores lectos. . . et pauca de multis breviter perstringentes, pleraque etiam adjicientes vel aliqua ex parte mutantes. Præf., P. L., t. LXXXIII, col. 207. L’allégorie y est souvent poussée jusqu’à l’excès, elle est du moins d’un ton très moralisant. 

De fide catholica ex Veteri et Novo Testamento contra judæos. Ce titre pourrait faire croire à un traité d’apologétique ou de controverse, mais il n’en est pas tout à fait ainsi. Sans doute, dans son épître dédicatoire à sa sœur Florentine, Isidore dit : Ut prophetarum auctoritas fidei gratiam firmet et infidelium judæorum imperitiam probet, ce qui semble annoncer une thèse, mais il ajoute : Hæc, sancta soror te petente, ob ædificationem studit tui tibi dicavi, P. L., t. LXXXIII, col. 449 ; c’est, en effet, une exposition sereine plutôt qu’une œuvre de polémique. Dans le premier livre, on traite, texte en mains, de la personne du Christ, de son existence dans le sein du Père avant la création, de son incarnation, de sa passion, de sa mort, de sa résurrection, de son ascension et de retour futur pour le jugement, le tout terminé par cette observation : Tenent ista omnia libri Hebræorum, legunt cuncta judæi sed non intelligunt. Cont. judæos, I, 62, P. L., t. LXXXIII, col. 498. [col.104 fin / col.105 début] Dans le second, on montre les suites de l’incarnation, à savoir ; la vocation des gentils, la dispersion des juifs et la cessation du sabbat ; après quoi vient simplement cette exclamation : O infelicium judæorum defienda demential. Cont. judæos, II, 28 ; ibid., col. 536. Cette manière d’argumenter contre les juifs, quelque intérêt qu’elle offre pour l’époque, est loin de rappeler le célèbre Dialogue avec Tryphon, de saint Justin. 

10° Sententiarum libri tres. Autrement dit, ajoute Braulio, De summo bono. Voici un manuel de doctrine et de pratique chrétiennes, empruntés surtout à saint Augustin et à saint Grégoire le Grand. Il est divisé en trois livres. Dans le Ier, il est question de Dieu et de ses attributs, de la création, de l’origine du mal, des anges, de l’homme, de l’âme et des sens, du Christ, du Saint-Esprit, de l’Eglise et des hérésies, de la loi, du symbole et de la prière, du baptême et de la communion, du martyre, des miracles des saints, de l’Antechrist, de la résurrection et du jugement, du châtiment des damnés et de la récompense des justes. Dans le IIe, de la sagesse, de la foi, de la charité, de l’espérance, de la grâce, de la prédestination, de l’exemple des saints, de la confession des péchés et de la pénitence, du désespoir, de ceux que Dieu abandonne, de la rechute, des vices et des vertus. Dans le IIIe, qui est d’une grande utilité pratique, il s’agit des châtiments de Dieu et de la patience qu’il faut avoir à les supporter, de la tentation, et de ses remèdes, prière, lecture et étude, de la science sans la grâce, de la contemplation, de l’action, de la vie des moines, des chefs de l’Eglise, des princes, des juges et des jugements, de la brièveté de la vie et de la mort. 

11° De ecclesiasticis officiis. Dédié à Fulgence († 620), frère du saint, ce traité d’Isidore contient des renseignements précieux sur l’état du culte divin et des fonctions ecclésiastiques dans l’Eglise gothique du VIIe siècle. Le premier livre, relatif au culte, passe en revue les chants, les cantiques, les psaumes, les hymnes, les antiennes, les prières, les répons, les leçons, l’alléluia, les offertoires, l’ordre et les prières de la messe dans la liturgie gallicane, cf. Duchesne, Les origines du culte chrétien, 2e édit., Paris, 1898, p. 189 sq., le symbole, les bénédictions, le sacrifice, les offres de tierce, sexte, none, vêpres et complies, les vigiles, les matines, le dimanche, le samedi, la Noël, l’Epiphanie, les Rameaux, les trois derniers jours du carême, les fêtes de Pâques, de l’Ascension, de la Pentecôte, des martyrs, de la dédicace ; les jeûnes du carême, de la Pentecôte, du septième mois, des calendes de novembre et de janvier, l’abstinence. Le second livre, relatif aux membres du clergé et aux diverses catégories de fidèles, traite des clercs : évêques, archevêques, prêtres, diacres, sous-diacres, lecteurs, chantres, exorcistes, acolytes, portiers ; des moines, des pénitents, des vierges, des veuves, des personnes mariées, des catéchumènes, des compétents, du symbole et de la règle de foi qui précèdent la collation du baptême, de la chrismation, de l’imposition des mains ou de la confirmation. 

12° Synonyma, de lamentatione animæ peccatricis. Ces deux titres, dont le premier fit plutôt penser à quelque traité de grammaire, et dont le second des gémissements d’un pécheur, se justifient également, l’un pour la forme, l’autre pour le fond. En effet, chaque idée est présentée plusieurs fois par des expressions différentes, mais équivalentes : de là le titre de Synonyma. Mais comme il s’agit d’un pauvre pécheur qui gémit son propre état, le second titre explique la matière du traité. C’est une sorte de soliloque ou plutôt de dialogue intime entre l’homme et sa raison. L’homme, sous le poids des maux qui l’oppriment, en vient à désirer la mort ; mais la raison intervient pour relever son courage, lui rendre l’espoir du pardon, le ramener dans la bonne voie et pousser jusqu’au som- [col.105 fin / col.106 début] met de la perfection. Il a tort, en effet, de se plaindre, car les épreuves ont leur utilité : Dieu les permet pour notre amendement, et elles sont la juste punition de nos fautes. Mieux vaut donc lutter, se convertir, opposer de bonnes habitudes aux mauvaises, persévérer dans la crainte de mourir comme un impie et d’encourir les châtiments éternels : tel est l’objet du premier livre, au commencement duquel se lit cette sentence : Melius est bene mori quam male vivere ; melius est non esse quam infeliciter esse. Syn., I, 21, P. L., t. LXXXIII, col. 832. Dans le second livre, la raison continue à donner des approprié et détaillés pour conserver la chasteté, résister aux tentations, pratiquer la prière, la vigilance, la mortification, et poursuivre la conquête des biens célestes, etc., et elle conclut : Donum scientiæ acceptum retine, imple opere quod didicisti prædicatione. Syn., II, 100, ibid., col. 868. Et le pécheur aussitôt de remercier la raison. Cette œuvre de direction morale est, du point de vue de la piété, la plus intéressante de saint Isidore. 

13° Regula monachorum. Résumé de tout ce que l’on trouve épars dans les ouvrages des Pères relativement à la disposition et à la distribution d’un monastère, à l’élection de l’abbé et à la vie des moines. 

14° Epistolæ. En dehors des lettres, qui servent de préface ou de dédicace à cinq de ses ouvrages, on n’en a conservé que quelques autres : trois à Braulio, évêque de Saragosse ; nue à Leudefeld, de Cordoue, concernant les membres et les fonctions du clergé dans l’Eglise ; une à Massona, de Mérida, sur la réintégration, après pénitence, des clercs tombés dans le péché ; une à Helladius, sur la chute de l’évêque de Cordoue ; une au duc Claude, sur ses victoires ; une à l’archidiacre Redemptus, sur certains points de liturgie ; une autre enfin à Eugène, sur l’éminente dignité des évêques, en tant que successeurs des apôtres, et plus particulièrement du pontife romain, tête de l’Eglise. 

15° De ordine creaturarum. Cet opuscule, retenu comme authentique par Arevalo, traite d’abord de la Trinité, puis des créatures spirituelles, c’est-à-dire des anges distribués en neuf chœurs, du diable et des démons, ensuite des eaux supérieures du firmament, du soleil, de la lune, de l’espace supérieur et inférieur, des eaux et de l’océan, du paradis, et enfin de l’homme après le péché, de la diversité des pécheurs et du lieu de leur peine, du feu du purgatoire et de la vie future. 

16° De natura reum. Dédié au roi Sisebut, après avoir été composé sur sa demande, ce petit travail résume tout ce que les anciens ont écrit sur le jour, la nuit, la semaine, le mois, l’année, les saisons, le solstice et l’équinoxe, le monde et ses parties, le ciel et les sept planètes alors connues, le cours du soleil et de la lune, les éclipses, les étoiles filantes et les comètes, le tonnerre et les éclairs, l’arc-en-ciel, les nuages, la pluie, la neige, la grêle, les vents, les tremblements de terre, etc. Pour les diverses sources, voir Becker, De natura rerum, Berlin, 1857. 

17° Chronicon. Toujours fidèle à sa méthode, Isidore résume dans cette chronique, en une suite de 122 paragraphes, les six âges de l’histoire du monde, depuis la création jusqu'à l’an 654 de l’ère espagnole, c’est-à-dire jusqu’en 616, en empruntant ses matériaux aux travaux de Jules l’Africain, d’Eusèbe, de saint Jérôme et de Victor de Tunnunum, et en y rajoutant quelques renseignement sur l’histoire de l’Espagne. Il a soin, à la fin, de rappeler la victoire de Léovigilde, sur les Suèves, le soulèvement d’Herménégilde, mais sans faire la moindre allusion à sa mort violente, la conversion de Recarède et de tous les Goths d’Espagne, et la part que prît à ce grand évènement son frère Léandre. Pour les sources, voir Hertzberg, Ueber die Croniken des Isidorus von Sevilla, dans [col.106 fin / col.107 début] Forschungen zur deutschen Geschichte, 1875, t. XV, p. 289-360. 

18° Historia de regibus Gothorum, Wandalorum et Suevorum. Ce résumé historique, tout à l’honneur de l’Espagne dont il célèbre la richesse, la fécondité et la gloire, est d’une valeur inappréciable et constitue la source principale pour l’histoire des Visigoths, depuis leur origines jusqu’à la cinquième année du règne de Suintila, en 621, c’est-à-dire pendant 256 années ; pour l’histoire des Vandales, depuis leur entrée en Espagne sous Gundéric, en 408, jusqu’à l’invasion de l’Afrique et la défaite de Gélimer, en 522 ; et enfin pour l’histoire des Suèves, qui, entrés en Espagne en même temps que les Alains, les Vandales s’y maintinrent jusqu’en 585, lors de leur incorporation au royaume des Goths. Cf. Hertzberg, Die Historien und die Chroniken des Isidorus von Sevilla, Gœttingue, 1874. 

19° De viris illustribus. Sur une liste de 46 noms dont il est question dans ce traité, treize appartiennent à des auteurs espagnols, ce qui nous vaut des renseignements précieux sur plusieurs évêques d’Espagne, antérieurs au VIIe siècle. On y trouve une note sévère sur la mort d’Osius et un éloge mérité de Léandre au sujet de son influence religieuse et de la part qu’il prit à la conversion des Goths.


 III. DOCTRINE.

1° Observation préliminaire. Sur l’Ecriture, le dogme, la morale, la discipline et la liturgie, saint Isidore a résumé la science de son temps ; mais c’est moins sa pensée qu’il nous donne que celle des autres. Il s’est contenté d’être l’écho de la tradition, dont il a pris soin de recueillir et de reproduire les témoignages, et, à ce point de vue ; son œuvre des plus précieuse ; c’est celle d’un disciple très averti, d’un témoin autorisé, mais ce n’est pas celle d’un initiateur ou d’un maître. S’en tenant trop exclusivement à sa méthode de collectionneur et de rapporteur, il n’a pas donné, dans quelque œuvre originale et forte, toute la mesure de son talent. Dans ces conditions, il serait difficile de parler de son enseignement personnel ; il suffira de signaler quelques points particuliers sur lesquels son témoignage est bon à recueillir ou à propos desquels il a été l’objet d’accusations injustifiées. 

 2° Sur l’Ecriture

1. Le canon. Par trois fois, saint Isidore a donné le catalogue des livres de la Bible. Etym., VI, I ; In libros Veteris et Novi Testamenti proæmia, prol. 2-13 ; De officiis ecclesiasticis, I, XI, P. L., t. LXXXIII, col. 150-160 ; 229 ; 746. Pour l’Ancien Testament, c’est la liste du Prologus galeatus. Aux trois classes des protocanoniques, livres historiques, prophétiques et hagiographes, Isidore joint celle des deut rocanoniques, la Sagesse, l’Ecclésiastique, Tobie, Judith et les deux livres des Machabées, parce que l’Eglise, dit-il, les tient pour des livres divins. Pour le Nouveau testament, c’est l’ordo evangelicus ou les quatre Evangiles ; l’ordo apostolicus : les quatorze épîtres de saint Paul, les sept Epîtres catholiques rangées dans l’ordre suivant : Pierre, Jacques, Jean et Jude, et enfin les Actes et l’Apocalypse. Ce dernier livre était encore contesté en Espagne, mais Isidore eut soin, au IVe concile de Tolède, de faire porter ce décret : " L’autorité de plusieurs conciles et les décrets synodaux des pontifes romains déclarent que le livre de l’Apocalypse est de Jean l’Evangéliste et ordonnent de le recevoir parmi les livres divins. Mais il y a beaucoup de gens qui contestent son autorité et qui ne veulent pas l’expliquer dans l’Eglise de Dieu. Si désormais quelqu’un ne le reçoit ou ne le prend pas pour texte d’explication pendant la messe, de Pâques à la Pentecôte, il sera excommunié. " Can. 17. 

 2. L’inspiration. Saint Isidore affirme le fait de l’inspiration divine de tous les auteurs sacrés, mais sans en spécifier la nature ; il se contente de dire : Auctor earumdem Scripturarum Spiritus Sanctus esse credit- [col.107 fin / col. 108 début] tur ; ipse enim scripsit qui prophetis suis scribenda dictavit. De offic. eccle., I, XII, 13, P. L., t. LXXXIII, col. 750. Quant au rôle et à la part de l’écrivain sacré dans la rédaction de son œuvre, il n’en parle pas, cette question n’ayant pas encore été pleinement élucidée. 

 3. L’interprétation. Isidore connaît la multiple signification du texte sacré ; il sait que l’on peut entendre au sens littéral et au sens spirituel, au sens propre ou métaphorique. Scriptura non solum historialiter sed etiam mysterio sensu, id est spiritualiter, sentienda est. De fide cath., II, XX, 1, P. L., t. LXXXIII, col. 528. Scriptura sacra ratione tripartita intellegitur ; d’abord secundum litteram sine ulla figurali intentione ; ensuite secundum figuralem intellegentiam absque aliquo rerum respectu ; enfin salva historica rerum narratione, mystica ratione. De ord. creat., X, 6-7, P. L., t. LXXXIII, col. 939. Pour l’intelligence des passagers les plus obscurs, il rappelle, à la suite de saint Augustin, mais sans y joindre les judicieuses réflexions de l’évêque d’Hippone dans son De doctrina christiana, III, XXX-XXXVIII, 42-56, les sept règles du donatiste Tichonius. Sent., I, IXI, P. L., t. LXXXIII, col. 581-586. 

 3° Sur le dogme. Deux points de doctrine ont paru répréhensibles dans saint Isidore : l’un sur la prédestination, l’autre sur la transsubstantiation ; qu’en est-il ? 

 1. La prédestination. Saint Isidore parle dans un passage de la gemina prædestinatio, sive electorum ad requiem, sive reproborum ad mortem. Sent., II, VI, 1, P. L., t. LXXXIII, col. 606. Hincmar de Reims, au IXe siècle, a conclu de là que l’évêque de Séville était un successeur des Gaulois qu’avait combattu saint Augustin dans son De prædestinatione sanctorum et son De bono perseverantiæ. C’est bien à tort, car il n’y a pas de preuve que le prédestinatianisme ait paru en Espagne, soit de provenance gauloise, soit d’ ailleurs. L’erreur des prédestinatiens du IXe siècle fut de croire que Dieu prédestine les pécheurs, non seulement à la damnation, mais aussi au péché. Or, saint Isidore distingue avec raison l’une de l’autre, il nie la prédestination au péché ; car Dieu ne veut pas le péché, il ne fait que le permettre ; et s’il est question de l’endurcissement ou de l’aveuglement du pécheur, il faut prendre garde au rôle négatif de Dieu. Obdurare dicitur Deus hominem, non ejus faciendo duritiam, sed non auferendo eam, quam sibi ipse nutrivit. Non aliter et obcæcare dicitur quosdam Deus, non ut in eis eamdem ipse cæcitatem eorum ab eis ipse non auferat. Sent. II, V, 13, P. L., t. LXXXIII, col. 605. Quant à la prédestination à la peine, Isidore l’enseigne : Miro modo æquus omnibus Conditor alios prædestinando præeligit, alios in suis moribus pravis justo judicio derelinquit ; quidam enim gratissimæ misericordiæ ejus prævenientis dono salvantur, effecti vasa misericordiæ ; quidam vero reprobi habiti ad pœnam prædestinati damnantur, effecti vasa iræ. Different., II, XXXII, 117-118, P. L., t. LXXXIII, col. 88. 

 Au sens propre et rigoureux qu’il aura dans la langue théologique, le mot de prédestination ne s’applique qu’à certaines créatures raisonnables qui doivent avoir la gloire du ciel en partage ; c’est la prescience, non des mérites de la créature, mais des bienfaits de Dieu ; c’est le plan éternel de Dieu statuant en lui-même l’obtention du ciel pour ceux qui, en effet, doivent un jour et pour l’éternité, être admis à ce bonheur. Il ne s’applique au pécheur que dans un sens impropre ; car la réprobation implique de la part de Dieu deux choses, d’abord la permission de la faute, ensuite la volonté de la punir. Dieu permet le péché : pourquoi ? C’est le grand mystère, dont il n’est point permis de demander compte à Dieu ; et Dieu très justement châtie le péché non pardonné et non expié. Cf. Arevalo, Isidoriana, part. I, c. XXX, n. 1-14, P. L., t. LXXXI, col. 150-157. [col.108 fin / col.109 début] 

 2. La transsubstantiation. D’après Bingham, Origines eccles., l. XV, c. V, sect. 4, Londres, 1710-1719, t. VI, p. 801, saint Isidore aurait nié la transsubstantiation. S’il s’agit du mot, il est certain que saint Isidore ne l’a pas employé, pour la bonne raison qu’il n’existait pas encore pour exprimer la nature du changement qui s’opère au sacrifice de la messe par la consécration ; mais s’il s’agit du sens exprimé si bien plus part par le mot de transsubstantiation, on ne peut pas soutenir qu’Isidore ne l’a pas enseigné. Car, dans un passage, il dit qu’on appelle corps et sang du Christ le pain et le vin, quand ils sont sanctifiés et deviennent sacrement par l’invisible opération du Saint-Esprit. Unde hoc, eo jubente corpus Christi et sanguinem dicimus, quod, dum sit ex fructibus terræ, sanctificantur et fit sacramentum operante invisibiliter Spiritu Dei. Etym., VI, XIX. Resteraient-ils pain et vin tout en devenant sacrement ? Nullement, car, dans un autre passage, après avoir dit comme saint Paul : panis, quem frangimus, corpus Christi est, il ajoute : Hæc autem, dum sunt visibilia, sanctificata per Spiritum Sanctum, in sacramentum divini corporis transeunt. De offic. eccl., I, XVIII. Transeunt, qu’est-ce à dire ? Il s’agit bien d’un changement, d’une transformation, et n’est-ce pas là l’équivalent du mot transsubstantiation ? Cf. Arevalo, Isidoriana, part. I, c. XXX, n. 15-24, P. L., t. LXXXI, col. 157-160. 

 4° Sur les sacrements. Bingham, Origines eccles., l. XII, c. I, accuse encore saint Isidore de n’avoir fait qu’un seul sacrement du baptême et de la confirmation. En effet, l’évêque de Séville a écrit : Sunt autem sacramenta baptismus et chrisma, corpus et sanguis. Etym., VI, XIX. D’où Bingham de conclure : de même que corpus et sanguis ne désignent qu’un seul et même sacrement, de même baptismus et chrisma. Conclusion erronée, car Isidore, loin de confondre le sacrement du baptême avec celui de la confirmation, les distingue l’un de l’autre : Sicut in baptismo peccatorum remissio datur, ita per unctionem sanctificatio Spiritus adhibetur, et il traite ailleurs, De offic. eccles., II, XXV-XXVIII, P. L., t. LXXXIII, col. 822-826, séparément et distinctement du baptême, de la chrismatio et de l’imposition des mains. Ce que l’on peut reprocher à son langage, c’est, tout au plus, un certain manque de précision fort excusable à une époque où la théorie sacramentaire n’était pas encore rigoureusement fixée. Cf. Arevalo, Isidoriana, part. I, c. XXX, n. 22-25, P. L., t. LXXXI, col. 160-162. 

 5° Sur l’origine de l’âme des enfants d’Adam. L’âme de l’enfant qui vient au monde a-t-elle été créée dès l’origine, ou n’est-t-elle créée par Dieu qu’au moment de la conception, ou bien encore ne serait-elle pas transmise du père au fils par voie de génération ? Autant de questions soulevées parmi les Pères grecs et latins et résolues en sens divers. Saint Augustin est mort sans avoir pu y trouver une solution qui le satisfît. Saint Isidore, cela va sans dire, rappelle les opinions anciennes, en constatant que la question est des plus difficiles et n’a pas été tranchée. Differ., II, XXX, 105 ; De offic. eccl., II, XXIV, 3 ; De ord. creat., XV, 10, P. L., t. LXXXIII, col. 85, 818, 952. Toutefois il se prononce pour la création de l’âme au moment où elle doit animer un corps humain : Animam non esse partem divinæ substantiæ, vel naturæ, nec esse eam priusquam corporis misceatur, constat ; sed tunc creari eam quando et corpus creatur, cui admisceri videtur. Sent., I, XII, 4, P. L., t. LXXXIII, col. 562. 

 I. EDITIONS. Margarin de la Bigne fut le premier à publier les œuvres de l’évêque de Séville sous ce titre : S. Isidori Hispalensis episcopi opera omnia, Paris, 1580. Son édition était incomplète et laissait à désirer. près de vingt ans après, Grial donna une autre édition beaucoup plus soignée, mais qui est encore loin d’être satisfaisante : [col.109 fin/col.110 début] Divi Isidori Hispalensis episcopi opera, Madrid, 1599 ; 2 vol. 1778. Le bénédiction Jacques du Breuil, profitant du travail de ses devanciers, améliora celle de Margarin de la Bigne et compléta celle de Grial sans la rendre plus correcte : S. Isidori Hispalensis episcopi opera omnia, Paris, 1601 ; Cologne, 1617. Au XVIIIe siècle, Ulloa reprit l’édition de Grial et la publia à Madrid, en 1778, revue, corrigée et augmentée de notes de Gomez. Mais il restait un examen critique à faire sur tous les ouvrages, authentiques ou supposés, de saint Isidore ; ce fut l’œuvre d’Arevalo. Ce dernier, grâce à un examen attentif et à une connaissance approfondie du sujet, passa en revue les manuscrits et les éditions et ne retint comme authentique que les ouvrages dont l’analyse a été donnée dans cet article, en suivant l’ordre de la dignité des matières et, dans chaque matière, le genre d’abord, les espèces ensuite ; c’est jusqu’ici la meilleure de toutes les éditions : S. Isidori Hispalensis episcopi opera omnia, 4 vol., Rome, 1797-1803. Migne l’a reproduite : P. L., t. LXXXI-LXXXIV, en y joignant la Collectio canonum attribuée à saint Isidore, ainsi que la Liturgia mozarabica secundum regulam beati Isidori, P. L., t. LXXXV-LXXXVI. Depuis lors quelques ouvrages de saint Isidore ont fait l’objet d’éditions critiques nouvelles. La partie historique, sous ce titre : Isidori junioris Hispalensis historia Gothorum, Wandalorum, Sueborum ad annum 624, a été insérée dans les Monumenta Germaniæ historica. Auctores antiquissimi, Berlin, 1894, t. XI, p. 304-390. G. Becker a donné une édition critique du De natura rerum, Berlin, 1857. K. Weinhold, a publié quelques fragments en vieil allemand de l’opuscule contre les juifs : Di altdeutschen Bruckstücke des Tractats des Bischofs Isidorus von Sevilla De fide catholica contra judæos, Paderborn, 1874. G. A. Hench, a publié un fac-similé du codex de Paris : Der althochdeusche Isidor. Fac-Simile Ausgabe der Pariser Codex, nebst kritischen Texte der Pariser und Monseer Bruchstücke, Strasbourg, 1893. Il reste encore beaucoup à faire. W. M. Lindsay, Isidori Hispalensis Etymologiarum seu Originum libri XX, 2 vol. Oxford, 1911 : Beer, Isidori Etymologiarum cod. Toletanus phototypice editus, Leyde, 1909. 

 II. SOURCES. S. Braulio, évêque de Saragosse, contemporain et ami de saint Isidore ; Prænotatio librorum divi Isidori, P. L., t. LXXXI, col. 15-17 ; S. Ildefonse, De viris illustribus, IX, ibid., col. 27-28 ; un récit de la mort de l’évêque de Séville, ibid., col. 30-32 ; Acta sanctorum, avril, t. I, p. 325-361. 

 III. TRAVAUX. Des biographies ont été publiées par Cajétan, Rome, 1616, par Dumesnil, 1843, par l’abbé Colombet, 1846. Sur la vie et les œuvres de saint Isidore, Noël Alexandre, Historia ecclesiastica, Paris, 1743, t. X, p. 195, 411-413 ; Dupin, Nouvelle bibliothèque des auteurs ecclésiastiques, Mons, 1691, t. VI, p. 1-6 ; Ceillier, Histoire générale des auteurs sacrés et ecclésiastiques, Paris, 1858-1868, t. XI, p. 720-728 ; N. Antonio, Bibliotheca hispana vetus, Madrid, 1788, p. 321 sq. ; Florez, España sagrada, Madrid, 1754-1777, t. III, p. 101-109 ; t. V, p. 417-420 ; t. VI, P. 441-452, 477-482 ; t. IX, p. 173, 406-412 ; Arevalo, Isidoriana, P. L., t. LXXXI ; Bourret, L’école chrétienne de Séville sous la monarchie des Wisigoths, Paris, 1855 ; Gams, Die Kirchengeschichte von Spanien, Ratisbonne, 1862-1874, t. II, sect. II, p. 102-113 ; Ebert, Histoire générale de la littérature du moyen âge en Occident, trad. franç., Paris, 1883, t. I, p. 621-636 ; Teuffel, Geschichte der römischen Litteratur, Leipzig, 1870 ; trad. franç., Paris, 1883, t. III, p. 337-345 ; Dressel, De Isidori Originum fontibus, Turin, 1874 ; Hertzberg, Ueber die Chroniken des Isidorus von Sevilla, dans les Forschungen zur deutschen Geschichte, 1875, t. XV, p. 289-360 ; Menendez y Pelayo, S. Isidore et l’importance de son rôle dans l’histoire intellectuelle de l’Espagne, trad. franç., dans les Annales de philosophie chrétienne, 1882, t. VII, p. 258-269 ; Manitius, Geschichte der christ.-latein. Poesie, Stuttgart, 1891, p. 414-420 ; Klusmann, Excerpta Tertullianea in Isidori Hispa. Etymologiis, Hambourg, 1892 ; Dzialowski, Isidor und Ildefons als Litterarhistoriker, Munster, 1899 ; Bardenhewer, Patrologie, 3e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1910, p. 568 sq. ; Realencyklopädie für protestantische Theologie und Kirche, 3e édit., Leipzig, 1901, t. IX, p. 447-453 ; Leclercq, L’Espagne chrétienne, Paris, 1906, p. 302-306 ; Kirchenlexicon, 2e édit., t. VI, p. 969, 976 ; Smith et Wace, A dictionary of christian biography, t. III, p. 305-313 ; U. Chevalier, Répertoire. Bio-bibliographie, t. I, p. 2283-2285 ; Schwarz, Observationes criticæ in Isidori Hispalensis Origines, Hirschberg, 1895 ; Schulte, Studien über den Schriftstellerkatalog des h. Isidorus, dans Kirchengeschitliche. Abhandlugen de Sdralek, Breslau, 1902, [col.110 fin / col.111 début] t. VI ; Endt, Isidor und Lukasscholien, dans Wiener Studien, 1909 ; Valenti, S. Isidoro, noticia de sua vida y escritos, Valladolid, 1909 ; Schenk, De Isidori Hispalensis de natura rerum libelli fontibus (diss.), Iéna, 1909 ; C. H. Besson, Isidor Studien, Munich, 1913 ; J. Tixeront, Précis de patrologie, Paris, 1918, p. 492-496.


G. BAREILLE. 
 






Saint Isidore de Séville et son élève Braule de Saragosse.

04/04 St Isidore de Séville, évêque, confesseur et docteur

Mort à Séville le 4 avril 636. Culte immédiat en Espagne.
Innocent XIII inscrivit sa fête comme docteur, au rite double, en 1722.

Textes de la Messe

die 4 aprilis

SANCTI ISIDORI

Ep., Conf. et Eccl. Doct.

III classis (ante CR 1960 : duplex)

Missa In médio, de Communi Doctorum.

Oratio C

Deus, qui pópulo tuo ætérnæ salútis beátum Isidórum minístrum tribuísti : præsta, quǽsumus ; ut, quem Doctórem vitæ habúimus in terris, intercessórem habére mereámur in cælis. Per Dóminum.

Ante 1960 : Credo

Secreta C 1

Sancti Isidóri Pontíficis tui atque Doctóris nobis, Dómine, pia non desit orátio : quæ et múnera nostra concíliet ; et tuam nobis indulgéntiam semper obtíneat. Per Dóminum.

Postcommunio C 1

Ut nobis, Dómine, tua sacrifícia dent salútem : beátus Isidórus Póntifex tuus et Doctor egrégius, quǽsumus, precátor accédat. Per Dóminum nostrum.

(En Carême, on fait seulement mémoire du Saint avec les trois oraisons de la Messe suivante)

le 4 avril

SAINT ISIDORE

Evêque, Confesseur et Docteur de l’Église
IIIème classe (avant 1960 : double)

Messe In médio, du Commun des Docteurs.

Collecte C

O Dieu qui avez fait à votre peuple la grâce d’avoir le bienheureux Isidore, pour ministre du salut éternel, faites, nous vous en prions, que nous méritions d’avoir pour intercesseur dans les cieux celui qui nous a donné sur terre la doctrine de vie.

Avant 1960 : Credo

Secrète C 1

Que la pieuse intercession de saint Isidore, Pontife et Docteur, ne nous fasse point défaut, Seigneur, qu’elle vous rende nos dons agréables et nous obtienne toujours votre indulgence.

Postcommunion C 1

Afin, Seigneur, que votre saint sacrifice nous procure le salut, que le bienheureux Isidore, votre Pontife et votre admirable Docteur intercède pour nous.

Office

Leçons des Matines avant 1960

Au deuxième nocturne.

Quatrième leçon. Isidore, Docteur illustre, était Espagnol de nation ; il naquit à Carthagène ; son père, Sévérien, était gouverneur de la province. Les saints Évêques, Léandre de Séville, et Fulgence de Carthagène, ses frères, prirent soin de lui enseigner la piété et les lettres. Formé aux littératures latine, grecque et hébraïque, et instruit dans les lois divines et humaines, il acquit à un degré éminent toutes les sciences et toutes les vertus chrétiennes. Dès sa jeunesse, il combattit avec tant de courage l’hérésie aérienne, depuis longtemps déjà répandue chez les Goths alors maîtres de l’Espagne, que peu s’en fallut qu’il ne fût mis à mort par les hérétiques. Léandre ayant quitté cette vie, Isidore fut élevé, malgré lui, au siège épiscopal de Séville, sur les instances du roi Récarède, avec l’assentiment unanime du clergé et du peuple. On rapporte que saint Grégoire le Grand ne se contenta pas de confirmer cette élection par l’autorité apostolique, mais qu’il envoya, selon l’usage, le pallium au nouvel élu, et l’établit son vicaire ainsi que celui du Siège apostolique dans toute l’Espagne.

Cinquième leçon. On ne peut dire combien Isidore fut, durant son épiscopat, constant, humble, patient, miséricordieux, zélé pour !a restauration des mœurs chrétiennes et de la discipline ecclésiastique, infatigable à les soutenir par ses paroles et ses écrits, remarquable enfin par l’éclat de toutes les vertus. Ardent promoteur et propagateur des institutions monastiques en Espagne, il construisit plusieurs monastères et édifia également des collèges, où, se livrant à la science sacrée et à l’enseignement, il instruisit un grand nombre de disciples qui affluaient vers lui, et parmi lesquels brillèrent saint Ildephonse, Évêque de Tolède, et saint Braulion, Évêque de Saragosse. Dans un concile rassemblé à Séville, il réprima et écrasa par une discussion vive et éloquente l’hérésie des Acéphales déjà menaçante. Isidore acquit auprès de tous une telle renommée de sainteté et de science, que seize ans à peine après sa mort, au milieu des applaudissements de tout un synode réuni à Tolède et composé de cinquante-deux Évêques, et avec le suffrage de saint Ildephonse, il mérita d’être appelé un Docteur excellent, la gloire la plus récente de l’Église catholique, l’homme le plus docte de la-fin des temps ; et les Prélats déclarèrent que son nom ne devait être prononcé qu’avec respect. Saint Braulion ne se contente pas de le comparer à saint Grégoire, mais il estime que le ciel l’avait donné à l’Espagne pour l’instruire, et tenir la place de l’Apôtre saint Jacques.

Sixième leçon. Isidore composa des livres sur les Étymologies, sur les Offices ecclésiastiques, et beaucoup d’autres ouvrages si utiles pour la discipline chrétienne et ecclésiastique, que le Pape Léon IV n’a pas hésité à écrire aux Évêques de Bretagne, que l’on doit faire le même cas des paroles d’Isidore que de celles de Jérôme et d’Augustin, lorsqu’il se présente une difficulté nouvelle qui ne peut être résolue par les Canons. On voit plusieurs sentences tirées de ses écrits placées parmi les lois canoniques de l’Église. Le saint Évêque de Séville présida le quatrième concile de Tolède, le plus célèbre de tous ceux d’Espagne. Enfin, après avoir banni de l’Espagne l’hérésie arienne, prédit publiquement sa mort et la dévastation du royaume par les armées des Sarrazins, et gouverné son Église environ quarante ans, il mourut à Séville l’an six cent trente-six. Son corps fut d’abord inhumé, comme lui-même l’avait demandé, entre son frère Léandre et sa sœur Florentine. Ferdinand Ier, roi de Castille et de Léon, l’ayant racheté à grand’peine d’Enète prince sarrazin alors maître de Séville, le transporta à Léon, et l’on a élevé en son honneur une église où ses miracles l’ont rendu célèbre, et où le peuple l’honore avec une grande dévotion.

Au troisième nocturne.

Lecture du saint Évangile selon saint Matthieu. Cap. 5, 13-19. 

En ce temps-là : Jésus dit à ses disciples : Vous êtes le sel de la terre. Que si le sel perd sa vertu, avec quoi le salera-t-on ? Il n’est plus bon qu’à être jeté dehors et foulé aux pieds par les hommes. Et le reste.


Homélie de saint Isidore, Évêque.

Septième leçon. Celui qui a la charge d’instruire les peuples et de les former à la vertu doit de toute nécessité, avoir une sainteté accomplie, et se montrer absolument irrépréhensible. Car pour reprendre les pécheurs, il faut qu’il soit lui-même exempt de péché. Comment, en effet, oserait-il reprendre ses subordonnés, exposé qu’il serait à s’entendre répondre : Commencez par adresser à vous-même vos leçons de vertu. Celui qui se propose d’enseigner aux autres à bien vivre doit donc d’abord régler sa propre conduite. Qu’en tout il se montre un modèle de bonne vie, et que ses exemples comme sa doctrine engagent au bien tous les hommes. La science des Écritures lui est également nécessaire. Car la sainte vie de l’Évêque toute seule, ne serait profitable qu’à lui-même, mais s’il y joint la science et la parole, il pourra encore instruire les autres, donnant l’enseignement aux fidèles et combattant les ennemis de la foi qui, s’ils ne sont réfutés et convaincus de fausseté, peuvent trop facilement tromper les simples.

Huitième leçon. La parole de l’Évêque doit être pure, simple, claire, pleine de gravité et de noblesse, pleine de douceur et de grâce ; il doit traiter des mystères de la loi, de la doctrine de la foi, de la modération chrétienne, des règles de la justice. Son langage doit varier avec la profession, la qualité, les mœurs de ses auditeurs ; il doit à l’avance mesurer Si>n enseignement quant à l’objet, au temps, à la manière et aux personnes. Avant tout, il doit, pour accomplir son office, lire la sainte Écriture, étudier les Canons, imiter les exemples des Saints, s’adonner aux veilles, au jeûne, à la prière ; il doit garder la paix avec tous ses frères, et ne blesser aucun des membres du corps dont il est le chef, ne condamner personne sans preuve, n’excommunier personne sans examen. Il doit unir dans la prélature l’humilité à l’autorité ; qu’une humilité indiscrète ne favorise pas les vices de ses subordonnés, qu’une sévérité immodérée n’accompagne point l’exercice de sa puissance ; mais qu’envers ceux qui lui sont confiés, il se montre d’autant plus rempli de sollicitude qu’il doit redouter du Christ lui-même un examen plus sévère de sa vertu.

Neuvième leçon. Il conservera la charité, cette vertu qui s’élève au-dessus de tous les dons, et sans laquelle toutes les autres ne sont rien. Il mettra sa chasteté sous la garde de la charité ; et le lieu où cette gardienne habitera sera l’humilité. Il aura donc parmi tous ces biens l’excellence de la chasteté, afin que son âme, donnée entièrement à Jésus-Christ, soit pure et libre de toute souillure de la chair. Cependant il devra, prudent dispensateur, prendre soin des pauvres, nourrir les affamés, vêtir ceux qui sont nus, recevoir les étrangers, racheter les captifs, protéger les veuves et les orphelins montrer en tout une vigilante sollicitude, une prudence pleine de discrétion dans les distributions de chaque jour. Il exercera excellemment l’hospitalité, recevant toute sorte de personnes avec bonté et chanté ; car si tous les fidèles désirent entendre cette parole de l’Évangile : « J’ai été sans asile et vous m’avez donné l’hospitalité », combien plus l’Évêque, dont la demeure doit être un abri ouvert à tous ?

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

La sainte Église nous présente aujourd’hui la douce et imposante figure d’un de ses plus vertueux Pontifes. Isidore, le grand Évêque de Séville, le plus savant homme de son siècle, mais plus recommandable encore par les effets de son zèle sur sa noble patrie, vient nous encourager dans la carrière par ses exemples et par son intercession.

Entre toutes les provinces du Christianisme, il en est une qui a mérité par excellence le nom de Catholique : c’est l’Espagne. Dès le commencement du VIIIe siècle, la divine Providence la soumit à la plus dure épreuve, en permettant que l’inondation sarrasine la submergeât presque tout entière : en sorte qu’il fallut à ses héroïques enfants huit siècles de combats pour recouvrer enfin leur patrie. Les vastes contrées de l’Asie et de l’Afrique qui, à la même époque, subirent l’invasion musulmane, sont demeurées sous le joug de l’Islamisme. D’où vient que l’Espagne a triomphé de ses oppresseurs, et que le sentiment de la dignité humaine ne s’est jamais éteint dans la race qui l’habite ? La réponse est facile à donner : l’Espagne, au moment de l’invasion, était catholique ; la vie catholique animait cette vaste région ; tandis que les peuples qui succombèrent sous le cimeterre musulman avaient déjà rompu avec la chrétienté par l’hérésie ou par le schisme. Dieu les délaissa, parce qu’ils avaient repoussé la vérité de la Foi, l’unité de l’Église ; ils ne furent plus qu’une proie, et n’offrirent presque aucune résistance à leurs farouches vainqueurs.

L’Espagne cependant avait couru un immense danger. La race des Goths, en la subjuguant, avait en même temps déposé l’hérésie dans son sein. L’Arianisme élevait dans l’Ibérie ses autels sacrilèges ; mais Dieu ne permit pas que cette terre privilégiée demeurât longtemps sous le joug de l’erreur. Avant l’arrivée du Sarrasin, l’Espagne était déjà réconciliée avec l’Église ; une famille aussi illustre que sainte avait eu la gloire de consommer ce grand œuvre. Le voyageur qui parcourt, de nos jours encore, l’Andalousie, remarque avec un pieux étonnement, à chacun des quatre angles des places publiques, une statue correspondant à trois autres : ces statues représentent trois frères et une sœur : saint Léandre, Évêque de Séville ; saint Isidore que nous fêtons aujourd’hui ; saint Fulgence, Évêque de Carthagène ; et leur sœur, sainte Florentine, vierge consacrée à Dieu. Par les efforts du zèle et de l’éloquence de saint Léandre, le roi Récarède et toute la nation des Goths se réunirent à la foi catholique, au concile de Tolède, en 589 ; la science et le grand caractère de notre Isidore consolidèrent cette heureuse révolution ; Fulgence la soutint par ses vertus et par sa doctrine ; et Florentine apporta à cette œuvre si féconde pour l’avenir de sa patrie le tribut de ses soupirs et de ses prières.

Isidore, Pasteur fidèle, le peuple chrétien honore vos vertus et vos services ; il se réjouit de la récompense dont le Seigneur a couronné vos mérites ; soyez-lui donc propice en ces jours de salut. Sur la terre, votre vigilance n’abandonna jamais l’heureux troupeau qui lui était confié ; regardez-nous comme vos brebis, défendez-nous des loups ravissants qui nous menacent sans cesse. Que vos prières obtiennent pour nous la plénitude tics grâces qui nous sont nécessaires pour achever dignement cette sainte carrière qui s’avance vers sa fin. Soutenez notre courage ; animez notre ardeur ; préparez-nous à la célébration des grands mystères qui nous attendent. Nous avons regretté nos offenses, expié, quoique bien faiblement, nos fautes ; l’œuvre de notre conversion a fait un pas ; il faut maintenant qu’elle se consomme par la contemplation des souffrances et de la mort de notre Rédempteur. Assistez-nous, ô Pontife du Christ qui l’avez tant aime ; vous dont la vie fut toujours si pure, prenez soin des pécheurs, et écoutez la prière de l’Église qui se recommande à vous aujourd’hui. Du sein des joies éternelles, souvenez-vous aussi de votre patrie terrestre ; bénissez l’Espagne qui vous conserve un culte si fervent. Rendez-lui l’ardeur primitive de la foi ; renouvelez en son sein les mœurs chrétiennes ; faites disparaître l’ivraie qui s’est levée parmi le bon grain. L’Église entière honore cette contrée pour sa fidélité dans la garde du dépôt de la doctrine du salut ; sauvez-la de toute décadence, et arrêtez les maux dont elle souffre ; qu’elle soit toujours fidèle, toujours digne du beau nom que vous l’avez aidée à conquérir.

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Le culte de ce vrai Patriarche (+ 636) de l’Espagne au temps de la domination visigothe est très ancien, et l’autorité dont il jouissait déjà dans l’Église durant le haut moyen âge fut si indiscutable que Bédé le Vénérable et les encyclopédistes de l’époque carolingienne lui sont en grande partie redevables de leur science ecclésiastique. Le VIIIe synode de Tolède en 653 fait l’éloge suivant de saint Isidore : Nostri saeculi doctor egregius, ecclesiae catholicae novissimum decus, praecedentibus aetate postremus, doctrinae comparatione non infimus, et, quod maius est, in saeculorum fine doctissimus [1].

Cependant, son office liturgique dans le calendrier du Siège apostolique date seulement de la Renaissance parce que, non seulement saint Isidore n’est pas Romain, mais l’anniversaire de sa mort tombe presque toujours en Carême ou durant la semaine pascale.

La messe est celle du Commun des Docteurs.

A Rome, un monastère de Saint-Isidore est mentionné dans la biographie de Léon III, qui l’enrichit d’un coffret d’argent du poids de deux livres. Une autre église de Saint-Isidore existait derrière la diaconie de Sainte-Marie in Domnica, et elle est mentionnée dans une bulle d’Innocent III [2]. Enfin, un oratoire de Saint-Isidore, également détruit à présent, s’élevait près des thermes de Dioclétien là où, autrefois, étaient les dépôts de grains confiés au praefectus annonae. Il s’agit donc d’un culte ancien et assez répandu dont le saint Docteur était autrefois l’objet dans la Ville éternelle ; c’est pourquoi la Renaissance, en insérant saint Isidore dans le Calendrier romain, n’a fait que rétablir une vieille et traditionnelle dévotion envers ce grand docteur de la catholique Espagne.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Recherchons l’enseignement liturgique.

Saint Isidore : Jour de mort : 4avril 636. — Tombeau : Il fut d’abord dans la cathédrale de Séville ; depuis 1063, il est dans l’église Saint-Isidore, à Léon (Espagne). Image : On le représente en évêque, souvent en compagnie de saint Léandre. Vie : Saint Isidore, frère du saint évêque Léandre, est considéré comme la figure la plus importante de l’Église d’Espagne à cette époque. Il fut, en raison de sa sainteté manifeste, très aimé de son peuple. On se pressait partout autour de lui dès qu’on l’apercevait. « Les uns venaient pour entendre son enseignement salutaire ; les autres, pour voir les miracles qu’il faisait au nom du Seigneur ; les malades venaient pour être guéris de leurs maux, car la force de Dieu sortait de lui et les guérissait tous » [3]. Il est considéré comme le restaurateur de l’Église d’Espagne après le retour des Wisigoths à la foi catholique. Il a aussi beaucoup fait pour la liturgie de rit espagnol. Isidore présida le quatrième concile provincial de Tolède (633), le plus important qui ait été tenu en Espagne. Il gouverna son Église pendant quarante ans et mourut, en 636, riche de mérites.

Pratique : L’oraison nomme saint Isidore un docteur de vie. Il fut, pour son temps, un interprète excellent et un docteur éminent de la liturgie, à laquelle il était attaché de toute son âme. C’est ce que nous voyons dans ses deux livres sur l’office liturgique. — La messe (In medio) est du commun des docteurs.

Benoît XVI, catéchèses, 18 juin 2008


Chers frères et sœurs,

Je voudrais parler aujourd’hui de saint Isidore de Séville : il était le petit frère de Léandre, évêque de Séville, et grand ami du Pape Grégoire le Grand. Ce fait est important, car il permet de garder à l’esprit un rapprochement culturel et spirituel indispensable à la compréhension de la personnalité d’Isidore. Il doit en effet beaucoup à Léandre, une personne très exigeante, studieuse et austère, qui avait créé autour de son frère cadet un contexte familial caractérisé par les exigences ascétiques propres à un moine et par les rythmes de travail demandés par un engagement sérieux dans l’étude. En outre, Léandre s’était préoccupé de prédisposer le nécessaire pour faire face à la situation politico-sociale du moment : en effet, au cours de ces décennies les Wisigoths, barbares et ariens, avaient envahi la péninsule ibérique et s’étaient emparé des territoires qui avaient appartenu à l’empire romain. Il fallait donc les gagner à la romanité et au catholicisme. La maison de Léandre et d’Isidore était fournie d’une bibliothèque très riche en œuvres classiques, païennes et chrétiennes. Isidore, qui se sentait attiré simultanément vers les unes et vers les autres, fut donc éduqué à développer, sous la responsabilité de son frère aîné, une très grande discipline en se consacrant à leur étude, avec discrétion et discernement.

Dans l’évêché de Séville, on vivait donc dans un climat serein et ouvert. Nous pouvons le déduire des intérêts culturels et spirituels d’Isidore, tels qu’ils apparaissent dans ses œuvres elles-mêmes, qui comprennent une connaissance encyclopédique de la culture classique païenne et une connaissance approfondie de la culture chrétienne. On explique ainsi l’éclectisme qui caractérise la production littéraire d’Isidore, qui passe avec une extrême facilité de Martial à Augustin, de Cicéron à Grégoire le Grand. La lutte intérieure que dut soutenir le jeune Isidore, devenu successeur de son frère Léandre sur la chaire épiscopale de Séville en 599, ne fut pas du tout facile. Peut-être doit-on précisément à cette lutte constante avec lui-même l’impression d’un excès de volontarisme que l’on perçoit en lisant les œuvres de ce grand auteur, considéré comme le dernier des Pères chrétiens de l’antiquité. Quelques années après sa mort, qui eut lieu en 636, le Concile de Tolède de 653 le définit : "Illustre maître de notre époque, et gloire de l’Église catholique".

Isidore fut sans aucun doute un homme aux contrastes dialectiques accentués. Et, également dans sa vie personnelle, il vécut l’expérience d’un conflit intérieur permanent, très semblable à celui qu’avaient déjà éprouvé Grégoire le Grand et saint Augustin, partagés entre le désir de solitude, pour se consacrer uniquement à la méditation de la Parole de Dieu, et les exigences de la charité envers ses frères, se sentant responsable de leur salut en tant qu’évêque. Il écrit, par exemple, à propos des responsables des Églises : "Le responsable d’une Église (vir ecclesiasticus) doit d’une part se laisser crucifier au monde par la mortification de la chair et, de l’autre, accepter la décision de l’ordre ecclésiastique, lorsqu’il provient de la volonté de Dieu, de se consacrer au gouvernement avec humilité, même s’il ne voudrait pas le faire" [4]. Il ajoute ensuite, à peine un paragraphe après : "Les hommes de Dieu (sancti viri) ne désirent pas du tout se consacrer aux choses séculières et gémissent lorsque, par un mystérieux dessein de Dieu, ils sont chargés de certaines responsabilités... Ils font de tout pour les éviter, mais ils acceptent ce qu’ils voudraient fuir et font ce qu’ils auraient voulu éviter. Ils entrent en effet dans le secret du cœur et, à l’intérieur de celui-ci, ils cherchent à comprendre ce que demande la mystérieuse volonté de Dieu. Et lorsqu’ils se rendent compte de devoir se soumettre aux desseins de Dieu, ils humilient le cou de leur cœur sous le joug de la décision divine" [5].

Pour mieux comprendre Isidore, il faut tout d’abord rappeler la complexité des situations politiques de son temps dont j’ai déjà parlé : au cours des années de son enfance, il avait dû faire l’expérience amère de l’exil. Malgré cela, il était envahi par un grand enthousiasme apostolique : il éprouvait l’ivresse de contribuer à la formation d’un peuple qui retrouvait finalement son unité, tant sur le plan politique que religieux, avec la conversion providentielle de l’héritier au trône wisigoth, Ermenégilde, de l’arianisme à la foi catholique. Il ne faut toutefois pas sous-évaluer l’immense difficulté à affronter de manière appropriée les problèmes très graves, tels que ceux des relations avec les hérétiques et avec les juifs. Toute une série de problèmes qui apparaissent très concrets aujourd’hui également, surtout si l’on considère ce qui se passe dans certaines régions où il semble presque que l’on assiste à nouveau à des situations très semblables à celles qui étaient présentes dans la péninsule ibérique de ce VI siècle. La richesse des connaissances culturelles dont disposait Isidore lui permettait de confronter sans cesse la nouveauté chrétienne avec l’héritage classique gréco-romain, même s’il semble que plus que le don précieux de la synthèse il possédait celui de la collatio, c’est-à-dire celui de recueillir, qui s’exprimait à travers une extraordinaire érudition personnelle, pas toujours aussi ordonnée qu’on aurait pu le désirer.

Il faut dans tous les cas admirer son souci de ne rien négliger de ce que l’expérience humaine avait produit dans l’histoire de sa patrie et du monde entier. Isidore n’aurait rien voulu perdre de ce qui avait été acquis par l’homme au cours des époques anciennes, qu’elles fussent païenne, juive ou chrétienne. On ne doit donc pas s’étonner si, en poursuivant ce but, il lui arrivait parfois de ne pas réussir à transmettre de manière adaptée, comme il l’aurait voulu, les connaissances qu’il possédait à travers les eaux purificatrices de la foi chrétienne. Mais de fait, dans les intentions d’Isidore, les propositions qu’il fait restent cependant toujours en harmonie avec la foi pleinement catholique, qu’il soutenait fermement. Dans le débat à propos des divers problèmes théologiques, il montre qu’il en perçoit la complexité et il propose souvent avec acuité des solutions qui recueillent et expriment la vérité chrétienne complète. Cela a permis aux croyants au cours des siècles de profiter avec reconnaissance de ses définitions jusqu’à notre époque. Un exemple significatif en cette matière nous est offert par l’enseignement d’Isidore sur les relations entre vie active et vie contemplative. Il écrit : "Ceux qui cherchent à atteindre le repos de la contemplation doivent d’abord s’entraîner dans le stade de la vie active ; et ainsi, libérés des scories des péchés, ils seront en mesure d’exhiber ce cœur pur qui est le seul qui permette de voir Dieu" [6]. Le réalisme d’un véritable pasteur le convainc cependant du risque que les fidèles courent de n’être que des hommes à une dimension. C’est pourquoi il ajoute : "La voie médiane, composée par l’une et par l’autre forme de vie, apparaît généralement plus utile pour résoudre ces tensions qui sont souvent accentuées par le choix d’un seul genre de vie et qui sont, en revanche, mieux tempérées par une alternance des deux formes" [7].

Isidore recherche dans l’exemple du Christ la confirmation définitive d’une juste orientation de vie : "Le sauveur Jésus nous offrit l’exemple de la vie active, lorsque pendant le jour il se consacrait à offrir des signes et des miracles en ville, mais il montrait la voie contemplative lorsqu’il se retirait sur la montagne et y passait la nuit en se consacrant à la prière" [8]. A la lumière de cet exemple du divin Maître, Isidore peut conclure avec cet enseignement moral précis : "C’est pourquoi le serviteur de Dieu, en imitant le Christ, doit se consacrer à la contemplation sans se refuser à la vie active. Se comporter différemment ne serait pas juste. En effet, de même que l’on aime Dieu à travers la contemplation, on doit aimer son prochain à travers l’action. Il est donc impossible de vivre sans la présence de l’une et de l’autre forme de vie à la fois, et il n’est pas possible d’aimer si l’on ne fait pas l’expérience de l’une comme de l’autre" [9]. Je considère qu’il s’agit là de la synthèse d’une vie qui recherche la contemplation de Dieu, le dialogue avec Dieu dans la prière et dans la lecture de l’Écriture Sainte, ainsi que l’action au service de la communauté humaine et du prochain. Cette synthèse est la leçon que le grand évêque de Séville nous laisse à nous aussi, chrétiens d’aujourd’hui, appelés à témoigner du Christ au début d’un nouveau millénaire.

[1] Mansi, SS. Conc. Coll., X, 1215.

[2] ARMELLINI, op. cit., 503.

[3] Bollandistes, Avril I, 340.

[4] Sententiarum liber III, 33, 1 : PL 83, col 705 B.

[5] Sententiarum liber III, 33, 3 : PL 83, coll. 705-706.

[6] Differentiarum Lib II, 34, 133 : PL 83, col 91A.

[7] o.c., 134 : ibid., col 91B.

[8] o.c. 134 : ibid.

[9] o.c., 135 : ibid., col 91C.




Saint Isidore de Séville présentant sa Défense de la foi catholique contre les Juifs à sa sœur Florentine, 
vers 800. BNF, Latin 13396, f.1v. 
Soror mea Florentina accipe codicem Quem tibi composui feliciter amen, Abbaye de Corbie

St. Isidore of Seville

Born at Cartagena, Spain, about 560; died 4 April, 636.
Isidore was the son of Severianus and Theodora. His elder brother Leander was his immediate predecessor in the Metropolitan See of Seville; whilst a younger brother St. Fulgentius presided over the Bishopric of Astigi. His sister Florentina was a nun, and is said to have ruled over forty convents and one thousand religious.
Isidore received his elementary education in the Cathedral school of Seville. In this institution, which was the first of its kind inSpain, the trivium and quadrivium were taught by a body of learned men, among whom was the archbishop, Leander. With such diligence did he apply himself to study that in a remarkably short time mastered Latin, Greek, and Hebrew. Whether Isidore ever embraced monastic life or not is still an open question, but though he himself may never have been affiliated with any of thereligious orders, he esteemed them highly. On his elevation to the episcopate he immediately constituted himself protector of themonks. In 619 he pronounced anathema against any ecclesiastic who should in any way molest the monasteries.
On the death of Leander, Isidore succeeded to the See of Seville. His long incumbency to this office was spent in a period of disintegration and transition. The ancient institutions and classic learning of the Roman Empire were fast disappearing. In Spain a new civilization was beginning to evolve itself from the blending racial elements that made up its population. For almost two centuries the Goths had been in full control of Spain, and their barbarous manners and contempt of learning threatened greatly to put back her progress in civilization. Realizing that the spiritual as well as the material well-being of the nation depended on the full assimilation of the foreign elements, St. Isidore set himself to the task of welding into a homogeneous nation the various peoples who made up the Hispano-Gothic kingdom. To this end he availed himself of all the resources of religion and education. His efforts were attended with complete success. Arianism, which had taken deep root among the Visigoths, was eradicated, and the newheresy of Acephales was completely stifled at the very outset; religious discipline was everywhere strengthened. Like Leander, he took a most prominent part in the Councils of Toledo and Seville. In all justice it may be said that it was in a great measure due to the enlightened statecraft of these two illustrious brothers the Visigothic legislation, which emanated from these councils, is regarded by modern historians as exercising a most important influence on the beginnings of representative government. Isidore presided over the Second Council of Seville, begun 13 November, 619, in the reign of Sisebut. But it was the Fourth National Council of Toledo that afforded him the opportunity of being of the greatest service to his county. At this council, begun 5 December, 633, all the bishops of Spain were in attendance. St. Isidore, though far advanced in years, presided over its deliberations, and was the originator of most of its enactments. It was at this council and through his influence that a decree waspromulgated commanding all bishops to establish seminaries in their Cathedral Cities, along the lines of the school already existing at Seville. Within his own jurisdiction he had availed himself of the resources of education to counteract the growing influence ofGothic barbarism. His was the quickening spirit that animated the educational movement of which Seville was the centre. The study of Greek and Hebrew as well as the liberal arts, was prescribed. Interest in law and medicine was also encouraged. Through the authority of the fourth council this policy of education was made obligatory upon all the bishops of the kingdom. Long before theArabs had awakened to an appreciation of Greek Philosophy, he had introduced Aristotle to his countrymen. He was the firstChristian writer to essay the task of compiling for his co-religionists a summa of universal knowledge. This encyclopedia epitomized all learning, ancient as well as modern. In it many fragments of classical learning are preserved which otherwise had been hopelessly lost. The fame of this work imparted a new impetus to encyclopedic writing, which bore abundant fruit in the subsequent centuries of the Middle Ages. His style, though simple and lucid, cannot be said to be classical. It discloses most of the imperfections peculiar to all ages of transition. It particularly reveals a growing Visigothic influence. Arévalo counts in all Isidore's writing 1640 Spanish words.
Isidore was the last of the ancient Christian Philosophers, as he was the last of the great Latin Fathers. He was undoubtedly the most learned man of his age and exercised a far-reaching and immeasurable influence on the educational life of the Middle Ages. His contemporary and friend, Braulio, Bishop of Saragossa, regarded him as a man raised up by God to save the Spanish people from the tidal wave of barbarism that threatened to inundate the ancient civilization of Spain, The Eighth Council of Toledo (653) recorded its admiration of his character in these glowing terms: "The extraordinary doctor, the latest ornament of the CatholicChurch, the most learned man of the latter ages, always to be named with reverence, Isidore". This tribute was endorsed by the Fifteenth Council of Toledo, held in 688.

Works

As a writer, Isidore was prolific and versatile to an extraordinary degree. His voluminous writings may be truly said to constitute the first chapter of Spanish literature. It is not, however, in the capacity of an original and independent writer, but as an indefatigable compiler of all existing knowledge, that literature is most deeply indebted to him. The most important and by far the best-known of all his writings is the "Etymologiae", or "Origines", as it is sometimes called. This work takes its name from the subject-matter of one of its constituent books. It was written shortly before his death, in the full maturity of his wonderful scholarship, at the request. of his friend Braulio, Bishop of Saragossa. It is a vast storehouse in which is gathered, systematized, and condensed, all the learning possessed by his time. Throughout the greater part of the Middle Ages it was the textbook most in use in educational institutions. So highly was it regarded as a depository of classical learning that in a great measure, it superseded the use of the individual works of the classics themselves. Not even the Renaissance seemed to diminish the high esteem in which it was held, and according to Arévalo, it was printed ten times between 1470 and 1529. Besides these numerous reprints, the popularity of the "Etymologiae" gave rise to many inferior imitations. It furnishes, abundant evidence that the writer possessed a most intimateknowledge of the Greek and Latin poets. In all, he quotes from one hundred and fifty-four authors, Christian and pagan. Many of these he had read in the originals and the others he consulted in current compilations. In style this encyclopedic work is concise and clear and in order, admirable. Braulio, to whom Isidore sent it for correction, and to whom he dedicated it, divided it into twenty books.
  • The first three of these books are taken up with the trivium and quadrivium. The entire first book is devoted to grammar, including metre. Imitating the example of Cassiodorus and Boethius he preserves the logical tradition of the schools by reserving the second book for rhetoric and dialectic.
  • Book four, treats of medicine and libraries;
  • book five, of law and chronology;
  • book six, of ecclesiastical books and offices;
  • book seven, of God and of the heavenly and earthly hierarchies;
  • book eight, of the Church and of the sects, of which latter he numbers no less than sixty-eight;
  • book nine, of languages, peoples, kingdoms, and official titles;
  • book ten, of etymology:
  • book eleven, of man;
  • book twelve, of beasts and birds;
  • book thirteen, of the world and its parts;
  • book fourteen, of physical geography;
  • book fifteen, of public buildings and roadmaking;
  • book sixteen, of stones and metals;
  • book seventeen, of agriculture;
  • book eighteen, of the terminology of war, of jurisprudence, and public games;
  • book nineteen, of ships, houses, and clothes;
  • book twenty, of victuals, domestic and agricultural tools, and furniture.
In the second book, dealing with dialectic and rhetoric, Isidore is heavily indebted to translations from the Greek by Boethius. Caelius Aurelianus contributes generously to that part of the fourth book which deals with medicine. Lactantius is the author most extensively quoted in the eleventh book, concerning man. The twelfth, thirteenth, and fourteenth books are largely based on the writings of Pliny and Solinus; whilst the lost "Prata" of Suetonius seems to have inspired the general plan of the "Etymologiae", as well as many of its details.
Similar in its general character to the "Etymologiae" is a work entitled "Libri duo differentiarum". The two books of which it is composed are entitled respectively, "De differentiis verborum" and "De differentiis rerum". The former is a dictionary of synonyms, treating of the differences of words with considerable erudition, and not a little ingenuity; the latter an exposition of theological and ascetical ideas, dealing in particular with the, Trinity and with the Divine and human nature of Christ. It suggests, and probably was inspired by, a similar work of Cato's, It is supplementary to the first two books of the "Etymologiae". The "Synonyma", or, as it is sometimes called on account of its peculiar treatment, "Liber lamentationum", is in a manner illustrative of the first book of the "Differentiae". It is cast in the form of a dialogue between Man and Reason. The general burden of the dialogue is that Man mourns the condition to which he has been reduced through sin, and Reason comforts him with the knowledge of how he may still realize eternal happiness. The second part of this work consists of a dissertation on vice and virtue. The "De natura rerum" a manual of elementary physics, was composed at the request of King Sisebut, to whom it is dedicated. It treats of astronomy, geography, and miscellanea. It is one of Isidore's best known books and enjoyed a wide popularity during the Middle Ages. The authenticity of "De ordine creaturarum" has been questioned by some critics, though apparently without good reason. Arévalo unhesitatingly attributes it to Isidore. It deals with various spiritual and physical questions, such as the Trinity, the consequences of sin, eternity, the ocean, the heavens, and the celestial bodies.
The subjects of history and biography are represented by three important works. Of these the first, "Chronicon", is a universal chronicle. In its preface Isidore acknowledges, his indebtedness to Julius Africanus; to St. Jerome's rendering of Eusebius; and to Victor of Tunnuna. The "Historia de regibus Gothorum, Wandalorum, et Suevorum" concerns itself chiefly with the Gothic kings whose conquests and government deeply influenced the civilization of Spain. The history of the Vandals and the Suevi is treated in two short appendixes. This work is regarded as the chief authority on Gothic history in the West. It contains the interesting statement that the Goths descended from Gog and Magog. Like the other Historical writings of Isidore, it is largely based on earlier works of history, of which it is a compendium. It has come down to us in two recensions, one of which ends at the death of Sisebut (621), and the other continues to the fifth year of the reign of Swintila, his successor. "De viris illustribus" is a work of Christianbiography and constitutes a most interesting chapter in the literature of patrology. To the number of illustrious writers mentioned therein Braulio added the name of Isidore himself. A short appendix containing a list of Spanish theologians was added by Braulio's disciple, Ildephonsus of Toledo. It is the continuation of the work of Gennadius, a Semipelagian priest of Marseilles, who wrote between 467 and 480. This work of Gennadius was in turn, but the continuation of the work of St. Jerome.
Among the scriptural and theological works of St. Isidore the following are especially worthy of note:
  • "De ortu et obitu patrum qui in Scriptura laudibus efferuntur" is a work that treats of the more notable Scriptural characters. It contains more than one passage that, in the light of modern scholarship, is naive or fantastic. The question of authenticity has been raised, though quite unreasonably, concerning it.
  • "Allegoriae quaedam Sacrae Scripturae" treats of the allegorical significance that attaches to the more conspicuous characters of Scripture. In all some two hundred and fifty personalities of the Old and New Testament are thus treated.
  • "Liber numerorum qui in Sanctis Scripturis occurrunt" is a curious dissertation on the mystical significance of Scriptural numbers.
  • "In libros Veteris et Novi Testamenti prooemia", as its name implies, is a general introduction to the Scriptures, with special introductions for particular books in the Old and New Testament.
  • "De Veteri et Novo Testamento quastiones" consists of a series of questions concerning the Scriptures.
  • "Secretorum expositiones sacramentorum, seu quaestiones in Vetus Testamentum" is a mystical rendering of the Old Testament books, of Genesis, Exodus, Leviticus, Numbers, Deuteronomy, Josue, Judges, Kings, Esdras, and Machabees. It is based on the writings of the early Fathers of the Church.
  • "De fide catholica ex Veteri et Novo Testamento, contra Judaeos" is one of the best known and most meritorious of Isidore's works. It is of an apologetico-polemical character and is dedicated to Florentina, his sister, at whose request it is said to have been written. Its popularity was unbounded in the Middle Ages, and it was translated into many of the vernaculars of the period. It treats of the Messianic prophecies, the passing of the Old Law, and of the Christian Dispensation. The first part deals with the Second Person of the Blessed Trinity, and His return for the final judgment. The second part is taken up with the unbelief of the Jews, the calling of the Gentiles, and the passing of the Sabbath. In all, it is an appeal to the Jews to accept Christianity.
  • "Sententiarum libri tres" is a compendium of moral and dogmatic theology. Gregory the Great and St. Augustine are the most generous contributors to its contents. The Divine attributes, creation, evil, and miscellanea are the subjects treated in the first book. The second is of a miscellaneous character; whilst the third deals with ecclesiastical orders, the judgment and the chastisement of God. It is believed that this work greatly influenced Peter Lombard in his famous "Book of Sentences",
  • "De ecclesiasticis officiis" is divided into two books, "De origine officiorum" and "De origine ministrorum". In the first Isidore treats of Divine worship and particularly the old Spanish Liturgy. It also Contains a lucid explanation of the Holy, Eucharist. The second treats of the hierarchy of the Church and the various states of life. In it much interesting information is to be found concerning the development of music in general and its adaptation to the needs of the Ritual.
  • "Regula monachorum" is a manner of life prescribed for monks, and also deals in a general way with the monastic state. The writer furnishes abundant proof of the true Christian democracy of the religious life by providing for the admission of men of every rank and station of life. Not even slaves were debarred. "God", he said, "has made no difference between the soul of the slave and that of the freedman." He insists that in the monastery all are equal in the sight of God and of the Church.
The first edition of the works of Isidore was published in folio by Michael Somnius (Paris, 1580). Another edition that is quite complete is based upon the manuscripts of Gomez, with notes by Perez and Grial (Madrid, 1599). Based largely upon the Madridedition is that published by Du Breul (Paris, 1601; Cologne, 1617). The last edition of all the works of Isidore, which is also regarded as the best, is that of Arévalo (7 vols., Rome, 1797-1803). It is found in P.L., LXXXI-LXXXIV. The "De natura rerum" was edited by G. Becker (Berlin, 1857). Th. Mommsen edited the historical writings of St. Isidore ("Mon. Germ. Hist.: Auct. antiquiss.", Berlin, 1894). Coste produced a German translation of the "Historia de regibus Gothorum, Wandalorum et Suevorum" (Leipzig, 1887).
O'Connor, John Bonaventure. "St. Isidore of Seville." The Catholic Encyclopedia. Vol. 8. New York: Robert Appleton Company, 1910. 5 Apr. 2018 <http://www.newadvent.org/cathen/08186a.htm>.
Transcription. This article was transcribed for New Advent by Darl J. Dumont.
Ecclesiastical approbation. Nihil Obstat. October 1, 1910. Remy Lafort, S.T.D., Censor. Imprimatur. +John Cardinal Farley, Archbishop of New York.
SOURCE : http://www.newadvent.org/cathen/08186a.htm


Statue en marbre blanc de Saint Isidore de Séville, sur les marches de la bibliothèque nationale d'Espagne, à Madrid.


Isidore of Seville B, Doctor (RM)

Born at Cartagena, Spain, c. 560; died in Seville, Spain, in April 4, 636; canonized by Pope Clement VIII in 1598; and declared a Doctor of the Church by Pope Innocent XIII in 1722.


Saint Isidore was born into a noble Hispano-Roman family, which also produced SS. Leander, Fulgentius, and Florentina. Their father was Severian, a Roman from Cartagena, who was closely connected to the Visigothic kings. Though Isidore became one of the most erudite men of his age, as a boy he hated his studies, perhaps because his elder brother, Saint Leander, who taught him, was a strict task master.

It is probably that Isidore assisted Leander in governing his diocese, because, in 601, Saint Isidore succeeded his brother Leander to the archiepiscopal see of Seville. During his long episcopate, Isidore strengthened the Spanish church by organizing councils, establishing schools and religious houses, and continuing to turn the Visigoths from Arianism. He presided over the Council of Seville in 619 and that of Toledo in 633, where he was given precedence over the archbishop of Toledo on the ground of his exceptional merit as the greatest teacher in Spain.

Aware of the great boon of education, Isidore insisted that a cathedral school should be established in every diocese in Spain-- centuries before Charlemagne issued a similar decree. He thought that students should be taught law and medicine, Hebrew and Greek, as well as the classics. These schools were similar to contemporary seminaries.

For centuries Isidore was known as 'the schoolmaster of the middle ages,' because he wrote a 20-volume Etymologies or Origins, an encyclopedia of everything that was known in 7th century Europe. His Chronica Majora summarized all the events in the world from creation to his own time drawn from other church historians but with the addition of Spanish history. Another book completed Saint Jerome's work of biographies of every great man and woman mentioned in the Bible plus those of many Spanish notables. His history of the Goths and Vandals is very valuable today. He also wrote new rules for monasteries, including one that bears his name and was generally followed throughout Spain, and books about astronomy, geography, and theology.

While not an original or critical thinker, Saint Isidore's works were highly influential in the middle ages as demonstrated by the very large number of manuscripts of his writings. Dante mentions him in the Paradiso (x, 130), in the company of the Venerable Bede and the Scottish Richard of Saint-Victor. In fact, at the time of his death, Bede was working on a translation of extracts from Isidore's book On the wonders of nature (De natura rerum).

Isidore longed to convert the Spanish Goths, who were Arians. He rewrote the liturgies and breviaries of the Church for their use (known as the Mozarabic Rite, which had been began by Leander), and never wearied of preaching and teaching those in error during his 37 years as archbishop. He also sought to convert the local Jews, but by highly questionable methods.

This extraordinary man loved to give to the poor, and towards the end of his life scarcely anyone could get into his house in Seville, crowded as it was with beggars and the unfortunate from the surrounding countryside.

When he felt that death was near, he invited two bishops to visit. Together they went to the church where one of them covered him with sackcloth and the other put ashes upon his head. Thus clad in the habit of a penitent, he raised his hands to heaven and prayed earnestly for forgiveness. Then he received the viaticum, asked for the prayers of those present, forgave those who had sinned against him, exhorted all to charity, bequeathed his earthly possessions to the poor, and gave up his soul to God.

The archbishop of Seville was considered the most learned man of his century. Not only for the reason that the Church was able to proclaim him Doctor a short time after his death, or because he is the author of the Etymologies, but because knowledge permeated his whole being. The nexus of sanctity and learning gladdens this heart.

Learning did not turn Saint Isidore away from sanctity. Indeed, it was sanctity that surely made such a learned man of him. The saint, possessed by God, is full of gifts of the Holy Spirit; and learning is one of them. This learning, the true science which contains all other sciences, favors new discoveries and multiplies it in every domain that is approached.

Saints are most exclusively the savants of God and their private works are no less important. And savants are a type of saint because any discovery discloses something of God. The philosopher as well as the painter, the seeker as well as the poet, is a savant.

Recall another Spanish saint, John of the Cross, whose works nearly brought a contemporary philosopher to the edges of sanctity. The bird in Braque's last painting is a figure of grace. This revelation leads me to believe that the patient hand that was the means of painting could not have been anything other than that of a man on the way to sanctity. One can paint birds without making them suggest such a presence as Braque's painting does. This presence is not that of the artist, he has absolutely effaced himself; it is the presence of that which finally transcends him, the presence of God.

The most learned persons have perceived the richness, the 'odor' of sanctity. Our age may see it flower; how could it have a taste for anything else after having plumbed the depths of nothingness and despair, if, of course, it still wants something to which it can aspire. Our generation needs something solid, substantial. It is dying of weariness and thirst.

A life-giving stream is still running, all we need to do is bend down to drink it in order to renew the ancient gestures and enter humbly, without hesitation or compromise, into that which does not go out of fashion and does not age: into this Church in which today we pray to Saint Isidore, who is the patron of savants. Saint Isidore, pray for us and for them (Attwater, Benedictines, Bentley, Delaney, Encyclopedia, Farmer, Walsh).

In art, Saint Isidore is an old bishop with a prince at his feet. At times he may be depicted (1) with pen and book (often his Etymologia); (2) with a beehive or bees (rare, but symbolizes oratorical eloquence); or (3) with his brothers and sister, SS. Leander, Fulgentius, and Florentina (Roeder). 

SOURCE : http://www.saintpatrickdc.org/ss/0404.shtml



Sant' Isidoro di Siviglia Vescovo e dottore della Chiesa


 - Memoria Facoltativa

560? - 4 aprile.636

Ultimo dei Padri latini, Isidoro di Siviglia (560-636) fu molto letto nel Medioevo, soprattutto per le sue «Etimologie», un'utile "somma" della scienza antica. Fu però soprattutto un vescovo zelante preoccupato della maturazione culturale e morale del clero spagnolo. Per questo motivo fondò un collegio ecclesiastico, prototipo dei futuri seminari, dedicando molto spazio della sua laboriosa giornata all'istruzione dei candidati al sacerdozio. Dei suoi fratelli due furono vescovi e santi, Fulgenzio e Leandro, che fece da tutore a Isidoro, e una sorella, Fiorentina, fu religiosa e santa. Successe a Leandro nel governo episcopale della diocesi di Siviglia. Presiedette l'importante quarto concilio di Toledo (nel 633). Sapienza, mai disgiunta da profonda umiltà e carità, gli hanno meritato il titolo di «doctor egregius» e l'aureola di santo.

Etimologia: Isidoro = dono di Iside, dal greco

Emblema: Bastone pastorale

Martirologio Romano: Sant’Isidoro, vescovo e dottore della Chiesa, che, discepolo di suo fratello Leandro, gli succedette nella sede di Siviglia nell’Andalusia in Spagna; scrisse molte opere erudite, convocò e presiedette vari concili e si adoperò sapientemente per il bene della fede cattolica e per l’osservanza della disciplina ecclesiastica. 

Ultimo dei Padri latini, S. Isidoro di Siviglia (560-636) ricapitola in sè tutto il retaggio di acquisizioni dottrinali e culturali che l'epoca dei Padri della Chiesa ha trasmesso ai secoli futuri. Scrittore enciclopedico, Isidoro fu molto letto nel medioevo, soprattutto per le sue Etimologie, un'utile "somma" della scienza antica, della quale con più zelo che spirito critico condensò i principali risultati. Questo volgarizzatore dotatissimo della scienza antica, che avrebbe esercitato su tutta la cultura medioevale un influsso considerevole, era soprattutto un vescovo zelante preoccupato della maturazione culturale e morale del clero spagnolo.

Per questo motivo fondò un collegio ecclesiastico, prototipo dei futuri seminari, dedicando molto spazio della sua laboriosa giornata all'istruzione dei candidati al sacerdozio. La santità era di casa nella nobile famiglia, oriunda di Cartagena, che diede i natali verso il 560 a Isidoro: tre fratelli furono vescovi e santi, Leandro, Fulgenzio e il nostro Isidoro; e una sorella, Fiorentina, fu religiosa e santa. Leandro, il fratello maggiore, fu tutore e maestro di Isidoro, rimasto orfano in tenera età.

Il futuro dottore della Chiesa, autore di una immensa mole di libri che trattano di tutto lo scibile umano, dall'agronomia alla medicina, dalla teologia all'economia domestica, fu dapprima uno studente svogliato e poco propenso a stare chino sui libri di scuola.
Come tanti coetanei marinava la scuola e vagava per la campagna. Un giorno si accostò a un pozzo per dissetarsi e notò dei profondi solchi scavati dalla fragile corda sulla dura pietra del bordo. Comprese allora che anche la costanza e la volontà dell'uomo possono aver ragione dei più duri scogli della vita.

Tornò con rinnovato amore ai suoi libri e progredì tanto avanti nello studio da meritare la reputazione di uomo più sapiente del suo tempo. Chierico a Siviglia, Isidoro successe al fratello Leandro nel governo episcopale della importante diocesi. Come il fratello, sarebbe stato il vescovo più popolare e autorevole della sua epoca, presiedendo pure l'importante quarto concilio di Toledo (nel 633). Formatosi alla lettura di S. Agostino e S. Gregorio Magno, pur senza avere la vigoria di un Boezio o il senso organizzativo di un Cassiodoro, con essi Isidoro condivide la gloria di essere stato il maestro dell'Europa medievale e il primo organizzatore della cultura cristiana. Un'amena leggenda racconta che nel primo mese di vita uno sciame d'api, invasa la sua culla, depositasse sulle labbra del piccolo Isidoro un rivoletto di miele, come auspicio del dolce e sostanzioso insegnamento che da quelle labbra sarebbe un giorno sgorgato. Sapienza, mai disgiunta da profonda umiltà e carità, gli hanno meritato il titolo di "doctor egregius" e l'aureola di santo.

Autore: 
Piero Bargellini


SOURCE : http://www.santiebeati.it/dettaglio/26600

BENEDETTO XVI

UDIENZA GENERALE

Piazza San Pietro

Mercoledì, 18 giugno 2008

Sant'Isidoro di Siviglia


Cari fratelli e sorelle,

oggi vorrei parlare di sant’Isidoro di Siviglia: era fratello minore di Leandro, Vescovo di Siviglia e grande amico del Papa Gregorio Magno. Il rilievo è importante, perché permette di tenere presente un accostamento culturale e spirituale indispensabile alla comprensione della personalità di Isidoro. Egli deve infatti molto a Leandro, persona molto esigente, studiosa e austera, che aveva creato intorno al fratello minore un contesto familiare caratterizzato dalle esigenze ascetiche proprie di un monaco e dai ritmi di lavoro richiesti da una seria dedizione allo studio. Inoltre Leandro si era preoccupato di predisporre il necessario per far fronte alla situazione politico-sociale del momento: in quei decenni infatti i Visigoti, barbari e ariani, avevano invaso la penisola iberica e si erano impadroniti dei territori appartenuti all’Impero romano. Occorreva conquistarli alla romanità e al cattolicesimo. La casa di Leandro e di Isidoro era fornita di una biblioteca assai ricca di opere classiche, pagane e cristiane. Isidoro, che si sentiva attratto simultaneamente sia verso le une che verso le altre, fu educato perciò a sviluppare, sotto la responsabilità del fratello maggiore, una disciplina molto forte nel dedicarsi al loro studio, con discrezione e discernimento.

Nell’episcopio di Siviglia si viveva, perciò, in un clima sereno ed aperto. Lo possiamo dedurre dagli interessi culturali e spirituali di Isidoro, così come essi emergono dalle sue stesse opere, che comprendono una conoscenza enciclopedica della cultura classica pagana e un’approfondita conoscenza della cultura cristiana. Si spiega così l’eclettismo che caratterizza la produzione letteraria di Isidoro, il quale spazia con estrema facilità da Marziale ad Agostino, da Cicerone a Gregorio Magno. La lotta interiore che dovette sostenere il giovane Isidoro, divenuto successore del fratello Leandro sulla cattedra episcopale di Siviglia nel 599, non fu affatto leggera. Forse si deve proprio a questa lotta costante con se stesso l’impressione di un eccesso di volontarismo che s’avverte leggendo le opere di questo grande autore, ritenuto l’ultimo dei Padri cristiani dell’antichità. Pochi anni dopo la sua morte, avvenuta nel 636, il Concilio di Toledo del 653 lo definì: “Illustre maestro della nostra epoca, e gloria della Chiesa cattolica”.

Isidoro fu senza dubbio un uomo dalle contrapposizioni dialettiche accentuate. E, anche nella sua vita personale, sperimentò un permanente conflitto interiore, assai simile a quello che avevano avvertito già san Gregorio Magno e sant’Agostino, fra desiderio di solitudine, per dedicarsi unicamente alla meditazione della Parola di Dio, ed esigenze della carità verso i fratelli della cui salvezza si sentiva, come Vescovo, incaricato. Scrive per esempio a proposito dei responsabili delle Chiese: “Il responsabile di una Chiesa (vir ecclesiasticus) deve da una parte lasciarsi crocifiggere al mondo con la mortificazione della carne e dall’altra accettare la decisione dell’ordine ecclesiastico, quando proviene dalla volontà di Dio, di dedicarsi al governo con umiltà, anche se non vorrebbe farlo” (Sententiarum liber III, 33, 1: PL 83, col 705 B). Aggiunge poi appena un paragrafo dopo: “Gli uomini di Dio (sancti viri) non desiderano affatto di dedicarsi alle cose secolari e gemono quando, per un misterioso disegno di Dio, vengono caricati di certe responsabilità… Essi fanno di tutto per evitarle, ma accettano ciò che vorrebbero fuggire e fanno ciò che avrebbero voluto evitare. Entrano infatti nel segreto del cuore e là dentro cercano di capire che cosa chieda la misteriosa volontà di Dio. E quando si rendono conto di doversi sottomettere ai disegni di Dio, umiliano il collo del cuore sotto il giogo della decisione divina” (Sententiarum liber III, 33, 3: PL 83, coll. 705-706).

Per capire meglio Isidoro occorre ricordare, innanzitutto, la complessità delle situazioni politiche del suo tempo, a cui ho già accennato: durante gli anni della fanciullezza aveva dovuto sperimentare l’amarezza dell’esilio. Ciò nonostante era pervaso di entusiasmo apostolico: sperimentava l’ebbrezza di contribuire alla formazione di un popolo che ritrovava finalmente la sua unità, sul piano sia politico che religioso, con la provvidenziale conversione dell’erede al trono visigoto Ermenegildo dall’arianesimo alla fede cattolica. Non si deve tuttavia sottovalutare l’enorme difficoltà di affrontare in modo adeguato problemi assai gravi come quelli dei rapporti con gli eretici e con gli Ebrei. Tutta una serie di problemi che appaiono molto concreti anche oggi, soprattutto se si considera ciò che avviene in certe regioni nelle quali sembra quasi di assistere al riproporsi di situazioni assai simili a quelle presenti nella penisola iberica in quel sesto secolo. La ricchezza delle conoscenze culturali di cui disponeva Isidoro gli permetteva di confrontare continuamente la novità cristiana con l’eredità classica greco-romana, anche se più che il dono prezioso della sintesi sembra che egli avesse quello della collatio, cioè della raccolta, che si esprimeva in una straordinaria erudizione personale, non sempre ordinata come si sarebbe potuto desiderare.

Da ammirare è, in ogni caso, il suo assillo di non trascurare nulla di ciò che l’esperienza umana aveva prodotto nella storia della sua patria e del mondo intero. Isidoro non avrebbe voluto perdere nulla di ciò che era stato acquisito dall’uomo nelle epoche antiche, fossero esse pagane, ebraiche o cristiane. Non deve stupire pertanto se, nel perseguire questo scopo, gli succedeva a volte di non riuscire a far passare adeguatamente, come avrebbe voluto, le conoscenze che possedeva attraverso le acque purificatrici della fede cristiana. Di fatto, tuttavia, nelle intenzioni di Isidoro, le proposte che egli fa restano sempre in sintonia con la fede cattolica, da lui sostenuta con fermezza. Nella discussione dei vari problemi teologici, egli mostra di percepirne la complessità e propone spesso con acutezza soluzioni che raccolgono ed esprimono la verità cristiana completa. Ciò ha consentito ai credenti nel corso dei secoli di fruire con gratitudine delle sue definizioni fino ai nostri tempi. Un esempio significativo in materia ci è offerto dall’insegnamento di Isidoro sui rapporti tra vita attiva e vita contemplativa. Egli scrive: “Coloro che cercano di raggiungere il riposo della contemplazione devono allenarsi prima nello stadio della vita attiva; e così, liberati dalle scorie dei peccati, saranno in grado di esibire quel cuore puro che, unico, permette di vedere Dio” (Differentiarum Lib II, 34, 133: PL 83, col 91A). Il realismo di un vero pastore lo convince però del rischio che i fedeli corrono di ridursi ad essere uomini ad una dimensione. Perciò aggiunge: “La via media, composta dall’una e dall’altra forma di vita, risulta normalmente più utile a risolvere quelle tensioni che spesso vengono acuite dalla scelta di un solo genere di vita e vengono invece meglio temperate da un’alternanza delle due forme” (o.c., 134: ivi, col 91B).

La conferma definitiva di un giusto orientamento di vita Isidoro la cerca nell’esempio di Cristo e dice: “Il Salvatore Gesù ci offrì l’esempio della vita attiva, quando durante il giorno si dedicava a offrire segni e miracoli in città, ma mostrò la vita contemplativa quando si ritirava sul monte e vi pernottava dedito alla preghiera” (o.c. 134: ivi). Alla luce di questo esempio del divino Maestro, Isidoro può concludere con questo preciso insegnamento morale: “Perciò il servo di Dio, imitando Cristo, si dedichi alla contemplazione senza negarsi alla vita attiva. Comportarsi diversamente non sarebbe giusto. Infatti come si deve amare Dio con la contemplazione, così si deve amare il prossimo con l’azione. E’ impossibile dunque vivere senza la compresenza dell’una e dell’altra forma di vita, né è possibile amare se non si fa esperienza sia dell’una che dell’altra” (o.c., 135: ivi, col 91C). Ritengo che questa sia la sintesi di una vita che cerca la contemplazione di Dio, il dialogo con Dio nella preghiera e nella lettura della Sacra Scrittura, come pure l’azione a servizio della comunità umana e del prossimo. Questa sintesi è la lezione che il grande Vescovo di Siviglia lascia a noi, cristiani di oggi, chiamati a testimoniare Cristo all’inizio di un nuovo millennio.

Saluti:

Je suis heureux d’accueillir ce matin les pèlerins de langue française. Je salue particulièrement les étudiants de l’Institut de philosophie comparée, de Paris, la paroisse de Rodez, et tous les jeunes. Je vous invite à faire dans votre vie l’unité entre la contemplation de Dieu et le service de vos frères. Avec ma Bénédiction apostolique.   

I am pleased to welcome the Missionary Sisters of Our Lady of Apostles gathered in Rome for their General Chapter, and the participants in the Rome Seminar of the Association of Catholic Colleges and Universities. I also warmly greet a group of survivors of the Holocaust who are present at today’s Audience. Upon all the English-speaking pilgrims, especially those from England, South Africa, Australia, Vietnam and  the United States, I cordially invoke God’s blessings of joy and peace.

Mit Freude begrüße ich die deutschsprachigen Pilger und Besucher hier auf dem Petersplatz. Einen besonderen Gruß richte ich an die Wallfahrer der Suchthilfeeinrichtungen des Deutschen Ordens und natürlich auch an die Marianische Kongregation aus Köln. Achten auch wir darauf, dem Gebet und der Stille einen festen Platz in unserem Tagesablauf einzuräumen, damit unsere zahlreichen Aufgaben einen tiefen Sinn, eine Mitte erhalten und zu einem Ausdruck der Hingabe an Gott und unsere Mitmenschen werden. Der Herr segne euch und eure Familien.

Saludo con afecto a los peregrinos de lengua española, en particular, a las Religiosas Esclavas del Sagrado Corazón y a los fieles procedentes de España, Portugal, México y de otros países latinoamericanos. Que el ejemplo de San Isidoro de Sevilla os ayude a dar testimonio de Cristo al comienzo de este milenio. Muchas gracias.

A todos os amados ouvintes de língua portuguesa, com cordiais saudações, desejo felicidades, graça e paz no Senhor Jesus Cristo. Saúdo em particular os peregrinos portugueses da Diocese de Viana do Castelo: que a Virgem de Fátima vos acompanhe e ampare sempre na caminhada da fé e no crescimento do amor pelo próximo, e consiga todo o bem para os que vos são queridos. Com a minha Bênção Apostólica.

Saluto in lingua polacca:

Pozdrawiam pielgrzymów polskich. Mówiąc o Ojcach i Doktorach Kościoła trzeba pamiętać, że byli oni ludźmi modlitwy. Ich aktywność, twórcza inwencja, podejmowane dzieła płynęły z ducha kontemplacji. Przykładem tego jest święty Izydor z Sewilli. Niech także nasze codzienne zadania, troska o człowieka wyrastają z ducha modlitwy. Niech będzie pochwalony Jezus Chrystus.

Traduzione italiana:

Saluto i pellegrini Polacchi. Parlando dei Padri e dei Dottori della Chiesa, bisogna ricordare che erano uomini di preghiera. La loro attività, la loro creatività e le opere da loro realizzate derivavano dal loro spirito di contemplazione: un esempio edificante ne è sant’Isidoro di Siviglia. Che anche i nostri impegni quotidiani come la nostra attenzione ai bisogni dell’uomo si ispirino dalla nostra preghiera. Sia lodato Gesù Cristo.

Saluto in lingua ungherese:

Szeretettel köszöntöm  a magyar híveket, különösen is a Tamási Áron Gimnázium tanulóit Székelyudvarhelyről. 

Ez a római út az apostolok sírjaihoz erősítsen meg benneteket hitben, reményben és szeretetben. Szívesen adom kedves mindnyájatokra apostoli áldásomat. 

Dicsértessék a Jézus Krisztus!

Traduzione italiana:

Saluto con affetto i fedeli di lingua ungherese, specialmente gli studenti del Liceo Áron Tamási di Székelyudvarhely. 

Questa visita romana alle tombe degli Apostoli sia per voi un tempo di rinnovamento della fede, spe e carità. Volentieri imparto a tutti voi la Benedizione Apostolica.
Sia lodato Gesù Cristo!

Saluto in lingua slovacca:

S láskou vítam pútnikov zo Slovenska: študentov a pedagógov Gymnázia svätého Mikuláša v Starej Ľubovni a Piaristického  gymnázia Františka Hanáka w Prievidzi. 

Milí mladí, ďakujem vám za modlitby, ktorými sprevádzate moju službu Nástupcu svätého Petra a zo srdca žehnám vás i vašich drahých.

Pochválený buď Ježiš Kristus!

Traduzione italiana:

Con affetto do il benvenuto ai pellegrini provenienti dalla Slovacchia: agli studenti ed agli insegnanti del Ginnasio “S. Nicola” di Stará Ľubovňa e del Ginnasio “František Hanák“  dei Padri Scolopi di Prievidza.

Cari giovani, vi ringrazio per le preghiere con le quali accompagnate il mio servizio di Successore di San Pietro e cordialmente benedico voi ed i vostri cari.
Sia lodato Gesù Cristo! 

Saluto in lingua croata:

Poseban pozdrav upućujem hrvatskim hodočasnicima, a osobito vjernicima župe Svetoga Ivana Apostola iz Zagreba. O skoroj petoj obljetnici proglašenja Ivana Merza blaženim, potičem vas da i vi svoju vjeru svakodnevno potvrđujete pobožnošću i djelima ljubavi. Hvaljen Isus i Marija!

Traduzione italiana:

Rivolgo ai pellegrini croati uno speciale saluto, particolarmente ai fedeli della parrocchia di San Giovanni Apostolo di Zagabria. Nell’imminente quinto anniversario della beatificazione di Ivan Merz, vi esorto che anche voi confermiate quotidianamente la vostra fede con la devozione e con le opere di carità. Siano lodati Gesù e Maria!

Saluto in lingua slovena:

Lepo pozdravljam romarje iz dekanije Jarenina v Sloweniji! Nai vam bosta to vaŝe romanje in srećanje s Petrovim naslednikom u spodbudo, da boste čedalje bolj napredovali v duhovnem veselju in v zvestobi Kristusovemu nauku. Naj vas vedno spremlja moj blagoslov!

Traduzione italiana:

Rivolgo un cordiale saluto ai pellegrini del Vicariato Foraneo di Jarenina in Slovenia! Questo vostro pellegrinaggio e l’incontro con il Successore di Pietro vi siano di incoraggiamento affinché progrediate sempre di più nella letizia spirituale e nella fedeltà agli insegnamenti di Cristo. Vi accompagni la mia Benedizione!

* * *

Rivolgo un cordiale saluto ai pellegrini di lingua italiana, in particolare ai sacerdoti novelli della diocesi di Brescia. Carissimi, mentre prego il Signore affinché vi sostenga nel vostro ministero, vi invito a diffondere intorno a voi quella gioia che nasce dalla generosa e fedele corrispondenza alla divina chiamata. Saluto poi voi, cari fedeli della parrocchia di San Pietro, in San Martino in Pensilis, ed auspico che questo incontro susciti in ciascuno un rinnovato slancio apostolico, per testimoniare ovunque Cristo e il Vangelo.

Il mio pensiero va, infine, ai giovani, ai malati e agli sposi novelli. Siamo alle soglie del periodo estivo, tempo di turismo e di pellegrinaggi, di ferie e di riposo. Cari giovani, mentre penso ai vostri coetanei che stanno ancora affrontando gli esami, auguro a voi già in vacanza di profittare dell’estate per utili esperienze sociali e religiose. Auguro a voi, cari malati, di trovare conforto e sollievo nella vicinanza dei vostri familiari. E a voi, cari sposi novelli, rivolgo l’invito ad utilizzare questo periodo estivo per approfondire sempre più il valore della missione nella Chiesa e nella società.

Il mio pensiero va ora ai partecipanti al Congresso Eucaristico Internazionale, che si sta svolgendo in questi giorni nella città di Québec in Canada, sul tema “L’Eucaristia, dono di Dio per la vita del mondo”. Mi rendo spiritualmente presente in così solenne incontro ecclesiale, ed auspico che esso sia per le comunità cristiane canadesi e per la Chiesa universale un tempo forte di preghiera, di riflessione e di contemplazione del mistero della santa Eucaristia. Sia pure occasione propizia per riaffermare la fede della Chiesa nella presenza reale di Cristo nel Santissimo Sacramento dell’Altare. Preghiamo inoltre perché questo Congresso Eucaristico Internazionale ravvivi nei credenti, non solo del Canada ma di tante altre Nazioni nel mondo, la consapevolezza di quei valori evangelici e spirituali che hanno forgiato la loro identità lungo il corso della storia.
     
© Copyright 2008 - Libreria Editrice Vaticana


SOURCE : http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/it/audiences/2008/documents/hf_ben-xvi_aud_20080618.html