dimanche 16 juin 2013

JOHANN (JEAN) TAULER, dominicain et mystique



Johann Tauler

Le berger des consciences

Johann Tauler naît, au début du XIVè siècle, dans le milieu aisé de la bourgeoisie strasbourgeoise. Il entre chez les Dominicains vers sa quinzième année. Il est vraisemblable qu'il écoute, au Studium de Cologne, les prédications de Maître Eckhart dont l'influence spirituelle est indéniable sur son oeuvre.

Après un exil momentané à Bâle (1339-1346) il se consacre à l'enseignement et à la direction de conscience, parcourant les paroisses et les couvents des plaines rhénanes, principalement sur les rives de l'ILL.

Son oeuvre, essentiellement destinée à l'édification des âmes pieuses dont il a la charge, évoque dans un style plus nuancé, plus familier et imaginé que celui d'Eckhart, la percée du fond de l'être dans l'incréé, mais elle se révèle également une redoutable machine de guerre contre la philosophie scolastique dont il brocarde les "grands maîtres de Paris" qui s'empètrent dans les livres "écrits de main d'homme" et dédaignent "le livre de vie" où s'exhausse "l'admirable opération divine". Tauler se soucie moins de la création cosmique que du "Jeu éternel du Verbe dans le coeur du Père"; seule l'expérience mystique, "éprouvée dans le fond de l'âme", abolissant les barrières frustrantes de l'intellect, peut saisir la pénétration de l'Esprit Saint dans le silence des consciences apaisées.

Tauler dont la pratique confessionnelle l'avertissait des égarements provoqués par des actes "spirituels" inconsidérés (dévotions mécaniques ou mortifications spectaculaires) s'efforça toujours de ramener ses disciples dans le droit chemin...

Une pierre tombale authentifie sa mort à Strasbourg en 1361.

La pauvreté intérieure.

La pauvreté intérieure décrite par Tauler ressemble à une nuit impénétrable qui descend sur le fidèle et le laisse seul, abandonné de tous, privé de ressources, proie du doute et de l'incertitude (Jean de la Croix, quelques dizaines d'années plus tard, décrira également l'obscurité tragique dans laquelle l'âme est plongée) :

"Poussés sur un étroit chemin, où tout est sombre et sans consolation, où ils ressentent un insupportable tourment, et qu'ils ne peuvent pourtant point quitter. De quelque côté qu'ils se tournent, ils ne trouvent que profonde misère, déserts, désolation, ténèbre."

L'union à la déité constitue évidemment le but de l'entreprise mystique mais Tauler, contrairement à Eckhart dont la logique métaphysique radicale, proche du Vedanta indien ou du Tch'an chinois, postule l'instantanéité de l'expérience ultime, insiste sur la nécessité d'une voie progressive au cours de laquelle l'âme et le corps sont peu à peu purifiés. Alors que le Maître de Cologne se place d'emblée au faîte de la percée mystique, Tauler, en sollicitant une pédagogie plus graduelle, et probablement plus efficace, témoigne des difficultés et des souffrances inhérentes à la désappropriation de soi.

"Pour que la sortie ait lieu, et même le dépassement hors et au dessus de soi, il faut que nous anéantissions tout vouloir, tout désir, tout agir propres; il ne faut laisser subsister qu'une simple et pure attention à Dieu, sans rechercher en aucune manière à être ou à devenir ou à acquérir quelque chose en propre.

"N'interroge pas sur les hautes spéculations, mais rentre dans ton propre fond, apprends à te connaître toi-même, et ne pose pas de questions sur les secrets de Dieu, la diffusion et le retour, sur le quelque chose dans le rien, et sur l'étincelle de l'âme au coeur de l'essence." (Extraits)

Jean Tauler

Jean Tauler est né probablement né vers 1300, ou peu de temps d’années avant 1300 à Strasbourg. Était-il fils d’un échevin, ou d’un bourgeois ? D’après une phrase échappée pendant un sermon, il semble issu d’une famille qui ne connaissait pas l’indigence : “Si j’avais su ce que je sais maintenant, quand j’étais le fils de mon père, j’aurais choisi de vivre de son héritage, et non pas d’aumônes”.Cette petite phrase supporte plusieurs niveaux de lecture. Premier niveau, celui de la recherche de Jean Tauler : recherche de pauvreté, de simplicité. Jean Tauler nous parle ici de son désir de vivre en pauvre du Christ, et ce thème lui est cher. Second niveau, celui des rapports entre l’ordre dominicain et la société strasbourgeoise au XIVe siècle. Celui-ci s’inscrit dans l’examen des conditions dans lesquelles est né la mystique rhénane. Ainsi que le rappelle P. Dollinger : "Il est vrai que les désordres, les scandales pouvaient inciter les âmes éprises d'idéal à se réfugier dans la contemplation. Il n'est pas douteux que mainte vocation mystique a été affermie par la vue des laideurs du monde. (…) D'une façon générale, on a souvent exprimé l'opinion que le succès de la mystique [rhénane] s'explique, pour une large part, par le retentissement des catastrophes du XIVe siècle. Outre les querelles dans l'Église, on ne manque pas de rappeler la peste noire, les massacres des Juifs, les processions de flagellants, et pour l'Alsace, les invasions de routiers de la guerre de Cent Ans, qualifiés d' « Anglais» en 1365 et 1375. Il faut cependant noter que les plus dramatiques de ces événements propres à agir fortement sur la sensibilité des contemporains se sont produits au milieu du XIVe siècle, à l'époque où le mouvement mystique se trouvait à son apogée, voire même sur son déclin. Si l'on se place à la période décisive de l'éclosion du mouvement, c'est-à-dire au premier quart du XIVe siècle, on peut dire que les malheurs de l'Église et du monde n'étaient ni plus ni moins grands qu'à d'autres époques du Moyen Age. Les troubles du temps ont pu porter certains individus au mysticisme : ils n'expliquent en aucune façon que le XIVe siècle ait été un sommet dans l'histoire de la mystique. “ Le troisième niveau concerne la famille de Jean Tauler : il y avait un héritage… Ce n’était donc pas une famille pauvre. Vers 1315, Jean Tauler entre au couvent des dominicains de Strasbourg. Ce n’était pour l’époque, ni trop jeune, ni trop vieux…Selon le cursus alors en vigueur, il aurait dû étudier à Strasbourg jusqu’en 1323 à Strasbourg, puis encore jusqu’en 1327 à Cologne. Il n’a pas suivi cette longue formation, puisqu’on sait qu’il a pu commencer sa prédication à Strasbourg en 1323, l’année de la canonisation de Thomas d’Aquin. Sa formation a pu être écourtée en raison de sa santé fragile : il ne reçut jamais en effet le titre de Maître ou de Docteur en théologie. Ce qui l’amena d’emblée à être un Lebenmeister. Sa culture est cependant solide. Il “cite Proclus, Thomas d’Aquin, Augustin, Bernard de Clairvaux, Hugues de S. Victor,” et la qualité de ses sermons est certaine “même si, parfois, on a préféré voir en lui, un homme frustre, n’ayant jamais étudié comme “ceux de Paris” , le réduisant fallacieusement par là à un prédicateur de province, inspiré mais peu instruit”. Un séjour à Cologne, entre 1325 et 1330 est possible, mais rien ne le prouve. On pense qu’il a dû séjourner à Cologne, y écouter Maître Eckhart, et peut-être rencontrer Henri Suso.

En ce premier quart du XIVe siècle, le mouvement des “Frères du Libre Esprit”, contre lequel s’était dépensé Maître Eckhart a quasiment disparu. Un autre tendance se manifeste à travers les béguinages. Les historiens en comptent entre 70 et 80 à Strasbourg. Pour saisir l’ampleur de ces chiffres, précisons que la ville comptait au début du XIVe siècle un peu plus de 15 000 habitants, qu’il y avait sept couvents de dominicaines (dont celui de Saint Nicolas in Undis, où réside la sœur de Jean Tauler). À ces couvents s’ajoutaient les couvents des ordres franciscains, les monastères de l’ordre de Saint-Benoît, les Ordres militaires, les couvents pour les “dames repentantes”, hors de l’enceinte de la ville et les paroisses… Les béguinages, existent depuis la fin du XIIe siècle. Perçus dans un premier temps comme des maisons où des veuves, principalement, ou des célibataires vivent en petites communautés, sans règle, mais avec beaucoup de dévotion, sont de plus en plus suspects. Or, en 1300, Guy de Colmieu, évêque de Cambrai, ordonne l’autodafé du Miroir des âmes simples de Marguerite Porète. Cette dernière est une béguine, qui sera arrêtée en 1309, jugée et brûlée en 1310 à Paris. Eckhart était alors à Paris. En son couvent logeait aussi l’inquisiteur instruisant le procès de Marguerite Porète. La mystique rhénane a beaucoup de points communs avec les écrits béghards. Ceux-ci manifeste un courant de spiritualité très vif au XIVe siècle. Et les liens avec le Libre-Esprit sont forts. Les erreurs des béghards sont dénoncés en 1317 au concile de Vienne, et condamnés par bulle en 1318 et 1320. Tauler commence donc à prêcher quand des personnes doivent choisir entre se maintenir dans le béguinage ou bien s’inscrire dans une forme de vie reconnue par l’Église, c’est-à-dire un couvent, à Strasbourg assez souvent d’obédience dominicaine ou franciscaine. “L’exécution à Cologne, en 1322, du Hollandais Walter et de ses compagnons n’a pas, semble-t-il, troublé l’existence de la communauté de bégards qui, au témoignage de l’un d’entre eux, Jean de Brünn, pratiqua impunément le Libre-Esprit de 1315 à 1335.” [10] Tauler, par sa prédication, aura la charge d’inciter les béghards à se maintenir dans l’orthodoxie, comme Eckhart face au mouvement du Libre-Esprit.

L’autre évènement qui marque le début de la prédication de Jean Tauler est le conflit entre Jean XXII et l’empereur Louis IV de Bavière. En Avignon, le pape Jean XXII, l’excommunie en 1324 pour sa politique italienne. Il le déclare privé d’Empire. Les villes de l’Empire soutiennent Louis IV. Le conflit dure, et le pape jette l’interdit sur l’Empire en 1329. Jusqu’alors, Strasbourg était restée neutre. L’interdit durera 15 ans. Dans les couvents des mendiants, les prise de position en faveur de l’un ou l’autre camp sont variées. Finalement, les dominicains se soumettent aux ordres pontificaux, et la ville, en 1339 les chasse pour 4 ans. Tauler se retrouve ainsi tout d’abord à Cologne, puis à Bâle. Durant ce séjour “outre Rhin”, il rencontre deux personnalités marquantes de la spiritualité Rhénane du XIVe siècle : Henri de Nördlingen et Marguerite Ebner, tous deux parfois trop vite associés aux béghards, alors qu’ils semblent beaucoup plus appartenir à cette mouvance “des Amis de Dieu”.

Revenu à Strasbourg en 1348, Tauler ne repartira plus, sauf, peut-être pour un hypothétique voyage à Paris, en 1350, voyage où il aurait rencontré Ruysbroeck. Il meurt à Strasbourg le 16 juin 1361.

Sa spiritualité est traversée par deux thèmes centraux : le détachement, et la naissance de Dieu dans l'âme.

(Dr Jean Devriendt)


Jean Tauler, Sermon 1, § 1 et 7-8.

Extrait de l'édition française de référence des oeuvres de Jean Tauler, Éditions du Cerf, coll. Sagesse Chrétienne.

Sermon pour la fête de Noël

Un enfant nous est né un fils nous a été donné (Is 9, 5).

1. On fête aujourd'hui, dans la sainte chrétienté, une triple naissance où chaque chrétien devrait trouver une jouissance et un bonheur si grands qu'il en soit mis hors de lui-même; il y a de quoi le faire entrer en des transports d'amour, de gratitude et d'allégresse; un homme qui ne sentirait rien de tout cela devrait trembler.

La première et la plus sublime naissance est celle du Fils unique engendré par le Père céleste dans l'essence divine, dans la distinction des personnes. La seconde naissance fêtée aujourd'hui est celle qui s'accomplit par une mère qui dans sa fécondité garda l'absolue pureté de sa virginale chasteté. La troisième est celle par laquelle Dieu, tous les jours et à toute heure, naît en vérité, spirituellement, par la grâce et l'amour, dans une bonne âme. Telles sont les trois naissances qu'on célèbre aujourd'hui par trois messes.

(...)

7. Nous avons jusqu'ici parlé de la première et de la troisième naissance, et de la leçon que nous devons tirer de la première, en vue de la dernière; maintenant nous allons expliquer celle-ci au, moyen de la seconde par laquelle le Fils de Dieu, en cette nuit, est né d'une mère, est devenu notre frère. Il a été, dans l'éternité, engendré sans mère, et dans le temps, sans père. Saint Augustin nous dit : " Marie a été bien plus heureuse de ce que Dieu est né spirituellement en son âme que du fait qu'il est né d'elle selon la chair. " Celui donc qui veut voir cette naissance noble et spirituelle s'accomplir en son âme comme dans l'âme de Marie, doit considérer quelles étaient les dispositions particulières de Marie, elle qui fut mère de Dieu, mère à la fois spirituelle et corporelle. Marie était une vierge, chaste et pure; c'était une jeune femme promise et fiancée; elle se tenait à l'écart et séparée de tout, lorsque l'ange vint à elle. C'est ainsi que doit être une mère spirituelle de cette divine naissance.

Elle doit être une vierge chaste et pure. Si elle s'est parfois égarée du chemin de la pureté, il faut maintenant qu'elle y revienne. Une vierge, c'est une personne extérieurement stérile mais intérieurement très féconde. C'est ainsi que la vierge dont nous parlons doit fermer son coeur aux choses extérieures, avoir peu de. commerce avec elles et porter peu de fruits extérieurement. C'est ainsi que Marie n'avait de soucis que des choses de Dieu. Mais à l'intérieur, il faut que cette vierge porte beaucoup de fruits. " Toute la parure de la fille du Roi vient de l'intérieur ". Une vierge qui veut lui ressembler doit donc vivre dans la retraite ayant toutes ses dispositions habituelles, ses pensées, sa conduite orientées vers l'intérieur. C'est ainsi qu'elle porte beaucoup de fruits, et un fruit splendide, à savoir : Dieu lui-même, le Fils de Dieu qui est et porte en lui toutes choses.

Marie était une jeune femme mariée; c'est ainsi que notre vierge doit être mariée, d'après l'enseignement de saint Paul. Tu dois jeter à fond ta volonté changeante dans la volonté de Dieu qui est immuable, afin qu'elle aide ta faiblesse.

Enfin, de plus, Marie s'était enfermée; de même encore la servante de Dieu doit se tenir enfermée, si elle veut ressentir vraiment en elle cette naissance, s'abstenant non seulement des dispersions temporelles qui paraissent devoir lui apporter quelque dommage, mais même des pratiques purement sensibles des vertus. Elle doit assez souvent faire le silence et le calme en elle-même, s'enfermer en son intérieur, se cacher dans l'esprit pour se soustraire et échapper aux sens, et se faire à elle-même un lieu de silence et de repos intérieur.

8. C'est de ce repos intérieur qu'on chantera dimanche prochain au commencement de la messe : " Dum medium silentium fieret. Alors que l'on était en plein silence, que toutes choses étaient dans le plus grand silence, et que la nuit était au milieu de son cours, c'est alors Seigneur, que de ton trône royal descendit la parole toute-puissante ", le Verbe éternel sortant du coeur de son Père. C'est au milieu du silence, au moment même où toutes les choses sont plongées dans le plus grand silence, où le vrai silence règne, c'est alors qu'on entend en vérité ce Verbe, car si tu veux que Dieu parle, il faut te taire; pour qu'il entre, toutes choses doivent sortir.

Quand notre Seigneur Jésus entra en Égypte, toutes les idoles du pays s'effondrèrent : Tes idoles à toi, c'est tout ce qui empêche cette naissance éternelle de s'accomplir en toi, d'une façon véritable et immédiate, aussi bon et aussi saint que cela paraisse. Notre Seigneur a dit : " Je suis venu apporter un glaive pour trancher tout ce qui tient à l'homme : mère, soeur, frère ". Car ce qui t'est le plus proche, voilà ton ennemi : cette multiplicité d'images, qui cachent en toi le Verbe, et s'étendent sur " lui, empêche cette naissance en toi, sans que pourtant cette paix te soit entièrement enlevée. Cette paix ne peut, il est vrai, toujours régner en toi. Mais c'est par elle, pourtant, que tu deviendras mère spirituelle de cette naissance. Une telle mère doit souvent établir en elle ce plein silence, afin de s'habituer à le faire; l'habitude lui en donnera une certaine maîtrise, car ce qui n'est rien pour un homme exercé, paraît tout à fait impossible au novice inexercé. C'est en effet l'habitude qui donne la maîtrise.

Puisse donc chacun de nous donner place en lui à cette noble naissance, afin de devenir une vraie mère spirituelle. Que Dieu nous y aide ! Amen.

John Tauler

German Dominican, one of the greatest mystics and preachers of the Middle Ages, born at Strasburg about 1300; died at the same place, 16 June, 1361. He was the son of a prosperous citizen of that city. Apparently while still a youth he entered the Dominican Order at Strasburg, because according to his own confession the ascetic life of the order attracted him. It is possible that while taking the customary eight-years' course of study at the monastery he heard Eckhart preach. When a student at the university of the order at Cologne, he became more closely acquainted with Eckhart. In the same way he probably came to know Henry Suso at Cologne. Whether he also studied at Paris is uncertain; more probably he returned from Cologne to Strasburg. From about 1339 to 1347 or 1348 he lived at Basle where he and Henry of Nördlingen were the centre of the large society called the Friends of God of Basle; these were persons who favoured the mystical life and who gave themselves this name from John 15:15. Tauler then returned to Strasburg where he laboured as a preacher. Christina Ebner praises his fiery tongue that kindled the entire world; Rulman Merswin chose him as confessor. Later he lived for some time at Cologne. During the last period of his life he was again at Strasburg.

The "Meisterbuch" of the "Friend of God of the Upland" gives an account of a master of the Scriptures who attracted great attention in 1346 by his preaching. One day a layman accused the master of seemingly seeking his own honour rather than that of God, saying also that probably he had not himself borne the burdens he had laid upon others. Without making any stipulations the master allowed himself to be guided by the layman and learned from him to forget the world and himself, to turn all his thoughts upon God and to lead a life of the Spirit. For two years he lived in seclusion. When after this he preached again for the first time the effect was so great that forty of his hearers went into convulsions and twelve could hardly be revived. After the master had lived and laboured for nine years more he fell dangerously ill, and calling for the layman gave him a written account of his conversion. To this account the layman added five sermons of the master that he had copied. It was customary at an earlier date to regard Tauler as this master; and the "Meisterbuch" was from the year 1498 included in the editions of Tauler's sermons. In more recent times Preger has also supported this opinion. But in the treatise "Taulers Bekehrung" Denifle has produced strong proofs against attributing to Tauler the rôle of this master; this view is now generally maintained, The story told by the later Strasburg chronicler, Speckle (died 1589) is a tissue of falsehoods; it relates that Tauler opposed the pope and the interdict that the pope had laid upon Strasburg in the struggle between the papacy and the Emperor Louis the Bavarian.

Tauler's writings have not yet been subjected to a thorough critical investigation. Much that is attributed to him is doubtful, much not genuine. He certainly did not write the book of the "Nachahmung des armen Lebens Christi" or "Von der geistlichen Armut". The "Exercitia super vita et passione Jesu Christi" and the spiritual songs attributed to him are also spurious. At the most he only wrote a small part of the "Medulla animæ" or of "Institutiones divinæ". Only the sermons, therefore, remain as the actual works of Tauler. The first edition appeared in 1498 at Leipzig and includes 84 sermons; the second edition (Basle, 1521-22) added 42 more some of which, however, even in the opinion of the editor of the edition, were not Tauler's; in the third edition (Cologne, 1543) 25 new sermons were added, part of which are also spurious. The Cologne edition was translated into or rather paraphrased in, Latin by Laurentius Surius (Cologne, 1548). This Latin edition was the copy used for translations into various foreign languages and for both Catholic and Protestant retranslations into German. The modern editions (Frankfort, 1826, 1864, 1872; Berlin, 1841) are based on the old German editions. Lately, Ferdinand Vetter has prepared an edition (Berlin, 1910) based on the Engelberg manuscript (the only one made at Cologne and the oldest one that may perhaps represent the collection revised by Tauler himself) also on the Freiburg manuscript, and on copies of the three manuscripts burned at Strasburg in 1870. This edition contains 81 sermons. The sermons are among the finest monuments of the German language, of German fervour of belief, and of profound spiritual feeling. The language is quiet and measured, yet warm, animated, and full of imagery. Tauler is not so speculative as his teacher Eckhart but he is clearer, more practical, and more adapted to the common people; with all this he united Suso's fervour. The expression used by Christina Ebner, that he had set the whole world aflame by his fiery tongue, does not mean that he was a preacher of fiery, entrancing eloquence, but a preacher who warmed and inflamed the hearts of his hearers by the quiet flame of the pure love that burned in his own breast.


The centre of Tauler's mysticism is the doctrine of the visio essentiœ Dei, the blessed contemplation or knowledge of the Divine nature. He takes this doctrine from Thomas Aquinas, but goes further than the latter in believing that the Divine knowledge is attainable in this world also by a perfect man, and should be sought by every means. God dwells within each human being. In order, however, that the transcendent God may appear in man as a second subject, the human, sinful activities must cease. Aid is given in this effort by the light of grace which raises nature far above itself. The way to God is through love; God replies to its highest development by His presence. Tauler gives advice of the most varied character for attaining that height of religion in which the Divine enters into the human subject. Something needs to be said as regards Tauler's position towards the Church. Luther praised him greatly and Protestants have always had a very high opinion of him, and have included him among the "reformers before the Reformation". However it is now conceded by Protestants that he was "in reality entirely mediæval and not Protestant". He was in fact a dutiful son of the Church and never thought of withdrawing his allegiance. He expresses his opinion very plainly in his sermon on St. Matthew. He set his face against all heresy, especially that of the Brethren of the Free Spirit. What attracted Luther was probably not Tauler's doctrine itself, but only here and there some subordinate thought. Perhaps it pleased him that the word indulgence appears only once in Tauler's sermons, or it aroused his sympathy that Tauler laid less stress upon works, or again he was attracted by the tremendous earnestness of this seeker after God.
Sources

QUÉTIF-ECHARD, Scriptores ordinis prædicatorum, I (Paris, 1719), 677-9; SCHMIDT, Johannes Tauler von Strassburg (Hamburg, 1841); PREGER, Gesch. der deutschen Mystik im Mittelalter, III (Leipzig, 1893), 1-241; DENIFLE, Das Buch von der geistlichen Armut (Munich, 1877); IDEM, Taulers Bekehrung (Strasburg, 1879); SIEDEL, Die Mystik Taulers (Leipzig, 1911).