lundi 19 mars 2012

Saint JOSEPH, Époux de la Très Sainte Vierge Marie, confesseur, Patron de l'Église universelle


Saint Joseph, époux de la Vierge Marie

C'était un « juste » selon l'évangile de saint Matthieu. Les évangélistes ne nous ont conservé aucune parole de ce « juste », le charpentier de Nazareth en Galilée, fiancé de Marie, la Mère de Dieu, époux aussi discret que fidèle et chaste. Père nourricier et éducateur de Dieu le Fils, devenu homme parmi les hommes de ce village, il le fait tout simplement. 

L'ange lui avait dit: "Ne crains pas de prendre chez toi, Marie, ton épouse." et Joseph prit chez lui Marie son épouse.

L'ange lui avait dit : "Lève-toi, prends l'enfant et sa mère" et Joseph se leva, prit l'enfant et sa mère et s'enfuit en Égypte. 

Il est un vrai fils d'Abraham : il croit et fait ce que Dieu lui dit. Lorsque Jésus disparaît pendant trois jours lors du pèlerinage à Jérusalem, Joseph accompagne la quête de Marie : "Ton père et moi nous te cherchions." Et Jésus, redescend à Nazareth, soumis à celui qui, sur terre, a autorité paternelle sur lui. Dieu savait à qui il confiait son Fils unique et sa Mère, à celui qui était l'homme le plus capable au monde d'être la parfaite image du Père.

SOURCE : http://www.paroisse-saint-aygulf.fr/index.php/prieres-et-liturgie/saints-par-mois/icalrepeat.detail/2015/03/19/5645/-/saint-joseph-epoux-de-la-vierge-marie

Saint Joseph

Époux de la Vierge Marie (Ier siècle)

"C'était un juste" selon l'évangile de saint Matthieu, chapitre 1, verset 19.

Les évangélistes ne nous ont conservé aucune parole de ce "juste", le charpentier de Nazareth en Galilée, fiancé de Marie, la Mère de Dieu, époux aussi discret que fidèle et chaste. Père nourricier et éducateur de Dieu le Fils, devenu homme parmi les hommes de ce village, il le fait tout simplement.

L'ange lui avait dit: "Ne crains pas de prendre chez toi, Marie, ton épouse." et Joseph prit chez lui Marie son épouse.

L'ange lui avait dit : "Lève-toi, prends l'enfant et sa mère" et Joseph se leva, prit l'enfant et sa mère et s'enfuit en Égypte.

Il est un vrai fils d'Abraham: il croit et fait ce que Dieu lui dit. Lorsque Jésus disparaît pendant trois jours lors du pèlerinage à Jérusalem, Joseph accompagne la quête de Marie: "Ton père et moi nous te cherchions." Et Jésus, redescend à Nazareth, soumis à celui qui, sur terre, a autorité paternelle sur lui. Dieu savait à qui il confiait son Fils unique et sa Mère, à celui qui était l'homme le plus capable au monde d'être la parfaite image du Père .  

Les Orientaux honorent saint Joseph depuis toujours. Les Latins l'ont méconnu longtemps.

- Avec la Lettre Apostolique Patris corde (avec un cœur de père), François rappelle le 150e anniversaire de la proclamation de saint Joseph comme Patron de l’Église universelle. À cette occasion, une «année spéciale saint Joseph» se tiendra du 8 décembre 2020 au 8 décembre 2021.

Saint Joseph sur le site Vatican News

- vidéo 'un carême avec saint Joseph' méditation devant un tableau du XVe sc à Asti intitulé 'le mariage de Marie et Joseph'.

Voir aussi saint Joseph artisan, fêté le 1er mai.

- 'que Joseph nous donne la capacité de rêver, et nous aide à nous rapprocher du rêve que Dieu a pour nous', Pape à Sainte-Marthe: saint Joseph, porteur de nos rêves, le 20 mars 2017.

- Saint Joseph a été déclaré patron de l'Eglise universelle par le pape Pie IX le 8 décembre 1870.

- Le 18 mars 2009, lors de son voyage en Afrique, Benoît XVI a présidé les premières vêpres de la solennité de saint Joseph.

"A la foule et à ses disciples, Jésus déclare: Vous n'avez qu'un seul Père. Il n'est en effet de paternité que celle de Dieu le Père, l'unique Créateur du monde visible et invisible. Il a cependant été donné à l'homme, créé à l'image de Dieu, de participer à l'unique paternité de Dieu. Saint Joseph illustre cela d'une façon saisissante, lui qui est père sans avoir exercé une paternité charnelle. Il n'est pas le père biologique de Jésus dont Dieu seul est le Père, et pourtant il va exercer une paternité pleine et entière. Être père, c'est avant tout être serviteur de la vie et de la croissance. Saint Joseph a fait preuve, en ce sens, d'un grand dévouement. Pour le Christ, il a connu la persécution, l'exil et la pauvreté qui en découle...".

... A tout moment, mais d'une façon particulière lorsque la fidélité est éprouvée, saint Joseph rappelle à chacun le sens et la valeur de ses engagements"... La vie de saint Joseph, vécue dans l'obéissance à la Parole, est un signe éloquent pour tous les disciples de Jésus qui aspirent à l'unité de l'Église. Son exemple nous incite à comprendre que c'est en se livrant pleinement à la volonté de Dieu que l'homme devient un ouvrier efficace du dessein de Dieu qui désire réunir les hommes en une seule famille, une seule assemblée, une seule Ecclesia". (source: VIS 090319)

- En 2017, le 19 mars étant le 3éme dimanche de Carême, cette solennité avait été reportée au 20 mars.
Solennité de saint Joseph, époux de la bienheureuse Vierge Marie. Il fut l'homme juste, issu de la famille de David, qui a servi de père au Fils de Dieu, le Christ Jésus, qui a voulu être appelé fils de Joseph et lui a été soumis comme un fils à son père. L'Église vénère d'une manière toute spéciale le patron que le Seigneur a établi sur toute sa famille. - Le 19 mars tombant un dimanche de carême en 2023, la célébration de la solennité de la saint Joseph a été reportée au lundi 20 mars cette année-là. 

Martyrologe romain

Il "est, dans l'histoire, l'homme qui a donné à Dieu la plus grande preuve de confiance".

(Benoît XVI à Yaoundé le 19 mars 2009)

SOURCE : https://nominis.cef.fr/contenus/saint/833/Saint-Joseph.html


SAINT JOSEPH

Époux de la Très Sainte Vierge Marie

Saint Joseph descendait de la race royale de David. On croit généralement qu'en vue de la mission sublime que le Ciel lui destinait, il fut sanctifié avant sa naissance. Nul ne peut douter que Joseph ne fût préparé à son sublime ministère, quand la Providence, qui dirige tous les événements, unit son sort à celui de Marie.

L'Évangile est très sobre de détails sur saint Joseph, et on y voit tout résumé en ces mots: "Il était juste." Mais que ces mots couvrent de merveilles, puisque les docteurs s'accordent à dire que saint Joseph tient le premier rang après Marie parmi tous les Saints!

Son père l'éleva, d'après la tradition, dans l'état modeste de charpentier; il pouvait avoir, selon de sérieux auteurs, une cinquantaine d'années, et il avait gardé une chasteté parfaite, lorsque la Volonté de Dieu lui confia la Très Sainte Vierge. Cette union, belle devant les anges, dit saint Jérôme, devait sauvegarder l'honneur de Marie devant les hommes.

Dieu voulut que le mystère de l'Annonciation demeurât quelques temps caché à saint Joseph, afin de nous donner, dans le trouble qui plus tard s'empara de lui, lorsqu'il s'aperçut de la grossesse de Marie, une preuve de la virginité de la Mère et de la conception miraculeuse du Fils. L'avertissement d'un ange dissipa toutes ses craintes.

Qui dira ce que Joseph, depuis lors, montra de respect, de vénération, de tendresse pour Celle qui bientôt allait donner au monde le Sauveur? Combien Joseph fut utile à Marie dans le voyage de Bethléem! Combien plus encore il Lui fut utile dans la fuite en Égypte! Joseph se montra pour la Mère de Dieu l'ami fidèle, le gardien vigilant, le protecteur dévoué.

Imaginons-nous les progrès en vertu que dut faire saint Joseph, vivant dans la compagnie de Jésus et de Marie. Quel délicieux intérieur! Quelle sainte maison que cette modeste demeure! Que de mystères dans cette vie cachée où un Dieu travaille sous la direction d'un homme, où un homme se sanctifie sous l'influence d'un Dieu visible à ses yeux et devenu son Fils adoptif! Après la plus heureuse des vies, Joseph eut la plus heureuse des morts, car il rendit son dernier soupir entre les bras de Jésus et de Marie.

Il est permis de croire, après saint François de Sales qui l'affirme, que saint Joseph est dès maintenant au Ciel en corps et en âme, avec Jésus et Marie. C'est à bon droit que saint Joseph porte le titre glorieux de Patron de l'Église universelle, et que son nom, dans la dévotion chrétienne, est devenu inséparable des noms de Jésus et de Marie.

On l'invoque aussi comme Patron de la bonne mort.

Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950

SOURCE : http://magnificat.ca/cal/fr/saints/saint_joseph.html

Saint JOSEPH

Saint Joseph, l'ombre du Père ! celui sur qui l'ombre du Père tombait épaisse et profonde, saint Joseph, l'homme du silence, celui de qui la parole approche à peine ! l'Evangile ne dit de lui que quelques mots : « C'était un homme juste ! » l'Evangile, si sobre de paroles, devient encore plus sobre quand il s'agit de saint Joseph. On dirait que cet homme, enveloppé de silence, inspire le silence. Le silence de saint Joseph fait le silence autour de saint Joseph. Le silence est sa louange, son génie, son atmosphère. Là où il est, le silence règne. Quand l'aigle plane, disent certains voyageurs, le pèlerin altéré devine une source à l'endroit où tombe son ombre dans le désert. Le pèlerin creuse, l'eau jaillit. L'aigle avait parlé son langage, il avait plané. Mais la chose belle avait été une chose utile ; et celui qui avait soif, comprenant le langage de l'aigle, avait fouillé le sable et trouvé l'eau.

Quoi qu'il en soit de cette magnifique légende et de sa vérité naturelle que je n'ose garantir, elle est féconde en symboles superbes. Quand l'ombre de saint Joseph tombe quelque part, le silence n'est pas loin. Il faut creuser le sable, qui dans sa signification symbolique représente la nature humaine ; il faut creuser le sable, et vous verrez jaillir l'eau. L'eau, ce sera, si vous voulez, ce silence profond, où toutes les paroles sont contenues, ce silence vivifiant, rafraîchissant, apaisant, désaltérant, le silence substantiel ; là où est tombée l'ombre de saint Joseph, la substance du silence jaillit, profonde et pure, de la nature humaine creusée.

Pas une parole de lui dans l'Ecriture ! Mardochée, qui fit fleurir Esther à son ombre, est un de ses précurseurs. Abraham, père d'Isaac, représenta aussi le père putatif de Jésus. Joseph, fils de Jacob, fut son image la plus expressive. Le premier Joseph garda en Egypte le pain naturel. Le second Joseph garda en Egypte le pain surnaturel. Tous deux furent les hommes du mystère ; et le rêve leur dit ses secrets. Tous deux furent instruits en rêve, tous deux devinèrent les choses cachées. Penchés sur l'abîme, leurs yeux voyaient à travers les ténèbres. Voyageurs nocturnes, ils découvraient leurs routes à travers les mystères de l'ombre. Le premier Joseph vit le soleil et la lune prosternés devant lui. Le second Joseph commanda à Marie et à Jésus ; Marie et Jésus obéissaient.

Dans quel abîme intérieur devait résider l'homme qui sentait Jésus et Marie lui obéir, l'homme à qui de tels mystères étaient familiers et à qui le silence révélait la profondeur du secret dont il était gardien. Quand il taillait ses morceaux de bois, quand il voyait l'Enfant travailler sous ses ordres, ses sentiments, creusés par cette situation inouïe, se livraient au silence qui les creusait encore ; et du fond de la profondeur où il vivait avec son travail, il avait la force de ne pas dire aux hommes : le Fils de Dieu est ici.

Son silence ressemble à un hommage rendu à l'inexprimable. C'était l'abdication de la Parole devant l'Insondable et devant l'Immense. Cependant l'Evangile, qui dit si peu de mots, a les siècles pour commentateurs ; je pourrais dire qu'il a les siècles pour commentaires. Les siècles creusent ses paroles et font jaillir du caillou l'étincelle vivante. Les siècles sont chargés d'amener à la lumière les choses du secret. Saint Joseph a été longtemps ignoré. Mais voici quelque chose d'étrange : chaque siècle a deux faces, la face chrétienne et la face antichrétienne ; la face chrétienne s'oppose en général à la face antichrétienne par un contraste direct et frappant. Le XVIII° siècle, le siècle du rire, de la frivolité, de la légèreté, du luxe, posséda Benoît-Joseph Labre... Le XIX° siècle est par-dessus tout, dans tous les sens du mot, le siècle de la Parole. Bonne ou mauvaise, la Parole remplit notre air. Une des choses qui nous caractérisent, c'est le tapage. Rien n'est bruyant comme l'homme moderne : il aime le bruit, il veut en faire autour des autres, il veut surtout que les autres en fassent autour de lui. Le bruit est sa passion, sa vie, son atmosphère ; la publicité remplace pour lui mille autres passions qui meurent étouffées sous cette passion dominante, à moins qu'elles ne vivent d'elle et ne s'alimentent de sa lumière pour éclater plus violemment. Le XIX° siècle parle, pleure, crie, se vante et se désespère.

Il fait étalage de tout. Lui qui déteste la confession secrète, il éclate à chaque instant en confessions publiques. II vocifère, il exagère, il rugit. Eh bien ! ce sera ce siècle, ce siècle du vacarme, qui verra s'élever et grandir dans le ciel de l'Eglise la gloire de saint Joseph. Saint Joseph vient d'être choisi officiellement pour patron de l'Eglise pendant le bruit de l'orage. II est plus connu, plus prié, plus honoré qu'autrefois.

Au milieu du tonnerre et des éclairs, la révélation de son silence se produit insensiblement.

(Ernest Hello, Physionomie des saints, Paris, Victor Palmé, 1875, ch.X, pp.139 sq. : « Saint Joseph. »)

SOURCE : http://surlespasdessaints.over-blog.com/article-prieres-sur-saint-joseph-69722242.html


EXHORTATION APOSTOLIQUE REDEMPTORIS CUSTOS

DE SA SAINTETÉ JEAN-PAUL II

SUR LA FIGURE ET LA MISSION DE SAINT JOSEPH DANS LA VIE DU CHRIST

ET DE L'ÉGLISE

Aux évêques Aux prêtres et aux diacres Aux religieux et religieuses A tous les fidèles laïcs

INTRODUCTION


1. Appelé à veiller sur le Rédempteur, «Joseph fit ce que l'Ange du Seigneur lui avait prescrit: il prit chez lui son épouse » (Mt 1, 24).

Dès les premiers siècles, les Pères de l'Eglise, s'inspirant de l'Evangile, ont bien montré que; de même que saint Joseph a pris un soin affectueux de Marie et s'est consacré avec joie à l'éducation de Jésus Christ (1), de même il est le gardien et le protecteur de son Corps mystique, l'Eglise, dont la Vierge sainte est la figure et le modèle.

En ce centenaire de la publication de l'encyclique Quamquam pluries du pape Léon XIII (2) et dans la ligne de la vénération multi-séculaire pour saint Joseph, je désire proposer à votre méditation, chers Frères et Soeurs, quelques réflexions sur celui à qui Dieu « confia la garde de ses trésors les plus précieux » (3). C'est avec joie que j'accomplis ce devoir pastoral afin que grandissent en tous la dévotion envers le Patron de l'Eglise universelle et l'amour pour le Rédempteur qu'il a servi de façon exemplaire.

Ainsi, non seulement le peuple chrétien tout entier recourra avec plus de ferveur à saint Joseph et invoquera avec confiance son patronage, mais il aura toujours sous les yeux sa manière humble et sage de servir et de « participer » à l'économie du Salut.(4)

J'estime en effet qu'une réflexion renouvelée sur la participation de l'Epoux de Marie au mystère divin permettra à l'Eglise, en marche vers l'avenir avec toute l'humanité, de retrouver sans cesse son identité dans le cadre du dessein rédempteur, qui a son fondement dans le mystère de l'Incarnation.

Joseph de Nazareth a précisément « participé » à ce mystère plus qu'aucune autre personne en dehors de Marie, la Mère du Verbe incarné. Il y a participé avec elle, entraîné dans la réalité du même événement salvifique, et il a été le dépositaire du même amour, par la puissance duquel le Père éternel « nous a prédestinés à être pour lui des fils adoptifs par Jésus Christ » (Ep 1, 5).

I. LE CONTEXTE ÉVANGÉLIQUE

Le mariage avec Marie

2. « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse: ce qui a été engendré en elle vient de l'Esprit Saint et elle enfantera un fils auquel tu donneras le nom de Jésus, car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés » (Mt 1, 20-21).

Ces paroles contiennent le noyau central de la vérité biblique sur saint Joseph, sur le moment de son existence auquel se référent en particulier les Pères de l'Eglise.

L'évangéliste Matthieu explique la signification de ce moment, en précisant comment Joseph l'a vécu. Mais pour comprendre pleinement son contenu et son contexte, il est important d'avoir présent à l'esprit le passage parallèle de l'Evangile de Luc. En effet, en référence au verset qui dit « Voici quelle fut l'origine de Jésus Christ. Marie, sa mère, était accordée en mariage à Joseph; or, avant qu'ils aient habité ensemble, elle se trouva enceinte par le fait de l'Esprit Saint » (Mt 1, 18), l'origine de la maternité de Marie « par le fait de l'Esprit Saint » est décrite de façon plus détaillée et plus explicite dans ce que nous lisons en Luc à propos de l'annonce de la naissance de Jésus: « L'ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée du nom de Nazareth, à une jeune fille accordée en mariage à un homme nommé Joseph, de la famille de David; cette jeune fille s'appelait Marie» (Lc 1, 26-27). Les paroles de l'ange: « Réjouis-toi, comblée de grâce, le Seigneur est avec toi » (Lc 1, 28) provoquèrent un trouble intérieur en Marie et l'amenèrent aussi à réfléchir. Le messager tranquillise alors la Vierge et en même temps lui révèle le dessein spécial de Dieu sur elle: « Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu vas être enceinte, tu enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père » (Lc 1, 30-32).

Peu auparavant, l'évangéliste avait affirmé qu'au moment de l'Annonciation, Marie était « accordée en mariage à un homme nommé Joseph, de la famille de David ». La nature de ce « mariage » est expliquée indirectement lorsque Marie, après avoir entendu ce que le messager avait dit de la naissance d'un fils, demande: « Comment cela se fera-t-il puisque je suis vierge » (Lc 1, 34). Alors lui parvient cette réponse: « L'Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre; c'est pourquoi celui qui va naître sera saint et sera appelé Fils de Dieu » (Lc 1, 35). Marie, tout en étant déjà « mariée » avec Joseph, restera vierge, car l'enfant conçu en elle dès l'Annonciation était conçu par le fait de l'Esprit Saint.

Sur ce point, le texte de Luc coïncide avec celui de Matthieu 1, 18 et sert à expliquer ce que nous y lisons. Si, après le mariage avec Joseph, Marie « se trouva enceinte par le fait de l'Esprit Saint », ce fait correspond à tout ce que comporte l'Annonciation, en particulier aux. dernières paroles prononcées par Marie: « Que tout se passe pour moi comme tu l'as dit (Lc 1, 38). Répondant au clair dessein de Dieu, Marie, au fur et à mesure que s'écoulent les jours et les semaines, se présente devant les gens et devant Joseph comme « enceinte », comme celle qui doit enfanter et qui porte en elle le mystère de la maternité.

3. En de telles circonstances, « Joseph, son époux, qui était un homme juste et ne voulait pas la dénoncer publiquement, résolut de la répudier secrètement » (Mt 1, 19). Il ne savait pas quelle attitude adopter devant cette « étonnante » maternité de Marie. Il cherchait évidemment une réponse à la question qui l'inquiétait, mais surtout il cherchait une issue à cette situation difficile pour lui. Alors qu'il « avait formé ce projet, voici que l'Ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit: «Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse: ce qui a été engendré en elle vient de l'Esprit Saint et elle enfantera un fils auquel tu donneras le nom de Jésus, car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés» » (Mt 1, 20-21).

Il y a une analogie étroite entre « l'annonciation » du texte de Matthieu et celle du texte de Luc. Le messager divin introduit Joseph dans le mystère de la maternité de Marie. Celle qui est son « épouse » selon la loi, tout en restant vierge, est devenue mère par le fait de l'Esprit Saint. Et quand le Fils que Marie porte en son sein viendra au monde, il devra recevoir le nom de Jésus. C'était là un nom connu parmi les Israélites, et on le donnait parfois aux enfants. Mais ici il s'agit du Fils qui - selon la promesse divine - accomplira pleinement la signification de ce nom: Jésus, Yehošua', qui veut dire Dieu sauve.

Le messager s'adresse à Joseph en tant qu' « époux de Marie », celui qui, le moment venu, devra donner ce nom au Fils qui naîtra de la Vierge de Nazareth qui l'a épousé. Il s'adresse donc à Joseph en lui confiant les devoirs d'un Père terrestre à l'égard du Fils de Marie. « A son réveil, Joseph fit ce que l'Ange du Seigneur lui avait prescrit: il prit chez lui son épouse » (Mt 1, 24). Il la prit avec tout le mystère de sa maternité, il la prit avec le Fils qui devait venir au monde par le fait de l'Esprit Saint: il manifesta ainsi une disponibilité de volonté semblable à celle de Marie à l'égard de ce que Dieu lui demandait par son messager.

II. LE DÉPOSITAIRE DU MYSTÈRE DE DIEU

4. Lorsque Marie, peu après l'Annonciation, se rendit dans la maison de Zacharie pour rendre visite à sa parente Elisabeth, elle entendit, au moment où elle la saluait, les paroles prononcées par Elisabeth « remplie de l'Esprit Saint » (Lc 1, 41). Après la parole qui rejoignait la salutation de l'Ange de l'Annonciation, Elisabeth dit: « Bienheureuse celle qui a cru en l'accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur » (Lc 1, 45). Ces paroles ont été le fil conducteur de l'encyclique Redemptoris Mater par laquelle j'ai voulu approfondir l'enseignement du Concile Vatican II qui déclare: « La bienheureuse Vierge avança dans son pèlerinage de foi, gardant fidèlement l'union avec son Fils jusqu'à la Croix », (5) « précédant » (6) tous ceux qui, par la foi, suivent le Christ.

Or, au début de ce pèlerinage, la foi de Marie rencontre la foi de Joseph. Si Elisabeth a dit de la Mère du Rédempteur: « Bienheureuse celle qui a cru », on peut en un sens attribuer aussi cette béatitude à Joseph, car il a répondu affirmativement à la Parole de Dieu quand elle lui a été transmise en ce moment décisif. Joseph, il est vrai, n'a pas répondu à l' « annonce » de l'Ange comme Marie, mais il « fit ce que l'Ange du Seigneur lui avait prescrit: il prit chez lui son épouse ». Ce qu'il fit est pure « obéissance de la foi » (cf. Rm 1, 5; 16, 26; 2 Co 10, 5-6).

On peut dire que ce que fit Joseph l'unit d'une manière toute spéciale à la foi de Marie: il accepta comme une vérité venant de Dieu ce qu'elle avait déjà accepté lors de l'Annonciation. Le Concile dit: « A Dieu qui révèle est due «l'obéissance de la foi» par laquelle l'homme s'en remet tout entier et librement à Dieu dans «un complet hommage d'intelligence et de volonté à Dieu qui révèle» et dans un assentiment volontaire à la révélation qu'il fait ». (7) Cette phrase, qui touche à l'essence même de la foi, s'applique parfaitement à Joseph de Nazareth.

5. Il devint donc d'une façon singulière le dépositaire du mystère « tenu caché depuis les siècles en Dieu » (cf. Ep 3, 9), de même que Marie le devint, en ce moment décisif appelé par l'Apôtre « la plénitude du temps », lorsque « Dieu envoya son Fils, ne d'une femme », afin de « racheter les sujets de la Loi », pour « leur conférer l'adoption filiale » (cf. Ga 4, 4-5). « Il a plu à Dieu - dit le Concile - dans sa sagesse et sa bonté de se révéler en personne et de faire connaître le mystère de sa volonté (cf. Ep 1, 9) grâce auquel les hommes, par le Christ, le Verbe fait chair, accèdent dans l'Esprit Saint auprès du Père et sont rendus participants de la nature divine (cf. Ep 2, 18; 2 P 1, 4) ». (8)

Joseph est, avec Marie, le premier dépositaire de ce mystère divin. En même temps que Marie - et aussi en rapport avec Marie - il participe à la phase culminante de cette révélation que Dieu fait de lui-même dans le Christ, et il y participe dès le premier commencement. En ayant devant les yeux le texte des deux évangélistes Matthieu et Luc on peut dire également que Joseph est le premier à participer à la foi de la Mère de Dieu, et qu'ainsi il soutient son épouse dans la foi à l'Annonciation divine. Il est aussi celui qui est placé le premier par Dieu sur le chemin du « pèlerinage de foi » sur lequel Marie - surtout à partir du Calvaire et de la Pentecôte - sera la première d'une manière parfaite. (9)

6. Le chemin personnel de Joseph, son pèlerinage de foi se conclura le premier, c'est-à-dire avant que Marie ne se tienne au pied de la Croix sur le Golgotha et avant que, le Christ étant retourné vers son Père, elle ne se retrouve au Cénacle de la Pentecôte le jour où fut manifestée au monde l'Église, née de la puissance de l'Esprit de vérité. Cependant, le chemin de foi de Joseph suit la même direction, il reste totalement déterminé par le même mystère dont il était, avec Marie, devenu le premier dépositaire. L'Incarnation et la Rédemption constituent une unité organique et indissoluble dans laquelle « l'économie de la Révélation comprend des événements et des paroles intimement unis entre eux. » (10) En raison de cette unité précisément, le Pape Jean XXIII, qui avait une grande dévotion envers saint Joseph, décida que dans le canon romain de la messe, mémorial perpétuel de la Rédemption, son nom serait ajouté à côté de celui de Marie, avant les Apôtres, les Souverains Pontifes et les Martyrs. (11)

Le service de la paternité

7. Comme il résulte des textes évangéliques, le mariage de Marie est le fondement juridique de la paternité de Joseph. C'est pour assurer une présence paternelle auprès de Jésus que Dieu choisit Joseph comme époux de Marie. Il s'ensuit que la paternité de Joseph - relation qui le place le plus près possible du Christ, fin de toute élection et de toute prédestination (cf. Rm 8, 28-29) - passe par le mariage avec Marie, c'est-à-dire par la famille.

Tout en affirmant clairement que Jésus a été conçu par le fait de l'Esprit Saint et que dans ce mariage la virginité a été préservée (cf. Mt 1. 18-25; Lc 1, 26-38), les évangélistes appellent Joseph l'époux de Marie et Marie l'épouse de Joseph (cf. Mt 1, 16. 18-20. 24; Lc 1, 27; 2, 5).

Pour l'Église aussi, s'il est important de proclamer la conception virginale de Jésus, il est non moins important de défendre le mariage de Marie avec Joseph car, juridiquement, c'est de lui que dépend la paternité de Joseph. On comprend alors pourquoi les générations ont été énumérées selon la généalogie de Joseph: « Pourquoi - se demande saint Augustin - n'auraient-elles pas dû être celles de Joseph? Joseph n'était-il pas l'époux de Marie? [...] L'Écriture affirme, par la voix autorisée de l'Ange, qu'il était son époux. Ne crains pas, dit-il, de prendre chez toi Marie, ton Épouse.- ce qui a été engendré en elle vient de l'Esprit Saint. Il reçoit l'ordre de donner à l'enfant son nom, bien qu'il ne soit pas né de lui. Elle enfantera un fils, dit-il, auquel tu donneras le nom de Jésus. L'écriture sait bien que Jésus n'est pas né de Joseph, puisque, alors qu'il était préoccupé au sujet de l'origine de la maternité de Marie, il lui est dit: cela vient de l'Esprit Saint. Et pourtant, l'autorité paternelle ne lui est pas enlevée puisqu'il lui est ordonné de donner à l'enfant son nom. Enfin, la Vierge Marie elle-même, qui a bien conscience de ne pas avoir conçu le Christ par l'union conjugale avec lui, l'appelle cependant père du Christ. » (12) Le fils de Marie est aussi fils de Joseph en vertu du lien matrimonial qui les unit: « En raison de ce mariage fidèle, ils méritèrent tous les deux d'être appelés les parents du Christ, non seulement elle, d'être appelée sa mère, mais lui aussi, d'être appelé son père, de même qu'époux de sa mère, car il était l'un et l'autre par l'esprit et non par la chair. » (13) Dans ce mariage, il ne manqua rien de ce qui était nécessaire pour le constituer: « En ces père et mère du Christ se sont réalisés tous les biens du mariage: la progéniture, la fidélité, le sacrement. Nous connaissons la progéniture, qui est le Seigneur Jésus lui-même; la fidélité, car il n'y a aucun adultère; le sacrement, car il n'y a aucun divorce. » (14)

Quand ils analysent la nature du mariage, saint Augustin comme saint Thomas considèrent constamment qu'elle réside dans l' « union indivisible des esprits », dans l' « union des coeurs », dans le « consentement » (15), tous éléments qui se sont manifestés d'une manière exemplaire dans ce mariage. Au point culminant de l'histoire du salut, quand Dieu révèle son amour pour l'humanité par le don du Verbe, c'est précisément le mariage de Marie et de Joseph qui réalise en pleine « liberté » le « don sponsal de soi » en accueillant et en exprimant un tel amour. (16) « Dans cette grande entreprise du renouvellement de toutes choses dans le Christ, le mariage, lui aussi purifié et renouvelé, devient une réalité nouvelle, un sacrement de la Nouvelle Alliance. Et voici qu'au seuil du Nouveau Testament comme à l'entrée de l'Ancien se dresse un couple. Mais, tandis que celui d'Adam et Eve fut la source du mal qui a déferlé sur le monde, celui de Joseph et de Marie est le sommet d'où la sainteté se répand sur toute la terre. Le Sauveur a commencé l'oeuvre du salut par cette union virginale et sainte où se manifeste sa toute-puissante volonté de purifier et sanctifier la famille, ce sanctuaire de l'amour et ce berceau de vie. » (17)

Que d'enseignements en découlent aujourd'hui pour la famille! Puisque, « en définitive, l'essence de la famille et ses devoirs sont définis par l'amour » et que « la famille reçoit la mission de garder, de révéler et de communiquer l'amour, reflet vivant et participation réelle de l'amour de Dieu pour l'humanité et de l'amour du Christ Seigneur pour l'Église son Épouse » (18) c'est dans la sainte Famille, cette « Église en miniature » (19) par excellence, que toutes les familles chrétiennes doivent trouver leur reflet. En elle, en effet, « par un mystérieux dessein de Dieu, le Fils de Dieu a vécu caché durant de longues années. Elle est donc le prototype et l'exemple de toutes les familles chrétiennes. » (20)

8. Saint Joseph a été appelé par Dieu à servir directement la personne et la mission de Jésus en exerçant sa paternité. C'est bien de cette manière qu'il coopère dans la plénitude du temps au grand mystère de la Rédemption et qu'il est véritablement « ministre du salut » (21). Sa paternité s'est exprimée concrètement dans le fait « d'avoir fait de sa vie un service, un sacrifice au mystère de l'Incarnation et à la mission rédemptrice qui lui est liée; d'avoir usé de l'autorité légale qui lui revenait sur la sainte Famille, pour lui faire le don total de lui-même, de sa vie, de son travail; d'avoir converti sa vocation humaine à l'amour familial en une oblation surnaturelle de lui-même, de son coeur et de toutes ses forces à l'amour mis au service du Messie qui naquit dans sa maison. » (22)

La liturgie rappelle qu'« à saint Joseph a été confiée la garde des mystères du salut à l'aube des temps nouveaux »(23), et elle précise qu' « il fut le serviteur fidèle et prudent à qui Dieu confia la sainte Famille pour qu'il veille comme un père sur son Fils unique. »(24) Léon XIII souligne la sublimité de cette mission: « Joseph brille entre tous par la plus auguste dignité, parce qu'il a été, de par la volonté divine, le gardien du Fils de Dieu, regardé par les hommes comme son père. D'où il résultait que le Verbe de Dieu était humblement soumis à Joseph, qu'il lui obéissait et qu'il lui rendait tous les devoirs que les enfants sont obligés de rendre à leurs parents. »(25)

Il serait inconcevable qu'à une tâche aussi élevée ne correspondent pas les qualités voulues pour bien l'accomplir. Il convient donc de reconnaître que Joseph eut à l'égard de Jésus, « par un don spécial du ciel, tout l'amour naturel, toute l'affectueuse sollicitude que peut connaître un coeur de père. » (26)

En même, temps que la puissance paternelle sur Jésus, Dieu a aussi accordé à Joseph l'amour correspondant, cet amour qui a sa source dans le Père, « de qui toute paternité, au ciel et sur la terre, tire son nom. » (Ep 3, 15).

Dans les Évangiles est clairement décrite la tâche de père qui est celle de Joseph à l'égard de Jésus. En effet, le salut, qui passe par l'humanité de Jésus, se réalise dans des gestes qui font partie de la vie familiale quotidienne, en respectant l' « abaissement » inhérent à l'économie de l'Incarnation. Les évangélistes sont très attentifs à montrer que, dans la vie de Jésus, rien n'a été laissé au hasard et que tout s'est déroulé selon un plan divin préétabli. La formule souvent répétée: « Cela advint pour que s'accomplit... » et la référence de l'événement décrit à un texte de l'Ancien Testament tendent à souligner l'unité et la continuité du projet, qui atteint son accomplissement dans le Christ.

Par l'Incarnation, les « promesses » et les « figures » de l'Ancien Testament deviennent des « réalités »: les lieux, les personnes, les événements et les rites s'entremêlent selon des ordres divins précis, transmis par le ministère des anges et reçus par des créatures particulièrement sensibles à la voix de Dieu. Marie est l'humble servante du Seigneur, préparée de toute éternité à la mission d'être Mère de Dieu; Joseph est celui que Dieu a choisi pour être « l'ordonnateur de la naissance du Seigneur » (27), celui qui a la charge de pourvoir à l'entrée « dans l'ordre » du Fils de Dieu dans le monde, en respectant les dispositions divines et les lois humaines. Toute la vie « privée » ou « cachée » de Jésus est confiée à sa garde.

Le recensement

9. En se rendant à Bethléem pour le recensement, conformément aux ordres de l'autorité légitime, Joseph accomplit à l'égard de l'enfant la tache importante et significative d'inscrire officiellement le nom de « Jésus, fils de Joseph de Nazareth » (cf. Jn 1,45) à l'état civil de l'empire. Cette inscription manifeste clairement l'appartenance de Jésus au genre humain, comme homme parmi les hommes, citoyen de ce monde, sujet de la loi et des institutions civiles, mais aussi « sauveur du monde. » Origène décrit bien la signification théologique inhérente à ce fait historique, qui est loin d'être marginal: « A quoi me sert ce récit qui raconte à la fois «le premier recensement» de l'univers entier au temps de l'empereur César Auguste, le voyage de «Joseph, accompagné de Marie son épouse enceinte», allant, au milieu de tout le monde se faire inscrire lui aussi sur les listes du cens et la venue au monde de Jésus, avant la fin du recensement? Pour qui y regarde de plus prés, ces événements sont le signe d'un mystère: il a fallu que le Christ aussi fűt recensé dans ce dénombrement de l'univers, parce qu'il voulait être inscrit avec tous pour sanctifier tous les hommes, et être mentionné sur le registre avec le monde entier pour offrir à l'univers de vivre en communion avec lui; il voulait, après ce recensement, recenser tous les hommes avec lui sur «le livre des vivants», et tous ceux qui auront cru en lui les «inscrire dans les cieux» avec les saints de Celui « à qui appartiennent la gloire et la puissance dans les siècles des siècles. Amen.» (28) »

La naissance à Bethléem

10. Dépositaire du mystère « caché depuis les siècles en Dieu » et qui commence à se réaliser à ses yeux lorsque vient « la plénitude du temps », Joseph est avec Marie, en la nuit de Bethléem, le témoin privilégié de la venue au monde du Fils de Dieu. Ainsi s'exprime saint Luc: « Or il advint, comme ils étaient là, que les jours furent accomplis où elle devait enfanter. Elle enfanta son fils premier-né, l'enveloppa de langes et le coucha dans une crèche, parce qu'ils manquaient de place dans la salle» (Lc 2, 6-7). Joseph fut le témoin oculaire de cette naissance, survenue dans des conditions humainement humiliantes, première annonce du « dépouillement » (cf. Ph 2, 5-8) auquel le Christ consent librement pour la rémission des péchés. En même temps, il fut le témoin de l'adoration des bergers, arrivés sur le lieu de la naissance de Jésus après que l'ange leur eut porté cette grande et heureuse nouvelle (cf. Lc 2, 15-16); plus tard, il fut aussi le témoin de l'hommage rendu par les Mages venus de l'Orient (cf. Mt 2, 11).

La circoncision

11. La circoncision d'un fils était le premier devoir religieux du père: par ce rite (cf. Lc 2, 21), Joseph exerce son droit et son devoir à l'égard de Jésus. Le principe selon lequel tous les rites de l'Ancien Testament ne sont que l'ombre de la réalité (cf. He 9, 9-10; 10, 1) fait comprendre pourquoi Jésus les accepte. Comme pour les autres rites, celui de la circoncision trouve en Jésus son « accomplissement. » L'alliance de Dieu avec Abraham, dont la circoncision était le signe (cf. Gn 17, 13), atteint en Jésus son plein effet et sa réalisation parfaite, car Jésus est le « oui » de toutes les anciennes promesses (cf. 2 Co 1, 20).

L'imposition du nom

12. A l'occasion de la circoncision, Joseph donne à l'enfant le nom de Jésus. Ce nom est le seul nom dans lequel se trouve le salut (cf. Ac 4, 12); et sa signification avait été révélée à Joseph au moment de son « annonciation »: « Tu lui donneras le nom de Jésus, car c'est lui qui sauvera le peuple de ses péchés » (Mt 1, 21). En lui donnant son nom, Joseph manifeste sa paternité légale à l'égard de Jésus et, en prononçant ce nom, il proclame la mission de sauveur qui est celle de l'enfant.

La présentation de Jésus au Temple

13. Ce rite, rapporté par Luc (2, 22 ss.), comprend le rachat du premier-né et éclaire le futur épisode de Jésus resté au Temple à l'âge de douze ans. Le rachat du premier-né est un autre devoir du père, que Joseph accomplit. Le premier-né représentait le peuple de l'Alliance, racheté de l'esclavage pour appartenir à Dieu. Sur ce plan aussi, non seulement Jésus, qui est le véritable « prix » du rachat (cf. 1 Co 6, 20; 7, 23; 1 P 1, 19), « accomplit » le rite de l'Ancien Testament, mais il le dépasse en même temps; en effet, il n'est pas un sujet de rachat mais l'auteur même du rachat. L'évangéliste note que « son père et sa mère étaient dans l'étonnement de ce qui se disait de lui » (Lc 2, 33), et en particulier de ce que dit Syméon dans son cantique adressé à Dieu, où i1 présente Jésus comme le « salut préparé par Dieu à la face de tous les peuples », « lumière pour éclairer les nations et gloire de son peuple Israël », et aussi, un peu plus loin, « signe en butte à la contradiction » (cf. Lc 2, 30-34).

La fuite en Égypte

14. Après la présentation au Temple, l'évangéliste Luc note: « Quand ils eurent accompli tout ce qui était conforme à la Loi du Seigneur, ils retournèrent en Galilée, à Nazareth, leur ville. Cependant l'enfant grandissait, se fortifiait et se remplissait de sagesse. Et la grâce de Dieu était sur lui. » (Lc 2, 39-40.) Mais, selon le texte de Matthieu, avant ce retour en Galilée il faut placer un événement très important, pour lequel la divine Providence recourt encore à Joseph: « Après leur départ [des Mages], voici que l'Ange du Seigneur apparaît en songe à Joseph et lui dit: « Lève-toi, prends avec toi l'enfant et sa mère, et fuis en Égypte; et restes-y jusqu'à ce que je te dise. Car Hérode va rechercher l'enfant pour le faire périr. » (Mt 2, 13) Lorsque les Mages étaient venus de l'Orient, Hérode avait appris la naissance du « roi des juifs » (Mt 2, 2). Et quand les Mages s'en allèrent, il « envoya mettre à mort, dans Bethléem et tout son territoire, tous les enfants de moins de deux ans » (Mt 2, 16). Ainsi, en les tuant tous, il voulait tuer ce nouveau-né, « roi des juifs », dont il avait entendu parler durant la visite des Mages à sa cour. Alors Joseph, après avoir entendu l'avertissement en songe, « prit avec lui l'enfant et sa mère, de nuit, et se retira en Egypte; et il resta la jusqu'à la mort d'Hérode, pour que s'accomplît cet oracle prophétique du Seigneur: « D'Égypte j'ai appelé mon fils. » (Mt 2, 1415; cf. Os 11, 1). La route du retour de Jésus de Bethléem à Nazareth passa donc par l'Égypte. De même qu'Israël avait, « de l'état d'esclavage », pris le chemin de l'exode pour commencer l'Ancienne Alliance, de même Joseph, dépositaire et coopérateur du mystère providentiel de Dieu, veille aussi en exil sur celui qui réalise la Nouvelle Alliance.

La présence de Jésus au Temple.

15. Dés l'Annonciation, Joseph, en un sens, se trouva avec Marie au centre du mystère caché depuis les siècles en Dieu et qui avait pris chair: « Le Verbe s est fait chair et il a habité parmi nous » Un 1, 14). Il a habité parmi les hommes, et le lieu de sa présence a été la sainte Famille de Nazareth, l'une des nombreuses familles de cette petite ville de Galilée, l'une des nombreuses familles de la terre d'Israël. La, Jésus grandissait, il « se fortifiait et se remplissait de sagesse. Et la grâce de Dieu était sur lui » (Lc 2, 40). Les Évangiles résument en peu de mots la longue période de la vie « cachée » pendant laquelle Jésus se prépare à sa mission messianique. Un seul moment est soustrait à cette « discrétion » et il est décrit par 1'Evangile de Luc: la Pâque de Jérusalem, lorsque Jésus avait douze ans. Jésus participa à cette fête comme jeune pèlerin, avec Marie et Joseph. Et voici que, « une fois les jours de la fête écoulés, alors qu'ils s'en retournaient, l'enfant Jésus reste à Jérusalem à l'insu de ses parents » (Lc 2, 43). Au bout d'un jour, ils se rendirent compte de son absence et commencèrent à le rechercher « parmi leurs parents et connaissances »: « Et il advint, au bout de trois jours, qu'ils le trouvèrent dans le Temple, assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant; et tous ceux qui l'entendaient étaient stupéfaits de son intelligence et de ses réponses. » (Lc 2, 46-47.) Marie lui demande: « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela? Vois! Ton père et moi, nous te cherchons, angoissés. » (Lc 2, 48.) Jésus leur fit une telle réponse qu' « ils ne comprirent pas sa parole ». Il avait dit: « Pourquoi donc me cherchiez-vous? Ne saviez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père? » (Lc 2, 4950.) Cette réponse fut entendue de Joseph, dont Marie venait de dire « ton père ». Tout le monde, en effet, disait et pensait que Jésus « était, à ce qu'on croyait, fils de Joseph » (Lc 3, 23). La réponse de Jésus au Temple n'en devait pas moins raviver dans la conscience du « père présumé » ce qu'il avait entendu une nuit, douze ans plus tôt: « Joseph..., ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse: ce qui a été engendré en elle vient de l'Esprit-Saint. » Dès lors, il savait qu'il était le dépositaire du mystère de Dieu, et Jésus, à douze ans, évoqua précisément ce mystère: « Je dois être dans la maison de mon Père. » La subsistance et l'éducation de Jésus à Nazareth 16. La croissance de Jésus « en sagesse, en taille et en grâce » (Lc 2, 52) s'accomplit dans le cadre de la sainte famille, sous les yeux de Joseph qui avait la haute tâche d' « élever », c'est-à-dire de nourrir Jésus, de le vêtir et de lui apprendre la Loi et un métier, conformément aux devoirs qui reviennent au père. Dans le sacrifice eucharistique, l'Église vénère la mémoire de la bienheureuse Marie toujours Vierge, mais aussi de saint Joseph (29) car «il a nourri Celui que les fidèles devaient manger comme Pain de la vie éternelle (30) ». Pour sa part, Jésus « leur était soumis » (Lc 2, 51), payant respectueusement de retour les attentions de ses « parents ». Ainsi voulait-il sanctifier les devoirs de la famille et du travail qu'il exécutait aux côtés de Joseph.

III. L'HOMME JUSTE - L'ÉPOUX

17. Au cours de sa vie, qui fut un pèlerinage dans la foi, Joseph, comme Marie, resta jusqu'au bout fidèle à l'appel de Dieu. La vie de Marie consista à accomplir à fond le premier fiat prononcé au moment de l'Annonciation, tandis que Joseph, comme on 1'a dit, ne proféra aucune parole lors de son « annonciation »: il « fit » simplement « ce que l'Ange du Seigneur lui avait prescrit » (Mt 1, 24). Et ce premier « il fit » devint le commencement du « chemin de Joseph ». Le long de ce chemin, les Évangiles ne mentionnent aucune parole dite par lui. Mais le silence de Joseph a une portée particulière: grâce à lui, on peut saisir pleinement la vérité contenue dans le jugement que l'Évangile émet sur Joseph: le « juste » (Mt 1, 19). Il faut savoir lire cette vérité car en elle est contenu l'un des témoignages les plus importants sur l'homme et sur sa vocation. Au cours des générations, l'Église lit ce témoignage d'une manière toujours plus attentive et plus consciente, comme si elle tirait du trésor de cette figure insigne « du neuf et du vieux » (Mt 13, 52).

18. L'homme « juste » de Nazareth possède avant tout les caractéristiques très claires de l'époux. L'évangéliste parle de Marie comme d' « une jeune fille accordée en mariage à un homme nommé Joseph » (Lc 1, 27). Avant que commence à s'accomplir « le mystère caché depuis des siècles en Dieu » (Ep 3, 9), les Évangiles présentent à nos yeux l'image de l'époux et de l'épouse. Selon la coutume du peuple hébreu, le mariage se concluait en deux étapes: on célébrait d'abord le mariage légal (vrai mariage), et c'est seulement après un certain temps que l'époux faisait venir l'épouse chez lui. Avant de vivre avec Marie, Joseph était donc déjà son « époux »; toutefois, Marie gardait au fond d'elle-même le désir de réserver exclusivement à Dieu le don total de soi. On pourrait se demander de quelle manière ce désir se conciliait avec le « mariage ». La réponse ne vient que du déroulement des événements du salut, c'est-à-dire de l'action spéciale de Dieu même. Depuis l'Annonciation, Marie sait qu elle doit réaliser son désir virginal de se donner à Dieu de façon exclusive et totale précisément en devenant mère du Fils de Dieu. La maternité par le fait de l'Esprit-Saint est la forme de don que Dieu lui-même attend de la Vierge « accordée en mariage» à Joseph. Marie prononce son fiat. Le fait qu'elle est « accordée en mariage » à Joseph est compris dans le dessein même de Dieu. C'est ce qu'indiquent les deux évangélistes cités, mais plus particulièrement Matthieu. Les paroles adressées à Joseph sont très significatives: « Ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse: ce qui a été engendré en elle vient de l'Esprit-Saint. » (Mt 1, 20.) Elles expliquent le mystère de l'épouse de Joseph: Marie est vierge dans sa maternité. En elle, « le Fils du Très-Haut » prend un corps humain et devient « le Fils de l'homme ». En s'adressant à Joseph par les paroles de l'Ange, Dieu s'adresse à lui comme à l'époux de la Vierge de Nazareth. Ce qui s'est accompli en elle par le fait de l'Esprit- Saint exprime en même temps une particulière confirmation du lien sponsal qui préexistait déjà entre Joseph et Marie. Le messager dit clairement à Joseph: « Ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse. » Ainsi, ce qui était advenu auparavant - son mariage avec Marie - s'était fait par la volonté de Dieu et devait donc être conservé. Dans sa maternité divine, Marie doit continuer à vivre comme « une vierge, épouse d'un mari » (cf. Lc 1, 27).

19. Dans les paroles de 1' « annonciation » nocturne, non seulement Joseph entend la vérité divine sur la vocation ineffable de son épouse, mais il y réentend aussi la vérité sur sa propre vocation. Cet homme « juste », qui, dans l'esprit des plus nobles traditions du peuple élu, aimait la Vierge de Nazareth et s'était lié à elle d'un amour sponsal, est à nouveau appelé par Dieu à cet amour. « Joseph fit ce que l'Ange du Seigneur lui avait prescrit: il prit chez lui son épouse »; ce qui est engendré en elle « vient de l'Esprit-Saint »: ne faut-il pas conclure, devant ces expressions, que son amour d'homme est, lui aussi, régénéré par l'Esprit-Saint? Ne faut-i1 pas penser que l'amour de Dieu, qui a été répandu dans le coeur de l'homme par le Saint-Esprit (cf. Rm 5, 5), façonne de la manière la plus parfaite tout amour humain? Il façonne aussi - et d'une façon tout à fait singulière - l'amour sponsal des époux, et il approfondit en lui tout ce qui est humainement digne et beau, ce qui porte les signes de l'abandon exclusif de soi, de l'alliance des personnes et de la communion authentique du Mystère trinitaire. « Joseph... prit chez lui son épouse mais il ne la connut pas jusqu'à ce qu'elle eut enfanté un fils. » (Mt 1, 24-25.) Ces paroles indiquent une autre proximité sponsale. La profondeur de cette intimité, l'intensité spirituelle de l'union et du contact entre personnes - de l'homme et de la femme proviennent en définitive de l'Esprit, qui vivifie (cf. Jn 6, 63). Joseph, obéissant à l'Esprit, retrouva précisément en lui la source de l'amour, de son amour sponsal d'homme, et cet amour fut plus grand que ce que « l'homme juste » pouvait attendre selon la mesure de son coeur humain.

20. Dans la liturgie, Marie est célébrée comme « unie à Joseph, homme juste, par les liens d'un amour sponsal et virginal (31) ». Il s'agit en effet de deux amours qui représentent ensemble le mystère de l'Église, vierge et épouse, dont le mariage de Marie et de Joseph est le symbole. « La virginité et le célibat pour le Royaume de Dieu ne diminuent en rien la dignité du mariage, au contraire ils la présupposent et la confirment. Le mariage et la virginité sont les deux manières d'exprimer et de vivre l'unique mystère de l'Alliance de Dieu avec son peuple (32) », qui est la communion d'amour entre Dieu et les hommes. Par le sacrifice total de soi, Joseph exprime son amour généreux pour la Mère de Dieu, lui faisant le « don sponsal de lui-même ». Bien que décidé à se retirer pour ne pas faire obstacle au plan de Dieu qui était en train de se réaliser en elle, sur l'ordre exprès de l'Ange, il la garde chez lui et respecte son appartenance exclusive à Dieu. D'autre part, c'est de son mariage avec Marie que sont venus à Joseph sa dignité unique et ses droits sur Jésus. « Certes, la dignité de la Mère de Dieu est si haute qu'il ne peut être créé rien au-dessus. Mais, comme Joseph a été uni à la bienheureuse Vierge par le lien conjugal, il n'est pas douteux qu'il ait approché plus que personne de cette dignité suréminente par laquelle la Mère de Dieu surpasse de si haut toutes les créatures. Le mariage est en effet la société et l'union la plus intime de toutes, qui entraîne de sa nature la communauté des biens entre l'un et l'autre conjoints. Aussi, en donnant Joseph pour époux à la Vierge, Dieu lui donna non seulement un compagnon de vie, un témoin de sa virginité, un gardien de son honneur, mais encore, en vertu même du pacte conjugal, un participant de sa sublime dignité (33) ».

21. Ce lien de charité a constitué la vie de la sainte Famille d'abord dans la pauvreté de Bethléem, puis dans l'exil en Égypte et enfin dans l'existence à Nazareth. L'Église entoure cette famille d'une profonde vénération, la proposant comme modèle à toutes les familles. La Famille de Nazareth, directement insérée dans le mystère de l'Incarnation, constitue elle-même un mystère particulier. Et en même temps - comme dans l'Incarnation -, dans ce mystère, la vraie paternité a sa place: la forme humaine de la famille du Fils de Dieu, véritable famille humaine, constituée par le mystère divin. En elle, Joseph est le père: sa paternité ne découle pas de la génération; et pourtant, elle n'est pas « apparente » ou seulement « substitutive », mais elle possède pleinement l'authenticité de la paternité humaine, du rôle du père dans la famille. Il y a 1à une conséquence de l'union hypostatique: l'humanité assumée dans l'unité de la Personne divine du Verbe-Fils, Jésus-Christ. Avec l'humanité est aussi « assumé » dans le Christ tout ce qui est humain et, en particulier, la famille, première dimension de son existence sur terre. Dans ce contexte est aussi « assumée » la paternité humaine de Joseph. En fonction de ce principe, ce que dit Marie au jeune Jésus dans le Temple trouve son sens profond: « Ton père et moi, nous te cherchons. » Ce n'est pas 1à une phrase de convenance: ce que dit la Mère de Jésus montre toute la réalité de l'Incarnation, qui appartient au mystère de la Famille de Nazareth. Certainement, Joseph, qui dès le début accepta en « obéissance de foi » sa paternité humaine vis-à-vis de Jésus, suivant en cela la lumière de l'Esprit-Saint qui se donne à l'homme par la foi, découvrait toujours plus largement le don ineffable de sa paternité.

IV. LE TRAVAIL EXPRESSION DE L'AMOUR

22. Une des expressions quotidiennes de cet amour dans la vie de la Famille de Nazareth est le travail. Le texte évangélique précise par quel type de travail Joseph essayait d'assurer la subsistance de sa Famille :  celui de charpentier. Ce simple mot recouvre toute l'étendue de la vie de Joseph. Pour Jésus, ce sont 1à les années de la vie cachée dont parle l'évangéliste après l'épisode du Temple: « Il redescendit alors avec eux et revint à Nazareth; et i1 leur était soumis. » (Lc 2, 51.) Cette « soumission », c'est-à-dire l'obéissance de Jésus dans la maison de Nazareth, est aussi comprise comme une participation au travail de Joseph. Celui qui était appelé le « fils du charpentier » avait appris le travail de son « père » putatif. Si, dans l'ordre du salut et de la sainteté, la Famille de Nazareth est un exemple et un modèle pour les familles humaines, on peut en dire autant, par analogie, du travail de Jésus aux côtés de Joseph le charpentier. A notre époque 1'Eglise a mis cela en relief, entre autres, par la mémoire liturgique de saint Joseph Artisan, fixée au 1er mai. Le travail humain, en particulier le travail manuel, prend un accent spécial dans 1'Evangile. Il est entré dans le mystère de l'Incarnation en même temps que l'humanité du Fils de Dieu, de même aussi qu'il a été racheté d'une manière particulière. Grâce à son atelier où il exerçait son métier et même temps que Jésus, Joseph rendit le travail humain proche du mystère de la Rédemption.

23. Dans la croissance humaine de Jésus « en sagesse, en taille et en grâce », une vertu eut une part importante: la conscience professionnelle, le travail étant « un bien de l'homme » qui « transforme la nature » et rend l'homme « en un certain sens plus homme (34) ». L'importance du travail dans la vie de l'homme demande qu'on en connaisse et qu'on en assimile les éléments afin « d'aider tous les hommes à s'avancer grâce à lui vers Dieu, Créateur et Rédempteur, à participer à son plan de salut sur l'homme et le monde, et à approfondir dans leur vie l'amitié avec le Christ, en participant par la foi de manière vivante à sa triple mission de prêtre, de prophète et de roi (35) ».

24. Il s'agit en définitive de la sanctification de la vie quotidienne, à laquelle chacun doit s'efforcer en fonction de son état et qui peut être proposée selon un modèle accessible à tous: « Saint Joseph est le modèle des humbles, que le christianisme élève vers de grands destins; il est la preuve que, pour être de bons et authentiques disciples du Christ, i1 n'y a pas besoin de «grandes choses»: il faut seulement des vertus communes, humaines, simples, mais vraies et authentiques (36) ».

V. LA PRIMAUTÉ DE LA VIE INTÉRIEURE

25. Le climat de silence qui accompagne tout ce qui se réfère à la figure de Joseph s'étend aussi à son travail de charpentier dans la maison de Nazareth. Toutefois, c'est un silence qui révèle d'une manière spéciale le profil intérieur de cette figure. Les Évangiles parlent exclusivement de ce que « fit » Joseph; mais ils permettent de découvrir dans ses « actions », enveloppées de silence, un climat de profonde contemplation. Joseph était quotidiennement en contact avec le mystère « caché depuis les siècles », qui « établit sa demeure » sous son toit. Cela explique par exemple pourquoi sainte Thérèse de Jésus, la grande réformatrice du Carmel contemplatif, se fit la promotrice du renouveau du culte rendu à saint Joseph dans la chrétienté occidentale.

26. Le sacrifice absolu que Joseph fit de toute son existence aux exigences de la venue du Messie dans sa maison trouve son juste motif « dans son insondable vie intérieure, d'où lui viennent des ordres et des réconforts tout à fait particuliers et d'où découlent pour lui la logique et la force, propres aux âmes simples et transparentes, des grandes décisions, comme celle de mettre aussitôt à la disposition des desseins divins sa liberté, sa vocation humaine légitime, son bonheur conjugal, acceptant la condition, la responsabilité et le poids de la famille et renonçant, au profit d'un amour virginal incomparable, à l'amour conjugal naturel qui la constitue et l'alimente (37) ». Cette soumission à Dieu, qui est promptitude de la volonté à se consacrer à tout ce qui concerne son service, n'est autre que l'exercice de la dévotion qui constitue une des expressions de la vertu de religion (38).

27. La communion de vie entre Joseph et Jésus nous amène à considérer encore le mystère de l'Incarnation précisément sous l'aspect de l'humanité du Christ, instrument efficace de la divinité pour la sanctification des hommes: « En vertu de la divinité, les actions humaines du Christ ont été salutaires pour nous, produisant en nous la grâce tant en raison du mérite que par une certaine efficacité (39) ». Parmi ces actions, les évangélistes privilégient celles qui concernent le mystère pascal, mais ils n'omettent pas de souligner l'importance du contact physique avec Jésus à propos des guérisons (cf. par exemple Mc 1,41) et l'influence qu'il exerce sur Jean-Baptiste lorsqu'ils étaient l'un et l'autre dans le sein de leur mère (cf. Lc 1, 41-44). Le témoignage apostolique, on l'a vu, n'a pas omis de décrire la naissance de Jésus, la circoncision, la présentation au Temple, la fuite en Égypte et la vie cachée à Nazareth, et cela en raison du « mystère » de grâce contenu dans de tels « gestes », tous salvifiques, parce que participant de la même source d'amour: la divinité du Christ. Si cet amour, par son humanité, rayonnait sur tous les hommes, les premiers bénéficiaires en étaient bien évidemment ceux que la volonté divine avait placés dans son intimité la plus étroite: Marie, sa mère, et Joseph, son père putatif (40). Puisque l'amour « paternel » de Joseph ne pouvait pas ne pas influer sur l'amour « filial » de Jésus et que, réciproquement, l'amour« filial» de Jésus ne pouvait pas ne pas influer sur l'amour « paternel » de Joseph, comment arriver à reconnaître en profondeur cette relation tout à fait singulière? Les âmes les plus sensibles aux impulsions de l'amour divin voient à juste titre en Joseph un exemple lumineux de vie intérieure. En outre, l'apparente tension entre la vie active et la vie contemplative est dépassée en lui de manière idéale, comme cela peut se faire en celui qui possède la perfection de la charité. Selon la distinction bien connue entre l'amour de la vérité (charitas veritatis) et l'exigence de l'amour (necessitas charitatis) (41), nous pouvons dire que Joseph a expérimenté aussi bien l'amour de la vérité, c'est-à-dire le pur amour de contemplation de la Vérité divine qui rayonnait de l'humanité du Christ, que l'exigence de l'amour, c'est-à-dire l'amour, pur lui aussi, du service, requis par la protection et le développement de cette même humanité.

VI. PATRON DE L'ÉGLISE DE NOTRE TEMPS

28. En des temps difficiles pour l'Église, Pie IX, voulant la confier à la protection spéciale du saint patriarche Joseph, le déclara « Patron de l'Église catholique (42) ». Le Pape savait que son geste n'était pas hors de propos car, en raison de la très haute dignité accordée par Dieu à ce fidèle serviteur, « l'Église, après la Vierge Sainte son épouse, a toujours tenu en grand honneur le bienheureux Joseph, elle l'a comblé de louanges et a recouru de préférence à lui dans les difficultés (43) ». Quels sont les motifs d'une telle confiance? Léon XIII les énumère ainsi: « Les raisons et les motifs speciaux pour lesquels saint Joseph est nommément le patron de l'Église et qui font que 1'Église espère beaucoup, en retour, de sa protection et de son patronage sont que Joseph fut l'époux de Marie et qu'il fut réputé le père de Jésus-Christ. [...] Joseph était le gardien, l'administrateur et le défenseur légitime et naturel de la maison divine dont il était le chef. [...] Il est donc naturel et très digne du bienheureux Joseph que, de même qu'il subvenait autrefois à tous les besoins de la famille de Nazareth et l'entourait saintement de sa protection, il couvre maintenant de son céleste patronage et défende 1'Église de Jésus Christ (44) ».

29. Ce patronage doit être invoqué, et il est toujours nécessaire à l'Église, non seulement pour la défendre contre les dangers sans cesse renaissants mais aussi et surtout pour la soutenir dans ses efforts redoublés d'évangélisation du monde et de nouvelle évangélisation des pays et des nations « où - comme je l'ai écrit dans l'exhortation apostolique Christifideles laici - la religion et la vie chrétienne étaient autrefois on ne peut plus florissantes » et qui « sont maintenant mis à dure épreuve (45) ». Pour apporter la première annonce du Christ ou pour la présenter à nouveau là où elle a été délaissée ou oubliée, l'Église a besoin d'une particulière « force d'en haut » (cf. Lc 24, 49; Ac 1, 8), don de l'Esprit du Seigneur, assurément, mais non sans lien avec l'intercession et l'exemple de ses saints.

30. En plus de la protection efficace de Joseph, l'Église a confiance en son exemple insigne, exemple qui ne concerne pas tel état de vie particulier mais est proposé à toute la communauté chrétienne, quelles que soient en elle la condition et les tâches de chaque fidèle. Comme le dit la Constitution du Concile Vatican II sur la Révélation divine, l'attitude fondamentale de toute l'Église doit être celle de « l'écoute religieuse de la Parole de Dieu (46) », c'est-à-dire de la disponibilité absolue à servir fidèlement la volonté salvifique de Dieu révélée en Jésus. Dés le début de la Rédemption humaine, nous trouvons le modèle de l'obéissance incarné, après Marie, précisément en Joseph, celui qui se distingue par l'exécution fidèle des commandements de Dieu. Paul VI invitait à invoquer son patronage « comme l'Église, ces derniers temps, a l'habitude de le faire, pour elle-même d'abord, pour une réflexion théologique spontanée sur l'alliance de l'action divine avec l'action humaine dans la grande économie de la Rédemption, dans laquelle la première, l'action divine, se suffit totalement à elle-même tandis que la seconde, l'action humaine, la nôtre, tout en étant dans l'incapacité (cf. Jn 15, 5), n'est jamais dispensée d'une collaboration humble mais conditionnelle et anoblissante. En outre, l'Église l'invoque comme protecteur en raison d'un désir profond et très actuel de raviver son existence séculaire avec des vertus évangéliques véritables, telles qu'elles ont resplendi en saint Joseph (47) ».

31. L'Église transforme ces exigences en prière. Rappelant que Dieu, à l'aube des temps nouveaux, a confié à saint Joseph la garde des mystères du salut, elle lui demande de lui accorder de collaborer fidèlement à l'oeuvre du salut, de lui donner un coeur sans partage, à l'exemple de saint Joseph qui s'est consacré tout entier à servir le Verbe incarné, de nous faire vivre dans la justice et la sainteté, soutenus par l'exemple et la prière de saint Joseph (48). Déjà, il y a cent ans, le pape Léon XIII exhortait le monde catholique à prier pour obtenir la protection de saint Joseph, patron de toute 1'Eglise. L'encyclique Quamquam pluries se référait à 1' « amour paternel » dont saint Joseph « entourait l'enfant Jésus », et à ce « très sage gardien de la divine Famille », elle recommandait « l'héritage que Jésus a acquis de son sang ». Depuis lors, l'Église, comme je l'ai rappelé au début, implore la protection de Joseph « par l'affection qui 1'a uni à la Vierge immaculée, Mère de Dieu » et elle lui confie tous ses soucis, en raison notamment des menaces qui pèsent sur la famille humaine. Aujourd'hui encore, nous avons de nombreux motifs pour prier de la même manière: « Préserve-nous, Ô Père très aimant, de toute souillure d'erreur et de corruption...; sois-nous propice et assiste-nous du haut du ciel, dans le combat que nous livrons à la puissance des ténèbres...; et de même que tu as arraché autrefois l'Enfant Jésus au péril de la mort, défends aujourd'hui la sainte Église de Dieu des embûches de l'ennemi et de toute adversité (49) ». Aujourd'hui encore, nous avons des motifs permanents de recommander chaque personne à saint Joseph.

32. Je souhaite vivement que la présente évocation de la figure de Joseph renouvelle en nous aussi les accents de prière que mon prédécesseur, il y a un siècle, recommanda d'élever vers lui. Il est certain, en effet, que cette prière et la figure même de Joseph ont acquis un renouveau d'actualité pour 1'Eglise de notre temps, en rapport avec le nouveau millénaire chrétien. Le Concile Vatican II nous a encore une fois tous sensibilisés aux « merveilles de Dieu », à « l'économie du salut » dont Joseph fut particulièrement le ministre. En nous recommandant donc à la protection de celui à qui Dieu même « confia la garde de ses trésors les plus précieux et les plus grands (50) », nous apprenons de lui, en même temps, à servir « l'économie du salut ». Que saint Joseph devienne pour tous un maître singulier dans le service de la mission salvifique du Christ qui nous incombe à tous et à chacun dans l'Église: aux époux, aux parents, à ceux qui vivent du travail de leurs mains ou de tout autre travail, aux personnes appelées à vie contemplative comme à celles qui sont appelées à l'apostolat. L'homme juste, qui portait en lui tout le patrimoine de l'Ancienne Alliance, a été aussi introduit dans le « commencement » de l'Alliance nouvelle et éternelle en Jésus Christ. Qu'il nous indique les chemins de cette Alliance salvifique au seuil du prochain millénaire où doit se poursuivre et se développer la « plénitude du temps » propre au mystère ineffable l'Incarnation du Verbe! Que saint Joseph obtienne à l'Église et au monde, comme à chacun de nous, la bénédiction du Père et du Fils et du Saint- Esprit!

Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 15 août 1989, solennité de l'Assomption de la Vierge Marie, en la onzième année de mon pontificat.

IOANNES PAULUS PP. II

NOTES

(*) IOANNES PAULUS PP. II, Adhortatio apostolica ad sacros Antistites, Presbyteros et Diaconos, Religiosos ac Religiosas, Christifideles omnes: de persona sancti Ioseph et opera in Christi Iesu Ecclesiaeque vita: AAS 82 (1990), p. 5-34; texte officiel français reproduit dans DocCath 86 (1989), p. 984-993.

(1) Cf. S. IRÉNÉE, Adversus haereses, IV, 23, 1: S. Ch. 100/2, pp. 692-694.

(2) LÉON XIII, Encycl. Quamquam pluries (15 août 1889): Leonis XIII P. M. Acta, IX (1890), Yp. 175-182.

(3) SACRÉE CONGRÉGATION DES RITES, Décret Quemadmodum Deus (8 décembre 1870): Pit IX P. M. Acta, le" partie, vol. V, p. 282; PIE IX, Lettre apost. Inclytum Pαtriarcham (7 juillet 1871),1.c., pp. 331-335.

(4) Cf. S. JEAN. CHRYSOSTOME, Homélie sur S. Matth. V, 3: PG 57, 57-58; se fondant entre autres sur la similitude de nom, des Docteurs de l'Eglise et des Souverains Pontifes ont vu en Joseph d'Egypte le prototype de Joseph de Nazareth car i1 a en quelque sorte esquissé le ministère et la grandeur de gardien des trésors les plus précieux de Dieu le Père que sont le Verbe incarné et sa très sainte Mère; cf. par ex.. S. BERNARD, Super « Missus est », Hom. II, 16: S. Bernardi Opera, Ed. Cist., IV, 33-34; LÉON XIII, Encycl. Quamquam pluries (15 aoűt 1889): 1. c., p. 179.

(5) Const. dogm. sur 1'Eglise Lumen gentium, n. 58.

(6) Cf. ibid., n. 63.

(7) Const. dogm. sur la Révélation divine Dei Verbum, n. 5.

(8) Ibid., n. 2.

(9) Cf. CONCILE VATICAN II, Const. dogm. sur 1'Eglise Lumen gentium, n. 63.

(10) CONCILE VATICAN II, Const, dogm. sur la Révélation divine Dei Verbum, n. 2.

(11} S. CONGRÉG. DES RITES, Décret Novis hisce temporibus (13 novembre 1962): AAS 54 (1962), p. 873.

(12) S. AUGUSTIN, Sermo 51, 10, 16: PL 38, 342.

(13) S. AUGUSTIN, De nuptiis et concupiscentia, I, 11, 12: PL 44, 421; cf. De consensu evangelistarum, II, 1, 2: PL 34, 1071; Contra Faustum, III, 2: PL 42, 214.

(14) S. AUGUSTIN, De nuptiis et concupiscentia, 1,11,13: PL 44, 421; cf. Contra Iulianum, V, 12,46: PL 44, 810.

(15) Cf. S. AUGUSTIN, Contra Faustum, XXIII, 8: PL 42, 470-471; De consensu evangelistarum, II, 1, 3: PL 34, 1072; Sermo 51, 13, 21: PL 38, 344-345; S. THOMAS, Somme théol. III, q. 29, a. 2 in conclus.

(16) Cf. Allocutions des 9 et 16 janvier, et 20 février 1980: Insegnamenti, III/1 (1980), pp. 8892; 148-152; 428-431.

(17) PAUL VI, Allocution aux « Equipes Notre-Dame » (4 mai 1970), n. 7: AAS 62 (1970), p. 431. Une présentation analogue de la Famille de Nazareth comme modèle parfait de la communauté familiale se trouve, par ex., dans LÉON XIII, Lettre apost. Neminem fugit (14 juin 1892): Leonis XIII P. M. Acta, XII (1892), pp. 149-150; BENOÎT XV, Motu proprio Bonum sane (25 juillet 1920): AAS 12 (1920), pp. 313-317.

(18) Exhort. apost. Familiaris consortio (22 novembre 1981), n. 17: AAS 74 (1982), p. 100.

(19) Ibid., n. 49: 1.c., p. 140; cf. CONCILE VATICAN II, Const. dogm. sur 1'Eglise Lumen gentilim, n. 11; Décret sur l'Apostolat des laïcs Apostolicam actuositatem, n. 11.

(20) Exhort. apost. Familiaris consortio (22 novembre 1981), n. 85: 1.c., pp. 189-190 (texte français: n. 86).

(21) Cf. S. JEAN CHRYSOSTOME, Homélie sur S. Matth. V, 3: PG 57, 57-58.

(22) PAUL VI, Allocution du 19 mars 1966: Insegnamenti, IV (1966), p. 110.

(23) Cf. Missel romain, Collecte de la solennité de saint Joseph, époux de la Vierge Marie.

(24) Cf. ibid., Préface de la solennité de saint Joseph, époux de la Vierge Marie.

(25) Encycl. Quamquam pluries (15 aoűt 1889): 1.c., p. 178.

(26) PIE XII, Radiomessage aux étudiants des écoles catholiques des Etats-Unis d'Amérique (19 février 1958): AAS 50 (1958), p. 174.

(27)} ORIGÈNE, Homélie XIII sur S. Luc, 7: S. Ch. 87, pp. 214-215.

(28) ORIGÈNE, Homélie XI sur S. Luc, 6: S. Ch. 87, pp. 195. 197.

(29) Cf. Missel romain, Prière eucharistique n. 1.

(30) S. CONGRÉGATION DES RITES, Décret Quemadmodum Deus (8 décembre 1870): 1. c., p. 282.

(31) Collectio Missarum de Beata Maria Virgine, I, « Sancta Maria de Nazareth », Préface.

(32) Exhort. apost. Familiaris consortio (22 novembre 1981), n. 16: 1. c., p. 98.

(33). LÉON XIII, Encycl. Quamquam pluries (15 août 1889): 1. c., p. 177-178.

(34) Cf. Encycl. Laborem exercens (14 septembre 1981), n. 9: AAS 73 (1981), p. 599-600.

(35) Ibid., n. 24: 1. c., p. 638. En la période récente, les Souverains Pontifes ont constamment présenté saint Joseph comme le « modèle » des ouvriers et des travailleurs; cf. par ex. LÉON XIII, Encycl. Quamquam pluries (15 aoűt 1889): 1. c., p. 180; BENOÎT XV, Motu proprio Bonum sane (25 juillet 1920): 1. c., p. 314-316; PIE XII, Allocution du 11 mars 1945, n. 4: AAS 37 (1945), p. 72; Allocution du ler mai 1955: AAS 47 (1955), p. 406; Jean XXIII, Radiomessage du ler mai 1960: AAS 52 (1960), p. 398.

(36)' PAUL VI, Allocution du 19 mars 1969: Insegnamenti, VII (1969), p. 1268.

(37) Ibid.: 1. c., p. 1267.

(38) Cf. S. THOMAS, Somme theol., 11-T' , q. 82, a. 3, ad 2. (39) Ibid., III, q. 8, a. 1, ad 1.

(40) PIE XII, Encycl. Haurietis aquas (15 mai 1956), III: AAS 48 (1956), p. 329-330.

(41) Cf. S. THOMAS, Somme théol., II-II" , q. 182, a. 1, ad 3.

(42) Cf. S. CONGRÉGATION DES RITES, Décret Quemadmodum Deus (8 décembre ,1870):1. c., p. 283.

(43) Ibid., 1. c., p. 282-283.

(44) LÉON XIII, Encycl. Quamquam pluries (15 août 1889): 1. c., p. 177-179.

(45) Exhort. apost. post-synodale Christifideles laici (30 décembre 1988), n. 34: AAS 81 (1989), p. 456.

(46) Const. dogm. sur la Révélation divine Dei Verbum, n. 1.

(47) PAUL VI, Allocution du 19 mars 1969: Insegnamenti, VII (1969), p. 1269.

(48) Cf. Missel romain, Collecte et Prière sur les offrandes de la solennité de saint Joseph, époux de la Vierge Marie; Prière après la communion de la messe votive de saint Joseph.

(49) Cf. LÉON XIII, « Prière à saint Joseph » qui suit le texte de l'encyclique Quamquam pluries (15 août 1889): Leoпis XIII P. M. Acta, IX (1890), p. 183.

(50) S. CONGRÉGATION DES RITES, Décret Quemadmodum Deus (8 décembre 1870): 1. c., p. 282.

IOANNES PAULUS II

SOURCE : http://www.vatican.va/holy_father/john_paul_ii/apost_exhortations/documents/hf_jp-ii_exh_15081989_redemptoris-custos_fr.html

José Luzán, San José y el niño Jesús, vers 1750


BENOÎT XVI

ANGELUS

Place Saint-PierreIV Dimanche de l'Avent, 18 décembre 2005

Chers frères et soeurs!

En ces derniers jours de l'Avent, la liturgie nous invite à contempler de façon particulière la Vierge Marie et saint Joseph, qui ont vécu avec une intensité unique le temps de l'attente et de la préparation de la naissance de Jésus. Je désire aujourd'hui porter mon regard sur la figure de saint Joseph. Dans la page évangélique de ce jour, saint Luc présente la Vierge Marie comme "fiancée à un homme du nom de Joseph, de la maison de David" (Lc 1, 27). C'est toutefois l'évangéliste Matthieu qui accorde le plus d'importance au père putatif de Jésus, en soulignant que, à travers lui, l'Enfant résultait légalement inscrit dans la descendance de David, et accomplissait ainsi les Ecritures, dans lesquelles le Messie était prophétisé comme "fils de David". Mais le rôle de Joseph ne peut certainement pas se réduire à cet aspect juridique. Il est le modèle de l'homme "juste" (Mt 1, 19), qui, en parfaite harmonie avec son épouse, accueille le Fils de Dieu fait homme et veille sur sa croissance humaine. C'est pourquoi, au cours des jours qui précèdent Noël, il est plus que jamais opportun d'établir une sorte de dialogue spirituel avec saint Joseph, afin qu'il nous aide à vivre en plénitude ce grand mystère de la foi.

Le bien-aimé Pape Jean-Paul II, qui avait une profonde dévotion pour saint Joseph nous a laissé une méditation admirable qui lui est consacrée dans l'Exhortation apostolique Redemptoris Custos, "Le Gardien du Rédempteur". Parmi les nombreux aspects qu'il met en lumière, un accent particulier est placé sur le silence de saint Joseph. Son silence est un silence empreint de contemplation du mystère de Dieu, dans une attitude de disponibilité totale aux volontés divines. En d'autres termes, le silence de saint Joseph ne manifeste pas un vide intérieur, mais au contraire la plénitude de foi qu'il porte dans son coeur, et qui guide chacune de ses pensées et chacune de ses actions. Un silence grâce auquel Joseph, à l'unisson avec Marie, conserve la Parole de Dieu, connue à travers les Ecritures Saintes, en la confrontant en permanence avec les événements de la vie de Jésus; un silence tissé de prière constante, prière de bénédiction du Seigneur, d'adoration de sa sainte volonté et de confiance sans réserve à sa providence. Il n'est pas exagéré de penser que c'est précisément de son "père" Joseph que Jésus a appris - sur le plan humain - la solidité intérieure qui est le présupposé de la justice authentique, la "justice supérieure" qu'Il enseignera un jour à ses disciples (cf. Mt 5, 20).

Laissons-nous "contaminer" par le silence de saint Joseph! Nous en avons tant besoin, dans un monde souvent trop bruyant, qui ne favorise pas le recueillement et l'écoute de la voix de Dieu. En ce temps de préparation à Noël, cultivons le recueillement intérieur, pour accueillir et conserver Jésus dans notre vie.

Après l'Angelus:

En ce dernier dimanche de l'Avent, puissiez-vous, chers pèlerins de langue française, ouvrir votre coeur au Christ qui vient habiter dans notre monde, à l'exemple de Marie, la Servante du Seigneur, pour faire comme elle la volonté de Dieu, qui nous rend libres. Avec mon salut cordial et affectueux.

Merci à tous pour votre visite appréciée. Bon dimanche.

© Copyright 2005 - Libreria Editrice Vaticana

SOURCE : http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/angelus/2005/documents/hf_ben-xvi_ang_20051218_fr.html

Albrecht Dürer, Saint Joseph et saint Joachim1504, 96 × 54, Munich, Alte Pinakothek


CÉLÉBRATION EUCHARISTIQUE POUR LES TRAVAILLEURS 

EN LA SOLENNITÉ DE SAINT JOSEPH


HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI

Basilique Vaticane

III Dimanche de Carême, 19 mars 2006


Chers frères et soeurs,

Nous avons écouté ensemble une page célèbre et belle du Livre de l'Exode, celle dans laquelle l'auteur sacré raconte la remise à Israël du Décalogue de la part de Dieu. Un détail nous frappe immédiatement: l'énonciation des dix commandements est introduite par une référence significative à la libération du peuple d'Israël. Le texte dit: "Je suis Yahvé, ton Dieu, qui t'ai fait sortir du pays d'Egypte, de la maison de servitude" (Ex 20, 2). Le Décalogue se veut donc une confirmation de la liberté conquise. En effet, les commandements, si on les regarde en profondeur, sont le moyen que le Seigneur nous donne pour défendre notre liberté aussi bien des conditionnements internes des passions que des abus externes de personnes malintentionnées. Les "non" des commandements sont autant de "oui" à la croissance d'une liberté authentique. Il existe une deuxième dimension du Décalogue qu'il faut également souligner: à travers la loi donnée par la main de Moïse, le Seigneur révèle qu'il souhaite passer avec Israël un pacte d'alliance. Plus qu'un ordre, la loi est par conséquent un don. Plus que commander ce que l'homme doit faire, elle veut manifester à tous le choix de Dieu: il est du côté du peuple élu; il l'a libéré de l'esclavage et il l'entoure de sa bonté miséricordieuse. Le Décalogue est le témoignage d'un amour préférentiel.

La Liturgie d'aujourd'hui nous offre un deuxième message: la Loi mosaïque a trouvé son plein accomplissement en Jésus, qui a révélé la sagesse et l'amour de Dieu à travers le mystère de la Croix, "scandale pour les Juifs, folie pour les païens - comme nous l'a dit saint Paul dans la seconde lecture -, mais pour ceux qui sont appelés, Juifs et Grecs... puissance de Dieu et sagesse de Dieu" (1 Co 1, 23, 24). C'est précisément à ce mystère que fait référence la page évangélique qui vient d'être proclamée: Jésus chasse du temple les marchands et les changeurs. L'évangéliste fournit la clé de lecture de cet épisode significatif à travers le verset d'un Psaume: "Car le zèle de ta maison me dévore" (cf. Ps 69, 10). Jésus est bien "dévoré" par ce "zèle" pour la "maison de Dieu", utilisée dans des buts différents de ceux auxquels elle devrait être destinée. Face à la demande des responsables religieux, qui prétendent un signe de son autorité, à la stupéfaction des personnes présentes, il affirme: "Détruisez ce sanctuaire et en trois jours je le relèverai" (Jn 2, 19). Une parole mystérieuse, incompréhensible à ce moment-là, mais que Jean reformule pour ses lecteurs chrétiens, en observant que: "Lui parlait du sanctuaire de son corps" (Jn 2, 21). Ce "sanctuaire", ses adversaires allaient le détruire, mais après trois jours, il l'aurait reconstruit à travers la résurrection. La douloureuse et "scandaleuse" mort du Christ allait être couronnée par le triomphe de sa glorieuse résurrection. Alors qu'en ce temps de Carême, nous nous préparons à revivre dans le triduum pascal cet événement central de notre salut, notre regard est déjà tourné vers le Crucifié, en entrevoyant en Lui le rayonnement du Ressuscité.

Chers frères et soeurs, la Célébration eucharistique d'aujourd'hui, qui unit à la méditation des textes liturgiques du troisième dimanche de Carême, le souvenir de saint Joseph, nous offre l'opportunité de considérer, à la lumière du mystère pascal, un autre aspect important de l'existence humaine. Je veux parler de la réalité du travail, placée aujourd'hui au centre de changements rapides et complexes. La Bible, en de nombreuses pages, montre que le travail appartient à la condition originelle de l'homme. Lorsque le Créateur façonna l'homme à son image et ressemblance, il l'invita à travailler la terre (cf. Gn 2, 5.6). Ce fut à cause du péché de nos premiers ancêtres que le travail devint effort et peine (cf. Gn 3, 6-8), mais dans le projet divin, il conserve intacte toute sa valeur. Le Fils de Dieu lui-même, en se faisant en toute chose semblable à nous, se consacra pendant de nombreuses années à des activités manuelles, au point d'être connu comme le "fils du charpentier" (cf. Mt 13, 55). L'Eglise a toujours fait preuve, en particulier au cours du dernier siècle, d'attention et de sollicitude pour cette dimension de la société, ainsi qu'en témoignent les nombreuses interventions sociales du Magistère et l'action de multiples associations d'inspiration chrétienne dont certaines sont venues ici aujourd'hui représenter le monde des travailleurs dans son ensemble. Je suis heureux de vous accueillir, chers amis, et je présente à chacun de vous mon salut cordial. J'adresse une pensée particulière à Mgr Arrigo Miglio, Evêque d'Ivrea et Président de la Commission épiscopale italienne pour les Questions sociales et le Travail, la Justice et la Paix, qui s'est fait l'interprète des sentiments communs et m'a adressé de courtoises paroles de voeux pour ma fête. Je lui en suis vivement reconnaissant.

Le travail revêt une importance primordiale pour la réalisation de l'homme et pour le développement de la société, et c'est pourquoi il faut qu'il soit toujours organisé et accompli dans le plein respect de la dignité humaine et au service du bien commun. Dans le même temps, il est indispensable que l'homme ne se laisse pas asservir par le travail, qu'il ne l'idolâtre pas, en prétendant trouver en celui-ci le sens ultime et définitif de la vie. A ce propos, l'invitation contenue dans la première Lecture est tout à fait riche de sens: "Tu te souviendras du jour du sabbat pour le sanctifier. Pendant six jours tu travailleras et tu feras tout ton ouvrage; mais le septième jour est un sabbat pour Yahvé ton Dieu" (Ex 20, 8-9). Le sabbat est le jour sanctifié, c'est-à-dire consacré à Dieu, pendant lequel l'homme comprend mieux le sens de son existence comme de son activité professionnelle. L'on peut par conséquent affirmer que l'enseignement biblique sur le travail trouve son couronnement dans le commandement du repos. Le Compendium de la doctrine sociale de l'Eglise souligne justement à ce propos que: "A l'homme, lié à la nécessité du travail, le repos ouvre la perspective d'une liberté plus complète, celle du sabbat éternel (cf. He 4, 9-10). Le repos permet aux hommes de rappeler et de revivre les oeuvres de Dieu, depuis la Création jusqu'à la Rédemption, de se reconnaître eux-mêmes comme Son oeuvre (cf. Ep 2, 10), de lui rendre grâce de leur vie et de leur subsistance, car il en est l'auteur" (n. 258).

L'activité professionnelle doit servir au vrai bien de l'humanité, en permettant "à l'homme, considéré comme individu ou comme membre de la société, de s'épanouir selon la plénitude de sa vocation" (Gaudium et spes, n. 35). Pour que cela advienne, la qualification technique et professionnelle, même si elle est nécessaire, ne suffit pas; la création d'un ordre social juste et attentif au bien de tous n'est pas non plus suffisante. Il faut vivre une spiritualité qui aide les chrétiens à se sanctifier à travers le travail, en imitant saint Joseph qui, chaque jour, a dû pourvoir aux besoins de la Sainte Famille de ses propres mains et que, pour cette raison, l'Eglise indique comme Patron des travailleurs. Son témoignage montre que l'homme est le sujet et l'acteur du travail. Je voudrais lui confier les jeunes qui parviennent avec difficulté à s'insérer dans le monde du travail, les chômeurs et ceux qui souffrent des problèmes dus à l'importante crise de l'emploi. Qu'avec Marie, son Epouse, saint Joseph veille sur tous les travailleurs et obtienne pour les familles et pour toute l'humanité, sérénité et paix. Qu'en tournant le regard vers ce grand saint, les chrétiens apprennent à témoigner dans tous les milieux professionnels de l'amour du Christ, source de solidarité véritable et de paix stable. Amen!

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SOURCE : http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/homilies/2006/documents/hf_ben-xvi_hom_20060319_lavoratori_fr.html

Bartolomé Esteban Murillo (1617–1682), La Sagrada Familia del pajarito

(La Sainte Famille avec l'oiseau), 1645–1650, 144 x 188, Madrid, Prado

Saint Joseph, la vocation de garder

Chers frères et sœurs !

Je remercie le Seigneur de pouvoir célébrer cette Messe de l’inauguration de mon ministère pétrinien en la solennité de saint Joseph, époux de la Vierge Marie et Patron de l’Église universelle : c’est une coïncidence très riche de signification, et c’est aussi la fête de mon vénéré Prédécesseur : nous lui sommes proches par la prière, pleins d’affection et de reconnaissance.

Je salue avec affection les Frères Cardinaux et Évêques, les prêtres, les diacres, les religieux et les religieuses et tous les fidèles laïcs. Je remercie de leur présence les représentants des autres Églises et Communautés ecclésiales, de même que les représentants de la communauté juive et d’autres communautés religieuses. J’adresse mon cordial salut aux Chefs d’État et de Gouvernement, aux Délégations officielles de nombreux pays du monde et au Corps diplomatique.

Nous avons entendu dans l’Évangile que « Joseph fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse » (Mt 1,24). Dans ces paroles est déjà contenue la mission que Dieu confie à Joseph, celle d’être custos, gardien. Gardien de qui ? De Marie et de Jésus ; mais c’est une garde qui s’étend ensuite à l’Église, comme l’a souligné le bienheureux Jean-Paul II : « Saint Joseph a pris un soin affectueux de Marie et s’est consacré avec joie à l’éducation de Jésus Christ, de même il est le gardien et le protecteur de son Corps mystique, l’Église, dont la Vierge sainte est la figure et le modèle » (Exhort. apost. Redemptoris Custos, n. 1).

Comment Joseph exerce-t-il cette garde ? Avec discrétion, avec humilité, dans le silence, mais par une présence constante et une fidélité totale, même quand il ne comprend pas. Depuis son mariage avec Marie jusqu’à l’épisode de Jésus, enfant de douze ans, dans le Temple de Jérusalem, il accompagne chaque moment avec prévenance et avec amour. Il est auprès de Marie son épouse dans les moments sereins et dans les moments difficiles de la vie, dans le voyage à Bethléem pour le recensement et dans les heures d’anxiété et de joie de l’enfantement ; au moment dramatique de la fuite en Égypte et dans la recherche inquiète du fils au Temple ; et ensuite dans le quotidien de la maison de Nazareth, dans l’atelier où il a enseigné le métier à Jésus.

Comment Joseph vit-il sa vocation de gardien de Marie, de Jésus, de l’Église ? Dans la constante attention à Dieu, ouvert à ses signes, disponible à son projet, non pas tant au sien propre ; et c’est cela que Dieu demande à David, comme nous l’avons entendu dans la première Lecture : Dieu ne désire pas une maison construite par l’homme, mais il désire la fidélité à sa Parole, à son dessein ; c’est Dieu lui-même qui construit la maison, mais de pierres vivantes marquées de son Esprit. Et Joseph est « gardien », parce qu’il sait écouter Dieu, il se laisse guider par sa volonté, et justement pour cela il est encore plus sensible aux personnes qui lui sont confiées, il sait lire avec réalisme les événements, il est attentif à ce qui l’entoure, et il sait prendre les décisions les plus sages. En lui, chers amis, nous voyons comment on répond à la vocation de Dieu, avec disponibilité, avec promptitude, mais nous voyons aussi quel est le centre de la vocation chrétienne : le Christ ! Nous gardons le Christ dans notre vie, pour garder les autres, pour garder la création !

La vocation de garder, cependant, ne nous concerne pas seulement nous les chrétiens, elle a une dimension qui précède et qui est simplement humaine, elle concerne tout le monde. C’est le fait de garder la création tout entière, la beauté de la création, comme il nous est dit dans le Livre de la Genèse et comme nous l’a montré saint François d’Assise : c’est le fait d’avoir du respect pour toute créature de Dieu et pour l’environnement dans lequel nous vivons. C’est le fait de garder les gens, d’avoir soin de tous, de chaque personne, avec amour, spécialement des enfants, des personnes âgées, de celles qui sont plus fragiles et qui souvent sont dans la périphérie de notre cœur. C’est d’avoir soin l’un de l’autre dans la famille : les époux se gardent réciproquement, puis comme parents ils prennent soin des enfants et avec le temps aussi les enfants deviennent gardiens des parents. C’est le fait de vivre avec sincérité les amitiés, qui sont une garde réciproque dans la confiance, dans le respect et dans le bien. Au fond, tout est confié à la garde de l’homme, et c’est une responsabilité qui nous concerne tous. Soyez des gardiens des dons de Dieu !

Et quand l’homme manque à cette responsabilité, quand nous ne prenons pas soin de la création et des frères, alors la destruction trouve une place et le cœur s’endurcit. À chaque époque de l’histoire, malheureusement, il y a des « Hérode » qui trament des desseins de mort, détruisent et défigurent le visage de l’homme et de la femme.

Je voudrais demander, s’il vous plaît, à tous ceux qui occupent des rôles de responsabilité dans le domaine économique, politique ou social, à tous les hommes et à toutes les femmes de bonne volonté : nous sommes « gardiens » de la création, du dessein de Dieu inscrit dans la nature, gardiens de l’autre, de l’environnement ; ne permettons pas que des signes de destruction et de mort accompagnent la marche de notre monde ! Mais pour « garder » nous devons aussi avoir soin de nous-mêmes ! Rappelons-nous que la haine, l’envie, l’orgueil souillent la vie ! Garder veut dire alors veiller sur nos sentiments, sur notre cœur, parce que c’est de là que sortent les intentions bonnes et mauvaises : celles qui construisent et celles qui détruisent ! Nous ne devons pas avoir peur de la bonté, et même pas non plus de la tendresse !

Et ici j’ajoute alors une remarque supplémentaire : le fait de prendre soin, de garder, demande bonté, demande d’être vécu avec tendresse. Dans les Évangiles, saint Joseph apparaît comme un homme fort, courageux, travailleur, mais dans son âme émerge une grande tendresse, qui n’est pas la vertu du faible, mais au contraire, dénote une force d’âme et une capacité d’attention, de compassion, de vraie ouverture à l’autre, d’amour. Nous ne devons pas avoir peur de la bonté, de la tendresse !

Aujourd’hui, en même temps que la fête de saint Joseph, nous célébrons l’inauguration du ministère du nouvel Évêque de Rome, Successeur de Pierre, qui comporte aussi un pouvoir. Certes, Jésus-Christ a donné un pouvoir à Pierre, mais de quel pouvoir s’agit-il ? À la triple question de Jésus à Pierre sur l’amour, suit une triple invitation : sois le pasteur de mes agneaux, sois le pasteur de mes brebis. N’oublions jamais que le vrai pouvoir est le service et que le Pape aussi pour exercer le pouvoir doit entrer toujours plus dans ce service qui a son sommet lumineux sur la Croix ; il doit regarder vers le service humble, concret, riche de foi, de saint Joseph et comme lui, ouvrir les bras pour garder tout le Peuple de Dieu et accueillir avec affection et tendresse l’humanité tout entière, spécialement les plus pauvres, les plus faibles, les plus petits, ceux que Matthieu décrit dans le jugement final sur la charité : celui qui a faim, soif, est étranger, nu, malade, en prison (cf. Mt 25,31-46). Seul celui qui sert avec amour sait garder !

Dans la deuxième Lecture, saint Paul parle d’Abraham, qui « espérant contre toute espérance, a cru » (Rm 4,18). Espérant contre toute espérance ! Aujourd’hui encore devant tant de traits de ciel gris, nous avons besoin de voir la lumière de l’espérance et de donner nous-mêmes espérance. Garder la création, tout homme et toute femme, avec un regard de tendresse et d’amour, c’est ouvrir l’horizon de l’espérance, c’est ouvrir une trouée de lumière au milieu de tant de nuages, c’est porter la chaleur de l’espérance ! Et pour le croyant, pour nous chrétiens, comme Abraham, comme saint Joseph, l’espérance que nous portons à l’horizon de Dieu qui nous a été ouvert dans le Christ, est fondée sur le rocher qui est Dieu.

Garder Jésus et Marie, garder la création tout entière, garder chaque personne, spécialement la plus pauvre, nous garder nous-mêmes : voici un service que l’Évêque de Rome est appelé à accomplir, mais auquel nous sommes tous appelés pour faire resplendir l’étoile de l’espérance : gardons avec amour ce que Dieu nous a donné !

Je demande l’intercession de la Vierge Marie, de saint Joseph, des saints Pierre et Paul, de saint François, afin que l’Esprit Saint accompagne mon ministère et je vous dis à tous : priez pour moi ! Amen.

Pape François

19 mars 2013

SOURCE : http://saint-joseph.fr/2013/03/saint-joseph-la-vocation-de-garder/

Francisco de Herrera (I), San José y al Niño Jesús, que descansa sobre los brazos de su padre.

1648, 116 x 112, Museum of Lázaro Galdiano


BENOÎT XVI

ANGELUS

Place Saint-Pierre

III Dimanche de Carême, 19 mars 2006


Chers frères et soeurs!

Aujourd'hui, 19 mars, nous célébrons la solennité de saint Joseph, mais, étant donnée la coïncidence de cette fête avec le troisième dimanche de Carême, sa célébration liturgique est reportée à demain. Toutefois, le contexte marial de l'Angelus nous invite à nous arrêter aujourd'hui avec vénération sur la figure de l'époux de la Bienheureuse Vierge Marie et Patron de l'Eglise universelle. Je voudrais rappeler que le bien-aimé Pape Jean-Paul II également avait une grande dévotion pour saint Joseph, auquel il consacra l'Exhortation apostolique Redemptoris Custos - Gardien du Rédempteur, et il fit certainement l'expérience de son assistance à l'heure de sa mort.

La figure de ce grand Saint, tout en demeurant plutôt cachée, revêt dans l'histoire du salut une importance fondamentale. Tout d'abord, appartenant à la tribu de Juda, il relia Jésus à la descendance davidique, de sorte que, en réalisant les promesses sur le Messie, le Fils de la Vierge Marie peut se dire véritablement: "fils de David". L'Evangile de Matthieu souligne de façon particulière les prophéties messianiques qui trouvèrent leur accomplissement à travers le rôle de Joseph: la naissance de Jésus à Bethléem (2, 1-6); son passage en Egypte, où la sainte Famille s'était réfugiée (2, 13-15); le surnom de "Nazaréen" (2, 22-23). A l'instar de son épouse, Marie, il s'est montré en tout cela l'héritier authentique de la foi d'Abraham: foi dans le Dieu qui guide les événements de l'histoire selon son mystérieux dessein salvifique. Sa grandeur, comme celle de Marie, ressort encore davantage du fait que sa mission s'est accomplie dans l'humilité et dans la vie cachée de la maison de Nazareth. Du reste, Dieu lui-même, en la personne de son Fils incarné, a choisi cette voie et ce style - l'humilité et la vie cachée - dans son existence terrestre.

L'exemple de saint Joseph est pour nous tous une puissante invitation à accomplir avec fidélité, simplicité et modestie le devoir que la Providence nous a confié. Je pense avant tout aux pères et aux mères de famille, et je prie pour qu'ils sachent toujours apprécier la beauté d'une vie simple et consacrée au travail, en cultivant avec soin la relation conjugale et en accomplissant avec enthousiasme la grande et difficile mission éducative. Que saint Joseph obtienne pour les prêtres, qui exercent la paternité à l'égard des communautés ecclésiales, d'aimer l'Eglise avec affection et un dévouement total, et qu'il aide les personnes consacrées à observer de façon joyeuse et fidèle les conseils évangéliques de pauvreté, de chasteté et d'obéissance. Qu'il protège les travailleurs du monde entier afin qu'ils contribuent à travers leurs diverses professions au progrès de l'humanité tout entière, et qu'il aide chaque chrétien à réaliser avec confiance et amour la volonté de Dieu, coopérant ainsi à l'accomplissement de l'oeuvre de salut.

Au terme de l'Angelus

Nous célébrons cette année le V centenaire des Musées du Vatican, que mon bien-aimé prédécesseur Jean-Paul II a définis comme "l'une des plus importantes portes du Saint-Siège ouvertes sur le monde". Cette institution offre en effet une contribution importante à la mission de l'Eglise, en communiquant à des millions de personnes les vérités chrétiennes à travers le langage de l'art. Je forme les meilleurs voeux pour les manifestations culturelles prévues et j'assure de mon souvenir dans la prière tous ceux qui travaillent dans les Musées du Vatican et tous les visiteurs.

Chers pèlerins de langue française, je vous salue cordialement. Alors que nous fêtons saint Joseph, à qui Dieu a confié la garde des mystères du salut, puisse-t-il aider toute l'Eglise et chacun de vous à vivre en conformité avec l'enseignement et l'exemple de Jésus, pour y trouver la liberté et la joie véritables! Que Dieu bénisse votre chemin vers Pâques!

Je souhaite à tous un bon dimanche et un fructueux chemin de Carême. Meilleurs voeux, bonne semaine! Merci et encore bon dimanche. Merci.

© Copyright 2006 - Libreria Editrice Vaticana

SOURCE : http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/angelus/2006/documents/hf_ben-xvi_ang_20060319_fr.html

Décret de la Sacrée Congrégation des Rites

publié le 8 décembre 1870 dans les Basiliques Patriarcales de la Ville pendant la célébration des Messes

et par lequel Saint Joseph est déclaré Patron de l’Église Catholique.

De même que Dieu avait établi Joseph, fils du Patriarche Jacob, gouverneur de l’Egypte pour veiller sur les provisions de blé destinées au peuple, aussi, à l’approche de la plénitude des temps où il devait envoyer sur Terre son Fils unique comme sauveur du Monde, il se réserva un autre Joseph dont le premier avait été le type : il l’établit Seigneur et Prince sur sa maison et tous ses biens et le choisit comme gardien de ses principaux Trésors.

Et de fait, Joseph eut pour épouse l’Immaculée Vierge Marie de laquelle naquit de l’Esprit Saint Notre Seigneur Jésus-Christ qui voulut bien qu’on le prit pour le fils de Joseph et à qui il se soumit. Et celui qu’un aussi grand nombre de rois et de prophètes avait tant souhaité voir, Joseph, lui, non seulement le vit mais il vécut avec lui et lui prodigua par ses baisers et ses caresses les marques de l’amour paternel. Et c’est aussi avec le plus grand soin qu’il nourrit celui que le peuple fidèle prendrait comme pain descendu du Ciel pour en obtenir la vie éternelle. En raison de cette sublime dignité que Dieu confère à son très fidèle serviteur, l’Église, après la Vierge Mère de Dieu son épouse, entoura de tous temps le Bienheureux Joseph de l’honneur le plus grand et de ses plus hautes louanges et, au milieu des tourments, elle ne cessa d’implorer son assistance.

Mais en ces très tristes temps qui sont les nôtres c’est l’Église elle-même qui, de tous côtés, est poursuivie par ses ennemis. Et elle est accablée de malheurs si graves que les impies en arriveraient à penser que les portes de l’Enfer ont enfin prévalu contre elle. Voilà pourquoi les vénérables évêques, gardiens des saints mystères de l’univers catholique adressèrent au Souverain Pontife leurs prières et celles des fidèles dont ils ont la charge, demandant que l’on daignât établir Saint Joseph Patron de l’Eglise Universelle.

Puis, tandis qu’à l’occasion du Saint Synode Œcuménique du Vatican ces mêmes évêques avaient renouvelé avec plus d’instance leurs demandes et leurs vœux, Sa Sainteté Pie IX, affecté par le tout dernier et douloureux tour que prenaient les événements et afin de confier Sa Personne et tous les fidèles au patronage du très puissant Saint Patriarche Joseph, décida de satisfaire aux vœux des évêques gardiens de la Foi et le déclara solennellement Patron de l’Église Catholique. Il ordonna que sa fête, tombant le 19 mars, fût désormais célébrée sous le rite double de première classe, mais sans octave à raison du carême. De plus, il ordonna que cette déclaration deviendrait de droit public par le présent décret de la Congrégation des Saints Rites et cela au jour consacré à la Mère de Dieu, Vierge Immaculée et Épouse de très chaste Joseph. Nonobstant toutes choses contraires.

Le 8 décembre 1870.

SOURCE : https://www.icrsp.org/Calendriers/Mois-St-Joseph/Textes/St-Joseph-Congr-Rites-Patron.htm

Guido Reni (1575–1642), Saint Joseph et l’Enfant Jésus, 1635, 126 × 101, Hermitage Museum


Solennité de la Saint Joseph

Prières

Béni soyez-vous, ô très aimable cœur de Marie, pour toutes les affections que vous avez pour ce grand saint ! Béni soit à jamais votre noble cœur, ô saint Joseph, pour tout l'amour qu'il a porté et portera éternellement à Jésus et à Marie, pour tous les soins qu'il a eu pour pourvoir aux besoins du Fils et de la Mère et pour toutes les douleurs et angoisses qu'il a souffertes en vue de leurs souffrances et des mépris et mauvais traitements qu'il leur a vu porter de la part des hommes ingrats ! O grand saint, nous vous offrons nos cœurs ; unissez-les avec le vôtre et avec celui de Jésus et de Marie, les priant de faire en sorte que cette union soit inviolable et éternelle.

Saint Jean Eudes

Puis-je voir, ô divin Jésus, la fidélité admirable avec laquelle vous avez accompli toutes vos promesses, et avec laquelle vous ne manquez jamais d’être sur nos autels pour nous combler de grâces, sans me reprocher le peu de fidélité que j’ai pour vous servir ? Et puis-je voir cette vertu si éminente dans mon glorieux protecteur saint Joseph, sans rougir de l'infériorité où je suis devant tous mes devoirs ? Mais aujourd'hui, mon adorable Maître, je veux profiter de ces belles leçons et je commence à observer une fidélité si inviolable que non seulement je ne manquerai à aucune de mes obligations, mais encore avec une sainte opiniâtreté je me plierai aux plus petites pratiques que j'ai entreprises. Enfin je m’encourage à la fidélité en honorant saint Joseph et en adorant Jésus-Christ dans le Très Saint-Sacrement de l'autel.

P. Albert de Paris

Joseph même, qui toutefois est ange en la terre, choisi en la terre pour être le seul participant à ce grand conseil, le tuteur du Fils, l'époux de la Mère, le chef de la famille et de la maison du Père éternel en la terre et duquel, nous dit le Prophète, comme étant établi de Dieu en puissance et principauté, et son lieutenant sur la partie la plus noble de son Etat et de son Empire ; car le plus noble empire du Père éternel, c'est Jésus et Marie, et Joseph a puissance sur l'un et sur l'autre par le vouloir du Père. Et toutefois cet ange, ce prince, cet époux, ce tuteur du Fils et de la Mère de Dieu, n'est point appelé au secret de cette naissance intérieure de Jésus.

Cardinal Pierre de Bérulle

Glorieux saint Joseph, époux de Marie, accordez-nous votre protection paternelle, nous vous en supplions par le Cœur de Jésus-Christ. O vous, dont la puissance infinie s'étend à toutes nos nécessités et sait nous rendre possibles les choses les plus impossibles, ouvrez vos yeux de père sur les intérêts de vos enfants. Dans l'embarras et la peine qui nous pressent, nous recourons à vous avec confiance ; daignez prendre sous votre charitable conduite cette affaire importante et difficile, cause de nos inquiétudes. Faites que son heureuse issue tourne à la gloire de Dieu et au bien de ses dévoués serviteurs.

Saint François de Sales

Seigneur Jésus-Christ, dans l'éternité Dieu de Dieu et dans le temps, par votre ineffable humilité, homme né d'une vierge, qui avez voulu, en saint Joseph, donner à votre mère vierge un époux vierge, à cette humble femme un humble compagnon de vie, et qui l'avez merveilleusement élevé d'un état de petitesse à un état de grandeur, et d'un état d'humilité à un état de sublimité, par une augmentation de vertus et de prérogatives, donnez-nous, nous vous en prions, par son exemple, ses mérites et ses prières, la pureté de l'âme et du corps, la vraie vertu d'humilité, et, une fois fixés dans l'humilité, une augmentation de foi, d'espérance, de charité et de toutes les vertus, afin que par nos mérites vertueux nous puissions obtenir avec lui la récompense de la gloire éternelle. Vous qui étant Dieu vivez et régnez avec le Père et le Saint-Esprit dans tous les siècles des siècles. Amen.

Cardinal Pierre d’Ailly

Litanies

Seigneur, ayez pitié de nous Seigneur, ayez pitié de nous

O Christ, ayez pitié de nous O Christ, ayez pitié de nous

Seigneur, ayez pitié de nous Seigneur, ayez pitié de nous

Père du Ciel qui êtes Dieu, ayez pitié de nous

Fils, Rédempteur du monde qui êtes Dieu, ayez pitié de nous

Saint-Esprit qui êtes Dieu, ayez pitié de nous

Sainte Trinité qui êtes un seul Dieu, ayez pitié de nous

Sainte Marie, priez pour nous

Saint Joseph, priez pour nous

Illustre descendant de David, priez pour nous

Lumière des patriarches, priez pour nous

Epoux de la Mère de Dieu, priez pour nous

Chaste gardien de la Vierge, priez pour nous

Nourricier du Fils de Dieu, priez pour nous

Zélé défenseur de Jésus, priez pour nous

Chef de la sainte Famille, priez pour nous

Joseph très juste, priez pour nous

Joseph très chaste, priez pour nous

Joseph très prudent, priez pour nous

Joseph très courageux, priez pour nous

Joseph très obéissant, priez pour nous

Joseph très fidèle, priez pour nous

Miroir de patience, priez pour nous

Amant de la pauvreté, priez pour nous

Modèle des travailleurs, priez pour nous

Gloire de la vie de famille, priez pour nous

Gardien des vierges, priez pour nous

Soutien des familles, priez pour nous

Consolateur des malheureux, priez pour nous

Espérance des malades, priez pour nous

Patron des mourants, priez pour nous

Terreur des démons, priez pour nous

Protecteur de la sainte Eglise, priez pour nous

Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, pardonnez-nous, Seigneur

Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, exaucez-nous, Seigneur

Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, ayez pitié de nous, Seigneur

Jésus-Christ, écoutez-nous Jésus-Christ, écoutez-nous

Jésus-Christ, exaucez-nous Jésus-Christ, exaucez-nous

Il l’a établi maître de sa maison.

- Et prince sur tous ses biens.

O Dieu qui dans votre providence ineffable avez daigné choisir le bienheureux Joseph pour être l’époux de votre très sainte Mère, faites, nous vous en prions, que le vénérant ici-bas comme protecteur, nous méritions de l’avoir comme intercesseur dans le ciel. Vous qui étant Dieu, vivez et régnez avec le Père, dans l’unité du Saint-Esprit, pour les siècles des siècles. - Amen.

Méditation

Considérons quels sentiments de tendresse et de vénération Saint Joseph avait pour la bienheureuse Vierge Marie. A la bonté la plus accomplie elle joignait la plus profonde humilité, la plus aimable douceur, la plus complète pureté, la plus parfaite obéissance, le plus généreux amour de Dieu; élevée de la sorte par ses incomparables qualités au-dessus de tous les hommes et de tous les anges, Marie méritait l’affection de Saint Joseph, et Saint Joseph, pour qui la vertu avait tant de charmes, aimait Marie de tout son coeur. D’autant plus qu’il recevait incessamment les marques de l’affection dont sa sainte épouse était animée pour lui; nul doute, en effet, qu’elle n’aimât son chaste époux plus que n’importe quelle autre créature. Enfin, il voyait dans Marie la bien-aimée de Dieu, celle que le Seigneur avait choisie pour mère de son Fils unique. Combien donc le coeur si juste et si reconnaissant de Joseph devait aimer sa pure et admirable épouse !

Considérons ensuite l’amour que Joseph portait à Jésus. Dieu ne pouvait charger Joseph de tenir lieu de père à Jésus sans lui mettre au coeur l’amour dont il fallait qu’un père fût animé pour un tel Fils, un Fils si digne d’amour, un Fils qui était en même temps son Dieu. Aussi l’amour de Joseph, fort différent de celui que les pères ont d’ordinaire pour leurs enfants, ne fut pas seulement naturel, mais encore surnaturel, Jésus étant tout à la fois et le fils de Joseph et son Dieu. En effet, grâce à la révélation apportée du ciel par l’ange, Saint Joseph savait de science certaine que cet enfant, dont la vie s’écoulait près de lui, était le Verbe divin fait homme par amour pour les hommes, et en particulier pour lui, son père nourricier. Il se voyait choisi entre tous pour lui servir de gardien et de protecteur, en même temps qu’il l’entendait lui dire : mon père. Quel incendie d’amour ne devait pas allumer dans l’âme du saint patriarche la considération de ces merveilles! De quelles flammes d’amour il se sentait brûler lorsqu’il voyait son Dieu faire l’office d’un simple ouvrier, ouvrir et fermer l’atelier, aider à scier le bois, manier le rabot et la hache, ramasser les copeaux, balayer la maison, en un mot accomplir exactement tous ses ordres et n’agir jamais que par obéissance. Quels sentiments de tendresse inondaient son âme quand il portait l’Enfant Jésus dans ses bras et que tous deux se témoignaient leur amour par les plus douces caresses, quand il l’entendait proférer ces paroles de vie éternelle dont chacune était comme une flèche d’amour qui lui perçait le coeur, mais surtout quand il voyait donner l’exemple de toutes les plus sublimes vertus! Parmi les hommes, à force de vivre ensemble, on finit d’ordinaire par n’avoir plus l’un pour l’autre qu’un amour fort médiocre, parce que, au fur et à mesure que les relations durent, on découvre davantage les défauts l’un de l’autre. Saint Joseph, au contraire, ne cessait, en continuant de vivre avec Jésus, d’admirer davantage sa sainteté. Comprenons par là de quel amour il parvint à brûler pour lui, cette vie d’ineffable intimité n’ayant pas duré, selon le sentiment commun, moins de vingt-cinq ans.

Grand saint Joseph, je me réjouis que Dieu vous ait jugé digne d’occuper ce poste éminent où, constitué le père de Jésus, vous avez vu se soumettre à votre autorité celui dont le ciel et la terre exécutent les ordres. Puisqu’un Dieu voulut vous obéir, moi je veux me mettre à votre service. Oui, je veux désormais vous servir, vous honorer et vous aimer, comme mon Seigneur et Maître. Daignez m’accepter au nombre de vos clients ; ensuite commandez-moi tout ce que vous voulez. Quoi que vous m’ordonniez, ce sera, je le sais, pour mon plus grand bien et pour la gloire de Jésus, mon Rédempteur et le vôtre. Mon bien-aimé Saint Joseph, soyez mon intercesseur auprès de Jésus. Il vous a si fidèlement obéi sur la terre; certainement il ne rejettera jamais aucune de vos prières. Dites-lui donc qu’il me pardonne toutes les offenses dont je me suis rendu coupable contre lui. Dites-lui qu’il me détache des créatures et de moi-même et qu’il m’enflamme de son amour; puis qu’il fasse de moi tout ce qui lui plaît.

Saint Alphonse-Marie de Liguori

« Une année de méditations »

Extraits de l’homélie de S.S. le pape Jean-Paul II (24 mars 1985)

1. Tu es mon Père... et le rocher de mon salut (Psaume LXXXVIII 27). Avec ces paroles de la Liturgie d'aujourd'hui je désire, ensemble avec vous, chers Frères et Sœurs, adorer la Paternité de Dieu dans la grande et humble figure de l'époux de la Très Sainte Vierge, que nous commémorons en ce dimanche qui suit immédiatement sa fête (...)

J'ai conclu un pacte avec mon élu. Je me suis lié par serment à David, mon serviteur : J'affermirai ta race à perpétuité... (Psaume LXXXVIII 4-5) Le Psalmiste parle de David-roi, mais la liturgie indique Joseph de Nazareth, le charpentier. Dieu a conclu avec lui une alliance particulière, que l'Eglise compare avec celle de Dieu avec Abraham et David.

Le Dieu de l'Alliance dit à Abraham : Je te rendrai père d'une multitude de peuple (Genèse XVII 5). Et à Joseph de Nazareth Dieu dit : je t'ai fait père... le père de mon Fils ! Devant les hommes j'ai fait de toi le père de Celui qui fut conçu du Saint-Esprit - de toi, qui comme Abraham eut foi en espérant contre toute espérance (Romains IV18 ; cf. Genèse XV 6). Et en cette foi tu as accueilli sous ton toit Celui qui fut Espérance et Attente de tous les peuples : Jésus, fils de Marie. Par la solennité d'aujourd'hui l'Eglise professe et loue cette particulière alliance dans la Paternité, à laquelle Joseph de Nazareth a eu part encore plus qu'Abraham.

3. Abraham crut contre toute espérance au fait de pouvoir devenir père d'une multitude de peuple - contre toute espérance parce que, humainement, il ne pouvait attendre un fils. Joseph crut que à son côté aurait lieu l'accomplissement de l'Espérance. Il crut que par l'opération du Saint-Esprit Marie, son épouse promise, la Vierge de Nazareth, était devenue mère avant qu'ils eussent habité ensemble (Matthieu I 18).

Voici les paroles du Messager de Dieu auxquelles crut Joseph : Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre Marie pour femme, car l'enfant qu'elle a conçu vient de l'Esprit Saint. Elle va mettre au monde un fils à qui tu donneras le nom de Jésus, car il sauvera son peuple de ses péchés (Matthieu I 20-21). Comme elles sont proches ces paroles de l'annonciation de l'Ange, entendues par Joseph, de celles de l'annonciation qu'avait entendues Marie ! Elles se complètent réciproquement et expliquent ensemble le mystère divin de l'Incarnation du Verbe, Fils de Dieu.

4. Joseph, qui avait cru à ces paroles, conclut avec Dieu une Alliance particulière : l'Alliance dans la Paternité. Par la suite, il devait savoir ce que signifiaient dans sa vie et dans sa vocation les expressions du Psaume : Il m'invoquera : Tu es mon Père (Psaume LXXXVIII 27). De fait Jésus l'appelait ainsi. Et tous disaient de même, appelant Jésus le fils du charpentier (Matthieu XIII 55). Et lui, Joseph, savait que ces paroles se référaient au Père Eternel, Créateur du ciel et de la terre.

Il savait que s'était accomplie l'Alliance la plus sacrée. Il savait que sa pauvre maison de Nazareth avait été remplie de l'insondable mystère de la Paternité divine, dont lui même, Joseph, était devenu le dépositaire le plus proche et le serviteur fidèle. Lui, l'époux de Marie, la servante du Seigneur. Et quand chaque jour il s'approchait de son établi de travail, il savait que son travail faisait une seule chose avec le mystère de la Famille dans laquelle le fils Eternel de Dieu était devenu un enfant. Il savait et croyait, il eut foi espérant contre toute espérance.(...)

7. Sur le mystère divin de l'alliance dans la Paternité réfléchissent aussi aujourd'hui ceux qui sont les ministres de l'autel et de l'Eucharistie (...) Eux également ont conclu avec Dieu une alliance dans la Paternité grâce à laquelle tant d'âmes ont pu être élevées à la vie nouvelle dans le Christ. C'est une vraie paternité spirituelle que d'être ministre de Dieu. Saint Paul se réclamait d'elle quand il s'exclamait avec fierté : Eussiez-vous, en effet, dix mille maîtres dans le Christ, vous n'avez pas plusieurs pères : or, c'est moi qui, par l'Evangile, vous ai engendrés en Jésus-Christ (I Corinthiens IV 15). Et puisque sur le plan surnaturel comme sur le plan naturel, la mission de la paternité ne se limite pas à l'événement de la naissance, mais s'étend jusqu'à embrasser d'une certaine manière toute la vie, l'apôtre Paul pouvait s'adresser à ses chrétiens avec cette autre vibrante apostrophone : Mes petits enfants pour qui j'endure à nouveau les douleurs, jusqu'à ce que le Christ soit formé en vous (Galates IV 19).

Le ministère du prêtre est ministère de paternité. Le comprendre signifie comprendre aussi le sens profond de cette alliance spéciale avec Dieu qu'est le célibat. Il s'agit d'une alliance dans la paternité qui, si elle est vécue dans la foi espérant contre toute espérance, se révèle extraordinairement féconde. Comme Abraham, le prêtre devient également père d'un grand nombre de nations (Romains IV 18), et trouve dans les générations de chrétiens qui fleurissent autour de lui la récompense des fatigues, des renoncements, des souffrances dont est tissé son service quotidien.

Chers prêtres (...) sachez vivre avec générosité chaque jour cette alliance renouvelée avec Dieu dans la paternité spirituelle, orientant vers elle toute tâche de votre ministère. Donnez bon témoignage de la sainteté de la Parole de Dieu, en l'annonçant avec soin et amour, afin qu'elle soit comprise et vécue par le Peuple qui vous est confié. Célébrez avec conviction intérieure les sacrements du salut, spécialement ceux de l'Eucharistie et de la Réconciliation, portant les fidèles à goûter les trésors de la liturgie et à s'en nourrir pour une vie chrétienne toujours plus intense. Conduisez avec sens de la responsabilité des communautés que vous êtes appelés à diriger, en participant, activement aux joies et aux douleurs des gens (...)

9. Joseph témoigna de cette primauté par toute sa vie. Aujourd'hui la liturgie met en un certain sens dans son cœur et sur ses lèvres les paroles du Psaume : je veux chanter éternellement les bontés du Seigneur, Ma bouche annoncera d'âge en âge ta fidélité. Tu as dit en effet : la grâce est un édifice éternel ; Tu as affermi ta fidélité dans les cieux. (Psaume LXXXVII 2-3).

Joseph, homme juste, époux très chaste de Marie, charpentier de Nazareth, proclame dans la solennité d'aujourd'hui dans l'Eglise la grâce extraordinaire de Dieu, qui lui fut conférée à l'instar d'Abraham : la grâce de l'Alliance dans la paternité !

Et il proclame la fidélité de Dieu à cette Alliance, qui s'accomplit dans le silence de la pauvre maison en Galilée, où le travail remplissait les journées de la vie de la Sainte Famille.

Et nous en regardant la figure du Charpentier de Nazareth, nous prions pour que la grâce du Père Eternel accompagne notre travail quotidien, unisse nos familles dans la communion, fructifie au service de l'Eglise dont Joseph est protecteur et père, comme il fut protecteur et père sur la terre du Fils Eternel de Dieu.

SOURCE : http://missel.free.fr/Sanctoral/03/19.php

La véritable histoire de la dévotion à saint Joseph

Thérèse Puppinck | 19 mars 2020

Patron des familles, des travailleurs et des causes difficiles, saint Joseph occupe une place toute particulière dans le coeur des croyants. Mais si la dévotion envers lui est forte, elle n’en demeure pas moins relativement récente.

Durant les premiers siècles, l’Église ne rend pas de culte particulier à saint Joseph car elle choisit des patrons et des modèles dont le caractère répond aux épreuves qu’elle traverse : la lutte face au paganisme et aux hérésies. Ainsi, l’accent est davantage mis sur les martyrs, témoins héroïques de la foi, et sur les apôtres, symbole de l’unité catholique.

Le développement du culte de saint Joseph a pour point de départ les croisades et les pèlerinages en Terre Sainte. En effet, à Bethléem et à Nazareth, les souvenirs de saint Joseph sont prégnants, intimement mêlés à ceux de Jésus. A la suite de cette dévotion populaire débute un travail liturgique et théologique. Le père adoptif du Christ est particulièrement honoré dans le monachisme, notamment chez les franciscains et les dominicains. 

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La France joue un rôle important dans le développement du culte à saint Joseph. Au XVe siècle, le théologien Jean Gerson, qui s’est placé très jeune sous le patronage du saint, œuvre particulièrement pour promouvoir son culte. Il compose le premier livre écrit en l’honneur de Joseph et, lors du concile de Constance (1414-1418), il plaide en faveur d’une solennité nouvelle, pour qu’une fête propre lui soit dédiée. La fête de saint Joseph est alors inscrite au missel romain.

Si les guerres de religion freinent l’expansion de cette dévotion en France, il n’en est pas de même pour l’Espagne, où sainte Thérèse d’Avila lui donne une impulsion décisive. Particulièrement attachée à l’image toute paternelle de Joseph, elle l’invoque et le prie sans cesse ; il est son soutien dans toutes ses tribulations. Sur les dix-huit monastères qu’elle fonde, treize portent le nom de Saint-Joseph. Lors d’une de ses extases, la Sainte Vierge Marie lui révèle le plaisir qu’elle prend à l’entendre invoquer son époux Joseph. 

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Au début du XVIIe siècle, les papes Grégoire XV et Urbain VIII rendent la célébration de la solennité de saint Joseph obligatoire pour toute la chrétienté, la fête est alors fixée au 19 mars. Quelques années plus tard, au mois de juin 1660, saint Joseph apparaît à un jeune berger assoiffé, près du village de Cotignac, et lui indique une source miraculeuse. L’apparition est immédiatement reconnue par l’évêque du lieu, et les pèlerinages se multiplient. Depuis plusieurs années déjà, la Cour de France prend une part active à cette dévotion, d’autant plus que Bossuet exalte, avec le talent oratoire qu’on lui connaît, la mission terrestre de Joseph, gardien d’un dépôt sacré, l’Enfant-Dieu. Ce sermon, prononcé devant Anne d’Autriche, reine très pieuse et mère du jeune Louis XIV, est particulièrement remarqué. Le 10 mars 1661, après la mort du cardinal Mazarin, débute ce que les historiens appellent le règne personnel de Louis XIV. Une des premières décisions du roi est de décréter que le 19 mars, jour de la fête de saint Joseph, serait désormais un jour chômé dans tout le royaume de France. Bossuet prononce alors un second sermon sur les vertus de saint Joseph, panégyrique dans lequel il remercie le roi pour cette marque d’honneur rendue à l’époux de la Sainte Mère de Dieu.

La Révolution française supprime toutes les festivités et jours fériés liés aux fêtes religieuses ; et au XIXe siècle, les différents gouvernements ne restaurent pas la célébration temporelle de la fête du 19 mars, même si la dévotion à saint Joseph redevient très vigoureuse en France, en raison de la place toute spéciale qu’il a eu sur la terre. En effet, Joseph a partagé avec Marie les premiers sourires et les premières caresses de Jésus, il a eu la possibilité de le cajoler aussi souvent qu’il le voulait, de vivre dans une intimité de tous les instants. Dieu lui a confié son Fils, et en même temps qu’Il lui demandait d’assumer toutes les charges d’une vraie paternité, Il lui en conférait toute l’autorité et tous les droits. La paternité de Joseph s’est exercée pleinement sur Jésus ; mais elle s’étend également aux autres enfants de Marie, c’est-à-dire à l’humanité toute entière. C’est pourquoi saint Joseph a une place toute spéciale au ciel. Le pape Pie IX l’a bien reconnu, lui qui décréta saint Joseph patron de l’Église universelle, le 8 décembre 1870. 

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Outre cette glorieuse paternité, l’Église confia à saint Joseph beaucoup de missions. Si celles de patron des artisans et des familles sont bien connues, celles de patron des éducateurs, de la bonne mort et de la vie intérieure sont parfois plus ignorées. Elles correspondent pourtant bien aux vertus que Joseph a pratiquées durant sa vie. Ayant été chargé par Dieu de veiller sur son Fils, de le défendre, de l’élever, Joseph reçut des grâces particulières pour s’acquitter de cette mission. D’autre part, sa douce et belle mort, entouré de Jésus et Marie, invite les fidèles à demander la grâce du bien mourir. Enfin, saint Joseph est un parfait modèle de vie intérieure de l’âme, en raison de sa grande union spirituelle avec les cœurs de Jésus et Marie, au sein de la Sainte Famille.

Aujourd’hui encore, plusieurs pays solennisent la Saint-Joseph par un jour férié : c’est le cas notamment de la Colombie et de Malte, mais aussi de certaines régions espagnoles et de quelques lands autrichiens. Joli clin d’œil à la famille : en Espagne, le 19 mars est aussi le jour de la fête des pères. Sainte Thérèse d’Avila avait l’habitude de demander à saint Joseph, le jour de sa fête, une faveur spirituelle ou temporelle. Pourquoi ne pas reprendre cette belle coutume, ce serait l’occasion de redécouvrir les nombreuses prières dédiées à ce saint si puissant et si paternel.

SOURCE : https://fr.aleteia.org/2020/03/19/la-veritable-histoire-de-la-devotion-a-saint-joseph/?utm_campaign=NL_fr&utm_source=daily_newsletter&utm_medium=mail&utm_content=NL_fr

La discrétion de Joseph, langage de l’essentiel

Edifa | 18 mars 2020

Le 19 mars, l’Église fête saint Joseph comme le modèle parfait du chrétien. Ce saint discret nous apprend beaucoup sur la vie que nous devons mener sur terre pour atteindre la sainteté. Un exemple à suivre sans modération. 

L’Église a toujours reconnu en saint Joseph le plus grand saint de l’Église après la Vierge Marie. Un Père de l’Église, saint Grégoire de Nazianze (IVe siècle), écrivait : « Le Seigneur a réuni en Joseph, comme dans un soleil, tout ce que les saints ont ensemble de lumière et de splendeur ». N’est-ce pas exagéré au vu de ce que l’on sait de lui ? Pour répondre à cette question, il faut bien comprendre que ce n’est pas tant sa biographie qui est importante que son être « théologal ». C’est-à-dire son existence même en Dieu. Sa discrétion devient alors langage de l’essentiel.

Ce qui est absolument désarmant, c’est que le lieu de la plus haute sainteté – Nazareth – est aussi le lieu de la plus grande discrétion. Une vie si simple, presque banale. Une vie faite d’amour conjugal et de charité familiale. Une vie marquée par le travail. Une vie tout entière tournée vers Dieu par la prière et l’observance des prescriptions religieuses. Une vie marquée par une obéissance au devoir d’état dans la monotonie du quotidien ! On n’aura jamais fini de méditer cette relation contrastée entre une si éminente sainteté et l’humble vie de chaque jour.

À cette école de Nazareth, saint Joseph apparaît comme le docteur du « silence ». Il est maître en matière d’écoute de Dieu. Il vit pleinement le « Shema Israël » (« Écoute Israël »), qu’il prie deux fois par jour. Son silence n’est donc pas mutisme, mais qualité d’écoute ! Joseph est alors prompt à obéir : jamais prévenu, mais toujours prêt ! Tel est le signe convaincant de son abandon confiant en la providence divine : « Il prit chez lui son épouse » (Mt 1, 24); il partit à Bethléem (Lc 2, 4); il prit la mère et l’Enfant et s’enfuit en Égypte (Mt 2, 13). Après le décès d’Hérode, il revint à Nazareth avec son épouse et l’Enfant (Mt 2, 19-23). Par son exemple de vie réelle et bien « incarnée », l’époux de Marie, le père de Jésus et l’artisan du village est devenu le témoin d’une vie authentiquement mystique. Il est « juste », car il « est une personne qui prie, qui vit de la foi et qui cherche à accomplir le bien en chaque circonstance concrète de la vie », disait saint Jean-Paul II. 

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Ce qui n’est pas exprimé explicitement au sujet de Joseph – ces années de vie d’amour et de labeur – nous renvoie, par nécessité, à notre propre vie quotidienne. C’est comme si Dieu nous disait à travers Joseph : « Ne cherchez pas ailleurs que dans le réel de votre vie les occasions de sanctification. Ne fuyez pas hors de vos existences pour trouver le Seigneur. N’allez pas imaginer votre sainteté : recevez-la, construisez-la humblement, mais fermement, au fil des événements qui sont autant d’occasions d’obéissance à la volonté du Père du ciel, autant d’opportunité pour le don généreux de vous-même, autant de lieux pour rencontrer et vivre l’Unique nécessaire : l’amour de Dieu et du prochain ». Joseph : une sainteté sans parole, mais pas sans éloquence. Son silence nous invite à écouter le Verbe, la Parole faite chair qui est au centre de sa vie et de la nôtre.

Père Nicolas Buttet

SOURCE : https://fr.aleteia.org/cp1/2020/03/18/la-discretion-de-joseph-langage-de-lessentiel/?utm_campaign=NL_fr&utm_source=daily_newsletter&utm_medium=mail&utm_content=NL_fr

Pourquoi les victimes de la peste se consacraient-elles à saint Joseph ?

Philip Kosloski | 15 mars 2020

Alors que la peste ravageait l’Europe, les victimes se tournaient vers saint Joseph et demandaient son intercession miraculeuse.

L’Europe connut des heures très sombres à cause de la peste. Dans ces temps d’angoisse, les chrétiens avaient souvent recours à saint Joseph. Outre le fait de demander sa puissante intercession, de nombreux croyants se consacraient personnellement à lui, lui offrant leurs vies dans l’espoir qu’eux et leurs familles soient épargnés par l’épidémie.

Ainsi, on raconte que l’intervention de saint Joseph sauva un village entier de la peste au XVIIe siècle. En 1638, un vieillard habitant un village proche de Lyon ayant été atteint de la peste, qui désolait alors cette ville, demanda au vicaire de l’endroit si, en dehors des remèdes humains, il ne pourrait pas lui indiquer un moyen de sauver sa vie. « Vous n’avez, lui répondit le prêtre, qu’à faire vœu de célébrer tous les ans la fête de saint Joseph par la confession et la communion, et de vous y préparer par une neuvaine. » Le bon vieillard fit le vœu qu’on lui proposait, et aussitôt la peste disparut avec tous ses symptômes.

La ville de Lyon connut elle aussi une guérison miraculeuse grâce à saint Joseph :

Monsieur Augery, avocat au parlement du Dauphiné, se trouvait à Lyon pendant la peste qui affligea cette ville, dans l’année 1638. Il vit un de ses enfants, Théodore Augery, âgé de sept ans, atteint du fléau, avec tous les signes qui présageaient une mort prochaine et inévitable. Dans sa douleur extrême, ce père affligé s’adressa à saint Joseph avec la plus vive confiance, et lui promit, s’il sauvait son fils, d’aller pendant neuf jours entendre la sainte messe en son honneur, dans l’église qui lui était consacrée, d’y faire brûler des cierges devant son image, et enfin, d’y placer un ex-voto, dont l’inscription rappellerait le bienfait dû à son intercession. Cependant, les médecins visitèrent le jeune pestiféré ; ils le trouvèrent dans un état si déplorable, qu’ils le firent porter sur-le-champ au lazaret, ne lui donnant plus que deux heures de vie. L’ordre fut exécuté ; mais à peine arrivé au lazaret, l’enfant se trouve subitement guéri ; et le père, plein de reconnaissance pour son glorieux bienfaiteur, accomplit son vœu, avec de grands sentiments de piété. (The Glories of the Catholic Church)

Plus largement, on dit que les villes d’Avignon et de Lyon furent sauvées de la peste par l’intercession de saint Joseph :

Au commencement du XVIIe siècle, la peste exerçait ses fureurs dans la ville d’Avignon, le clergé et la magistrature recoururent à saint Joseph et s’engagèrent par vœu à célébrer, tous les ans, solennellement sa fête, s’il les délivrait de cette épidémie cruelle. À partir de ce moment, il n’y eut plus de nouvelles victimes et le fléau disparut entièrement ; mais ce fut pour aller à Lyon exercer ses ravages. L’invasion fut terrible, et l’on crut un instant que la ville allait être entièrement dépeuplée. Cependant, éclairés par l’exemple des Avignonnais, les habitants de cette grande cité recoururent au moyen qui les avait sauvés, et l’effet en fut le même. C’est de là que date la dévotion particulière des Lyonnais pour saint Joseph. (The Glories of the Catholic Church)

Bien entendu, il faut suivre les directives des autorités et du corps médical, mais l’attitude des chrétiens à travers les siècles montre à quel point il est également important de recourir à la prière dans la lutte contre une épidémie. Saint Joseph s’est avéré être un puissant intercesseur, permettant aux âmes qui l’invoquent de se rapprocher de Dieu, et demandant au Seigneur d’avoir pitié des malades et des souffrants. Surtout, saint Joseph nous apprend à faire confiance à Dieu en toutes circonstances et à remettre nos vies entre ses mains.

SOURCE : https://fr.aleteia.org/2020/03/15/pourquoi-les-victimes-de-la-peste-se-consacraient-elles-a-saint-joseph/?utm_campaign=NL_fr&utm_source=daily_newsletter&utm_medium=mail&utm_content=NL_fr

Saint Joseph portant le Christ enfant, École vénitienne (Première décennie du XVIe siècle.), 

Venise, Basilica Santi Giovanni e Paolo, Altare di San Giuseppe, già di San Marco.


St Joseph, époux de la bienheureuse Vierge Marie, confesseur

Dès le Ve siècle, le natale de St Joseph était célébré dans certains monastères égyptiens au 20 juillet, date toujours actuelle de la fête chez les Coptes.

Au rite byzantin, on commémore St Joseph le dimanche avant Noël, avec « tous les saints Pères depuis Adam » ; et le dimanche après Noël avec St Jacques et le roi David.

En Occident c’est le martyrologe de Rheinau qui mentionne le premier une fête au 19 mars au alentour de 800.

Le culte de St Joseph se développa surtout au cours des XIVe et XVe siècles sous l’influence des Franciscains qui avaient établi en 1399 la fête pour tout leur ordre.

Jean Gerson, Chancelier de Notre-Dame de Paris, composa dans les premières années du XVe siècle un office de la desponsatio de Marie et de Joseph et invita toutes les églises à célébrer cette fête le jeudi de la semaine des Quatre-Temps d’Avent et à commémorer la mort de St Joseph le 15 janvier. Mais c’est toutefois la date du 19 mars qui fut reçue universellement.

Le pape Sixte IV, franciscain autorisa la fête a Rome sous le rite simple en 1476. St Pie V l’inscrivit comme fête double obligatoire en 1568. Grégoire XV en fit une fête d’obligation en 1621 et en 1670 Clément X l’éleva à la 2ème classe. Pie X la promut à la 1ère classe quand il déclara St Joseph ‘patron de l’Église universelle’ en 1870.

Le missel de 1570, peu favorable aux compositions médiévales, remplaça les textes propres des Messes antérieurement composées par des textes du commun.

AUX PREMIÈRES VÊPRES.

Ant. 1 Jacob * engendra Joseph, époux de Marie de laquelle est né Jésus, qui est appelé Christ.

Ant. 2 Il fut envoyé * de Dieu, l’Ange Gabriel, à une vierge qu’avait épousée un homme nommé Joseph, de la maison de David ; et le nom de la vierge était Marie.

Ant. 3 Tandis qu’elle était fiancée * à Joseph, il se trouva, avant qu’ils vinssent ensemble, que Marie Mère de Jésus avait conçu par l’opération du Saint-Esprit.

Ant. 4 Joseph, son époux, * qui était un homme juste, ne voulant pas là diffamer, résolut de la renvoyer secrètement.

Ant. 5 Un Ange du Seigneur * apparut à Joseph, disant : Joseph, fils de David, ne crains point de prendre avec toi Marie, ton épouse ; car ce qui a été engendré en elle est du Saint-Esprit ; elle enfantera un fils auquel tu donneras le nom de Jésus.

Capitule. Prov. 28, 20 et 27, 18.Un homme fidèle sera beaucoup loué. Et celui qui est gardien de son Seigneur sera glorifié.

Hymnus

Te, Ioseph, célebrent ágmina cælitum,

Te cuncti résonent christíadum chori,

Qui clarus méritis, iunctus est ínclytæ

Casto fœdere Vírgini.

Almo cum túmidam gérmine cóniugem

Admírans, dúbio tángeris ánxius,

Afflátu súperi Fláminis Angelus

Concéptum Púerum docet.

Tu natum Dóminum stringis, ad éxteras

Ægypti prófugum tu séqueris plagas ;

Amíssum Sólymis quæris, et ínvenis,

Miscens gáudia flétibus.

Post mortem réliquos sors pia cónsecrat,

Palmámque eméritos glória súscipit :

Tu vivens, Súperis par, frúeris Deo,

Mira sorte beátior.

Hymne

Que les chœurs célestes célèbrent ta gloire, ô Joseph !

Que les chants de tous les Chrétiens fassent résonner tes louanges !

Glorieux déjà par tes mérites, tu es uni

par une chaste alliance à l’auguste Vierge.

Lorsque, en proie au doute et à l’anxiété,

tu t’étonnes de l’état où se trouve ton épouse,

un Ange vient t’apprendre que l’enfant qu’elle a conçu,

l’a été par l’opération de l’Esprit-Saint.

Le Seigneur est né, tu le presses dans tes bras ;

tu fuis avec lui vers les plages lointaines d’Égypte ;

tu le cherches à Jérusalem où tu l’as perdu, et tu le retrouves :

ainsi tes joies sont mêlées de larmes.

D’autres sont glorifiés après une sainte mort, c

eux qui ont mérité là palme sont reçus au sein de la gloire ;

mais toi, par une admirable destinée, égal aux Saints, plus heureux même,

tu jouis dès cette vie de la présence de Dieu.

Trinité souveraine, exaucez nos prières, donnez-nous le pardon ;

que les mérites de Joseph nous aident à monter dans les cieux,

pour qu’il nous soit enfin donné de chanter à jamais

le cantique de la reconnaissance et de la félicité. Amen.

V/. Il l’établit maître de sa maison.

R/. Et prince de toutes ses possessions.

Ant.au Magnificat Ainsi réveillé de son sommeil, Joseph * fit comme l’Ange du Seigneur lui avait ordonné, et prit son épouse avec lui.

A MATINES.

Invitatoire. Le Christ, Fils de Dieu, qui a daigné passer pour fils de Joseph, * Venez, adorons-le.

Hymnus

Cǽlitum Ioseph, decus atque nostræ

Certa spes vitæ, columénque mundi,

Quas tibi læti cánimus benígnus

Súscipe laudes.

Te Sator rerum státuit pudícæ

Vírginis sponsum, voluítque Verbi

Te patrem dici, dedit et minístrum

Esse salútis.

Tu Redemptórem stábulo iacéntem,

Quem chorus Vatum cécinit futúrum,

Aspicis gaudens, humilísque natum

Numen adóras.

Rex Deus regum, Dominátor orbis,

Cuius ad nutum tremit inferórum

Turba, cui pronus famulátur æther,

Se tibi subdit.

Hymne

Honneur des habitants du ciel, Joseph,

espérance assurée de notre vie, colonne du monde,

reçois, dans ta bonté, les louanges que nous t’offrons

avec joie en nos chants.

Le Créateur de toutes choses t’a choisi

pour l’époux de la Vierge très pure,

il a voulu qu’on t’appelât le père de son Verbe,

il t’a donné d’être le ministre du salut.

Le Rédempteur, dont le chœur des Prophètes a annoncé la venue,

tu le vois couché dans une étable,

tu le contemples avec joie, et tu adores humblement

ce Dieu nouveau-né.

Le Roi, Dieu des rois, dominateur de l’univers,

celui dont le moindre signe fait trembler la troupe infernale

et que les cieux servent en s’inclinant,

se soumet à toi.

Louange éternelle à la très sainte Trinité

qui t’a déféré de sublimes honneurs ;

qu’elle nous donne, par tes mérites, les joies

de la vie bienheureuse. Amen.

Au premier nocturne.

Ant. 1 Joseph monta * de Nazareth, ville de Galilée, en Judée, dans la ville de David, qui est appelée Bethléem, pour se faire inscrire avec Marie.

Ant. 2 Les pasteurs vinrent * en grande hâte, et ils trouvèrent Marie et Joseph, et l’enfant couché dans une crèche.

Ant. 3 Voilà qu’un Ange du Seigneur * apparut à Joseph pendant son sommeil, et dit : Lève-toi, prends l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte

V/. Il l’établit maître de sa maison.

R/. Et prince de toutes ses possessions.

Du livre de la Genèse. Cap. 39, 1-5 ; 41, 37-44.

Première leçon. Joseph fut donc mené en Égypte, et Putiphar, égyptien, eunuque de Pharaon et chef de l’armée, l’acheta de la main des Ismaélites par lesquels il avait été amené. Et le Seigneur fut avec lui, et c’était un homme prospérant en toutes choses : il demeura dans la maison de son maître, qui connaissait très bien que le Seigneur était avec lui, et que tout ce qu’il faisait, le Seigneur le dirigeait entre ses mains. Ainsi Joseph trouva grâce devant son maître, et il le servait ; préposé par lui à toutes choses, il gouvernait la maison qui lui était confiée, et tout ce qui avait été remis à ses soins. Et le Seigneur bénit la maison de l’Égyptien à cause de Joseph.

R/. Le Seigneur fut avec Joseph, et il lui fit trouver, grâce devant le chef de la prison. * Lequel mit sous sa main tous les prisonniers. V/. Tout ce qui se faisait était soumis à Joseph, car le Seigneur était avec lui et dirigeait toutes ses œuvres. * Lequel.

Deuxième leçon. Le conseil de Joseph plut à Pharaon et à tous ses ministres ; et il leur demanda : Pourrons-nous trouver un tel homme qui soit plein de l’esprit de Dieu ? Il dit donc à Joseph : Puisque Dieu t’a montré tout ce que tu as dit, pourrai-je trouver quelqu’un plus sage que toi, et même semblable à toi ? C’est toi qui seras sur ma maison, et au commandement de ta bouche, tout le peuple obéira : et c’est par le trône royal seulement que j’aurai sur toi la préséance.

R/. L’Égypte étant affamée, le peuple cria au roi, demandant des vivres. Il leur répondit : * Allez à Joseph, et tout ce qu’il vous dira, faites-le. V/. La famine augmentait chaque jour sur toute la terre, et Joseph ouvrit tous les greniers : et il vendait aux Égyptiens. * Allez.

Troisième leçon. Pharaon dit encore à Joseph : Voici que je t’établis sur toute la terre d’Égypte. Et il ôta l’anneau de sa main, et le mit à la main de Joseph : il le revêtit aussi d’une robe de fin lin, et lui mit autour du cou un collier d’or. Il le fit monter sur son second char, un héraut criant que tous devant lui fléchissent le genou, et sussent qu’il était préposé sur toute la terre d’Égypte. Le roi dit aussi à Joseph : Moi je suis Pharaon, mais sans ton commandement nul ne remuera la main ou le pied dans toute la terre d’Égypte.

R/. Le Seigneur m’a établi comme père du roi, et maître de toute sa maison : ne craignez point, * Car c’est pour votre salut que Dieu m’a envoyé avant vous en Égypte. V/. Venez à moi, et moi je vous donnerai tous les biens de l’Égypte, et vous vous nourrirez de la moelle de cette terre. * Car. Gloire au Père. * Car.

Au deuxième nocturne.

Ant. 1 Joseph, s’étant levé, * prit l’enfant et sa mère pendant la nuit et se retira en Égypte ; et il y demeura jusqu’à la mort d’Hérode.

Ant. 2 Hérode étant mort, * un Ange du Seigneur apparut à Joseph pendant son sommeil, en Égypte, disant : Lève-toi, prends l’enfant et sa mère, et va dans la terre d’Israël, car ils sont morts, ceux qui recherchaient la vie de l’enfant.

Ant. 3 Joseph prit * l’enfant et sa mère, et vint dans la terre d’Israël.

V/. Sa gloire est grande dans votre salut.

R/. Vous placerez sur lui la gloire et une haute majesté.

Sermon de saint Bernard, Abbé.

Quatrième leçon. Quel homme fut le bienheureux Joseph, vous pouvez vous en faire idée d’après le titre dont il a mérité d’être honoré, le Seigneur ayant voulu qu’on l’appelât et qu’on le crût père du Fils de Dieu, titre qui n’est vrai cependant, qu’au sens de nourricier. Jugez-en aussi d’après son propre nom qu’on interprète, vous le savez, par accroissement. Rappelez-vous, en même temps, le grand Patriarche qui fut autrefois vendu en Égypte ; et sachez que non seulement celui-ci a été l’héritier de son nom, mais qu’il eut encore sa chasteté, son innocence et sa grâce.

R/. Joseph monta -de Nazareth, ville de Galilée, en Judée, dans la ville de David, qui est appelée Bethléem. * Parce qu’il était de la maison et de la famille de David. V/. Pour se faire inscrire avec Marie son épouse. * Parce.

Cinquième leçon. Si ce Joseph, vendu par l’envie de ses frères et conduit en Égypte, préfigura le Christ qui devait être vendu, lu : aussi, saint Joseph fuyant la haine d’Hérode porta le Christ en Égypte. Le premier, pour demeurer fidèle à son maître, refusa de consentir à la passion de la maîtresse (de maison ; le second, reconnaissant une Maîtresse (sainte) dans la vierge devenue mère de son Maître (divin) vécut aussi dans la continence et se montra son fidèle gardien. A l’un fut donnée l’intelligence des songes mystérieux ; à l’autre, il a été accordé d’être le confident des mystères célestes, et d’y coopérer pour sa part.

R/. Lève-toi, prends l’enfant et sa mère, fuis en Égypte : * Et restes-y jusqu’à ce que je te parle. V/. Afin que soit accomplie cette parole que le Seigneur a dite par un Prophète : J’ai rappelé mon fils de l’Égypte. * Et.

Sixième leçon. L’un a mis du blé en réserve, non pour lui, mais pour tout un peuple ; l’autre a reçu la garde du pain du ciel, tant pour lui que pour le monde entier. On ne peut douter que ce Joseph à qui fut fiancée la mère du Sauveur, n’ait été un homme bon et fidèle. C’est, dis-je, le serviteur fidèle et prudent que le Seigneur a établi (sur sa famille), pour être ! le consolateur de sa mère, le nourricier de son enfance, enfin le seul et très digne coopérateur, ici-bas, de l’accomplissement de son grand dessein.

R/. Comme les parents de l’enfant Jésus l’apportaient dans le temple, afin de faire pour lui selon la coutume prescrite par la loi : * Siméon le prit entre ses bras et bénit Dieu. V/. Et son père et sa mère étaient dans l’admiration des choses que l’on disait de lui. * Siméon. Gloire au Père. * Siméon.

Au troisième nocturne.

Ant. 1 Joseph apprenant * qu’Archélaüs régnait en Judée à la place d’Hérode, son père, appréhenda d’y aller.

Ant. 2 Averti pendant son sommeil, * Joseph se retira dans le pays de Galilée ; étant donc venu, il habita une ville qui est appelée Nazareth, afin que s’accomplît ce qui a été dit par les Prophètes : Il sera appelé Nazaréen.

Ant. 3 Le père de Jésus * et sa mère étaient dans l’admiration des choses que l’on disait de lui, et Siméon les bénit.

V/. Le juste germera comme le lis.

R/. Et il fleurira éternellement devant le Seigneur.

Lecture du saint Évangile selon saint Matthieu. Cap. 1, 18-21.

En ce temps-là : Marie, la mère de Jésus, ayant été fiancée à Joseph, il se trouva, avant qu’ils eussent habité ensemble, qu’elle avait conçu par la vertu du Saint-Esprit. Et le reste.

Homélie de saint Jérôme, Prêtre.

Septième leçon. Pourquoi n’est-ce pas seulement par une vierge, mais par une fiancée, qu’il est conçu ? D’abord, afin que par la généalogie de Joseph, celle de Marie fût constatée ; en second lieu, de peur qu’elle ne fût lapidée par les Juifs comme adultère ; en troisième lieu, pour que, fugitive en Égypte, elle eût un soutien en la personne de Joseph. Le Martyr saint Ignace ajoute une quatrième raison ; S’il est conçu par une fiancée, c’est, dit-il, pour cacher cet enfantement au démon, qui le croira le fruit, non d’une vierge, mais d’une épouse.

R/. La mère de Jésus lui dit : Mon fils, pourquoi avez-vous agi ainsi avec nous ? * Voilà que votre père et moi, fort affligés, nous vous cherchions. V/. Mais il leur répondit : Pourquoi me cherchiez-vous ? Ignoriez-vous qu’il faut que je sois aux choses qui regardent mon Père ? * Voilà.

Huitième leçon. « Avant qu’ils vinssent ensemble, il fut découvert qu’elle avait conçu du Saint-Esprit ». Personne ne le découvrit, sinon saint Joseph, aux regards duquel ne pouvait échapper rien de ce qui concernait sa future épouse. Quand il est dit : « Avant qu’ils vinssent ensemble », il ne s’ensuit pas qu’ils se soient unis plus tard : l’Écriture constate ce qui n’avait pas eu lieu.

R/. Jésus descendit avec eux, et vint à Nazareth : * Et il leur était soumis. V/. Il avançait en sagesse, en âge et en grâce devant Dieu et devant les hommes. * Et. Gloire au Père. * Et.

Neuvième leçon. Mais Joseph, qui était un homme juste et ne voulait point la dénoncer, songea à la renvoyer sans éclat. « Si quelqu’un s’unit à une femme de mauvaise vie, il devient un même corps avec elle », et il est marqué dans la loi que non seulement ceux qui commettent le crime, mais les complices eux-mêmes du crime sont coupables. Comment donc Joseph, cachant le crime de son épouse, est-il appelé juste ? Mais c’est un témoignage en faveur de Marie ; car Joseph connaissant sa chasteté, et plein d’admiration pour ce qui se passe, cache, sous le voile du silence, l’événement dont il ne comprend point le mystère.

A LAUDES

Ant. 1 Les parents de Jésus allaient * tous les ans à Jérusalem à la fête de Pâques.

Ant. 2 Comme ils s’en retournaient, * l’enfant Jésus demeura à Jérusalem, et ses parents ne s’en aperçurent point

Ant. 3 Ne trouvant pas * Jésus, ils revinrent à Jérusalem pour le chercher, et après trois jours ils le trouvèrent dans le temple, assis au mi lieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant.

Ant. 4 Sa mère lui dit : * Mon fils, pourquoi avez-vous agi ainsi avec nous ? Voilà que votre père et moi, fort affligés, nous vous cherchions.

Ant. 5 Jésus descendit * avec eux, et vint à Nazareth ; et il leur était soumis.

Capitule. Prov. 28, 20 et 27, 18.Un homme fidèle sera beaucoup loué. Et celui qui est gardien de son Seigneur sera glorifié.

Hymnus

Iste, quem læti cólimus, fidéles,

Cuius excélsos cánimus triúmphos,

Hac die Ioseph méruit perénnis

Gáudia vitæ.

O nimis felix, nimis o beátus,

Cuius extrémam vígiles ad horam

Christus et Virgo simul astitérunt

Ore seréno.

Hinc stygis victor, láqueo solútus

Carnis, ad sedes plácido sopóre

Migrat ætérnas, rutilísque cingit

Témpora sertis.

Ergo regnántem flagitémus omnes,

Adsit ut nobis, veniámque nostris

Obtinens culpis, tríbuat supérnæ

Múnera pacis.

Hymne

Celui que nous, fidèles, nous honorons avec joie,

celui dont nous chantons le glorieux triomphe,

Joseph, a mérité de parvenir en ce jour aux joies

de l’éternelle vie.

O Saint très fortuné ! Ô Saint très heureux !

Il fut assisté à son heure dernière par le Christ et la Vierge,

qui veillaient auprès de lui avec un visage

inspirant la sérénité.

Vainqueur de l’enfer, libre des liens de la chair,

Joseph s’est endormi en paix,

et il monte vers l’éternel séjour ; son front est ceint de

brillantes couronnes.

Maintenant qu’il règne, supplions-le tous

de nous accorder son secours ; qu’il obtienne le pardon de nos fautes

et nous procure les bienfaits

de la paix céleste.

A vous soit la louange, à vous soit l’honneur,

ô Dieu qui régnez en trois personnes,

et qui donnez pour jamais une couronne d’or

au serviteur fidèle. Amen.

V/. La bouche du juste méditera la sagesse

R/. Et sa langue proférera la justice.

Ant. au Bénédictus Jésus* avait environ trente ans, et il passait pour fils de Joseph.

AUX DEUXIÈMES VÊPRES.

Ant. 1 Les parents de Jésus allaient * tous les ans à Jérusalem à la fête de Pâques.

Ant. 2 Comme ils s’en retournaient, * l’enfant Jésus demeura à Jérusalem, et ses parents ne s’en aperçurent point

Ant. 3 Ne trouvant pas * Jésus, ils revinrent à Jérusalem pour le chercher, et après trois jours ils le trouvèrent dans le temple, assis au mi lieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant.

Ant. 4 Sa mère lui dit : * Mon fils, pourquoi avez-vous agi ainsi avec nous ? Voilà que votre père et moi, fort affligés, nous vous cherchions.

Ant. 5 Jésus descendit * avec eux, et vint à Nazareth ; et il leur était soumis.

Capitule. Prov. 28, 20 et 27, 18.Un homme fidèle sera beaucoup loué. Et celui qui est gardien de son Seigneur sera glorifié.

Hymnus

Te, Ioseph, célebrent ágmina cælitum,

Te cuncti résonent christíadum chori,

Qui clarus méritis, iunctus est ínclytæ

Casto fœdere Vírgini.

Almo cum túmidam gérmine cóniugem

Admírans, dúbio tángeris ánxius,

Afflátu súperi Fláminis Angelus

Concéptum Púerum docet.

Tu natum Dóminum stringis, ad éxteras

Ægypti prófugum tu séqueris plagas ;

Amíssum Sólymis quæris, et ínvenis,

Miscens gáudia flétibus.

Post mortem réliquos sors pia cónsecrat,

Palmámque eméritos glória súscipit :

Tu vivens, Súperis par, frúeris Deo,

Mira sorte beátior.

Nobis, summa Trias, parce precántibus,

Da Ioseph méritis sídera scándere :

Ut tandem líceat nos tibi pérpetim

Gratum prómere cánticum. Amen.

V/. Gloire et richesses sont dans sa maison.

R/. Et sa justice demeure dans les siècles des siècles

Hymne

Que les chœurs célestes célèbrent ta gloire, ô Joseph !

Que les chants de tous les Chrétiens fassent résonner tes louanges !

Glorieux déjà par tes mérites, tu es uni

par une chaste alliance à l’auguste Vierge.

Lorsque, en proie au doute et à l’anxiété,

tu t’étonnes de l’état où se trouve ton épouse,

un Ange vient t’apprendre que l’enfant qu’elle a conçu,

l’a été par l’opération de l’Esprit-Saint.

Le Seigneur est né, tu le presses dans tes bras ;

tu fuis avec lui vers les plages lointaines d’Égypte ;

tu le cherches à Jérusalem où tu l’as perdu, et tu le retrouves :

ainsi tes joies sont mêlées de larmes.

D’autres sont glorifiés après une sainte mort, c

eux qui ont mérité là palme sont reçus au sein de la gloire ;

mais toi, par une admirable destinée, égal aux Saints, plus heureux même,

tu jouis dès cette vie de la présence de Dieu.

Trinité souveraine, exaucez nos prières, donnez-nous le pardon ;

que les mérites de Joseph nous aident à monter dans les cieux,

pour qu’il nous soit enfin donné de chanter à jamais

le cantique de la reconnaissance et de la félicité. Amen

Ant. au Magnificat Voici le serviteur fidèle * et prudent que le Seigneur a établi sur sa famille.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

Une nouvelle joie nous arrive, au sein des tristesses du Carême. Hier, c’était le radieux Archange qui déployait devant nous ses ailes [1] ; aujourd’hui, c’est Joseph, l’Époux de Marie, le Père nourricier du Fils de Dieu, qui vient nous consoler par sa chère présence. Dans peu de jours, l’auguste mystère de l’Incarnation va s’offrir à nos adorations : qui pouvait mieux nous initier à ses splendeurs, après l’Ange de l’Annonciation, que l’homme qui fut à la fois le confident et le gardien fidèle du plus sublime de tous les secrets ?

Le Fils de Dieu descendant sur la terre pour revêtir l’humanité, il lui fallait une Mère ; cette Mère ne pouvait être que la plus pure des Vierges, et la maternité divine ne devait altérer en rien son incomparable virginité. Jusqu’à ce que le Fils de Marie fût reconnu pour le Fils de Dieu, l’honneur de sa Mère demandait un protecteur : un homme devait donc être appelé à l’ineffable gloire d’être l’Époux de Marie. Cet heureux mortel, le plus chaste des hommes, fut Joseph.

Le ciel le désigna comme seul digne d’un tel trésor, lorsque la verge qu’il tenait dans le temple poussa tout à coup une fleur, comme pour donner un accomplissement sensible à l’oracle prophétique d’Isaïe : « Une branche sortira de la tige de Jessé, et une fleur s’élèvera de cette branche [2] ». Les riches prétendants à la main de Marie furent écartés ; et Joseph scella avec la fille de David une alliance qui dépassait en amour et en pureté tout ce que les Anges ont jamais connu dans le ciel.

Ce ne fut pas la seule gloire de Joseph, d’avoir été choisi pour protéger la Mère du Verbe incarné ; il fut aussi appelé à exercer une paternité adoptive sur le Fils de Dieu lui-même. Pendant que le nuage mystérieux couvrait encore le Saint des saints, les hommes appelaient Jésus, fils de Joseph, fils du charpentier ; Marie, dans le temple, en présence des docteurs de la loi, que le divin Enfant venait de surprendre par la sagesse de ses réponses et de ses questions, Marie adressait ainsi la parole à son fils : « Votre père et moi nous vous cherchions, remplis d’inquiétude [3] » ; et le saint Évangile ajoute que Jésus leur était soumis, qu’il était soumis à Joseph, comme il l’était à Marie.

Qui pourrait concevoir et raconter dignement les sentiments qui remplirent le cœur de cet homme que l’Évangile nous dépeint d’un seul mot, en l’appelant homme juste [4] ? Une affection conjugale qui avait pour objet la plus sainte et la plus parfaite des créatures de Dieu ; l’avertissement céleste donné par l’Ange qui révéla à cet heureux mortel que son épouse portait en elle le fruit du salut, et qui l’associa comme témoin unique sur la terre à l’œuvre divine de l’Incarnation ; les joies de Bethléhem lorsqu’il assista à la naissance de l’Enfant, honora la Vierge-Mère, et entendit les concerts angéliques ; lorsqu’il vit arriver près du nouveau-né d’humbles et simples bergers, suivis bientôt des Mages opulents de l’Orient ; les alarmes qui vinrent si promptement interrompre tant de bonheur, quand, au milieu de la nuit, il lui fallut fuir en Égypte avec l’Enfant et la Mère ; les rigueurs de cet exil, la pauvreté, le dénuement auxquels furent en proie le Dieu caché dont il était le nourricier, et l’épouse virginale dont il comprenait de plus en plus la dignité" sublime ; le retour à Nazareth, la vie humble et laborieuse qu’il mena dans cette ville, où tant de fois ses yeux attendris contemplèrent le Créateur du monde partageant avec lui un travail grossier ; enfin, les délices de cette existence sans égale, au sein de la pauvre maison qu’embellissait la présence de la Reine des Anges, que sanctifiait la majesté du Fils éternel de Dieu ; tous deux déférant à Joseph l’honneur de chef de cette famille qui réunissait autour de lui par les liens les plus chers le Verbe incréé, Sagesse du Père, et la Vierge, chef-d’œuvre incomparable de la puissance et de la sainteté de Dieu ?

Non, jamais aucun homme, en ce monde, ne pourra pénétrer toutes les grandeurs de Joseph. Pour les comprendre, il faudrait embrasser toute retendue du mystère avec lequel sa mission ici-bas le mit en rapport, comme un nécessaire instrument. Ne nous étonnons donc pas que ce Père nourricier du Fils de Dieu ait été figuré dans l’Ancienne Alliance, et sous les traits d’un des plus augustes Patriarches du peuple choisi. Saint Bernard a rendu admirablement ce rapport merveilleux : « Le premier Joseph, dit-il, vendu par ses frères, et en cela figure du Christ, fut conduit en Égypte ; le second, fuyant la jalousie d’Hérode, porta le Christ en Égypte. Le premier Joseph, gardant la foi à son maître, respecta l’épouse de celui-ci ; le second, non moins chaste, fut le gardien de sa Souveraine, de la Mère de son Seigneur, et le témoin de sa virginité. Au premier fut donnée l’intelligence des secrets révélés par les songes ; le second reçut la confidence des mystères du ciel même. « Le premier conserva les récoltes du froment, non pour lui-même, mais pour tout le peuple ; le second reçut en sa garde le Pain vivant descendu du ciel, pour lui-même et pour le monde entier [5]. »

Une vie si pleine de merveilles ne pouvait se terminer que par une mort digne d’elle. Le moment arrivait où Jésus devait sortir de l’obscurité de Nazareth et se manifester au monde. Désormais ses œuvres allaient rendre témoignage de sa céleste origine : le ministère de Joseph était donc accompli. Il était temps qu’il sortît de ce monde, pour aller attendre, dans le repos du sein d’Abraham, le jour où la porte des cieux serait ouverte aux justes. Près de son lit de mort veillait celui qui est le maître de la vie, et qui souvent avait appelé cet humble mortel du nom de Père ; son dernier soupir fut reçu par la plus pure des vierges, qu’il avait eu le droit de nommer son Épouse. Ce fut au milieu de leurs soins et de leurs caresses que Joseph s’endormit d’un sommeil de paix. Maintenant, l’Époux de Marie, le Père nourricier de Jésus, règne au ciel avec une gloire inférieure sans doute à celle de Marie, mais décoré de prérogatives auxquelles n’est admis aucun des habitants de ce séjour de bonheur.

C’est de là qu’il répand sur ceux qui l’invoquent une protection puissante. Dans quelques semaines, la sainte Église nous révélera toute l’étendue de cette protection ; une fête spéciale sera consacrée à honorer le Patronage de Joseph ; mais désormais la sainte Église veut que la fête présente, élevée à l’honneur des premières solennités, devienne le monument principal de la confiance qu’elle éprouve et qu’elle veut nous inspirer envers le haut pouvoir de l’époux de Marie. Le huit décembre 1870, Pie IX, au milieu de la tempête qui jusqu’à cette heure mugit encore, s’est levé sur la nacelle apostolique, et a proclamé, à la face de la Ville et du monde, le sublime Patriarche Joseph comme devant être honoré du titre auguste de Patron de l’Église universelle. Bonis soient l’année et le jour d’un tel décret, qui apparait comme un arc-en-ciel sur les sombres nuages de l’heure présente ! Grâces soient rendues au Pontife qui a voulu que le 19 mars comptât à l’avenir entre les jours les plus solennels du Cycle, et que la sainte Église, plus en butte que jamais à la rage de ses ennemis, reçût le droit de s’appuyer sur le bras de cet homme merveilleux à qui Dieu, au temps des mystères évangéliques, confia la glorieuse mission de sauver de la tyrannie d’Hérode, et la Vierge-mère et le Dieu-homme à peine déclaré à la terre !

Les Antiennes de l’Office consacré par l’Église au nourricier du Fils de Dieu sont empruntées à l’Évangile ; elles nous donnent les traits principaux de sa vie si sublime et si simple, dans l’ordre même de la narration du livre sacré.

Les Hymnes sont attribuées à la composition du pieux et savant Pape Clément XI.

A LA MESSE.

Joseph, appelé juste par l’Esprit-Saint, est bien en effet, dans ses vertus cachées, le modèle de tous ceux qui méritent ici-bas un si beau titre. Aussi la solennité de la fête de ce jour n’a-t-elle point empêché que l’Église ne prit la plus grande partie de la Messe du glorieux patriarche au Commun des saints Confesseurs.

La puissance du très saint Époux de la Mère de Dieu est pour l’Église un de ses plus fermes appuis ; dans la Collecte, couvrons-nous avec elle du crédit de son intercession près du Fils et de la Mère.

ÉPÎTRE.

Ces lignes sont consacrées, dans le livre de l’Ecclésiastique, à l’éloge de Moïse. Le plus doux des hommes qui habitaient de son temps sur la terre [6], Moïse fut choisi dans son humilité du milieu de toute chair pour confident de Dieu ; en présence des rois, il transmettait au peuple aimé les ordres du ciel ; sa gloire égala celle des plus illustres patriarches et saints personnages des siècles de l’attente. « S’il est parmi vous quelque prophète, disait le Seigneur, je lui apparaîtrai en vision, je lui parlerai en songe ; mais telle n’est pas la condition de mon serviteur Moïse, dans toute ma maison le plus fidèle : car je lui parle bouche à bouche, et c’est clairement, et non en énigme ou sous des figures, qu’il voit le Seigneur [7]. » Non moins aimé de Dieu, non moins béni de son peuple, Joseph n’est point seulement l’ami de Dieu [8], l’intermédiaire entre le ciel et une nation privilégiée. Le Père souverain lui communique les droits de sa paternité sur son Fils ; c’est à ce Fils, chef des élus, et non plus seulement au peuple des figures, qu’il transmet les ordres d’en haut. L’autorité qu’il exerce ainsi n’est égalée que par son amour ; ce n’est point en passant ou à la dérobée qu’il voit le Seigneur [9] : ce Fils de Dieu qui l’appelle son père en face de la terre et des cieux, se comporte comme tel, et reconnaît sans fin par ses effusions de divine tendresse les trésors de dévouement qu’il trouve en ce cœur si fidèle et si doux. Quelle gloire au ciel, quelle puissance sur toutes choses, répondant à son pouvoir et à sa sainteté d’ici-bas, ne sont pas maintenant le partage de celui qui, mieux que Moïse, pénétra les secrets de la nuée mystérieuse et connut tous les biens [10] !

Le Graduel et le Trait viennent bien à la suite de l’Épître, pour chanter les augustes privilèges de l’homme qui, plus qu’aucun autre, a justifié ce verset du psaume : La gloire et les richesses sont dans sa maison, et sa justice demeure dans les siècles des siècles.

ÉVANGILE.

Jamais épreuve fut-elle plus dure que celle qu’il plut à Dieu d’imposer à l’âme si droite du glorieux patriarche ? Joseph, c’est l’expérience des plus saintes âmes, devait être pour ses dévots clients un guide incomparable dans les voies spirituelles ; et c’est pour cela que lui aussi devait connaître l’angoisse, creuset nécessaire où toute sainteté s’achève. Mais la Sagesse n’abandonne point ceux qui recherchent uniquement ses sentiers. Comme le chante l’Église en ce jour même, elle conduisait le juste par des voies droites [11] sans qu’il en eût conscience, et dans cette nuit où ses pensées cherchaient péniblement à se frayer le chemin de la justice, elle lui montrait soudain sa divine lumière ; la connaissance des célestes secrets lui était donnée ; en retour de l’angoisse par où son cœur avait passé, il voyait la place que lui faisait l’inscrutable dessein de la Providence dans ce royaume de Dieu dont les splendeurs étaient appelées à rayonner pour jamais de sa pauvre demeure sur le monde entier. Véritablement donc pouvait-il conclure avec l’Église [12], et reconnaître que la Sagesse avait bien, en effet, ennobli son labeur et fécondé ses peines. Ainsi toujours elle rend aux justes le prix de leurs travaux, et les conduit par des voies admirables [13].

Chantons, dans l’Offertoire, cette effusion des largesses divines élevant au-dessus de tous les rois ses aïeux l’humble artisan de Nazareth.

Sachons avec l’Église, dans la Secrète, confier au bienheureux gardien de l’Enfant-Dieu la protection des dons du Seigneur en nos âmes ; il nourrira Jésus en nous, et l’amènera à la mesure de l’homme parfait, comme il le fit il y a dix-huit siècles.

La Communion rappelle le message de l’Ange annonçant à Joseph que Dieu même a pris possession de Marie son Épouse ; le banquet sacré ne rapproche-t-il pas l’heureux sort de l’Église de celui de la Vierge-Mère ?

La Postcommunion exprime de nouveau la pensée qui déjà inspirait la Secrète : daigne Dieu remettre ses dons, et Jésus même que nous venons de recevoir, à la garde si sûre du glorieux patriarche !

La Liturgie grecque, qui honore saint Joseph au Dimanche qui suit la fête de Noël, nous offre en son honneur les strophes suivantes que nous empruntons aux Menées.

(DOMINICA POST NATALE DOMINI.)

Joseph l’Époux vit de ses jeux l’accomplissement des prophéties ; choisi pour le plus illustre mariage, il reçut la révélation par la bouche des Anges qui chantaient : Gloire au Seigneur ! car il a donné la paix à la terre.

Annonce, ô Joseph, à David l’ancêtre de Dieu les prodiges que tes yeux ont contemplés : tu as vu l’entant reposant sur le sein de la Vierge ; tu l’as adoré avec les Mages ; tu as rendu gloire à Dieu avec les bergers, selon la parole de l’Ange : prie le Christ Dieu, afin que nos âmes soient sauvées.

Le Dieu immense devant qui tremblent les puissances célestes, toi, Joseph, tu l’as reçu dans tes bras, lorsqu’il naquit de la Vierge ; lu as été consacré par cet auguste contact : c est pourquoi nous te rendons honneur.

Ton âme fut obéissante au divin précepte ; rempli d’une pureté sans égale, heureux Joseph, tu méritas de recevoir pour épouse celle qui est pure et immaculée entre les femmes ; tu fus le gardien de cette Vierge, lorsqu’elle mérita de devenir le tabernacle du Créateur.

A Gabriel seul dans les cieux, à toi seul sur la terre, après la chaste Vierge, fut confié le grand et vénérable mystère qui devait renverser notre ennemi, le prince des ténèbres, heureux Joseph, digne de toute louange !

La Vierge pure, semblable à une nuée mystérieuse, tenant caché dans son sein le divin Soleil, tu l’as conduite de la cité de David en Égypte, pour dissiper les ténèbres de l’idolâtrie qui couvraient cette contrée, ô Joseph, ministre de l’incompréhensible mystère !

Tu as assisté avec sagesse, ô Joseph, le Dieu devenu enfant dans la chair ; tu l’as servi comme un de ses Anges ; il t’a illuminé immédiatement ; tu as reçu en toi ses rayons spirituels ; ô bienheureux ! tu as paru tout éclatant de lumière dans ton cœur et dans ton âme.

Celui qui d’une parole a façonné le ciel, la terre et la mer, a été appelé le Fils de l’artisan, de toi, admirable Joseph ! Tu as été nommé le père de celui qui est sans principe, et qui t’a glorifié comme le ministre d’un mystère qui surpasse toute intelligence.

Que ta mort fut précieuse en présence du Seigneur, heureux Joseph ! Consacré au Seigneur dès l’enfance, tu as été le gardien sacré de la Vierge bénie ; et tu as chanté avec elle ce cantique : « Que toute créature bénisse le Seigneur, et l’exalte dans les siècles éternels ! Amen. »

Nous vous louons, nous vous glorifions, heureux Joseph. Nous saluons en vous l’Époux de la Reine du ciel, le Père nourricier de notre Rédempteur. Quel mortel obtint jamais de pareils titres ? et cependant ces titres sont les vôtres, et ils ne sont que la simple expression des grandeurs qu’il a plu à Dieu de vous conférer. L’Église du ciel admire en vous le dépositaire des plus sublimes faveurs ; l’Église de la terre se réjouit de vos honneurs, et vous bénit pour les bienfaits que vous ne cessez de répandre sur elle.

Royal fils de David, et en môme temps le plus humble des hommes, votre vie semblait devoir s’écouler dans cette obscurité qui faisait vos délices ; mais le Seigneur voulut vous associer au plus sublime de ses actes. Une noble Vierge, de même sang que vous, fait l’admiration du ciel, et deviendra la gloire et l’espérance de la terre ; cette Vierge vous est destinée pour épouse. L’Esprit-Saint doit se reposer en elle comme dans son tabernacle le plus pur ; c’est à vous, homme chaste et juste, qu’il a résolu de la confier comme un inestimable dépôt. Devenez donc l’Époux de celle « dont le Seigneur lui-même a convoité la beauté [14] ».

Le Fils de Dieu vient commencer ici-bas une vie d’homme ; il vient sanctifier la famille, ses liens et ses affections. Votre oreille mortelle l’entendra vous nommer son Père ; vos yeux le verront obéir à vos commandements. Quelles furent, ô Joseph, les émotions de votre cœur, lorsque, pleinement instruit des grandeurs de votre Épouse et de la divinité de votre Fils adoptif, il vous fallut remplir le rôle de chef, dans cette famille au sein de laquelle le ciel et la terre se réunissaient ! Quel souverain et tendre respect pour Marie, votre Épouse ! Quelle reconnaissance et quelles adorations pour Jésus, votre enfant soumis ! O mystère de Nazareth ! Un Dieu habite parmi les hommes, et il souffre d’être appelé le Fils de Joseph !

Daignez, ô sublime ministre du plus grand de tous les bienfaits, intercéder en notre laveur auprès du Dieu fait homme. Demandez-lui pour nous l’humilité qui vous a fait parvenir à tant de grandeur, et qui sera en nous la base d’une conversion sincère. C’est par l’orgueil que nous avons péché, que nous nous sommes préférés à Dieu ; il nous pardonnera cependant, si nous lui offrons « le sacrifice d’un cœur contrit et humilié [15] ». Obtenez-nous cette vertu, sans laquelle il n’est pas de véritable pénitence. Priez aussi, ô Joseph, afin que nous soyons chastes. Sans la pureté du cœur et des sens, nous ne pouvons approcher du Dieu de toute sainteté, qui ne souffre près de lui rien d’impur ni de souillé. Par sa grâce, il veut taire de nos corps des temples de son Saint-Esprit : aidez-nous à nous maintenir à cette élévation, à la rétablir en nous, si nous l’avions perdue.

Enfin, ô fidèle Époux de Marie, recommandez-nous à notre Mère. Si elle daigne seulement jeter un regard sur nous en ces jours de réconciliation, nous sommes sauvés : car elle est la Reine de la miséricorde, et Jésus son fils, Jésus qui vous appela son Père, n’attend, pour nous pardonner, pour convertir notre cœur, que le suffrage de sa Mère. Obtenez-le pour nous, ô Joseph ! Rappelez à Marie Bethléhem, l’Égypte, Nazareth, où son courage s’appuya sur votre dévouement ; dites-lui que nous vous aimons, que nous vous honorons aussi : et Marie daignera reconnaître par de nouvelles bontés envers nous les hommages que nous rendons à celui qui lui fut donné par le ciel pour être son protecteur et son appui.

[1] La fête de St Gabriel était fêtée en de nombreux endroits le 18 mars avant que Benoît XV ne fixe sa date au 24 mars

[2] Isai. XI, 1.

[3] Luc. XI, 48.

[4] Matth. 1, 10.

[5] Homil. II super Missus est.

[6] Num, XII, 3.

[7] Ibid. 6-8.

[8] Ex. XXXIII, 11.

[9] Ibid. 22.

[10] Ex. XXXIII, 19.

[11] Capitule de None, ex Sap. X.

[12] Ibid.

[13] Sap. X, 17.

[14] Psalm. XLIV, 12.

[15] Psalm. L, 19.

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Dans la recension d’Epternach du martyrologe hiéronymien, nous trouvons en ce jour le natale d’un martyr Joseph d’Antioche qu’il ne semble pas possible d’identifier avec le très pur Époux de la Vierge immaculée. Au contraire, d’autres martyrologes postérieurs, à partir du Xe siècle, mentionnent aujourd’hui : In Betlehem sancti Joseph nutritoris Domini, comme le fait, par exemple, le martyrologe de Farfa. De cette brève notice est née la grande solennité que célèbre en ce jour l’Église catholique. La dévotion à saint Joseph s’est développée dans le peuple chrétien d’une manière si surprenante et selon des lois si admirables, qu’il est impossible de n’y pas reconnaître l’œuvre de la divine Providence.

Il convenait que, durant les trois premiers siècles, la divinité du Rédempteur rayonnât dans toute sa splendeur sur le monde idolâtre. Aussi les premières fêtes de l’année liturgique furent-elles celles qui se rapportaient au mystère du salut du monde, telles que celles de Pâques, de l’Épiphanie, du saint Baptême. Quand le premier péril polythéiste et l’hérésie arienne furent conjurés, la théologie s’arrêta de préférence à étudier les rapports existant entre la nature divine et la nature humaine dans l’unique Personne du Rédempteur, et c’est ainsi que naquirent les fêtes qui regardent principalement la sainte humanité de Jésus, comme la Nativité, la Présentation au temple, la Dormition de la Très Sainte Vierge. C’est l’âge d’or de la théologie mariale, inaugurée par le Concile d’Éphèse et qui, durant tout le haut moyen âge, fut l’inspiratrice féconde de fêtes, de processions, de basiliques et de monastères dédiés à la Mère de Dieu, si bien que le culte de Notre-Dame s’unit à la foi catholique jusqu’à en devenir la caractéristique. Les plus anciennes peintures christologiques des catacombes représentaient déjà l’Enfant divin sur les genoux de sa Mère, et la piété de l’Église continue à l’adorer entre les bras de Marie. Le catholique sait que Marie est le chef-d’œuvre de la création, et que l’honneur qu’on lui rend remonte jusqu’à Dieu. Il sait que Jésus Lui-même, en tant que son Fils, veut être dans l’obligation de l’honorer et de l’aimer infiniment, et c’est pourquoi le fidèle, en honorant et en aimant Marie, sait aussi qu’il ne fait que suivre, de très loin il est vrai, l’exemple de Jésus.

Mais après Marie vient celui qui, tout en n’étant pas le père de Jésus, eut néanmoins sur Lui une véritable autorité paternelle. C’est Joseph, qui ne fut pas simplement père putatif du Sauveur en ce sens que les juifs, ignorants du mystère de l’Incarnation, crurent Jésus son fils ; non ; il fut le vrai dépositaire de l’autorité du Père éternel, investi pour cela de la patria potestas au sein de la sainte Famille de Nazareth. L’Ange ne transmet donc les ordres du Seigneur, relatifs à la fuite en Égypte et au retour en Palestine, à personne autre qu’à Joseph ; c’est lui qui, avec Marie, impose au divin Enfant le nom de Jésus ; c’est lui qui engage à partir pour l’exil sa très pure Épouse ; c’est également sur lui que pèse la responsabilité de la vie de la sainte Famille. Et puisque, dans la sainte maison de Nazareth, sous l’autorité paternelle de Joseph, Dieu veut consacrer les prémices de l’Église, c’est à bon droit que celle-ci reconnaît et vénère comme son Patron spécial le premier chef de cette famille de Dieu sur la terre, saint Joseph.

Le culte liturgique envers ce grand patriarche prit un développement considérable au XVe siècle, grâce surtout à sainte Brigitte de Suède, à Jean Gerson et à saint Bernardin de Sienne, Le pape franciscain Sixte IV inséra sa mémoire dans le Bréviaire romain avec le rang de fête simple ; Clément IX l’éleva au rite double et Grégoire XV en fit une fête de précepte. Enfin Pie IX attribua à saint Joseph le titre de Patron de l’Église catholique.

Rome chrétienne, outre une splendide chapelle consacrée à saint Joseph dans la basilique vaticane, a dédié à ce glorieux patriarche, le plus sublime entre tous les saints, parce qu’il fut, en raison de ses fonctions, le plus proche de Marie et de Jésus, plusieurs églises et chapelles. Parmi les moins anciennes, nous devons mentionner l’église de Saint-Joseph des charpentiers sur la Custodia Mamertini, au Forum romain ; Saint-Joseph ad caput domorum, près de la porte Pinciana ; Saint-Joseph à la Lungara, dans la cité Léonine ; Saint-Joseph de linea, érigée jadis par la fameuse Victoria Colonna, mais maintenant détruite ; Saint-Joseph au pied du Collis ortorum, place d’Espagne ; Saint-Joseph de Cluny, près de la voie Merulana ; Saint-Joseph, sur la voie Nomentane ; Saint-Joseph, au Quartier-Triomphal, etc.

Il est probable que le choix du mois de mars pour la fête qu’on institua tardivement en l’honneur de saint Joseph, fut motivé par la commémoration que, durant la sainte Quarantaine, l’Église fait de l’ancien patriarche Joseph, dont l’éloge, prononcé par saint Ambroise, se lit après le deuxième nocturne du IIIe dimanche de Carême : Ex libro S. Ambrosii Episcopi, de Sancto Ioseph.

La messe est empruntée au Commun des Confesseurs et à d’autres messes plus anciennes du Sacramentaire. Le choix dénote d’ailleurs un bon goût.

Si saint Joseph est comparé à un palmier vigoureux et à la tige de Jessé, la fleur qui orne cette tige est Jésus-Christ, lequel, comme le dit si bien saint Augustin, est le fruit qui convenait uniquement à cette union sacrée et virginale entre Marie et le saint Patriarche.

La collecte est empruntée à la fête de saint Matthieu.

La lecture est celle du Commun des Abbés, mais bien mieux qu’à ceux-ci elle s’adapte à saint Joseph, constitué par Dieu patron de sa famille sur la terre, à qui il révéla la gloire et le mystère de l’Incarnation du Verbe, et qu’il honora plus que tout autre mortel.

Le graduel. La couronne que Dieu a posée sur le chef de saint Joseph resplendit de trois perles brillantes, qui sont Jésus, Marie et la sainte Église. . Au temps pascal, on omet le graduel et le trait et, à leur place, on récite les versets alléluiatiques suivants : « Alléluia, alléluia. Le Seigneur l’aima et l’orna de splendeur ; II le revêtit d’un manteau de gloire. » Le second verset est identique à celui de la fête de saint Paul, le premier ermite, et il fait allusion à la verge fleurie qui, selon la tradition, aurait désigné Joseph comme l’époux choisi par Dieu pour la Vierge Marie.

L’Évangile (Matth., I, 18-21) est celui de la Vigile de Noël ; il faut y remarquer que, selon l’ordre de l’Ange, Joseph, à titre de représentant du Père éternel, et en signe de la patria potestas sur le Verbe Incarné, lui impose le nom de Jésus, et, avec le nom, lui confie la mission de racheter le genre humain moyennant l’obéissance jusqu’au sacrifice du Calvaire. Saint Joseph entre ainsi dans les desseins de salut de Dieu, et fait partie du plan magnifique de l’incarnation du Verbe.

L’offertoire. Appliqué à saint Joseph, le verset du psaume 88 acquiert toutefois une signification plus sublime, puisque la vérité et la miséricorde que le Psalmiste montrent ici comme l’ornement et la force du juste, sont le Sauveur Jésus lui-même, qui, dans la sainte Famille, fut tout le trésor de ses Parents.

La prière sur l’oblation a aujourd’hui un sens spécial, car l’offrande inaugurale de l’hostie que nous allons présenter à Dieu sur le saint autel, fut accomplie pour la première fois dans le temple de Jérusalem, lorsque, quarante jours après Noël, Marie et Joseph portèrent le Verbe Incarné dans le temple : ut sisterent eum Domino : « Suppliants, Seigneur, nous vous rendons notre juste hommage, vous priant humblement de garder vous-même en nous vos dons, par les mérites de l’Époux de la Mère de votre Fils Jésus-Christ notre Seigneur, le bienheureux Joseph, en la vénérable fête duquel nous vous offrons cette hostie de louange. Par notre Seigneur, etc. »

La préface est propre elle aussi ; elle a été approuvée par Benoît XV.

L’antienne pour la sainte Communion est tirée de la lecture de l’Évangile du jour, et, répétée en ce moment par la sainte liturgie, elle a pour but d’exciter notre foi et "notre adoration envers la majesté de Celui que nous avons reçu dans notre cœur : « Joseph, fils de David, n’hésite pas à prendre pour épouse Marie, car Celui qui est né en elle est du Saint-Esprit. »

Après la Communion on récite la collecte suivante, où l’Église insiste pour la seconde fois aujourd’hui sur la garde diligente du don de Dieu et de la grâce : « Assistez-nous, ô Dieu de miséricorde, et par l’intercession du bienheureux confesseur Joseph, gardez vous-même en nous avec bonté vos dons. Par notre Seigneur, etc. »

Comme l’ancien Joseph garda le grain qui devait sauver l’Égypte durant les sept années de famine, ainsi l’Époux très pur de la Vierge Marie garda contre la cruauté d’Hérode le vrai Pain de vie éternelle qui donne le salut au monde entier. Maintenant encore, telle est la mission de Joseph dans le ciel ; et c’est pourquoi l’Église demande avec insistance que sa puissante intercession garde dans les âmes la vie mystique de Jésus, moyennant la correspondance fidèle à la grâce.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Allez à Joseph.

Nous faisons trêve à la sévérité du Carême pour célébrer la grande fête de saint Joseph. Nous ne pouvons pas, aujourd’hui, célébrer la messe du Carême. Nous n’omettrons pas cependant d’en méditer les pensées.

1. Saint Joseph. — Joseph, issu de la race royale de David, naquit à Bethléem. Il fut d’une condition modeste et gagna son pain comme simple ouvrier. Il avait sans doute déjà un certain âge quand il devint l’époux de la Mère de Dieu. Sa haute dignité se résume en ces mots : « Père nourricier de Jésus. » La Sainte Écriture ne raconte que peu de choses à son sujet. Elle nous dit seulement qu’il était « juste ». Elle indique par là qu’il s’acquitta fidèlement de son rôle sublime de gardien envers les deux plus grands trésors de Dieu sur la terre, Jésus et Marie. Les heures les plus amères de sa vie sont, sans doute, celles où il lui fallut douter de la fidélité de sa fiancée. Mais c’est justement dans le conflit entre ses droits et ses devoirs qu’il se montra grand. Il était nécessaire que cette souffrance, qui fait partie de l’œuvre rédemptrice, soit supportée en vue d’un grand bien : Joseph est le témoin le moins suspect de la naissance virginale du Rédempteur. Ensuite, dans l’histoire de la Rédemption, Joseph passe modestement au second plan. L’Écriture ne dit même rien de sa mort. Cependant, certaines indications nous font conclure qu’il était déjà mort au moment où commença la vie publique du Sauveur. Il eut la plus belle mort que puissent désirer les hommes : il s’endormit dans les bras de Jésus et de Marie. Sa vie fut humble et obscure. Il resta aussi humble et obscur, pendant des siècles, dans l’histoire de l’Église. Ce n’est que dans les temps modernes que l’Église l’a célébré avec solennité. Les honneurs liturgiques commencèrent à lui être rendus au XVe siècle, grâce surtout à sainte Brigitte de Suède et à saint Bernardin de Sienne. Sainte Thérèse travailla aussi beaucoup à promouvoir son culte. Il a aujourd’hui deux grandes fêtes : le 19 mars, on honore sa personne et la part qu’il prit à la Rédemption ; le troisième mercredi après Pâques, on honore son rôle de protecteur de l’Église. Pie IX, en effet, le proclama patron de l’Église universelle. Il est considéré aussi comme le patron de la bonne mort.

2. La messe et l’office des Heures sont de date récente (l’auteur est le pape Clément XI qui les prescrivit en 1714). Ce qui est typique dans la prière des Heures, c’est la composition systématique propre à cette époque et le parallèle entre Joseph l’Égyptien et saint Joseph. Dans les antiennes des vêpres et des matines, on a rassemblé tous les passages de l’Écriture qui concernent saint Joseph et on les a rangés dans l’ordre historique. Les leçons du premier nocturne et leur répons traitent de Joseph l’Égyptien. Dans les leçons du second nocturne, le docteur melliflue, saint Bernard, établit un parallèle entre les deux Joseph. « Ce Joseph que ses frères vendirent par envie et qui fut emmené en Égypte est une figure du Christ qui fut, lui aussi, vendu et trahi pour de l’argent. Quant à notre Joseph, il échappa à l’envie d’Hérode et emmena le Christ en Égypte. Le premier Joseph garda la fidélité à son maître et ne voulut pas pécher avec la femme adultère de son maître ; notre Joseph honora dans sa femme sa dame, la Mère de son Seigneur, la Vierge (sans tache), et, vierge lui-même, il fut son fidèle protecteur. Le premier avait reçu le don d’interpréter les songes mystérieux ; le second connut les mystères divins et y participa. Le premier Joseph garda le froment non pour lui, mais, pour tout le peuple ; le second Joseph reçut la garde du pain vivant descendu du ciel, tant pour lui que pour le monde entier :» L’Évangile de la messe est le même que celui de la vigile de Noël. Cet Évangile annonce, il est vrai, la plus grande souffrance de sa vie, mais aussi fonde sa grandeur.

SOURCE : http://www.introibo.fr/19-03-St-Joseph-epoux-de-la#nh1

Saint Joseph, l'ombre du Père ! celui sur qui l'ombre du Père tombait épaisse et profonde, saint Joseph, l'homme du silence, celui de qui la parole approche à peine ! l'Evangile ne dit de lui que quelques mots : « C'était un homme juste ! » l'Evangile, si sobre de paroles, devient encore plus sobre quand il s'agit de saint Joseph. On dirait que cet homme, enveloppé de silence, inspire le silence. Le silence de saint Joseph fait le silence autour de saint Joseph. Le silence est sa louange, son génie, son atmosphère. Là où il est, le silence règne. Quand l'aigle plane, disent certains voyageurs, le pèlerin altéré devine une source à l'endroit où tombe son ombre dans le désert. Le pèlerin creuse, l'eau jaillit. L'aigle avait parlé son langage, il avait plané. Mais la chose belle avait été une chose utile ; et celui qui avait soif, comprenant le langage de l'aigle, avait fouillé le sable et trouvé l'eau.

Quoi qu'il en soit de cette magnifique légende et de sa vérité naturelle que je n'ose garantir, elle est féconde en symboles superbes. Quand l'ombre de saint Joseph tombe quelque part, le silence n'est pas loin. Il faut creuser le sable, qui dans sa signification symbolique représente la nature humaine ; il faut creuser le sable, et vous verrez jaillir l'eau. L'eau, ce sera, si vous voulez, ce silence profond, où toutes les paroles sont contenues, ce silence vivifiant, rafraîchissant, apaisant, désaltérant, le silence substantiel ; là où est tombée l'ombre de saint Joseph, la substance du silence jaillit, profonde et pure, de la nature humaine creusée.

Pas une parole de lui dans l'Ecriture ! Mardochée, qui fit fleurir Esther à son ombre, est un de ses précurseurs. Abraham, père d'Isaac, représenta aussi le père putatif de Jésus. Joseph, fils de Jacob, fut son image la plus expressive. Le premier Joseph garda en Egypte le pain naturel. Le second Joseph garda en Egypte le pain surnaturel. Tous deux furent les hommes du mystère ; et le rêve leur dit ses secrets. Tous deux furent instruits en rêve, tous deux devinèrent les choses cachées. Penchés sur l'abîme, leurs yeux voyaient à travers les ténèbres. Voyageurs nocturnes, ils découvraient leurs routes à travers les mystères de l'ombre. Le premier Joseph vit le soleil et la lune prosternés devant lui. Le second Joseph commanda à Marie et à Jésus ; Marie et Jésus obéissaient.

Dans quel abîme intérieur devait résider l'homme qui sentait Jésus et Marie lui obéir, l'homme à qui de tels mystères étaient familiers et à qui le silence révélait la profondeur du secret dont il était gardien. Quand il taillait ses morceaux de bois, quand il voyait l'Enfant travailler sous ses ordres, ses sentiments, creusés par cette situation inouïe, se livraient au silence qui les creusait encore ; et du fond de la profondeur où il vivait avec son travail, il avait la force de ne pas dire aux hommes : le Fils de Dieu est ici.

Son silence ressemble à un hommage rendu à l'inexprimable. C'était l'abdication de la Parole devant l'Insondable et devant l'Immense. Cependant l'Evangile, qui dit si peu de mots, a les siècles pour commentateurs ; je pourrais dire qu'il a les siècles pour commentaires. Les siècles creusent ses paroles et font jaillir du caillou l'étincelle vivante. Les siècles sont chargés d'amener à la lumière les choses du secret. Saint Joseph a été longtemps ignoré. Mais voici quelque chose d'étrange : chaque siècle a deux faces, la face chrétienne et la face antichrétienne ; la face chrétienne s'oppose en général à la face antichrétienne par un contraste direct et frappant. Le XVIII° siècle, le siècle du rire, de la frivolité, de la légèreté, du luxe, posséda Benoît-Joseph Labre... Le XIX° siècle est par-dessus tout, dans tous les sens du mot, le siècle de la Parole. Bonne ou mauvaise, la Parole remplit notre air. Une des choses qui nous caractérisent, c'est le tapage. Rien n'est bruyant comme l'homme moderne : il aime le bruit, il veut en faire autour des autres, il veut surtout que les autres en fassent autour de lui. Le bruit est sa passion, sa vie, son atmosphère ; la publicité remplace pour lui mille autres passions qui meurent étouffées sous cette passion dominante, à moins qu'elles ne vivent d'elle et ne s'alimentent de sa lumière pour éclater plus violemment. Le XIX° siècle parle, pleure, crie, se vante et se désespère.

Il fait étalage de tout. Lui qui déteste la confession secrète, il éclate à chaque instant en confessions publiques. II vocifère, il exagère, il rugit. Eh bien ! ce sera ce siècle, ce siècle du vacarme, qui verra s'élever et grandir dans le ciel de l'Eglise la gloire de saint Joseph. Saint Joseph vient d'être choisi officiellement pour patron de l'Eglise pendant le bruit de l'orage. II est plus connu, plus prié, plus honoré qu'autrefois.

Au milieu du tonnerre et des éclairs, la révélation de son silence se produit insensiblement.

 (Ernest Hello, Physionomie des saints, Paris, Victor Palmé, 1875, ch.X, pp.139 sq. : « Saint Joseph. »)

SOURCE : http://surlespasdessaints.over-blog.com/article-prieres-sur-saint-joseph-69722242.html

Daniele Crespi, Le songe de Joseph, 1625, 297 x 203, 
Vienne, Kunsthistorisches Museum


Joseph, authentique modèle de la paternité

Réflexion biblique à l’occasion de la fête de la Sainte Famille

par le père Thomas Rosica, c.s.b.

Dans les dernières lueurs de Noël, l’Église célèbre la fête de la Sainte Famille. Cette fin de semaine, nous sommes invités à réfléchir sur le don et le mystère de la vie ainsi que la bénédiction que représente en particulier la vie familiale. Dans l’évangile de Luc, la scène de la Présentation de l’enfant Jésus au temple à Jérusalem nous permet de rencontrer quatre individus qui embrassent la nouvelle vie de Jésus dans leurs bras : le vieux et fidèle Siméon, Anne, la sage prophétesse avancée en âge, et le jeune couple, Marie et Joseph, qui par obéissance fidèle offrent leur enfant au Seigneur. La belle prière de Siméon n’est rien de plus que l’anthologie de la prière de l’ancienne Israël :  

Maintenant. O maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix car mes yeux ont vu le salut préparé à la face des peuples, lumière révélée aux nations et gloire de ton peuple Israël.   (Luc 2,29-32)

La scène entière de la Présentation, et les mots soigneusement choisis de la prière de Siméon soulèvent plusieurs questions pour nous : Comment puis-je voir la gloire de Dieu dans ma vie ? Ai-je soif de justice et de paix ? Quelles sont les nouvelles situations et quelles sont les personnes entrées dans ma vie dernièrement ? Comment suis-je lumière et salut pour les autres ?

Un zoom sur Joseph

Aujourd’hui j’aimerais que l’on regarde plus attentivement la figure de Joseph, l’un des personnages de cette scène évangélique des plus touchantes : la Présentation. En nous penchant sur le père nourricier du Seigneur, nous découvrons un aperçu   du contexte de la famille de notre Sauveur.

Joseph est souvent dans l’ombre de la gloire du Christ et de la pureté de Marie. Mais, lui aussi, attend que Dieu lui parle pour lui répondre avec obéissance. Luc et Matthieu notent tous deux que Joseph descend de David, le plus grand roi d’Israël (Matthieu 1,18 et Luc 3, 23-38). L’Écriture nous donne une information essentielle sur Joseph: il était « un homme droit » (Matthieu 1, 18).

Joseph était un homme compatissant et attentionné. Lorsqu’il découvre que Marie était enceinte tout juste après leurs fiançailles, il savait que l’enfant n’était pas le sien mais il n’était pas encore conscient qu’il était le Fils de Dieu. Il projetait de rompre avec Marie selon la loi mais il était soucieux pour sa sécurité. Joseph était aussi un homme de foi, obéissant à ce que Dieu lui demandait sans connaître le dénouement. Quand l’ange lui apparut en songe pour lui dire la vérité au sujet de l’enfant que Marie portait, Joseph,   sans attendre et sans question ou souci de commérage, prit Marie pour femme. Lorsque l’ange revint encore pour l’avertir du danger, il quitta immédiatement ce qu’il avait, sa famille et ses amis, et s’enfuit dans un pays étranger avec sa femme et son bébé. Il attendit en Egypte jusqu’à ce que l’ange lui dise qu’il pouvait rentrer. (Matthieu 2, 13-23).

On nous a dit que Joseph était un charpentier-menuisier, un homme qui travaillait pour soutenir sa famille. Joseph n’était pas un homme riche, car lorsqu’il monta au temple avec Jésus pour la circoncision et la purification de Marie, il offrit en sacrifice 2 tourterelles ou une paire de pigeons, animaux autorisés seulement à ceux qui ne pouvaient payer un agneau.

Joseph nous révèle dans son humanité le rôle unique des pères de proclamer la vérité de Dieu par la parole et le devoir. Sa situation paradoxale de « père nourricier de Jésus » met l’emphase sur la paternité, qui est plus que le simple fait de génération biologique. Un homme est un père lorsqu’il s’investit lui-même dans la formation spirituelle et morale de ses enfants. Joseph est tout particulièrement conscient, comme tout père devrait l’être, qu’il servait en tant que représentant de Dieu le Père.

Joseph a protégé et a pourvu au bien-être de Jésus et de Marie. Il a donné son nom à Jésus, lui apprit comment prier, comment travailler et comment être un homme. Bien qu’aucun texte ou aucune parole ne lui soient attribués, nous pouvons être sûrs que Joseph prononça 2 des mots les plus importants quand il nomma son fils « Jésus » et l’appela « Emmanuel ». Lorsque l’enfant restait au temple on nous dit que Joseph (avec Marie),   le cherchèrent pendant trois jours, tout angoissés.

La vie de Joseph nous rappelle qu’une maison ou une communauté n’est pas construite sur le pouvoir et l’avoir mais sur la bonté; pas sur les richesses mais sur la foi, la fidélité, la pureté et l’amour mutuel.

Les défis actuels de la paternité et de la masculinité ne peuvent être compris si on les sort de la culture dans laquelle nous baignons. Le manque de paternité a un effet profondément alarmant sur les enfants. Combien de jeunes gens aujourd’hui ont été affectés par la crise de la paternité ? Combien ont été privés d’un père ou d’un grand-père? Ce n’est pas pour rien que saint Joseph est patron de l’Église universelle et patron principal du Canada. S’il n’y avait jamais une époque qui ait besoin d’un modèle fort du rôle masculin et du rôle de père c’est bien la nôtre. La fête de la Sainte Famille est un jour très signifiant pour supplier saint Joseph de nous envoyer de bons pères qui seront de bons chefs de famille.

Joseph et Marie, plus que quiconque, furent les premiers à contempler la gloire de leur Unique et Seul qui venait du Père, plein de grâce et de vérité. Puisse saint Joseph faire de nous des bons prêtres, religieux et laïcs qui imiteront l’humble travailleur de Nazareth qui écoutait le Seigneur, conservait précieusement un cadeau qui n’était pas le sien, tout en montrant à Jésus comment le Verbe se fait chair et peut vivre parmi nous.

SOURCE : http://seletlumieretv.org/blogue/reflexion-biblique/joseph-authentique-modele-de-la-paternite-3

Icône de Saint Joseph avec Jésus, Musée Archéologique de VarnaBulgarie


PREMIER PANÉGYRIQUE

SAINT JOSEPH (a).

Depositum custodi.

Gardez le dépôt. I Timoth., VI, 20.

C'est une opinion reçue et un sentiment commun parmi tous les hommes, que le dépôt a quelque chose de saint, et que nous le devons conserver à celui qui nous le confie, non-seulement par fidélité, mais encore par une espèce de religion. Aussi apprenons-nous du grand saint Ambroise, au second livre de ses Offices (Cap. XXIX), que c'était une pieuse coutume établie parmi les fidèles, d'apporter aux évêques et à leur clergé ce qu'ils voulaient garder avec plus de soin pour le mettre auprès des autels, par une sainte persuasion qu'ils avoient qu'ils ne pouvaient mieux placer leurs trésors qu'où Dieu même confie les siens, c'est-à-dire ses sacrés mystères. Cette coutume s'était introduite dans l'Eglise par l'exemple de la Synagogue ancienne. Nous lisons dans l'histoire sainte que le temple auguste de Jérusalem était le lieu du dépôt des Juifs; et nous apprenons des auteurs profanes (Herodian., Hist., lib. I) que les païens faisaient cet honneur à leurs fausses divinités, de mettre leurs dépôts dans leurs temples et de les confier à leurs prêtres : comme si la nature nous enseignait que l'obligation du dépôt ayant quelque chose de religieux, il ne pouvait être mieux placé que dans les lieux où l'on révère la Divinité et entre les mains de ceux que la religion consacre.

Mais s'il y eut jamais un dépôt qui méritât d'être appelé saint et d'être ensuite gardé saintement, c'est celui dont je dois parler et que la providence du Père éternel commet à la foi du juste Joseph : si bien que sa maison me paraît un temple, puisqu'un Dieu y daigne habiter et s'y est mis lui-même en dépôt, et Joseph a dû être consacré pour garder ce sacré trésor. En effet il l'a été, chrétiens : son corps l'a été par la continence, et son âme par tous les dons de la grâce.

Madame,

Comme les vertus sont modestes et élevées dans la retenue, elles ont honte de se montrer elles-mêmes; et elles savent que ce qui les rend plus recommandables, c'est le soin qu'elles prennent de se cacher, de peur de ternir par l'ostentation et par une lumière empruntée l'éclat naturel et solide que leur donne la pudeur qui les accompagne. Il n'y a que l'obéissance dont on se peut glorifier sans crainte : elle est la seule entre les vertus que l'on ne blâme point de se produire, et dont on se peut vanter hardiment sans que la modestie en soit offensée. C'est pour cette raison, Madame, que je supplie Votre Majesté de permettre que je publie hautement les soumissions que je rends aux commandements que j'ai reçus d'elle. Il lui plaît d'ouïr de ma bouche ce panégyrique du grand saint Joseph (Par. : Elle a la bonté de vouloir entendre ce que Dieu m'a inspiré autrefois dans une occasion pareille) : elle m'ordonne de rappeler en mon souvenir des idées que le temps avait effacées. J'y aurais de la répugnance, si je ne croyais manquer de respect en rougissant de dire ce que Votre Majesté veut entendre. Il ne faut donc point étudier d'excuses ; il ne faut point se plaindre du peu de loisir, ni peser soigneusement les motifs pour lesquels Votre Majesté me donne cet ordre (Et trouvez bon, Madame, que je dise avec tout le respect que je dois, que me donnant à peine deux jours pour rappeler à mon souvenir des idées que le temps avait effacées, il semble que Votre Majesté m'ait voulu ôter le loisir d'y joindre de nouvelles pensées). L'obéissance est trop curieuse, qui cherche les causes du commandement. Il ne lui appartient pas d'avoir des yeux, si ce n'est pour considérer son devoir : elle doit chérir son aveuglement, qui la fait marcher avec sûreté. Votre Majesté verra donc Joseph dépositaire du Père éternel : il est digne de ce titre auguste, auquel il s'est préparé par tant de vertus. Mais n'est-il pas juste, Madame, qu'après vous avoir témoigné mes soumissions, je demande à Dieu cette fermeté qu'il promet (Madame, dans cette action que l'obéissance me fait entreprendre, il ne faut pas que j'oublie l'autorité sainte et apostolique que Jésus-Christ a donnée aux prédicateurs. Votre Majesté n'entend pas que sa présence en rabatte rien, et je m'en vais demander à Dieu cette fermeté qu'il promet) aux prédicateurs de son Evangile, et qui bien loin de se rabaisser devant les monarques du monde, y doit paraître avec plus de force.

Je m'adresse à vous, divine Marie, pour m'obtenir de Dieu cette grâce : j'espère tout de votre assistance, lorsque je dois célébrer la gloire de votre Epoux. O Marie, vous avez vu les effets de la grâce qui l'a rempli, et j'ai besoin de votre secours pour les faire entendre à ce peuple. Quand est-ce qu'on peut espérer de vous des intercessions plus puissantes, qu'où il s'agit du pudique Epoux que le Père vous a choisi pour conserver cette pureté qui vous est si chère et si précieuse? Nous recourons donc à vous, ô Marie, en vous saluant avec l'ange et disant (Var. : Je me jette à vos pieds dans cette pensée, en disant avec tout le peuple : Ave) : Ave, Maria.

Dans le dessein que je me propose d'appuyer les louanges de saint Joseph, non point sur des conjectures douteuses, mais sur une doctrine solide tirée des Ecritures divines et des Pères leurs interprètes fidèles, je ne puis rien-faire de plus convenable à la solennité de cette journée, que de vous représenter ce grand Saint comme un homme que Dieu choisit parmi tous les autres , pour lui mettre en main son trésor et le rendre ici-bas son dépositaire. Je prétends vous faire voir aujourd'hui que comme rien ne lui convient mieux, il n'est rien aussi qui soit plus illustre; et que ce beau titre de dépositaire nous découvrant les conseils de Dieu sur ce bienheureux patriarche, nous montre la source de toutes ses grâces et le fondement assuré de tous ses éloges.

Et premièrement, chrétiens, il m'est aisé de vous faire voir combien cette qualité lui est honorable. Car si le nom de dépositaire emporte une marque d'estime et rend témoignage à la probité ; si pour confier un dépôt nous choisissons ceux de nos amis dont la vertu est plus reconnue, dont la fidélité est plus éprouvée, enfin les plus intimes , les plus confidents : quelle est la gloire de saint Joseph que Dieu fait dépositaire, non-seulement de la bienheureuse Marie, que sa pureté angélique rend si agréable à ses yeux, mais encore de son propre Fils, qui est l'unique objet de ses complaisances et l'unique espérance de notre salut : de sorte qu'en la personne de Jésus-Christ, saint Joseph est établi le dépositaire du trésor commun de Dieu et des hommes. Quelle éloquence peut égaler la grandeur et la majesté de ce titre?

Si donc, fidèles, ce titre est si glorieux et si avantageux à celui dont je dois faire aujourd'hui le panégyrique, il faut que je pénètre un si grand mystère (Var. : Il faut que nous entrions plus parfaitement dans un mystère si admirable) avec le secours de la grâce ; et que recherchant dans nos Ecritures ce que nous y lisons de Joseph, je fasse voir que tout se rapporte à cette belle qualité de dépositaire. En effet je trouve dans les Evangiles trois dépôts confiés au juste Joseph par la Providence divine, et j'y trouve aussi trois vertus qui éclatent entre les autres et qui répondent à ces trois dépôts ; c'est ce qu'il nous faut expliquer par ordre ; suivez s'il vous plaît attentivement.

Le premier de tous les dépôts qui a été commis à sa foi (j'entends le premier dans l'ordre des temps ) c'est la sainte virginité de Marie, qu'il lui doit conserver entière sous le voile sacré de son mariage, et qu'il a toujours saintement gardée ainsi qu'un dépôt sacré qu'il ne lui était pas permis de toucher. Voilà quel est le premier dépôt. Le second et le plus auguste, c'est la personne de Jésus-Christ, que le Père céleste dépose en ses mains, afin qu'il serve de père à ce saint Enfant qui n'en peut avoir sur la terre. Vous voyez déjà, chrétiens, deux grands et deux illustres dépôts confiés aux soins de Joseph; mais j'en remarque encore un troisième, que vous trouverez admirable, si je puis vous l'expliquer clairement. Pour l'entendre, il faut remarquer que le secret est comme un dépôt. C'est violer la sainteté du dépôt que de trahir le secret d'un ami ; et nous apprenons par les lois que si vous divulguez le secret du testament que je vous confie, je puis ensuite agir contre vous comme ayant manqué au dépôt : Depositi actione tecum agi posse, comme parlent les jurisconsultes. Et la raison en est évidente, parce que le secret est comme un dépôt. Par où vous pouvez comprendre aisément que Joseph est dépositaire du Père éternel, parce qu'il lui a dit son secret. Quel secret? Secret admirable, c'est l'incarnation de son Fils. Car, fidèles, vous n'ignorez pas que c'était un conseil de Dieu, de ne pas montrer Jésus-Christ au monde jusqu'à ce que l'heure en fût arrivée ; et saint Joseph a été choisi, non-seulement pour le conserver, mais encore pour le cacher (Var.: Les apôtres étaient des lumières afin de faire voir Jésus-Christ, et saint Joseph un voile pour le couvrir jusqu'à ce que son heure fût arrivée). Aussi lisons-nous dans l'Evangéliste (Luc., II, 33) qu'il admirait avec Marie tout ce qu'on disait du Sauveur : niais nous ne lisons pas qu'il parlât, parce que le l'ère éternel en lui découvrant le mystère, lui découvre le tout en secret et sous L'obligation du silence; et ce secret, c'est un troisième dépôt que le Père ajoute aux deux autres, selon ce que dit le grand saint Bernard, que Dieu a voulu commettre à sa foi le secret le plus sacré de son cœur: Cui tutò committeret secretissimum atque sacratissimum sui cordis arcanum (Super Missus est, hom. II, n. 16). Que vous êtes chéri de Dieu, ô incomparable Joseph, puisqu'il vous confie ces trois grands dépôts, la virginité de Marie, la personne de son Fils unique, le secret de tout son mystère !

Mais ne croyez pas, chrétiens, qu'il soit méconnaissant de ces grâces. Si Dieu l'honore par ces trois dépôts, de sa part il présente a Dieu le sacrifice de trois vertus, que je remarque dans l'Evangile. Je ne doute pas que sa vie n'ait été ornée de toutes les autres; mais voici les trois principales que Dieu veut que nous voyions dans son Ecriture. La première, c'est sa pureté, qui paraît par sa continence dans son mariage ; la seconde, sa fidélité; la troisième, son humilité et l'amour de la vie cachée. Qui ne voit la pureté de Joseph par cette sainte société de désirs pudiques, et cette admirable correspondance avec la virginité de M.nie dans leurs noces spirituelles. La seconde (Combien paraît la seconde), sa fidélité dans les soins infatigables qu'il a de Jésus, au milieu de tant de traverses qui suivent partout ce divin Enfant dès le commencement de sa vie. La troisième (Enfin qui ne remarque la troisième), son humilité, en ce que possédant un si grand trésor par une grâce extraordinaire du Père éternel, bien loin de se vanter de ces dons ou de faire connaître ces avantages, il se cache autant qu'il peut aux yeux des mortels, jouissant paisiblement avec Dieu du mystère qu'il lui révèle et des richesses infinies qu'il met en sa garde. Ah ! que je découvre ici de grandeurs , et que j'y découvre d'instructions importantes ! Que je vois de grandeurs dans ces dépôts, que je vois d'exemples dans ces vertus! Et que l'explication d'un si beau sujet sera glorieux à Joseph et fructueux à tous les fidèles ! Mais afin de ne rien omettre dans une matière si importante, entrons plus avant au fond du mystère , achevons d'admirer les desseins de Dieu sur l'incomparable Joseph. Après avoir vu les dépôts, après avoir vu les vertus, considérons le rapport des uns et des autres, et faisons le partage de tout ce discours.

Pour garder la virginité de Marie sous le voile du mariage, quelle vertu est nécessaire à Joseph? Une pureté angélique, qui puisse en quelque sorte répondre a la pureté de sa chaste épouse. Pour conserver le Sauveur Jésus parmi tant de persécutions qui l'attaquent dès son enfance, quelle vertu demanderons-nous? Une fidélité inviolable, qui ne puisse être ébranlée par aucuns périls. Enfin pour garder le secret qui lui a été confié, quelle vertu y emploiera-t-il, sinon cette humilité admirable, qui appréhende les yeux des hommes, qui ne veut pas se montrer au monde, mais qui aime à se cacher avec Jésus-Christ? Depositum custodi: O Joseph, gardez le dépôt; gardez la virginité de Marie; et pour la garder dans le mariage , joignez-y votre pureté. Gardez cette vie précieuse, de laquelle dépend le salut des hommes ; et employez à la conserver parmi tant de difficultés la fidélité de vos soins. Gardez le secret du l'ère éternel : il veut que son Fils soit caché au monde ; servez-lui d'un voile sacré, et enveloppez-vous avec lui dans l'obscurité qui le couvre, par l'amour de la vie cachée. C'est ce que je me propose de vous expliquer avec le secours de la grâce.

PREMIER POINT.

Pour comprendre solidement combien Dieu honore le grand saint Joseph lorsque sa providence dépose en ses mains la virginité de Marie, il importe (Var. : Puisque ce premier point nous doit faire voir que Dieu met entre-les mains de Joseph la virginité de Marie ainsi qu'un céleste dépôt, pour entendre solidement combien il l'honore en lui confiant un si grand trésor, il importe...) que nous entendions avant toutes choses combien cette virginité est chérie du Ciel, combien elle est utile à la terre (Var. : Combien son prix est inestimable) ; et ainsi nous jugerons aisément par la qualité du dépôt de la dignité du dépositaire. Mettons donc cette vérité dans son jour, et faisons voir par les saintes Lettres combien la virginité était nécessaire pour attirer Jésus-Christ au monde. Vous n'ignorez pas, chrétiens, que c'était un conseil de la Providence (Je pose donc pour fondement de tout ce discours, que le monde n'avait rien de plus précieux que la virginité de Marie, dans le temps qu'il plut au Père éternel de la confier à Joseph; et pour entendre cette vérité, suivez, s'il vous plaît, ce raisonnement. Il n'est rien de plus précieux que ce qui doit attirer Jésus-Christ au monde. C'est vous, ô virginité de Marie, qui par les chastes attraits et par la lumière céleste de votre pureté admirable, devez aller charmer le Fils du Très-Haut jusque dans le sein de sou Père, et qui devez ensuite attirer au inonde cet unique Rédempteur des âmes : et par conséquent, chrétiens, il n'est rien de plus précieux que la virginité de Marie. Mais mettons cette vérité dans un plus grand jour; et faisons voir solidement par les saintes Lettres, combien la virginité était nécessaire pour la réparation de notre nature. Car c'était un conseil de la Providence), que comme Dieu produit son Fils dans l'éternité par une génération virginale, aussi quand il naîtrait dans le temps il sortît d'une mère vierge. C'est pourquoi (Il fut formé du sang d'une vierge. Jésus devait être tout l'amour des vierges, il devait être le pudique Epoux de la sainte virginité, il devait en être la gloire, et il devait aussi en être le fruit et venir au monde par son entremise. C'est pourquoi, etc.) les prophètes avoient annoncé qu'une vierge concevrait un fils (Isa., VII, 14) : nos pères ont vécu dans cette espérance, et l'Evangile nous en a fait voir le bienheureux accomplissement. Mais s'il est permis à des hommes de rechercher les causes d'un si grand mystère, il me semble que j'en découvre une très-considérable; et qu'examinant la nature de la sainte virginité selon la doctrine des Pères, j'y remarque une secrète vertu qui oblige en quelque sorte le Fils de Dieu à venir au monde par son entremise.

En effet demandons aux anciens docteurs de quelle sorte ils nous définissent la virginité chrétienne. Ils nous répondront d'un commun accord que c'est une imitation de la vie des anges ; qu'elle met les hommes au-dessus du corps par le mépris de tous ses plaisirs; et qu'elle élève tellement la chair qu'elle l'égale en quelque façon, si nous l'osons dire, à la pureté des esprits. Expliquez-le-nous, ô grand Augustin, et faites-nous entendre en un mot quelle estime vous faites des vierges. Voici une belle parole : Habent aliquid jam non carnis in carne. Ils ont, dit-il, en la chair quelque chose qui n'est pas de la chair, et qui tient de l'ange plutôt que de l'homme : Habent aliquid jam non carnis in carne. Vous voyez donc que, selon ce Père, la virginité est comme un milieu entre les esprits et les corps, et qu'elle nous fait approcher des natures spirituelles; et de là il est aisé de comprendre combien cette vertu devait avancer le mystère de l'incarnation (De sanctâ Virginit., n. 12). Car qu'est-ce que le mystère de l'incarnation ? C'est l'union très-étroite de Dieu et de l'homme, de la divinité avec la chair. «Le Verbe a été fait chair (Joan., I, 14); » dit l'Evangéliste; voilà l'union, voilà le mystère.

Mais, fidèles, ne semble-t-il pas qu'il y a trop de disproportion entre la corruption de nos corps et la beauté immortelle de cet esprit pur, et ainsi qu'il n'est pas possible d'unir des natures si éloignées ? C'est aussi pour cette raison que la sainte virginité se met entre deux , pour les approcher par son entremise (Et qu'il n'est pas possible d'unir des natures si éloignées, s'il ne se met auparavant entre deux quelque chose qui les rapproche : je veux dire qu'il ne semble pas que la chair puisse aspirer à la gloire de toucher de si près la Divinité, si elle n'y est auparavant préparée par quelque excellente disposition, si elle ne reçoit quelque qualité qui l'approche en quelque façon des esprits. Mais qui lui peut donner ce bel avantage, si ce n'est la virginité, qui tient en quelque façon de l'homme et de l'ange ?). Et en effet nous voyons que la lumière, lorsqu'elle tombe sur les corps opaques, ne les peut jamais pénétrer, parce que leur obscurité la repousse; il semble au contraire qu'elle s'en retire en réfléchissant ses rayons : mais quand elle rencontre un corps transparent, elle y entre, elle s'y unit, parce qu'elle y trouve l'éclat et la transparence qui approche de sa nature et tient quelque chose de la lumière. Ainsi nous pouvons dire, fidèles, que la divinité du Verbe éternel voulant s'unir à un corps mortel, demandait la bienheureuse entremise de la sainte virginité, qui ayant quelque chose de spirituel, a pu en quelque sorte préparer la chair à être unie à cet esprit pur.

Mais de peur que vous ne croyiez que je parle ainsi de moi-même, il faut que vous appreniez cette vérité d'un célèbre évêque d'Orient : c'est le grand Grégoire de Nysse, dont je vous rapporte les propres paroles tirées fidèlement de son texte. C'est, dit-il, la virginité qui fait que Dieu ne refuse pas de venir vivre avec les hommes : c'est elle qui donne aux hommes des ailes pour prendre leur vol du côté du ciel; et étant le lien sacré de la familiarité de l'homme avec Dieu , elle accorde par son entremise des choses si éloignées par nature : Quœ adeò naturâ distant, ipsa intercedens suâ virtute conciliât adducitque in concordiam (De Virginit., cap. II.).

Peut-on confirmer en termes plus clairs la vérité que je prêche ? Et par Là ne voyez-vous pas, et la dignité de Marie, et celle de Joseph son fidèle époux? Vous voyez la dignité de Marie (Var. : Et de là je tire cette conséquence : Un Dieu devait venir sur la terre; mais la sainte virginité le devait attirer du ciel : un Dieu devait prendre une chair humaine ; mais cette chair devait être ornée de toute la pureté d'un sang virginal; un Dieu devait avoir une mère; mais la sainte virginité lui devait purifier cette mère, afin que le Saint-Esprit pût se répandre sur son chaste corps. C'est pourquoi le grand saint Ambroise applique à la pureté de Marie ce passage d'un saint prophète : Ascendit Dominus super nubem levem. Quelle est, dit-il, cette nuée légère sur laquelle Dieu s'est fait porter? C'est la virginité île .Marie, qui ne sent point la corruption de la chair, ni le poids de ses convoitises. C'est, fidèles, que le Dieu Verbe s'est fait porter, quand il a voulu descendre du ciel; et c'est cette belle nuée qui a plu le Juste: Nubes pluant Justum. Et par cette doctrine évangélique, nous découvrons d'une même vue et la dignité de Marie, etc.), en ce que sa virginité bienheureuse a été choisie dès l'éternité pour donner Jésus-Christ au monde ; et vous voyez la dignité de Joseph, en ce que cette pureté de Marie, qui a été si utile à notre nature, a été confiée à ses soins et que c'est lui qui conserve au monde une chose si nécessaire. O Joseph, gardez ce dépôt : Depositum custodi. Gardez chèrement ce sacré dépôt de la pureté de Marie. Puisqu'il plaît au Père éternel de garder la virginité de Marie sous le voile du mariage , elle ne se peut plus conserver sans vous ; et aussi votre pureté est devenue en quelque sorte nécessaire au monde, par la charge glorieuse qui lui est donnée de garder celle de Marie (Car puisque c'était un conseil de Dieu de ne pas découvrir aux hommes le miracle de sa grossesse, jusqu'à ce que l'heure eu fût arrivée, qui ne voit manifestement que c'était une suite de ce conseil, de conserver la virginité de Marie sous le voile du mariage, pour la mettre à couvert de la calomnie dînant le temps qu'il plairait à Dieu de cacher un si grand mystère ? Et pour exécuter ce dessein, de protéger sa virginité par l'honnêteté nuptiale, ne lui fallait-il pas trouver un époux dont la pureté angélique pût en quelque sorte répondre à la sienne, et qui fût digne de vivre avec elle dans une sainte société de désirs tout spirituels? Joseph est choisi par la Providence pour accomplir un si grand mystère ; et ainsi la pureté de ce Saint est devenue en quelque sorte nécessaire au monde, par la charge qui lui est donnée de conserver celle de Marie).

C'est ici qu'il faut vous représenter un spectacle qui étonne toute la nature ; je veux dire ce mariage céleste, destiné par la Providence pour protéger la virginité et donner par ce moyen Jésus-Christ au monde. Mais qui prendrai-je pour mon conducteur dans une entreprise si difficile, sinon l'incomparable Augustin, qui traite si divinement ce mystère? Ecoutez ce savant évêque (De Genes, ad litt., lib. IX, cap. VII, n. 12), et suivez exactement sa pensée. Il remarque avant toutes choses qu'il y a trois liens dans le mariage : il y a premièrement le sacré contrat par lequel ceux que l'on unit se donnent entièrement l'un à l'autre; il y a secondement l'amour conjugal par lequel ils se vouent mutuellement un cœur, qui n'est plus capable de se partager et qui ne peut brûler d'autres flammes ; il y a enfin les enfants qui sont un troisième lien, parce que l'amour des parents venant pour ainsi dire à se rencontrer dans ces fruits communs de leur mariage, l'amour se lie par un nœud plus ferme.

Saint Augustin trouve ces trois choses dans le mariage de saint Joseph, et il nous montre que tout y concourt à garder la virginité (Contra Julian , lib. V, cap. XII, n. 46). Il y trouve premièrement le sacré contrat par lequel ils se sont donnés l'un à l'autre, et c'est Là qu'il faut admirer le triomphe de la pureté dans la vérité de ce mariage. Car Marie appartient à Joseph, et Joseph à la divine Marie; si bien que leur mariage est très-véritable, parce qu'ils se sont donnés l'un à l'autre. Mais de quelle sorte se sont-ils donnés? Pureté, voici ton triomphe. Ils se donnent réciproquement leur virginité, et sur cette virginité ils se cèdent un droit mutuel. Quel droit? De se la garder l'un à l'autre. Oui, Marie a droit de garder la virginité de Joseph, et Joseph a droit de garder la virginité de Marie. Ni l'un ni l'autre n'en peut disposer, et toute la fidélité de ce mariage consiste à garder la virginité. Voilà les promesses qui les assemblent , voilà le traité qui les lie. Ce sont deux virginités qui s'unissent, pour se conserver éternellement l'une l'autre par une chaste correspondance de désirs pudiques ; et il me semble que je vois deux astres, qui n'entrent ensemble en conjonction qu'à cause que leurs lumières s'allient. Tel est le nœud de ce mariage, d'autant plus ferme, dit saint Augustin (De Nupt. et Concup., lib. I, n. 12), que les promesses qu'ils se sont données doivent être plus inviolables, en cela même qu'elles sont plus saintes.

Qui pourrait maintenant vous dire quel devait être l'amour conjugal de ces bienheureux mariés? Car, o sainte virginité , vos flammes sont d'autant plus fortes qu'elles sont plus pures et plus dégagées; et le feu de la convoitise, qui est allumé dans nos corps, ne peut jamais égaler l'ardeur des chastes embrasements des esprits que l'amour de la pureté lie ensemble. Je ne chercherai pas des raisonnements pour prouver cette vérité ; mais je l'établirai par un grand miracle que j'ai lu dans saint Grégoire de Tours (Histor. Franc., lib. I, n. 42), au premier livre de son Histoire. Le récit vous en sera agréable, et du moins il relâchera vos attentions. Il dit que deux personnes de condition et de la première noblesse d'Auvergne , ayant vécu dans le mariage avec une continence parfaite, passèrent à une vie plus heureuse et que leurs corps furent inhumés en deux places assez éloignées. Mais il arriva une chose étrange : ils ne purent pas demeurer longtemps dans cette dure séparation ; et tout le monde fut étonné qu'on trouvât tout à coup leurs tombeaux unis, sans que personne y eût mis la main. Chrétiens, que signifie ce miracle ? Ne vous semble-t-il pas que ces chastes morts se plaignent de se voir ainsi éloignés? Ne vous semble-t-il pas qu'ils nous disent ( car permettez-moi de les animer et de leur prêter une voix, puisque Dieu leur donne le mouvement); ne vous semble-t-il pas qu'ils vous disent : Et pourquoi a-t-on voulu nous séparer ? Nous avons été si longtemps ensemble , et nous y avons toujours été comme morts, parce que nous avons éteint tout le sentiment des plaisirs mortels ; et étant accoutumés depuis tant d'années à être ensemble comme des morts, la mort ne nous doit pas désunir. Aussi Dieu permit qu'ils se rapprochèrent, pour nous montrer par cette merveille que ce ne sont pas les plus belles flammes que celles où la convoitise se mêle ; mais que deux virginités bien unies par un mariage spirituel en produisent de bien plus fortes, et qui peuvent, ce semble, se conserver sous les cendres mêmes de'la mort. C'est pourquoi Grégoire de Tours, qui nous a décrit cette histoire, ajoute que les peuples de cette contrée appelaient ordinairement ces sépulcres les sépulcres des deux amans, comme si ces peuples eussent voulu dire que c'étaient de véritables amans, parce qu'ils s'aimaient par l'esprit.

Mais où est-ce que cet amour si spirituel s'est jamais trouvé si parfait que dans le mariage de saint Joseph ? C'est là que l'amour était tout céleste, puisque toutes ses flammes et tous ses désirs ne tendaient qu'à conserver la virginité, et il est aisé de l'entendre. Car dites-nous, ô divin Joseph, qu'est-ce que vous aimez en Marie? Ah ! sans doute, ce n'était pas la beauté mortelle, mais cette beauté cachée et intérieure, dont la sainte virginité faisait le principal ornement. C'était donc la pureté de Marie qui faisait le chaste objet de ses feux; et plus il aimait cette pureté, plus il la voulait conserver, premièrement en sa sainte épouse, et secondement en lui-même, par une entière unité de cœur : si bien que son amour conjugal se détournant du cours ordinaire, se donnait et s'appliquait tout entier à garder la virginité de Marie. O amour divin et spirituel! Chrétiens, n'admirez-vous pas comme tout concourt dans ce mariage à conserver ce sacré dépôt ! Leurs promesses sont toutes pures, leur amour est tout virginal : il reste maintenant à considérer ce qu'il y a de plus admirable; c'est le fruit sacré de ce mariage, je veux dire le Sauveur Jésus.

Mais il me semble vous voir étonnés de m'entendre prêcher si assurément que Jésus est le fruit de ce mariage. Nous comprenons, direz-vous, que l'incomparable Joseph est père de Jésus-Christ par ses soins; mais nous savons qu'il n'a point de part à sa bienheureuse naissance. Comment donc nous assurez-vous que Jésus est le fruit de ce mariage? Cela peut-être paraît impossible : toutefois si vous rappelez à votre mémoire tant de vérités importantes que nous avons, ce me semble, si bien établies, j'espère que vous m'accorderez aisément que Jésus, ce bénit enfant, est sorti en quelque manière de l'union virginale de ces deux époux. Car, fidèles, n'avons-nous pas dit que c'est la virginité de Marie qui a attiré Jésus-Christ du ciel? Jésus n'est-il pas cette fleur sacrée que la virginité a poussée ? n'est-il pas le fruit bienheureux que la virginité a produit? Oui, certainement nous dit saint Fulgence, « il est le fruit, il est l'ornement, il est le prix et la récompensa de la sainte virginité : » Sanctœ virginitatis fructus, decus et munus (Ad Prob., epist. III, n. 6). C'est à cause de sa pureté que Marie a plu au Père éternel ; c'est à cause de sa pureté que le Saint-Esprit se répand sur elle et recherche ses embrassements, pour la remplir d'un germe céleste. Et par conséquent ne peut-on pas dire que c'est sa pureté qui la rend féconde? Que si c'est sa pureté qui la rend féconde, je ne craindrai plus d'assurer que Joseph a part à ce grand miracle. Car si cette pureté angélique est le bien de la divine Marie, elle est le dépôt du juste Joseph.

Mais je passe encore plus loin, chrétiens ; permettez-moi de quitter mon texte et d'enchérir sur mes premières pensées, pour vous dire que la pureté de Marie n'est pas seulement le dépôt, mais encore le bien de son chaste époux. Elle est à lui par son mariage, elle est à lui par les chastes soins par lesquels il l'a conservée. O féconde virginité ! si vous êtes le bien de Marie, vous êtes aussi le bien de Joseph. Marie l'a vouée, Joseph la conserve, et tous deux la présentent au Père éternel comme un bien gardé par leurs soins communs. Comme donc il a tant de part à la sainte virginité de Marie, il en prend aussi au fruit qu'elle porte : c'est pourquoi Jésus est son Fils, non pas à la vérité par la chair, mais il est son Fils par l'esprit à cause de l'alliance virginale qui le joint avec sa mère. Et saint Augustin l'a dit en un mot : Propter quod fidele conjugium parentes Christi vocari ambo meruerunt (De Nupt. et Concup., lib. I, ubi supra). O mystère de pureté ! ô paternité bienheureuse ! ô lumières incorruptibles qui brillent de toutes parts dans ce mariage !

Chrétiens, méditons ces choses, appliquons-les-nous à nous-mêmes : tout se fait ici pour l'amour de nous ; tirons donc notre instruction de ce qui s'opère pour notre salut. Voyez combien chaste, combien innocente est la doctrine du christianisme. Jamais ne comprendrons-nous quels nous sommes? Quelle honte, que nous nous souillions tous les jours par toutes sortes d'impuretés, nous qui avons été élevés parmi des mystères si chastes? Et quand est-ce que nous entendrons quelle est la dignité de nos corps, depuis que le Fils de Dieu en a pris un semblable? « Que la chair se soit jouée, dit Tertullien, ou plutôt qu'elle se soit corrompue, avant qu'elle eût été recherchée par son maître ; elle n'était pas digne du don de salut, ni propre à l'office de la sainteté. Elle était encore en Adam, tyrannisée par ses convoitises, suivant les beautés apparentes, et attachant toujours ses yeux à la terre. Elle était impure et souillée, parce qu'elle n'était pas lavée au baptême. Mais depuis qu'un Dieu en se faisant homme n'a pas voulu venir en ce monde, si la sainte virginité ne l'y attirait; depuis que trouvant au-dessous de lui-même la sainteté nuptiale, il a voulu avoir une Mère vierge, et qu'il n'a pas cru que Joseph fût digne de prendre le soin de sa vie, s'il ne s'y préparaît par la continence; depuis que, pour laver notre chair, son sang a sanctifié une eau salutaire où elle peut laisser toutes les ordures de sa première nativité : nous devons entendre, fidèles, que depuis ce temps-là la chair est toute autre. Ce n'est plus cette chair formée de la boue et engendrée par la convoitise; c'est une chair refaite et renouvelée par une eau très-pure et par l'Esprit-Saint (De Pudicit., n. 6). » Donc, mes Frères, respectons nos corps qui sont les membres de Jésus-Christ, gardons-nous de prostituer à l'impureté cette chair, que le baptême a faite vierge. « Possédons nos vaisseaux en honneur et non pas dans ces passions ignominieuses que notre brutalité nous inspire, comme les Gentils qui n'ont pas de Dieu. Car Dieu ne nous appelle pas à l'impureté, mais à la sanctification (I Thess., IV, 4, 5, 7) » en Notre-Seigneur Jésus-Christ. Honorons par la continence cette sainte virginité qui nous a donné le Sauveur, qui a rendu sa Mère féconde, qui a fait que Joseph a part à cette fécondité bienheureuse et l'élève, si je l'ose dire, jusqu'à être le père de Jésus-Christ même. Mais, fidèles, après avoir vu qu'il contribue en quelque façon à la naissance de Jésus-Christ en gardant la pureté de sa sainte Mère ; voyons maintenant ses soins paternels, et admirons la fidélité par laquelle il conserve ce divin Enfant que le Père céleste lui a confié; c'est ma seconde partie.

SECOND POINT.

Ce n'est pas assez au Père éternel d'avoir confié à Joseph la virginité de Marie : il lui prépare quelque chose de plus relevé ; et, après avoir commis à sa foi cette sainte virginité qui doit donner Jésus-Christ au monde, comme s'il avait dessein d'épuiser sa libéralité infinie en faveur de ce patriarche, il va mettre en ses mains Jésus-Christ lui-même, et il veut le conserver par ses soins. Mais si nous pénétrons le secret, si nous entrons au fond du mystère, c'est là, fidèles, que nous trouverons quelque chose de si glorieux au juste Joseph, que nous ne pourrons jamais assez le comprendre. Car Jésus, ce divin Enfant, sur lequel Joseph a toujours les yeux et qui fait l'admirable sujet de ses saintes inquiétudes, est né sur la terre comme un orphelin, et il n'a point de père en ce monde. C'est pourquoi saint Paul dit qu'il est sans père : Sinè patre (Hebr., VII, 3). Il est vrai qu'il en a un dans le ciel; mais à voir comme il l'abandonne, il semble que ce Père ne le connaît plus. Il s'en plaindra un jour sur la croix, lorsque l'appelant son Dieu et non pas son Père, « Et pourquoi, dira-t-il, m'abandonnez-vous (Matth., XXVII, 46)? » Mais ce qu'il a dit en mourant, il pouvait le dire dès sa naissance, puisque dès ce premier moment son Père l'expose aux persécutions et commence à l'abandonner aux injures. Tout ce qu'il fait en faveur de ce Fils unique pour montrer qu'il ne l'oublie pas, du moins ce qui paraît à nos yeux, c'est de le mettre en la garde d'un homme mortel qui conduira sa pénible enfance ; et Joseph est choisi pour ce ministère. Que fera ici ce saint homme? Qui pourrait dire avec quelle joie il reçoit cet abandonné, et comme il s'offre de tout son cœur pour être le père de cet orphelin ? Depuis ce temps-là, chrétiens, il ne vit plus que pour Jésus-Christ, il n'a plus de soin que pour lui ; il prend lui-même pour ce Dieu (Var. : Pour ce saint Enfant.) un cœur et des entrailles de père ; et ce qu'il n'est pas par nature, il le devient par affection.

Mais afin que vous soyez convaincus de la vérité d'un si grand mystère et si glorieux à Joseph, il faut vous le montrer par les Ecritures, et pour cela vous exposer une belle réflexion de saint Chrysostome. Il remarque dans l'Evangile que partout Joseph y paraît en père. C'est lui qui donne le nom à Jésus, comme les pères le donnaient alors; c'est lui seul que l'ange avertit de tous les périls de l'Enfant, et c'est à lui qu'il annonce le temps du retour. Jésus le révère et lui obéit : c'est lui qui dirige toute sa conduite comme en ayant le soin principal, et partout il nous est montré comme père. D'où vient cela, dit saint Chrysostome ? En voici la raison véritable. C'est, dit-il (In Matth., hom. IV, n. 6), que c'était un conseil de Dieu, de donner au grand saint Joseph tout ce qui peut appartenir à un père sans blesser la virginité : oper esti patros idion, ou loumainomenon to tes pathenias axioma touto soi didomi.

Je ne sais si je comprends bien toute la force de cette pensée, mais voici, si je ne me trompe, ce que veut dire ce grand évêque. Et premièrement supposons pour certain que c'est la sainte virginité qui empêche que le Fils de Dieu, en se faisant homme, ne choisisse un père mortel. En effet Jésus-Christ venant sur la terre, pour se rendre semblable aux hommes, comme il voulait bien avoir une mère, il ne devait pas refuser, ce semble, d'avoir un père tout ainsi que nous, et de s'unir encore à notre nature par le nœud de cette alliance. Mais la sainte virginité s'y est opposée, parce que les prophètes lui avoient promis qu'un jour le Sauveur la rendrait féconde ; et puisqu'il devait naître d'une vierge mère, il ne pouvait avoir de père que Dieu. C'est par conséquent la virginité qui empêche la paternité de Joseph. Mais peut-elle l'empêcher jusqu'à ce point que Joseph n'y ait plus de part, et qu'il n'ait aucune qualité de père? Nullement, dit saint Chrysostome; car la sainte virginité ne s'oppose qu'aux qualités qui la blessent ; et qui ne sait qu'il y en a dans le nom de père qui ne choquent pas la pudeur, et qu'elle peut avouer pour siennes? Ces soins, cette tendresse, cette affection, cela blesse-t-il la virginité? Voyez donc le secret de Dieu, et l'accommodement qu'il invente dans ce différend mémorable entre la paternité de Joseph et la pureté virginale. Il partage la paternité, et il veut que la virginité fasse le partage. Sainte pureté, lui dit-il, vos droits vous seront conservés. Il y a quelque chose dans le nom de père que la virginité ne peut pas souffrir; vous ne l'aurez pas, ô Joseph. Mais tout ce qui appartient à un père sans que la virginité soit intéressée (Var. : En soit offensée) : Voilà, dit-il, ce que je vous donne : Hoc tibi do, quod salvà virginitate paternum esse potest. Et par conséquent, chrétiens, Marie ne concevra pas de Joseph, parce que la virginité y serait bessée ; mais Joseph partagera avec Marie ces soins, ces veilles, ces inquiétudes, par lesquelles elle élèvera ce divin Enfant; et il ressentira pour Jésus cette inclination naturelle, toutes ces douces émotions, tous ces tendres empressements d'un cœur paternel.

Mais peut-être vous demanderez où il prendra ce cœur paternel, si la nature ne le lui donne pas? Ces inclinations naturelles peuvent-elles s'acquérir par choix, et l'art peut-il imiter ce que la nature écrit dans les cœurs? Si donc saint Joseph n'est pas père, comment aura-t-il un amour de père? C'est ici qu'il nous faut entendre que la puissance divine agit en cette œuvre. C'est par un effet de cette puissance que saint Joseph a un cœur de père ; et si la nature ne le donne pas, Dieu lui en fait un de sa propre main. Car c'est de lui dont il est écrit qu'il tourne où il lui plaît les inclinations. Pour l'entendre il faut remarquer une belle théologie que le Psalmiste nous a enseignée, lorsqu'il dit que Dieu forme en particulier tous les cœurs des hommes : Qui finxit singillatim corda eorum (Psal. XXXII, 15). Ne vous persuadez pas, chrétiens, que David regarde le cœur comme un simple organe du corps (Instrument de la vie), que Dieu forme par sa puissance comme toutes les autres parties qui composent l'homme (Les autres parties de nos corps). Il veut dire quelque chose de singulier: il considère le cœur en ce lieu comme principe de l'inclination ; et il le regarde dans les mains de Dieu comme une terre molle et humide, qui cède et qui obéit aux mains du potier et reçoit de lui sa figure. C'est ainsi, nous dit le Psalmiste, que Dieu forme en particulier tous les cœurs des hommes.

Qu'est-ce à dire, en particulier? Il fait un cœur de chair dans les uns, quand il les amollit par la charité ; un cœur endurci dans les autres, lorsque retirant ses lumières par une juste punition de leurs crimes, il les abandonne au sens réprouvé. Ne fait-il pas dans tous les fidèles, non un cœur d'esclave, mais un cœur d'enfant, quand il envoie en eux l'esprit de son Fils? Les apôtres tremblaient au moindre péril; mais Dieu leur fait un cœur tout nouveau, et leur courage devient invincible. Quels étaient les sentiments de Saül pendant qu'il paissait ses troupeaux ! Ils étaient sans doute bas et populaires. Mais Dieu en le mettant sur le trône, lui change le cœur par son onction : lmmutavit Dominus cor Saül (I Reg., X, 9) ; et il reconnaît incontinent qu'il est roi. D'autre part, les Israélites considéraient ce nouveau monarque comme un homme de la lie du peuple ; mais la main de Dieu leur touchant le cœur : Quorum Deus tetigit corda (Ibid., 26), aussitôt ils le voient plus grand et ils se sentent émus, en le regardant, de cette crainte respectueuse que l'on a pour ses souverains : c'est que Dieu faisait en eux un cœur de sujets.

C'est donc, fidèles, cette même main qui forme en particulier tous les cœurs des hommes, qui fait un cœur de père en Joseph et un cœur de fils en Jésus. C'est pourquoi Jésus obéit, et Joseph ne craint pas de lui commander. Et d'où lui vient cette hardiesse de commander à son Créateur? C'est que le vrai Père de Jésus-Christ, ce Dieu qui l'engendre dans l'éternité, ayant choisi le divin Joseph pour servir de père au milieu des temps à son Fils unique, a fait en quelque sorte couler en son sein quelque rayon ou quelque étincelle de cet amour infini qu'il a pour son Fils : c'est ce qui lui change le cœur, c'est ce qui lui donne un amour de père; si bien que le juste Joseph, qui sent en lui-même un cœur paternel formé tout à coup par la main de Dieu, sent aussi que Dieu lui ordonné d'user d'une autorité paternelle ; et il ose bien commander à celui qu'il reconnoît pour son maître.

Et après cela, chrétiens, qu'est-il nécessaire que je vous explique la fidélité de Joseph à garder ce sacré dépôt ? Peut-il manquer de fidélité à celui qu'il reconnaît pour son Fils unique? De sorte qu'il ne serait pas nécessaire que je vous parlasse de cette vertu, s'il n'était important pour votre instruction que vous ne perdiez pas un si bel exemple? Car c'est ici qu'il nous faut apprendre, par les traverses continuelles qui ont exercé saint Joseph depuis que Jésus-Christ est mis en sa garde, qu'on ne peut conserver ce dépôt sans peine, et que pour être fidèle à sa grâce il faut se préparer à souffrir. Oui certes, quand Jésus entre quelque part, il y entre avec sa croix, il y porte avec lui toutes ses épines, et il en fait part à tous ceux qu'il aime. Joseph et Marie étaient pauvres; mais ils n'avoient pas encore été sans maison, ils avoient un lieu pour se retirer (Var : Mais au moins avaient-ils leur maison, en laquelle ils se mettaient à couvert). Aussitôt que cet enfant vient au monde, on ne trouve point (Il n'y a plus) de maison pour eux, et leur retraite est dans une étable. Qui leur procure cette disgrâce, sinon celui dont il est écrit (Joan., I, 11) que, « venant en son propre bien, il n'y a pas été reçu par les siens, » et qu'il n'a pas de gîte assuré où il puisse reposer sa tête (Matth., VIII, 20)? Mais n'est-ce pas assez de leur indigence? Pourquoi leur attire-t-il des persécutions? Ils vivaient ensemble dans leur ménage, pauvrement, mais avec douceur, surmontant leur pauvreté par leur patience et par leur travail assidu. Mais Jésus ne leur permet pas ce repos : il ne vient au monde que pour les troubler, et il attire tous les malheurs avec lui. Hérode ne peut souffrir que cet enfant vive : la bassesse de sa naissance n'est pas capable de le cacher à la jalousie (A la rage) de ce tyran. Le Ciel lui-même trahit le secret : il découvre Jésus-Christ par une étoile; et il semble qu'il ne lui amène de loin des adorateurs, que pour lui susciter dans son pays propre un persécuteur impitoyable.

Que fera ici saint Joseph? Représentez-vous, chrétiens, ce que c'est qu'un pauvre artisan, qui n'a point d'autre héritage que ses mains, ni d'autre fonds que sa boutique, ni d'autre ressource que son travail (... Qu'un pauvre artisan, qui se voit tous les jours au bout de son fonds). Il est contraint d'aller en Egypte et de souffrir un exil fâcheux, et cela pour quelle raison? Parce qu'il a Jésus-Christ avec lui. Cependant croyez-vous, fidèles, qu'il se plaigne de cet Enfant incommode, qui le tire de sa patrie et qui lui est donné pour le tourmenter? Au contraire, ne voyez-vous pas qu'il s'estime heureux de souffrir en sa compagnie, et que toute la cause de son déplaisir (De ses douleurs), c'est le péril du divin Enfant qui lui est plus cher que lui-même? Mais peut-être a-t-il sujet d'espérer de voir bientôt unir ses disgrâces? Non, fidèles ; il ne l'attend pas; partout on lui prédit des malheurs. Siméon l'a entretenu des étranges contradictions que devait souffrir ce cher Fils : il en voit déjà le commencement, et il passe sa vie dans de continuelles appréhensions des maux qui lui sont préparés.

Est-ce assez pour éprouver sa fidélité? Chrétiens, ne le croyez pas ; voici encore une étrange épreuve. Si c'est peu des hommes pour le tourmenter, Jésus devient lui-même son persécuteur : il s'échappe adroitement de ses mains, il se dérobe à sa vigilance, et il demeure trois jours perdu. Qu'avez-vous fait, fidèle Joseph? Qu'est devenu le sacré dépôt que le Père céleste vous a confié? Ah ! qui pourrait ici raconter ses plaintes? Si vous n'avez pas encore entendu la paternité de Joseph, voyez ses larmes, voyez ses douleurs, et reconnaissez qu'il est père. Ses regrets le font bien connaître, et Marie a raison de dire à cette rencontre : Pater tuus et ego dolentes quœrebamus te (Luc., II, 48) : « Votre père et moi vous cherchions avec une extrême douleur. » O mon fils, dit-elle au Sauveur, je ne crains pas de l'appeler ici votre père, et je ne prétends pas faire tort à la pureté de votre naissance. Il s'agit de soins et d'inquiétudes; et c'est par là que je puis dire qu'il est votre père, puisqu'il a des inquiétudes vraiment paternelles : Ego et pater tuus; je le joins avec moi par la société des douleurs.

Voyez, fidèles, par quelles souffrances Jésus éprouve la fidélité, et i omme il ne veut être qu'avec ceux qui souffrent. Ames molles et voluptueuses, cet Enfant ne veut pas être avec vous; sa pauvreté a honte de votre luxe; et sa chair destinée à tant de supplices, ne peut supporter votre extrême délicatesse. Il cherche ces forts et ces courageux qui ne refusent pas de porter sa croix, qui ne rougissent pas d'être compagnons de son indigence et de sa misère. Je vous laisse à méditer ces vérités saintes; car pour moi je ne puis vous dire tout ce que je pense sur ce beau sujet. Je me sens appelé ailleurs, et il faut que je considère le secret du Père éternel confié à l'humilité de Joseph : il faut que nous voyions Jésus-Christ caché, et Joseph caché avec lui, et que nous nous excitions par ce bel exemple à l'amour de la vie cachée.

TROISIÈME POINT.

Que dirai-je ici, chrétiens, de cet homme caché avec Jésus-Christ? Où trouverai-je des lumières assez pénétrantes, pour percer les obscurités qui enveloppent la vie de Joseph? Et quelle entreprise est la mienne, de vouloir exposer au jour ce que l'Ecriture a couvert d'un silence mystérieux? Si c'est un conseil du Père éternel que son Fils soit caché au monde et que Joseph le soit avec lui, adorons les secrets de sa Providence sans nous mêler de les rechercher; et que la vie cachée de Joseph soit l'objet de notre vénération, et non pas la matière de nos discours. Toutefois il en faut parler, puisque je sais bien que je l'ai promis ; et il sera utile au salut des âmes de méditer un si beau sujet, puisque si je n'ai rien à dire autre chose, je dirai du moins, chrétiens, que Joseph a eu cet honneur d'être tous les jours avec Jésus-Christ, qu'il a eu avec Marie la plus grande part à ses grâces; que néanmoins Joseph a été caché, que sa vie, que ses actions, que ses vertus étaient inconnues. Peut-être apprendrons-nous d'un si bel exemple qu'on peut être grand sans éclat, qu'on peut être bienheureux sans bruit, qu'on peut avoir la vraie gloire sans le secours de la renommée par le seul témoignage de sa conscience : Gloria nostra hœc est, testimonium conscientiœ nostrœ (II Cor., I, 12); et cette pensée nous incitera à mépriser la gloire du monde : c'est la fin que je me propose.

Mais pour entendre solidement la grandeur et la dignité de la vie cachée de Joseph, remontons jusqu'au principe; et admirons avant toutes choses la variété infinie des conseils de la Providence dans les vocations différentes. Entre toutes les vocations, j'en remarque deux dans les Ecritures, qui semblent directement opposées : la première, celle des apôtres; la seconde, celle de Joseph. Jésus est révélé aux apôtres, Jésus est révélé à Joseph, mais avec des conditions bien contraires. Il est révélé aux apôtres pour l'annoncer par tout l'univers; il est révélé à Joseph pour le taire et pour le cacher. Les apôtres sont des lumières pour faire voir Jésus-Christ au monde ; Joseph est un voile pour le couvrir et sous ce voile mystérieux on nous cache la virginité do Marie et la grandeur du Sauveur des âmes. Aussi nous lisons dans les Ecritures que lorsqu'on le voulait mépriser : « N'est-ce pas là, disait-on, le fils de Joseph (Joan., VI, 42)?» Si bien que Jésus entre les mains des apôtres, c'est une parole qu'il faut prêcher : Prœdicate verbum Evangelii hujus (Act., V, 20.), « Prêchez la parole de cet Evangile; » et Jésus entre les mains de Joseph, c'est une parole cachée, Verbum absconditum (Luc., XVIII, 34), et il n'est pas permis de la découvrir. En effet voyez-en la suite. Les divins apôtres prêchent si hautement l'Evangile, que le bruit de leur prédication retentit jusqu'au ciel (Var. : Que la gloire en va jusqu'au ciel) : et saint Paul a bien osé dire que les conseils de la sagesse divine sont venus à la connaissance des célestes puissances par l'Eglise, dit cet Apôtre, et par le ministère des prédicateurs, Per Ecclesiam (Ephes., III, 10); et Joseph au contraire entendant parler des merveilles de Jésus-Christ, il écoute, il admire et se tait.

Que veut dire cette différence? Dieu est-il contraire à lui-même dans ces vocations opposées? Non, fidèles, ne le croyez pas : toute cette diversité tend à enseigner aux enfants de Dieu cette vérité importante, que toute la perfection chrétienne ne consiste qu'à se soumettre. Celui qui glorifie les apôtres par l'honneur de la prédication, glorifie aussi saint Joseph par l'humilité du silence; et par là nous devons apprendre que la gloire des chrétiens n'est pas dans les emplois éclatants, mais à faire ce que Dieu veut. Si tous ne peuvent pas avoir l'honneur de prêcher Jésus-Christ, tous peuvent avoir l'honneur de lui obéir; et c'est la gloire de saint Joseph, c'est le solide honneur du christianisme. Ne me demandez donc pas, chrétiens, ce que faisait saint Joseph dans sa vie cachée; il est impossible que je vous l'apprenne, et je ne puis répondre autre chose sinon ce que dit le divin Psalmiste : « Le juste, dit-il, qu'a-t-il fait? » Justus autem quid fecit (Psal. X, 4)? Ordinairement la vie des pécheurs fait plus de bruit que celle des justes, parce que l'intérêt et les passions, c'est ce qui remue tout dans le monde. Les pécheurs, dit David, ont tendu leur arc, ils l'ont lâché contre les justes, ils ont détruit, ils ont renversé, on ne parle que d'eux dans le monde : Quoniam quœ perfecisti, destruxerunt (Psal. X, 4). Mais le juste, ajoute-t-il, qu'a-t-il fait? Justus autem quid fecit? Il veut dire qu'il n'a rien fait. En effet il n'a rien fait pour les yeux des hommes, parce qu'il a tout fait (Var. : Réservé) pour les yeux de Dieu. C'est ainsi que vivait le juste Joseph. Il voyait Jésus-Christ, et il se tai-soit : il le goûtait, et il n'en parlait point; il se contentait de Dieu seul, sans partager sa gloire avec les hommes. Il accomplissait sa vocation, parce que, comme les apôtres sont les ministres de Jésus-Christ découvert, Joseph était le ministre et le compagnon de sa vie cachée.

Mais, chrétiens, pourrons-nous bien dire pourquoi il faut que Jésus se cache, pourquoi cette splendeur éternelle de la face du Père céleste se couvre d'une obscurité volontaire durant l'espace de trente années? Ah! superbe, l'ignores-tu? homme du monde, ne le sais-tu pas? C'est ton orgueil qui en est la cause; c'est ton vain désir de paraître, c'est ton ambition infinie et cette complaisance criminelle qui te fait honteusement détourner à un soin pernicieux de plaire aux hommes celui qui doit être employé à plaire à ton Dieu. C'est pour cela que Jésus se cache, il voit le désordre que ce vice produit ; il voit le ravage que cette passion fait dans les esprits, quelles racines elle y a jetées et combien elle corrompt toute notre vie depuis l'enfance jusqu'à la mort : il voit les vertus qu'elle étouffe par cette crainte lâche et honteuse de paraître sage et dévot : il voit les crimes qu'elle fait commettre, ou pour s'accommoder à la société par une damnable complaisance , ou pour satisfaire l'ambition à laquelle on sacrifie tout dans le monde. Mais, fidèles, ce n'est pas tout : il voit que ce désir de paraître détruit les vertus les plus éminentes, en leur faisant prendre le change, en substituant la gloire du monde à la place de celle du ciel, en nous faisant faire pour l'amour des hommes ce qu'il faut faire pour l'amour de Dieu. Jésus-Christ voit tous ces malheurs causés par le désir de paraître, et il se cache pour nous enseigner à mépriser le bruit et l'éclat du monde. Il ne croit pas que sa croix suffise pour dompter cette passion furieuse; il choisit, s'il se peut, un état plus bas et où il est en quelque sorte plus anéanti (Var. : Mais, chrétiens, pourrions-nous dire pourquoi il faut que Jésus se cache, pourquoi cette splendeur...? Pourquoi le fait-il, et que nous veut-il enseigner? C'est qu'il voit au fond de nos cœurs combien nous sommes tyrannisés par le désir de paraître. C'est le premier vice qui se montre en l'homme, et c'est le dernier qui le quitte. Il éclate dès notre enfance, il corrompt toute notre vie, il nous suit jusqu'à la mort. Combien étouffe-t-il de vertus par cette crainte honteuse de paraître sage? Combien fait-il faire de crimes pour satisfaire l'ambition? etc. C'est donc le vice le plus dangereux et le plus enraciné dans l'esprit des hommes; et je ne m'étonne pas, mon Sauveur, si vous vous cachez avec ceux que vous aimez le plus sur la terre, c'est-à-dire avec Joseph et Marie, pour nous apprendre par ce grand exemple que le bruit et l'éclat du monde est l'objet de votre mépris, qu'il n'est point de véritable grandeur que d'obéir à Dieu notre Père, en quelque état qu'il nous veuille mettre).

Car enfin je ne craindrai pas de le dire : Mon Sauveur, je vous connais mieux à la croix et dans la honte de votre supplice, que je ne fais dans cette bassesse et dans cette vie inconnue. Quoique votre corps soit tout déchiré, que votre face soit ensanglantée (Défigurée), et que bien loin de paraître Dieu, vous n'ayez pas même la figure d'homme (A peine vous reste-t-il une figure d'homme), toutefois vous ne m'êtes pas si caché et je vois, au travers de tant de nuages, quelque rayon de votre grandeur, dans cette constante résolution par laquelle vous surmontez les plus grands tourments. Votre douleur a de la dignité, puisqu'elle vous fait trouver un adorateur dans l'un des compagnons de votre supplice. Mais ici je ne vois rien que de bas; et dans cet état d'anéantissement, un ancien a raison de dire que vous êtes injurieux à vous-même : Adultus non gestit agnosci, sed contumeliosus insuper sibi est (Tertull., de Patient., n. 3). Il est injurieux à lui-même, parce qu'il semble qu'il ne fait rien et qu'il est inutile au monde. Mais il ne refuse pas cette ignominie; il veut bien que cette injure soit ajoutée à toutes les autres qu'il a souffertes, pourvu qu'en se cachant avec Joseph et avec l'heureuse Marie, il nous apprenne par ce grand exemple que s'il se produit quelque jour au inonde, ce sera par le désir de nous profiter et pour obéir à son Père ; qu'en effet toute la grandeur consiste à nous conformer aux ordres de Dieu, de quelque sorte qu'il lui plaise disposer de nous; et enfin que cette obscurité que nous craignons tant, est si illustre et si glorieuse, qu'elle peut être choisie même par un Dieu. Voilà ce que nous enseigne Jésus-Christ caché avec toute son humble famille, avec Marie et Joseph, qu'il associe à l'obscurité de sa vie à cause qu'ils lui sont très-chers. Prenons-y donc part avec eux , et cachons-nous avec Jésus-Christ.

Chrétiens, ne savez-vous pas que Jésus-Christ est encore caché (Var. : Pratiquons cette leçon importante. Eh! fidèles, ne voyez-vous pas que Jésus-Christ est encore caché?) ? Il souffre qu'on blasphème tous les jours son nom, et qu'on se moque de son Evangile, parce que l'heure de sa grande gloire n'est pas arrivée. Il est caché avec son Père, et nous sommes cachés en Dieu avec lui, comme parle le divin Apôtre. Puisque nous sommes cachés avec lui, ce n'est pas en ce lieu d'exil que nous devons rechercher la gloire ; mais quand Jésus se montrera en sa majesté, ce sera alors le temps de paraître : Cùm Christus apparuerit, tunc et simul apparebimus cum illo in gloriâ (Coloss., III, 4). O Dieu qu'il fera beau paraître en ce jour où Jésus nous louera devant ses saints anges, à la face de tout l'univers e! devant son Père céleste ! Quelle nuit, quelle obscurité assez longue pourra nous mériter cette gloire? Que les hommes se taisent de nous éternellement, pourvu que Jésus-Christ en parle en ce jour. Toutefois craignons, chrétiens, cette terrible parole qu'il a prononcée dans son Evangile : « Vous avez reçu votre récompense (Matth., VI, 2). » Vous avez voulu la gloire des hommes : vous l'avez eue; vous êtes payé; il n'y a plus rien à attendre. O envie ingénieuse de notre ennemi, qui nous donne les yeux des hommes, afin de nous ôter ceux de Dieu; qui par une justice (Reconnaissance) malicieuse s'offre à récompenser nos vertus, de peur que Dieu ne les récompense ! Malheureux, je ne veux point de ta gloire : ni ton éclat ni ta vaine pompe ne peuvent pas payer mes travaux. J'attends ma couronne d'une main plus chère, et ma récompense d'un bras plus puissant. Quand Jésus paraîtra en sa majesté, c'est alors, c'est alors que je veux paraître.

C'est là, fidèles, que vous verrez ce que je ne puis vous dire aujourd'hui : vous découvrirez les merveilles de la vie cachée de Joseph; vous saurez ce qu'il a fait durant tant d'années, et combien il est glorieux de se cacher avec Jésus-Christ. Ah! sans doute il n'est pas de ceux qui ont reçu leur récompense en ce monde : c'est pourquoi il paraîtra alors, parce qu'il n'a pas paru; il éclatera, parce qu'il n'a point éclaté. Dieu réparera l'obscurité de sa vie ; et sa gloire sera d'autant plus grande, qu'elle est réservée pour la vie future.

Aimons donc cette vie cachée où Jésus s'est enveloppé avec Joseph. Qu'importe que les hommes nous voient? Celui-là est follement ambitieux à qui les yeux de Dieu ne suffisent pas, et c'est lui faire trop d'injure que de ne se contenter pas de l'avoir pour spectateur. Que si vous êtes dans les grandes charges et dans les emplois importants, si c'est une nécessité que votre vie soit toute publique, méditez du moins sérieusement que vous ferez enfin une mort privée , puisque tous ces honneurs ne vous suivront pas. Que le bruit que les hommes font autour de vous ne vous empêche pas d'écouter les paroles du Fils de Dieu. Il ne dit pas : Heureux ceux qu'on loue; mais il dit dans son Evangile : « Heureux ceux que l'on maudit pour l'amour de moi (Matth., V, 11). » Tremblez donc, dans cette gloire qui vous environne, de ce que vous n'êtes pas jugés dignes des opprobres de l'Evangile. Mais si le monde nous les refuse, chrétiens, faisons-nous-en à nous-mêmes; reprochons-nous devant Dieu notre ingratitude et nos vanités ridicules : mettons-nous à nous-mêmes devant notre face toute la honte de notre vie; soyons du moins obscurs à nos yeux par une humble confession de nos crimes ; et participons comme nous pouvons à la confusion de Jésus, afin de participer à sa gloire. Amen.

Madame ,

Cette grandeur qui vous environne, empêche sans doute Votre Majesté de pouvoir goûter avec Jésus-Christ cette obscurité bienheureuse. Votre vie est dans la lumière, votre piété perce les nuages dans lesquels votre humilité veut l'envelopper. Les victoires de notre grand roi relèvent l'éclat de votre couronne ; et ce qui surpasse toutes les victoires, c'est qu'on ne parle plus par toute la France que de cette ardeur toute chrétienne avec laquelle Votre Majesté travaille à faire descendre la paix sur la terre, d'où nos crimes l'ont bannie depuis tant d'années, et à rendre le calme à cet Etat après en avoir soutenu toutes les tempêtes avec une résolution si constante. Parmi tant de gloire et tant de grandeur, quelle part peut prendre Votre Majesté à l'obscurité de Jésus-Christ et aux opprobres de son Evangile? Puisque le monde s'efforce à lui donner des louanges, où pourra-t-elle trouver de l'humiliation, si elle ne la prend d'elle-même. C'est, Madame, ce qui oblige Votre Majesté, lorsqu'elle se retire avec Dieu , de se dépouiller à ses pieds de toute cette magnificence royale, qui aussi bien s'évanouit devant lui (Var. : Ne sert de rien), et là de se couvrir humblement la face de la sainte contusion de la pénitence. C'est trop flatter les grands que de leur persuader qu'ils sont impeccables : au contraire qui ne sait pas que leur condition éminente leur apporte ce mal nécessaire, que leurs fautes ne peuvent presque être médiocres? C'est, Madame, dans la vue de tant de périls que Votre Majesté doit s'humilier. Tous les peuples loueront sa sage conduite dans toute l'étendue de leurs cœurs ; elle seule s'accusera, elle seule se confondra devant Dieu, et participera par ce moyen aux opprobres de Jésus-Christ pour participer à sa gloire, que je lui souhaite éternelle. Amen.

(a) Prêché d'abord le 19 mars 1657, aux Feuillans de la rue Saint-Honoré, devant le cardinal Barberini, neveu d'Urbain VIII; vingt-deux évêques, réunis pour l'assemblée générale du clergé de France; l'abbé de Rancé, Jean Baillet François de Nesmond, Dominique de Ligny, Santeul, etc.

Voici la preuve de tout cela, dans la Muse historique du 24 mars 1657.

Bossuet, ce jeune docteur,

Cet excellent prédicateur,

Et dont l'éloquence naissante

Est si pressante et si puissante,

Lundi, dans les Feuillans, prêcha,

Et plus que jamais épancha

Dans les cœurs de son auditoire

Le dégoût de la fausse gloire

Et de ce grand éclat mondain,

Que les sages ont à dédain,

Et qui n'est qu'une piperie

Alléguant l'Epoux de Marie,

Oui se plut, exempt de péché,

D'être un trésor toujours caché,

Et qui fut toujours si modeste.

Il débita cette matière

Avec tant d'art et de lumière,

Avec tant de moralité,

Avec tant de capacité,

Que l'éminence barberine,

Admirant sa rare doctrine,

Et plus de vingt et deux prélats

De l'ouïr n'étaient jamais las.

Le même sermon fut prêché pour la seconde fois deux ans plus tard, le 19 mars 1659, aux Carmélites de la rue Saint-Jacques, devant la reine mère. Tous ceux qui l'entendirent aux Feuillans, les écrivains les prêtres et les évoques furent ravis d'admiration; le Depositum custodi, comme on s'exprimait alors, fit longtemps le sujet de toutes les conversations et de tous les éloges; la reine Anne d'Autriche, qui avait passé la fête de Saint-Joseph aux Carmélites, voulut l'entendre à son tour.

C'est le prédicateur qui nous apprend lui-même cette circonstance : «Madame, dit-il à la reine dans l'exorde, je supplie Votre Majesté de permettre que je publie hautement les soumissions que je rends aux commandements que j'ai reçus d'elle. Il lui plaît d'ouïr de ma bouche ce panégyrique du grand saint Joseph : elle m'ordonne de rappeler en mon souvenir des idées que le temps avait effacées. » Bossuet n'eut que deux jours pour recueillir ses souvenirs; car il s'exprime ainsi dans une variante : « Madame, que je dise avec tout le respect que je dois, que me donnant à peine deux jours pour rappeler a mon souvenir des idées que le temps avait effacées, il semble que Votre Majesté m'ait voulu ôter le loisir d'y joindre de nouvelles pensées. »

Le sermon nous donne aussi le moyen de fixer le jour où il fut prononcé. L'auteur dit dans une allocution qu'il joignit à la péroraison : « Les victoires de notre grand roi relèvent l'éclat de votre couronne; et ce qui surpasse toutes les victoires, c'est qu'on ne parle plus par toute la France que de cette ardeur toute chrétienne avec laquelle Votre Majesté travaille à faire descendre la paix sur la terre, d'où nos crimes l'ont bannie depuis tant d'années... » Dans les temps qui précédèrent immédiatement ce discours, pendant que les armées françaises remportaient en Italie victoires sur victoires, elles marchaient en Flandre de triomphes en triomphes sous la conduite de Turenne. A la fin de décembre 1658, l'ambassadeur de Sa Majesté catholique offrit à Louis XIV, pour gage de la paix, l'infante d'Espagne ; et la veille du jour où Bossuet félicita la reine de ses efforts pour la pacification des deux peuples, le 18 mars 1659, Gui Patin écrivait à un de ses amis : « La paix est presque faite, la reine me l'a dit. » Le 3 juillet suivant, la reine elle-même se rendit sur les frontières d'Espagne, et la paix fut signée bientôt après.

Le journaliste versificateur confirme notre date dans la Muse historique du 22 mars 1659 :

L'abbé Bossuet, esprit rare,

Qu'aux plus éloquents ou compare,

Mercredi, jour de Saint-Joseph,

Aux Carmélites, dans la nef,

Fit un sermon si mémorable,

Qu'il passa pour incomparable.

Car, soit qu'il fût bien énoncé,

Ou qu'il fût bien prononcé;

Soit pour quantité de passages

Tirés par lui des saintes pages;

Soit qu'il fût savant, spécieux,

Moral, méthodique et pieux;

Certes tous ceux de l'audience

En admirèrent l'excellence;

Surtout les prélats et docteurs

Et d'autres grands prédicateurs,

Qui d'aller là prirent la peine ;

Et même notre auguste reine,

Dont l'esprit dévot et chrétien

Discerne les choses fort bien,

Avant et durant sa retraite,

En parut plus que satisfaite.

Santeul entendit le Depositum custodi, si bien qu'il en reproduisit la division dans une de ses plus belles strophes.

Alto progeniem quàm bene tibi creditant

Servas consilio, depositum Dei!

Tecum pervigiles Coelituum Pater

Curas juraque dividit.

Les éditeurs de Saint-Dizier, qui ont copié les éditeurs de Besançon, qui ceux de Versailles, qui ceux de Liège, qui ceux de Paris, qui ceux des Blancs Manteaux, disent en lête du célèbre panégyrique : « Précité devant la reiue, en 1660, dans l'église des RR. PP. Feuillans. » Cette indication pourrait s'appuyer sur un passage de l'abbé Ledieu, cela est vrai; niais elle n'en est pas moins manifestement fausse. La paix était faite en 1660 : Bossuet n'aurait donc pu cette année-là féliciter La reine de ses efforts pour l'obtenir. Bien plus la reine était dans les Pyrénées, et Bossuet se trouvait à Dijon dans le mois de mars 1660 : comment aurait-il pu, l'un prêcher, l'autre entendre le sermon à Paris?

SOURCE : http://www.abbaye-saint-benoit.ch/bossuet/volume012/007.htm

SECOND PANÉGYRIQUE DE SAINT JOSEPH (a).

Quasi fit sibi Deus virum juxta cor suum.

Le Seigneur s'est cherché un homme selon son cœur. I Reg., XIII, 13.

 

Cet homme selon le cœur de Dieu ne se montre pas au dehors, et Dieu ne le choisit pas sur les apparences, ni sur le témoignage de la voix publique. Lorsqu'il envoya Samuel dans la maison de Jessé pour y trouver David, le premier de tous qui a mérité cet éloge, ce grand homme, que Dieu destinait à la plus auguste couronne du monde, n'était pas même connu dans sa famille. On présente sans songer à lui tous ses aines au prophète ; mais Dieu, qui ne juge pas à la manière des hommes, l'avertissait en secret de ne regarder pas à leur riche taille, ni à leur contenance hardie (Var. : Mine hardie) : si bien que rejetant ceux que l'on produisait dans le monde , il fit approcher celui que l'on envoyait paître les troupeaux ; et versant sur sa tête l'onction royale, il laissa ses parents étonnés d'avoir si peu jusqu'alors connu ce fils, que Dieu choisissait avec un avantage si extraordinaire (Var. : Sur lequel Dieu arrêtait son choix).

Une semblable conduite de la Providence divine me fait appliquer aujourd'hui à Joseph, le fils de David, ce qui a été dit de David lui-même. Le temps était arrivé que Dieu cherchât un homme selon son cœur, pour déposer en ses mains ce qu'il avait de plus cher; je veux dire la personne de son Fils unique, l'intégrité de sa sainte Mère, le salut du genre humain, le secret le plus sacré de son conseil, le trésor du ciel et de la terre. Il laisse Jérusalem et les autres villes renommées ; il s'arrête sur Nazareth ; et dans cette bourgade inconnue il va choisir encore un homme inconnu, un pauvre artisan, Joseph en un mot, pour lui confier un emploi dont les anges du premier ordre se seraient sentis honorés, afin, Messieurs, que nous entendions que l'homme selon le cœur de Dieu doit être lui-même cherché dans le cœur, et que ce sont les vertus cachées qui le rendent digne de cette louange. Comme je me propose aujourd'hui de traiter ces vertus cachées, c'est-à-dire de vous découvrir le cœur du juste Joseph, j'ai besoin plus que jamais, chrétiens, que celui qui s'appelle le Dieu de nos cœurs (Psal. LXXII, 26) m'éclaire par son Saint-Esprit. Mais quelle injure ferions-nous à la divine Marie, si ayant accoutumé en d'autres sujets de lui demander son secours, maintenant qu'il s'agit de son saint époux, nous ne nous efforcions de lui dire avec une dévotion particulière : Ave.

C'est un vice ordinaire aux hommes, de se donner entièrement au dehors et de négliger le dedans, de travailler à la montre et à l'apparence et de mépriser l'effectif et le solide, de songer souvent quels ils paraissent et de ne penser point quels ils doivent être. C'est pourquoi les vertus qui sont estimées, ce sont celles qui se mêlent d'affaires et qui entrent dans le commerce des hommes : au contraire les vertus cachées et intérieures, où le public n'a point de part, où tout se passe entre Dieu et l'homme, non-seulement ne sont pas suivies, mais ne sont pas même entendues. Et toutefois c'est dans ce secret que consiste tout le mystère de la vertu véritable. En vain pensez-vous former un bon magistrat, si vous ne faites auparavant un homme de bien : en vain vous considérez quelle place vous pourrez remplir dans la société civile, si vous ne méditez auparavant quel homme vous êtes en particulier. Si la société civile élève un édifice, l'architecte fait tailler premièrement une pierre, et puis on la pose dans le bâtiment (Une pierre, avant de la mettre avec les autres). Il faut composer un homme en lui-même, avant que de méditer quel rang on lui donnera parmi les autres; et si l'on ne travaille (Bâtit) sur ce fonds, toutes les autres vertus, si éclatantes qu'elles puissent être, ne seront que des vertus de parade et appliquées par le dehors (De parade et artificielles), qui n'auront point de corps ni de vérité. Elles pourront nous acquérir de l'estime et rendre nos mœurs agréables, enfin elles pourront nous former au gré et selon le cœur des hommes ; mais il n'y a que les vertus particulières qui aient ce droit admirable, de nous composer au gré et selon le cœur de Dieu.

Ce sont ces vertus particulières, c'est cet homme de bien , cet homme au gré de Dieu et selon son cœur, que je veux vous montrer aujourd'hui en la personne du juste Joseph, (Note marg. : Je m'attache à sa vie particulière; et pour vous en donner le tableau, je n'irai pas chercher bien loin, ni des conjectures douteuses, ni des révélations apocryphes. Le peu que nous avons dans les Ecritures me suffit pour vous faire voir, dans le bon Joseph, l'idée et le caractère de cet homme de bien que nous cherchons, qui a réglé avec Dieu son intérieur) Je laisse les dons et les mystères qui pourraient relever son panégyrique. Je ne vous dis plus, chrétiens, qu'il est le dépositaire des trésors célestes, le père de Jésus-Christ, le conducteur de son enfance, le protecteur de sa vie, l'époux et le gardien de sa sainte Mère. Je veux taire tout ce qui éclate pour faire l'éloge d'un Saint dont la principale grandeur est d'avoir été à Dieu sans éclat. Les vertus mêmes dont je parlerai ne sont ni de la société ni du commerce ; tout est renfermé dans le secret de sa conscience. La simplicité, le détachement, l'amour de la vie cachée sont donc les trois vertus du juste Joseph , que j'ai dessein de vous proposer. Vous me paraissez étonnés de voir l'éloge d'un si grand Saint dont la vocation est si haute, réduit à trois vertus si communes : mais sachez qu'en ces trois vertus consiste le caractère de cet homme de bien dont nous parlons ; et il m'est aisé de vous faire voir que c'est aussi en ces trois vertus que consiste le caractère du juste Joseph. Car, mes Sœurs, cet homme de bien que nous considérons, pour être selon le cœur de Dieu, il faut premièrement qu'il le cherche; en second lieu, qu'il le trouve; en troisième lieu, qu'il en jouisse. Quiconque cherche Dieu , qu'il cherche en simplicité celui qui ne peut souffrir Var. : Qui n'aime point a) les voies détournées. Quiconque veut trouver Dieu, qu'il se détache de toutes choses pour trouver celui qui veut être lui seul tout notre bien. Quiconque veut jouir de Dieu, qu'il se cache et qu'il se retire pour jouir en repos, clans la solitude, de celui qui ne se communique point parmi le trouble et l'agitation du monde (Il faut qu'il se retire avec lui; il faut pour ainsi dire qu'il se cache en lui, afin de le goûter en repos). C'est ce qu'a fait notre patriarche. Joseph, homme simple, a cherché Dieu; Joseph, homme détaché, a trouvé Dieu ; Joseph, homme retiré, a joui de Dieu : c'est le partage de ce discours (O Joseph, homme simple, vous cherchez Dieu en simplicité; et il prend soin de guider vos pas, il vous envoie ses anges pour vous instruire; tout le ciel veille à votre conduite. O Joseph, homme détaché, vous allez et venez comme Dieu vous mène : partout où il vous appelle, vous y trouvez votre maison et votre patrie; votre cœur ne tient à rien sur la terre. Il fallait que vous fussiez ainsi disposé, pour être digne de recevoir en votre maison ce Dieu incarné qui se donne à vous. O Joseph, homme de retraite, vous savez ce que c'est que de jouir d'un Dieu ; et dans le dessein de le posséder en la paix de votre cœur, de peur que la gloire du monde ne vous détourne, ou que son tracas ne vous trouble, vous vous enveloppez avec Jésus-Christ dans l'amour de la vie cachée. O l'homme juste, l'homme de Dieu et l'homme selon sou cœur ! Apprenez de là, chrétiens, que d'être un bon particulier c'est quelque chose de grand et de vénérable, et dépouillez cette ambition qui vous ôte à Dieu et à vous-mêmes sous prétexte de vous donner au public. Mais pour mieux comprendre cette vérité, venez considérer avant toutes choses la simplicité de Joseph dans ma première partie.).

Quand je vous parle de la sainte simplicité, ne croyez pas entendre le nom d'une vertu particulière. Dans le style de l'Ecriture, homme simple n'est autre chose que la définition d'un homme de bien. Jacob, dit-elle, était homme simple, c'est-à-dire était homme juste (Genes., XXV, 27); et c'est ainsi que le Saint-Esprit a accoutumé de parler. Toutefois, chrétiens, il y a quelque chose de singulier qui nous est représenté par cette expression, et il faut tâcher de l'entendre. La simplicité, si je ne me trompe, est une certaine droiture d'un cœur qui est sincère avec Dieu; et c'est pourquoi l'Ecriture sainte joint toujours ces deux qualités dans la définition de l'homme de bien. Job, dit-elle, était simple et droit : Erat vir ille simplex et rectus (Job, I,1). Ainsi la simplicité, c'est la droiture du cœur; et vous entendez bien, aines saintes, que cette droiture de coeur, c'est la pureté d'intention : de sorte qu'un homme simple, c'est un homme dont le cœur est droit avec Dieu, c'est-à-dire dont les intentions sont droites et pures qui n'aime que Dieu dans le cœur, qui marche à lui sans détour; et c'est la première qualité d'un homme de bien. Vous pouvez juger aisément combien elle est nécessaire par cette réflexion.

PREMIER POINT.

Le chemin de la vertu n'est pas de ces grandes routes dans lesquelles on peut s'étendre avec liberté : au contraire nous apprenons par les saintes Lettres que ce n'est qu'un petit sentier et une voie étroite et serrée, et tout ensemble extrêmement droite : Semita justi recta est, rectus callis justi ad ambulandum (Isa., XXVI, 7). Par où nous devons apprendre qu'il faut y marcher en simplicité et dans une grande droiture. Si peu non-seulement que l'on se détourne, mais même que l'on chancelle dans cette voie, on tombe dans les écueils dont elle est environnée de part et d'autre. C'est pourquoi le Saint-Esprit voyant ce péril, nous avertit si souvent de marcher dans la voie qu'il nous a marquée, sans jamais nous détourner à droite ou à gauche : Non declinabitis neque ad dexteram neque ad sinistram (Deut., V, 32; XVII, 11 ; Prov., IV, 27; Isa., XXX, 21) ; nous enseignant par cette parole que pour tenir cette voie, il faut dresser tellement son intention, qu'on ne lui permette jamais de se relâcher ni de faire le moindre pas de côté ou d'autre.

C'est ce qui s'appelle dans les Ecritures avoir le cœur droit avec Dieu, et marcher en simplicité devant sa face. C'est le seul moyen de le chercher et la voie unique pour aller à lui, parce que, comme dit le Sage, « Dieu conduit le juste par les voies droites : » Justum deduxit Dominus per vias rectas (Sapient., X, 10). Car il veut qu'on le cherche avec grande ardeur, et ainsi que l'on prenne les voies les plus courtes, qui sont toujours les plus droites : si bien qu'il ne croit pas qu'on le cherche, lorsqu'on ne marche pas droitement à lui. C'est pourquoi il ne veut point ceux qui s'arrêtent, il ne veut point ceux qui se détournent, il ne veut point ceux qui se partagent. Quiconque prétend partager son cœur entre la terre et le ciel ne donne rien au ciel, et tout à la terre, parce que la terre retient ce qu'il lui engage, et que le ciel n'accepte pas ce qu'il lui offre.

Vous devez entendre par ce discours que cette bienheureuse simplicité tant vantée dans les saintes Lettres, c'est une certaine droiture de cœur et une pureté d'intention ; et l'acte principal de cette vertu, c'est d'aller à Dieu de bonne foi et sans s'en imposer à soi-même : acte nécessaire et important, qu'il faut que je vous explique. Ne vous persuadez pas, chrétiens, que je parle ainsi sans raison. Car si dans la voie de la vertu il y en a qui trompent les autres, beaucoup aussi se trompent eux-mêmes. Ceux qui se partagent entre les deux voies, qui veulent avoir un pied dans l'une et dans l'autre, qui se donnent tellement à Dieu qu'ils ont toujours un regard au monde ; ceux-là ne marchent point en simplicité ni devant Dieu ni devant les hommes, et n'ont point par conséquent de vertu solide. Ils ne sont pas droits avec les hommes, parce qu'ils imposent à leur vue par l'image d'une piété qui ne peut être que contrefaite, étant altérée par le mélange : ils ne sont pas droits devant Dieu, parce que pour plaire à ses yeux, il ne suffît pas, chrétiens, de produire par étude et par artifice des actes de vertu empruntés et des directions d'intention forcées.

Un homme engagé dans l'amour du monde, viole tous les jours les lois les plus saintes de la bonne foi, ou de l'amitié, ou de l'équité naturelle que nous devons aux plus étrangers, pour satisfaire à son avarice. Cependant sur une certaine inclination vague et générale qui lui reste pour la vertu, il s'imagine être homme de bien et il en veut produire des actes : mais quels actes, ô Dieu tout-puissant ? Il a ouï dire à ses directeurs ce que c'est qu'un acte de détachement, ou un acte de contrition et de repentance : il tire de sa mémoire les paroles qui le composent, ou l'image des sentiments qui le forment. Il les applique comme il peut sur sa volonté, car je ne puis dire autre chose (Var. : Il les applique pour ainsi dire sur sa volonté; car je ne puis dire qu'il les produit), puisque son intention y est opposée, et il s'imagine être vertueux; mais il se trompe, il s'abuse, il se joue lui-même.

Pour se rendre agréable à Dieu, il ne suffit pas, chrétiens, de tirer par artifice (Par étude, comme par machine) des actes de vertu forcés et des directions d'intention étudiées (Var. : Artificielles). Les actes de piété doivent naître du fond du cœur, et non pas être empruntés de l'esprit ou de la mémoire. Mais ceux qui viennent du cœur ne souffrent point de partage. « Nul ne peut servir deux maîtres (Matth., VI, 21) : » Dieu ne peut souffrir cette intention louche, si je puis parler de la sorte, qui regarde de deux côtés en un même temps. Les regards ainsi partagés, rendent l'abord d'un homme choquant et difforme; et l’âme se défigure elle-même, quand elle tourne en deux endroits ses intentions. «Il faut, dit le Fils de Dieu, que votre œil soit simple (Luc., XI, 31), » c'est-à-dire que votre regard soit unique; et pour parler encore en termes plus clairs, que l'intention pure et dégagée s'appliquant toute entière à la même fin, le cœur prenne sincèrement et de bonne foi les sentiments que Dieu veut. Mais ce que j'en ai dit en général, se connaîtra mieux dans l'exemple.

Dieu a ordonné au juste Joseph de recevoir la divine Vierge comme son Epouse fidèle pendant que sa grossesse semble la convaincre (Pendant qu'elle devient mère sans qu'il y ait part), de regarder comme son Fils propre un enfant qui ne le touche que parce qu'il est dans sa maison, de révérer comme son Dieu celui auquel il est obligé de servir de protecteur et de gardien. Dans ces trois choses, mes Frères, où il faut prendre des sentiments délicats et que la nature ne peut pas donner, il n'y a qu'une extrême simplicité qui puisse rendre le cœur docile et traitable. Voyons ce que fera le juste Joseph. Nous remarquerons en son lieu qu'à l'égard de sa sainte Epouse, jamais le soupçon ne fut plus modeste, ni le doute plus respectueux : mais enfin il était si juste, qu'il ne pouvait pas se désabuser sans que le ciel s'en mêlât. Aussi un ange lui déclare, de la part de Dieu, qu'elle a conçu de son Saint-Esprit (Matth., I, 20). Si son intention eût été moins droite, s'il n'eût été à Dieu qu'à demi, il ne se serait pas rendu tout à fait ; il serait demeuré au fond de son aine quelque reste de soupçon mal guéri, et son affection pour la sainte Vierge aurait toujours été douteuse et tremblante. Mais son cœur, qui cherche Dieu en simplicité (Son cœur simple et innocent), ne sait point se partager avec Dieu : il n'a point de peine à connaître que la vertu incorruptible de sa sainte Epouse méritait le témoignage du Ciel. Il surpasse la foi d'Abraham, bien qu'il nous soit donné dans les Ecritures (Rom., IV, 11 et seq) comme le modèle de la foi parfaite. Abraham est loué dans les saintes Lettres pour avoir cru l'enfantement d'une stérile (Genes., XV, 6) : Joseph a cru celui d'une vierge, et il a reconnu en simplicité ce grand et impénétrable mystère de la virginité féconde.

Mais voici quelque chose de plus admirable. Dieu veut que vous receviez comme votre Fils cet Enfant de la pureté, de Marie. Vous ne partagerez pas avec cette Vierge l'honneur de lui donner la naissance, parce que la virginité y serait blessée ; mais vous partagerez avec elle ces soins, ces veilles, ces inquiétudes par lesquelles elle élèvera ce cher Fils : vous tiendrez lieu de père à ce saint Enfant, qui n'en a point sur la terre ; et quoique vous ne le soyez pas par la nature, il faut que vous le deveniez par l'affection. Mais comment s'accomplira un si grand ouvrage? Où prendra-t-il ce cœur paternel, si la nature ne le lui donne pas? Ces inclinations peuvent-elles s'acquérir par choix ; et ne craindrons-nous pas, en ce lieu, ces mouvements empruntés et ces affections artificielles que nous venons de reprendre tout à l'heure? Non, mes Frères; ne le craignons pas. Un cœur qui cherche Dieu en simplicité (Var. : Un cœur simple et droit avec Dieu) est une terre molle et humide, qui reçoit la forme qu'il lui veut donner; ce que Dieu veut lui passe en nature. Si donc c'est la volonté du Père céleste que Joseph tienne sa place en ce monde et qu'il serve de père à son Fils, il ressentira, n'en doutez pas, pour ce saint et divin Enfant, cette inclination naturelle, toutes ces douces émotions, tous ces tendres empressements d'un cœur paternel.

En effet durant ces trois jours que le Fils de Dieu s'était dérobé pour demeurer dans le temple avec les docteurs, il est aussi touché que la Mère même, et elle le sait bien reconnaître : Pater tuus et ego dolentes quœrebamus te (Luc., II, 48) ; « Votre père et moi étions affligés. » Voyez qu'elle le joint avec elle dans la société des douleurs. Je ne crains pas de l'appeler ici votre père, et je ne prétends pas faire tort à la pureté de votre naissance : il s'agit de soins et d'inquiétudes ; et c'est par là que je puis dire qu'il est votre père, puisqu'il a vraiment des inquiétudes paternelles. Voyez, Messieurs, comme ce saint homme prend simplement et de bonne foi les sentiments que Dieu lui ordonne. Mais aimant Jésus-Christ comme son fils, se pourra-t-il faire, mes Sœurs, qu'il le révère comme son Dieu ? Sans doute, et il n'y aurait rien de plus difficile (Var. : De moins pratiquante), si la sainte simplicité n'avait rendu son esprit docile pour céder sans peine aux ordres divins.

Voici, chrétiens, le dernier effort de la simplicité du juste Joseph dans la pureté de sa foi. Le grand mystère de notre foi, c'est de croire un Dieu dans la faiblesse. Mais afin de bien comprendre, mes Sœurs, combien est parfaite la foi de Joseph, il faut, s'il vous plaît, remarquer que la faiblesse de Jésus-Christ peut être considérée en deux états : ou comme étant soutenue par quelque effet de puissance, ou comme étant délaissée et abandonnée à elle-même. Dans les dernières années de la vie de notre Sauveur, quoique l'infirmité de sa chair fût visible par ses souffrances, sa toute-puissance divine ne l'était pas moins par ses miracles. Il est vrai qu'il paraissait homme ; mais cet homme disait des choses qu'aucun homme n'avait jamais dites, mais cet homme faisait des choses qu'aucun homme n'avait jamais faites. Alors la faiblesse étant soutenue, je ne m'étonne pas que dans cet état Jésus ait attiré des adorateurs, les marques de sa puissance pouvant donner lieu déjuger que L'infirmité était volontaire; et la foi n'était pas d'un si grand mérite. Mais en l'état que l'a vu Joseph, j'ai quelque peine à comprendre comment il a cru si fidèlement, parce que jamais la faiblesse n'a paru plus abandonnée, non pas même, je le dis sans crainte, dans l'ignominie de la croix. Car c'était cette heure importante pour laquelle il était venu : son Père l'avait délaissé ; il était d'accord avec lui qu'il le délaisserait en ce jour : lui-même s'abandonnait volontairement pour être livré aux mains des bourreaux. Si durant ces jours d'abandonnement la puissance de ses ennemis a été fort grande, ils ne doivent pas s'en glorifier, parce que les ayant renversés d'abord par une seule de ses paroles, il leur a bien fait connaître qu'il ne leur cédait que par une faiblesse volontaire : Non haberes potestatem adversùm me ullam, nisi tibi datum esset desuper (Joan., XIX 11.): « Vous n'auriez aucun pouvoir sur moi, s'il ne vous était donné d'en haut. » Mais en l'état dont je parle et dans lequel le voit saint Joseph, la faiblesse est d'autant plus grande, qu'elle semble en quelque sorte forcée.

Car enfin, mon divin Sauveur, quelle est en cette rencontre la conduite de votre Père céleste? Il veut sauver les Mages qui vous sont venus adorer, et il les fait échapper par une autre voie. Je ne l'invente pas, chrétiens, je ne fais que suivre l'histoire sainte. Il veut vous sauver vous-mêmes, et il semble qu'il ait peine à l'exécuter. Un ange vient du ciel éveiller pour ainsi dire Joseph en sursaut, et lui dire comme pressé par un péril imprévu : « Fuyez vite, partez cette nuit avec la Mère et l'Enfant, et sauvez-vous en Egypte (Matth., II, 13). » Fuyez : ô quelle parole! Encore s'il avait dit : Retirez-vous. Mais : Fuyez pendant la nuit : ô précaution de faiblesse ! Quoi donc ! le Dieu d'Israël ne se sauve qu'à la faveur des ténèbres! Et qui ledit? C'est un ange qui arrive soudainement à Joseph comme un messager effrayé : « De sorte, dit un ancien, qu'il semble que tout le ciel soit alarmé, et que la terreur s'y soit répandue avant même de passer à la terre (S. Petr. Chrysol., Serm. CLI) : » Ut videatur cœlum timor ante tenuisse quâm terram. Mais voyons la suite de cette aventure. Joseph se sauve en Egypte, et le même ange revient à lui : « Retournez, dit-il, en Judée; car ceux-là sont morts qui cherchaient l’âme de l'Enfant. (Matth., II, 20). » Eh quoi ! s'ils étaient vivants, un Dieu ne serait pas en sûreté ! O faiblesse délaissée et abandonnée! Voilà l'état du divin Jésus ; et en cet état saint Joseph l'adore avec la même soumission que s'il avait vu ses plus grands miracles. Il reconnaît le mystère de ce miraculeux délaissement; il sait que la vertu de la foi, c'est de soutenir l'espérance sans aucun sujet d'espérance : In spem contra spem (Rom., IV, 18). Il s'abandonne à Dieu en simplicité, et exécute sans s'enquérir tout ce qu'il commande. En effet l'obéissance est trop curieuse qui examine les causes du commandement : elle ne doit avoir des yeux que pour considérer son devoir, et elle doit chérir son aveuglement, qui la fait marcher en sûreté. Mais cette obéissance de saint Joseph venait de ce qu'il croyait en simplicité; et que son esprit ne chancelant pas entre la raison et la foi, suivait avec une intention droite les lumières qui venaient d'en haut. O foi vive, ô foi simple et droite, que le Sauveur a raison de dire qu'il ne te trouvera plus sur la terre (Luc., XVIII, 8) ! Car, mes Frères, comment croyons-nous? Qui nous donnera aujourd'hui de pénétrer au fond de nous-mêmes pour voir si ces actes de foi, que nous faisons quelquefois, sont véritablement dans le cœur, ou si ce n'est pas la coutume qui les y amène du dehors?

Que si nous ne pouvons pas lire dans nos cœurs, interrogeons nos œuvres et connaissons notre peu de foi. Une marque de sa faiblesse, c'est que nous n'osons entreprendre de bâtir dessus; nous n'osons nous y confier, ni établir sur ce fondement l'espérance de notre bonheur. Démentez-moi, Messieurs, si je ne dis pas la vérité. Lorsque nous flottons incertains entre la vie chrétienne et la vie du monde, n'est-ce pas un doute secret qui nous dit dans le fond du cœur : Mais cette immortalité (Var. : Ce ciel) que l'on nous promet, est-ce une chose assurée; et n'est-ce pas trop hasarder son repos, son bonheur (Sa félicité, son plaisir), que de quitter ce qu'on voit pour suivre ce qu'on ne voit pas? Nous ne croyons donc pas en simplicité, nous ne sommes pas chrétiens de bonne foi.

Mais je croirais, direz-vous, si je voyais un ange comme saint Joseph. O hommes, désabusez-vous : Jonas a disputé contre Dieu, quoiqu'il fût instruit de ses volontés par une vision manifeste (Jonas n'a pas cru à la voix de Dieu, quoiqu'il l'eût entendue) ; et Job a été fidèle, quoiqu'il n'eût point encore été confirmé par des apparitions extraordinaires. Ce ne sont pas les voies extraordinaires qui font fléchir notre cœur, mais la sainte simplicité et la pureté d'intention que produit la charité véritable, qui attache aisément notre esprit à Dieu, en le détachant des créatures. C'est, mes Sœurs, ce détachement qui fera notre seconde partie.

SECOND POINT.

Dieu, qui a établi son Evangile sur des contrariétés mystérieuses, ne se donne qu'à ceux qui se contentent de lui et se détachent des autres biens. Il faut qu'Abraham quitte sa maison et tous les attachements de la terre avant que Dieu lui dise : Je suis ton Dieu. Il faut abandonner tout ce qui se voit pour mériter ce qui ne se voit pas, et nul ne peut posséder ce grand tout, s'il n'est au monde comme n'ayant rien : Tanquam nihil habentes (II Cor., VI, 10). Si jamais il y eut un homme à qui Dieu se soit donné de bon cœur, c'est sans doute le juste Joseph, qui le tient dans sa maison et entre ses mains, et à qui il est présent à toutes les heures beaucoup plus dans le cœur que devant les yeux. Voilà un homme qui a trouvé Dieu d'une façon bien particulière : aussi s'est-il rendu digne d'un si grand trésor par un détachement sans réserve, puisqu'il est détaché de ses passions, détaché de son intérêt et de son propre repos.

Deux sortes de passions ont accoutumé de nous émouvoir, je veux dire les passions douces et les passions violentes. Desquelles des deux, mes Sœurs, est-il plus difficile de se rendre maître? Il n'est pas aisé de le décider (Var. : C'est ce qu'il n'est pas aisé de vous expliquer). J'ai appris du grand saint Thomas que celles-là sont à craindre par la durée, celles-ci par la promptitude et par l'impétuosité de leur mouvement : celles-là nous flattent, celles-ci nous poussent par la force ; celles-là nous gagnent, celles-ci nous entraînent. Mais quoique par des voies différentes, les unes et les autres renversent le sens, les unes et les autres engagent le cœur. O pauvre cœur humain, de combien d'ennemis es-tu la proie ? de combien de tempêtes es-tu le jouet? de combien d'illusions es-tu le théâtre?

Mais apprenons, chrétiens, par l'exemple de saint Joseph à vaincre ces douceurs qui nous charment (Trompent, — séduisent), ces violences qui nous emportent. Voyez comme il est détaché de ses passions, puisqu'il a pu surmonter sans effort (Sans résistance) parmi les douces la plus flatteuse, parmi les violentes la plus farouche, je veux dire l'amour et la jalousie. Son Epouse est sa sœur. Il n'est touché, si je le puis dire, que de la virginité de Marie; mais il l'aime pour la conserver en sa chaste Epouse, et ensuite pour l'imprimer en soi-même par une entière unité de cœur. La fidélité de ce mariage consiste à se garder l'un à l'autre la parfaite intégrité qu'ils se sont promise. Voilà les promesses qui les assemblent, voilà le traité qui les lie. Ce sont deux virginités qui s'unissent, pour se conserver l'une l'autre éternellement par une chaste correspondance de désirs pudiques ; et il me semble que je vois deux astres, qui n'entrent ensemble en conjonction qu'à cause que leurs lumières s'allient. Tel est le nœud de ce mariage, d'autant plus ferme, dit saint Augustin (De nupt. et concup., lib. I, n. 12), que les promesses qu'ils se sont données doivent être plus inviolables en cela même qu'elles sont plus saintes.

Mais la jalousie, chrétiens, a pensé rompre le sacré lien de cette amitié conjugale. Joseph, encore ignorant des mystères dont sa chère Epouse était rendue digne (Var. : De ce que le Saint-Esprit a fait dans Marie), ne sait que penser de sa grossesse. Je laisse aux peintres et aux poètes de représenter à vos yeux les horreurs de la jalousie, le venin de ce serpent et les cent yeux de ce monstre : il me suffit de vous dire que c'est une espèce de complication des passions les plus furieuses. C'est là qu'un amour outragé pousse la douleur jusqu'au désespoir, et la haine jusqu'à la furie; et c'est peut-être pour cette raison que le Saint-Esprit nous a dit : Dura sicut infernus œmulatio (Cant., VIII, 6); « La jalousie est dure comme l'enfer, » parce qu'elle ramasse en effet les deux choses les plus cruelles que l'enfer ait, la rage et le désespoir.

Mais ce monstre si furieux ne peut rien contre le juste Joseph. Car admirez sa modération envers sa sainte et divine Epouse. Il sent le mal tel qu'il ne peut la défendre; et il ne veut pas la condamner tout à fait. Il prend un conseil tempéré. Réduit par l'autorité de la loi à l'éloigner de sa compagnie (A la nécessité d'éloigner Marie), il évite du moins de la diffamer, il demeure dans les bornes de la justice; et bien loin d'exiger le châtiment, il lui épargne même la honte. Voilà une résolution bien modérée : mais encore ne presse-t-il pas l'exécution. Il veut attendre la nuit, cette sage conseillère dans nos ennuis, dans nos promptitudes, dans nos précipitations dangereuses. Et en effet cette nuit lui découvrira le mystère, un ange viendra éclaircir ses doutes; et j'ose dire, Messieurs, que Dieu devait ce secours au juste Joseph. Car puisque la raison humaine soutenue de la grâce s'était élevée à son plus haut point, il fallait que le Ciel achevât le reste; et celui-là était digne de savoir la vérité, qui sans l'avoir reconnue, n'avait pas laissé néanmoins de pratiquer la justice : Meritò responsum subvenit mox divinum, cui humano deficiente consilio justifia non defecit (S. Petr. Chrysol., Serm. CLXXV ).

Certainement saint, Jean Chrysostome a raison d'admirer ici la philosophie de Joseph (In Matth., hom. IV, n. 4). C'était, dit-il, un grand philosophe parfaitement détaché de ses passions, puisque nous lui voyons surmonter la plus tyrannique de toutes. Combien est maître de ses mouvements un homme qui en cet état est capable de prendre conseil, et un conseil modéré, et qui l'ayant pris si sage, peut encore en suspendre l'exécution, et dormir parmi ces pensées d'un sommeil tranquille? Si son âme n'eût été calme, croyez que les lumières d'en haut n'y seraient pas sitôt descendues. Il est donc indubitable, mes Frères, qu'il était bien détaché de ses passions, tant de celles qui charment par leur douceur que de celles qui entraînent par leur violence.

Plusieurs jugeront peut-être qu'étant si détaché de ses passions, c'est un discours superflu de vous dire qu'il l'est (Var. ; C'est une suite infaillible qu'il l'est) aussi de ses intérêts. Mais je ne sais pas, chrétiens, si cette conséquence est bien assurée. Car cet attachement à notre intérêt est plutôt un vice qu'une passion, parce que les passions ont leur cours et consistent dans une certaine ardeur que les emplois changent, que l’âme modère, que le temps emporte, qui se consume enfin elle-même : au lieu que l'attachement à l'intérêt s'enracine de plus en plus par le temps (Avec l'âge), parce que, dit saint Thomas (II, quaest. CXVIII, art. 1, ad 3), venant de faiblesse, il se fortifie tous les jours à mesure que tout le reste se débilite et s'épuise. Mais quoi qu'il en soit, chrétiens, il n'est rien de plus dégagé de cet intérêt que l’âme du juste Joseph. Représentez-vous un pauvre artisan qui n'a point d'héritage que ses mains, point de fonds que sa boutique, point de ressource que son travail; qui donne d'une main ce qu'il vient de recevoir de l'autre, et se voit tous les jours au bout de son fonds; obligé néanmoins à de grands voyages, qui lui ôtent toutes ses pratiques (car il faut parler de la sorte du père de Jésus-Christ !), sans que l'ange qu'on lui envoie lui dise jamais un mot de sa subsistance. Il n'a pas eu honte de souffrir ce que nous avons honte de dire : humiliez-vous, ô grandeurs humaines! Il va néanmoins, sans s'inquiéter, toujours errant, toujours vagabond, seulement parce qu'il est avec Jésus-Christ; trop heureux de le posséder à ce prix. Il s'estime encore trop riche, et il fait tous les jours de nouveaux efforts pour vider son cœur, afin que Dieu y étende ses possessions et y dilate son règne; abondant, parce qu'il n'a rien; possédant tout, parce que tout lui manque; heureux, tranquille, assuré, parce qu'il ne rencontre ni repos, ni demeure, ni consistance.

C'est ici le dernier effet du détachement de Joseph, et celui que nous devons remarquer avec une réflexion plus sérieuse. Car notre vice le plus commun et le plus opposé au christianisme, c'est une malheureuse inclination de nous établir sur la terre; au lieu que nous devons toujours avancer, et ne nous arrêter jamais nulle part. Saint Paul, dans la divine Epître aux Hébreux, nous enseigne que Dieu nous a bâti une cité : « Et c'est pour cela, dit-il, qu'il ne rougit pas de s'appeler notre Dieu : » Ideò non confunditur Deus vocari Deus eorum : paravit enim illis civitatem ». Et en effet, chrétiens, comme le nom de Dieu est un nom de père, il aurait honte avec raison de s'appeler notre Dieu, s'il ne pourvoyait à nos besoins (a). Il a donc songé, ce bon Père, à pourvoir soigneusement ses enfants : il leur a préparé une cité qui a des fondements, dit saint Paul, fundamenta habentem civitatem (Hebr., XI, 16), c'est-à-dire qui est solide et inébranlable. S'il a honte de n'y pas pourvoir, quelle honte de ne l'accepter pas ! Quelle injure faites-vous à votre patrie, si vous vous trouvez bien dans l'exil ! Quel mépris faites-vous de Sion, si vous êtes à votre aise dans Babylone! Allez et marchez toujours, et n'ayez jamais de demeure fixe. C'est ainsi qu'a vécu le juste Joseph. A t-il jamais goûté un moment de joie, depuis qu'il a eu Jésus-Christ en garde? Cet Enflant ne laisse pas les siens eu repos : il les inquiète toujours dans ce qu'ils possèdent, et toujours il leur suscite quelque nouveau trouble.

Il nous veut apprendre, mes Sœurs, que c'est un conseil de la miséricorde de mêler de l’amertume dans toutes nos joies (Var.: De nous troubler dans toutes nos joies. C'est ce que dit le divin Psalmiste, que Dieu renverse le lit de ses serviteurs. Parmi ces incommodités de la vie, le cœur soupire après quelque appui.). Car nous sommes des voyageurs, exposés pendant le voyage à l'intempérie, de l'air et à l'irrégularité des saisons. Parmi les fatigues d'un si long voyage, lame épuisée par le travail, cherche quelque lieu pour se délasser. L'un met son divertissement dans un emploi ; l'autre a sa consolation dans sa femme, dans son mari, dans sa famille ; l'autre son espérance en son fils. Ainsi chacun se partagent cherche quelque appui sur la terre. L'Evangile ne blâme pas ces affections: mais comme le cœur humain est précipité dans ses mouvements, et qu'il lui est difficile de modérer ses désirs, ce qui lui était donné pour se relâcher, peu à peu il s'y repose et enfin il s'y attache. Ce n'était qu'un bâton pour le soutenir pendant le travail du voyage, il s'en fait un lit pour s'y endormir; et il demeure, il s'arrête, il ne se souvient plus de Sion. Universum stratum ejus versasti in infirmitate ejus (Psal., XL, 4) ! Dieu lui renverse ce lit où il s'endormait parmi les félicités temporelles, et par une plaie salutaire il fait sentir à ce cœur combien ce repos était dangereux. Vivons donc en ce monde comme détachés. Si nous y sommes comme n'ayant rien, nous y serons en effet comme possesseurs de tout : si nous nous détachons des créatures, nous y gagnerons le Créateur; e! il ne nous restera plus que de nous cacher avec Joseph, pour en jouir dans la retraite et la solitude : c'est notre dernière partie.

TROISIÈME POINT.

La justice chrétienne est une affaire particulière de Dieu avec l'homme, et de l'homme avec Dieu; c'est un mystère entre eux deux, qu'on profane quand on le divulgue , et qui ne peut être caché avec trop de religion à ceux qui ne sont pas du secret. C'est pourquoi le Fils de Dieu nous ordonne, lorsque nous avons dessein de prier, et le même doit s'entendre de toutes les vertus chrétiennes; il nous ordonne, dis-je, de nous retirer en particulier, et de fermer la porte sur nous (Matth., VI, 6). « Fermez, dit-il, la porte sur vous, et célébrez votre mystère avec Dieu tout seul, sans y admettre personne que ceux qu'il lui plaira d'appeler : « Solo pectoris contentus arcano orationem tuam fac esse mysterium (S. Chrysost, in Matth., hom. X X, n. 3). Ainsi la vie chrétienne doit être une vie cachée, et le chrétien véritable doit désirer ardemment de demeurer (Var. : Et celui-là n'est pas un vrai chrétien, qui ne peut pas se résoudre à demeurer) couvert sous l'aile de Dieu sans avoir d'autre spectateur.

Mais ici toute la nature réclame et ne peut souffrir cette obscurité, dont voici la raison, si je ne me trompe : c'est que la nature répugne à la mort; et vivre caché et inconnu , c'est être comme mort dans l'esprit des hommes. Car comme la vie est dans l'action, celui qui cesse d'agir semble avoir aussi cessé de vivre (A cessé de vivre). Or, mes Sœurs, les hommes du monde accoutumés au tumulte et aux empressements, ne savent pas ce que c'est qu'une action paisible et intérieure; et ils croient qu'ils n'agissent pas s'ils ne s'agitent, et qu'ils ne se remuent pas s'ils ne font du bruit; de sorte qu'ils considèrent la retraite et l'obscurité comme une extinction delà vie : au contraire ils mettent tellement la vie dans cet éclat du monde et dans ce bruit tumultueux, qu'ils osent bien se persuader qu'ils ne seront pas tout à fait morts, tant que leur nom fera du bruit sur la terre. C'est pourquoi la réputation leur paraît comme une seconde vie : ils comptent pour beaucoup de survivre dans la mémoire des hommes; et peu s'en faut qu'ils ne croient qu'ils sortiront en secret de leurs tombeaux pour entendre ce qu'on dira d'eux; tant ils sont persuadés que vivre, c'est faire du bruit et remuer encore les choses humaines, parce qu'ils mettent la vie dans le bruit. Voilà l'éternité que promet le siècle : éternité par les titres, immortalité par la renommée : Qualem polest prœstare sœculum de titulis œternitatem, de famâ immortalitatem (Tertull., Scorp., n. 6). Vaine et fragile immortalité, mais dont ces anciens conquérants faisaient tant d'état. C'est cette fausse imagination qui fait que l'obscurité semble une mort aux amateurs du monde et même, si je l'ose dire, quelque chose de plus dur que la mort, puisque selon leur opinion vivre caché et inconnu, c'est s'ensevelir tout vivant et s'enterrer pour ainsi dire au milieu du monde.

Notre-Seigneur Jésus-Christ étant venu pour mourir et s'immoler, il a voulu mourir et s'immoler pour nous en toutes manières : de sorte qu'il ne s'est point contenté, mes Sœurs, de mourir de la mort naturelle, ni de la mort la plus cruelle et la plus violente; mais il a encore voulu y ajouter la mort civile et politique. Et comme cette mort civile vient par deux moyens, ou par l'infamie, ou par l'oubli, il a voulu subir l'une et l'autre. Victime pour l'orgueil humain, il a voulu se sacrifier par tous les genres d'humiliations; et il a donné à cette mort d'oubli les trente premières années de sa vie. Pour mourir avec Jésus-Christ, il nous faut mourir de cette mort, afin de pouvoir dire avec saint Paul : Mihi mundus crucifîxus est, et ego mundo (Galat., VI, 14) : « Le monde est crucifié pour moi, et je suis crucifié pour le monde. »

Le grand pape saint Grégoire donne à ce passage de l'Apôtre une belle interprétation : Le monde, dit-il », est mort pour nous quand nous le quittons; mais, ajoute-t-il, ce n'est pas assez : il faut pour arriver à la perfection, que nous soyons morts pour lui et qu'il nous quitte; c'est-à-dire que nous devons nous mettre en tel état que nous ne plaisions plus au monde, qu'il nous tienne pour morts, et qu'il ne nous compte plus pour être de ses parties et de ses intrigues, ni même de ses entretiens et de ses discours (Moral. in Job., lib. V, cap. III). C'est la haute perfection du christianisme, c'est là que l'on trouve la vie, parce que l'on apprend à jouir de Dieu, qui n'habite pas dans le tourbillon ni dans le tumulte du siècle, mais dans la paix de la solitude et de la retraite.

Ainsi était mort le juste Joseph : enseveli avec Jésus-Christ et la divine Marie, il ne s'ennuyait pas de cette mort, qui le faisait vivre avec le Sauveur. Au contraire il ne craint rien tant que le bruit et la vie du siècle viennent troubler, ou interrompre ce repos caché et intérieur. Mystère admirable, mes Sœurs : Joseph a dans sa maison de quoi attirer les yeux de toute la terre, et le monde ne le connaît pas : il possède un Dieu-Homme, et il n'en dit mot : il est témoin d'un si grand mystère, et il le goûte en secret sans le divulguer. Les mages et les pasteurs viennent adorer Jésus-Christ, Siméon et Anne publient ses grandeurs : nul autre ne pourvoit rendre meilleur témoignage du mystère de Jésus-Christ que celui qui en était le dépositaire, qui savait le miracle de sa naissance, que l'ange avait si bien instruit de sa dignité et du sujet de son envoi. Quel père ne parlerait pas d'un fils si aimable? Et cependant l'ardeur de tant d’âmes saintes qui s'épanchent devant lui avec tant de zèle pour célébrer les louanges de Jésus-Christ, n'est pas capable d'ouvrir sa bouche pour leur découvrir le secret de Dieu qui lui a été confié. Erant mirantes, dit l'Evangéliste (Luc., II, 33) : ils paraissaient étonnés, il semblait qu'ils ne savaient rien : ils écoutaient parler tous les autres; et ils gardaient le silence avec tant de religion, qu'on dit encore dans leur ville au bout de trente ans : « N'est-ce pas le fils de Joseph (Joan., VI, 48)? » sans qu'on ait rien appris durant tant d'années du mystère de sa conception virginale. C'est qu'ils savaient l'un et l'autre que, pour jouir de Dieu en vérité, il fallait se faire une solitude, qu'il fallait rappeler en soi-même tant de désirs qui errent et tant de pensées qui s'égarent, qu'il fallait se retirer avec Dieu et se contenter de sa vue (Var. : O Dieu, j'adore avec un profond respect les voies impénétrables de votre sagesse. J'admire la diversité des vocations par lesquelles votre Providence daigne dispenser les emplois des hommes, ordonnant aux uns de publier ce que vous confiez à l'autre en secret et sous l'obligation du silence, sanctifiant les prédicateurs par la publication de votre mystère, et Joseph par le soin de le couvrir rendant la vie des uns illustre et glorieuse par tout l'univers, et donnant pour partage au juste Joseph d'être caché avec vous. O Dieu, soyez béni éternellement). Mais, chrétiens, où trouverons-nous ces hommes spirituels et intérieurs dans un siècle qui donne tout à l'éclat? Quand je considère les hommes, leurs emplois, leurs occupations, leurs empressements, je trouve tous les jours plus véritable ce qu'a dit saint Jean Chrysostome (In Matth., hom. XIX, n. 1), que si nous rentrons en nous-mêmes, nous trouverons que nos actions se font toutes par des vues humaines. Car pour ne point parler en ce lieu de ces âmes prostituées qui ne tâchent que de plaire nu monde, combien pourrons-nous en trouver qui ne se détournent pas de la droite voie, s'ils rencontrent en leur chemin les puissances ; qui ne se relâchent du moins, s'ils ne se ralentissent pas tout à fait; qui ne tâchent de se ménager entre la justice et la faveur, entre le devoir et la complaisance ? Combien en trouverons-nous à qui le préjugé des opinions, la tyrannie de la coutume, la crainte de choquer le monde, ne fassent pas chercher du moins des tempéraments pour accorder Jésus-Christ avec Bélial, et l'Evangile avec le siècle? Que s'il y en a quelques-uns en qui les égards humains n'étouffent ni ne resserrent les sentiments de la vertu, y en aura-t-il quelqu'un qui ne se lasse pas d'attendre sa couronne en l'autre vie, et qui ne veuille pas en tirer toujours quelque fruit (Var. : Récompense) par avance dans les louanges des hommes? C'est la peste de la vertu chrétienne. Et comme j'ai l'honneur de parler en présence d'une grande reine, qui écoule tous les jours les justes applaudissements de ses peuples, il me sera permis d'appuyer un peu sur cette morale.

La vertu est comme une plante qui peut mourir en deux sortes : quand on l'arrache, ou quand on la dessèche. Il viendra un ravage d'eaux qui la déracinera et la portera par terre; ou bien, sans y employer tant de violence, il arrivera quelque intempérie qui la fera sécher sur son tronc : elle paraîtra encore vivante, mais elle aura cependant la mort dans le sein. Il en est de même de la vertu. Vous aimez l'équité et la justice : quelque grand intérêt se présente à vous, ou quelque passion violente qui pousse impétueusement dans votre cœur cet amour que vous avez pour la justice : s'il se laisse emporter par cette tempête, ce sera un ravage d’eaux qui déracinera la justice. Vous soupirez quelque temps sur l'affaiblissement que vous éprouvez; mais enfin vous laissez arracher cet amour de votre cœur. Tout le monde est étonné de voir que vous avez perdu la justice, que vous cultiviez avec tant de soin.

Mais quand vous aurez résisté à ces efforts violents, ne prétendez pas pour cela de l'avoir sauvée, si vous ne la gardez d'un autre péril, j'entends celui des louanges. Le vice contraire la déracine, l'amour des louanges la dessèche. Il semble qu'elle se tienne en état, elle paraît se bien soutenir, et elle trompe en quelque sorte les yeux des hommes. Mais la racine est séchée, elle ne tire plus de nourriture, elle n'est plus bonne que pour le feu. C'est cette herbe des toits dont parle David, qui se sèche d'elle-même avant qu'on l'arrache : Quod priusquàm evellatur exaruit (Psal. CXXVIII, 6). Qu'il serait à désirer, chrétiens, qu'elle ne fût pas née dans un lieu si haut, et qu'elle durât plus longtemps dans quelque vallée déserte! Qu'il serait à désirer pour cette vertu qu'elle ne fût pas exposée dans une place si éminente, et qu'elle se nourrît dans quelque coin par l'humilité chrétienne! (Note marg. : Par humilité chrétienne, à l'ombre de votre clôture, dans le secret de votre retraite. Le voile que vous portez sur vos télés, ne croyez pas, mes Sœurs, que ce soit seulement pour cacher le corps et pour couvrir le visage)

Que si c'est une nécessité qu'il faille mener une vie publique et entendre les louanges des hommes, voici ce qu'il faut penser. Quand ce que l'on dit n'est pas au dedans, craignons un plus grand jugement (Var. : Châtiment). Si les louanges sont véritables, craignons de perdre notre récompense. Pour éviter ce dernier malheur, Madame, voici un sage conseil que vous donne un grand Pape, c'est saint Grégoire le Grand (Greg. Mag , Moral., lib. XXII, cap. VIII.); il mérite que Votre Majesté lui donne audience. Ne cachez jamais la vertu comme une chose dont vous ayez honte : il faut qu'elle luise devant les hommes, afin qu'ils glorifient le Père céleste (2 3 Matth., V, 16). Elle doit luire principalement dans la personne des souverains, afin que les mœurs dépravées soient, non-seulement réprimées par l'autorité de leurs lois, mais encore confondues par la lumière de leurs exemples. Mais pour dérober quelque chose aux hommes, je propose à Votre Majesté un artifice innocent. Outre les vertus qui doivent l'exemple, « mettez toujours quelque chose dans l'intérieur que le monde ne connaisse pas; » faites-vous un trésor caché que vous réserviez pour les yeux de Dieu ; ou, comme dit Tertullien : Mentire aliquid ex his quœ intùs sunt, ut soli Deo exhibeas veritatem

Madame ,

Ce sera de là que sortira votre grande gloire. Joseph a mérité les plus grands honneurs, parce qu'il n'a jamais été touché de l'honneur : l'Eglise n'a rien de plus illustre, parce qu'elle n'a rien de plus caché. Je rends grâces au Roi d'avoir voulu honorer sa sainte mémoire avec une nouvelle solennité. Fasse le Dieu tout-puissant que toujours il révère ainsi la vertu cachée; mais qu'il ne se contente pas de l'honorer dans le ciel, qu'il la chérisse aussi sur la terre; qu'à l'exemple des rois pieux il aille quelquefois la forcer dans sa retraite ; et qu'il puisse bien entendre cette vérité, que la vertu qui s'empresse avec plus d'ardeur à paraître au grand jour que fait sa présence, n'est pas toujours le plus à l'épreuve. Si Votre Majesté, Madame, lui inspire ces sages pensées, elle aura pour sa récompense la félicité éternelle, que, etc. Amen.

(a) Prêché le 19 mars 1661, aux Grandes-Carmélites, devant la reine mère. La Gazette de France, 26 mars 1661, dit que cette année-là Bossuet prêcha la Saint-Joseph aux « Grandes-Carmélites avec beaucoup de suffisance. »

Et l'orateur, rappelant la division du panégyrique précédent, s'exprime ainsi dans l'exorde de celui qu'on va lire : «Je laisse les dons et les mystères qui pourraient relever son panégyrique (de saint Joseph). Je ne vous dis plus, chrétiens, qu'il est le dépositaire des trésors célestes, le père de Jésus-Christ, le conducteur de son enfance, le protecteur de sa vie, l'époux et le gardien de sa sainte Mère. » Le Quœsivit Deus, comme on disait alors, fut donc prêché après le Depositum custodi, par conséquent en 1661.

Le prédicateur dit aussi, dans la péroraison : « Je rends grâces au roi d'avoir voulu honorer sa sainte mémoire (de saint Joseph) avec une nouvelle solennité. » C'est en 1661 que la fête de saint Joseph fut pour la première fois célébrée solennellement en France; sollicité par les deux reines, Louis XIV, après s'être concerté avec l'autorité ecclésiastique, avait porté un décret qui défendait tout travail ce jour-là.

Bossuet dit en finissant : « Si Voire Majesté, Madame, lui inspire (au roi) ces sages pensées, elle aura pour sa récompense la félicité éternelle que, » etc. Ces paroles ne pouvaient s'adresser qu'à la reine mère.

Oeuvres complètes de Bossuet. F. Lachat. Paris, Librairie de Louis Vivès Éditeur, rue Delambre 5, 1862

SOURCE : http://www.abbaye-saint-benoit.ch/bossuet/volume012/008.htm

José Luzán, Le songe de Joseph, 1765-1770,

Huile sur bois, Museo de Zaragoza (Musée des Beaux-Arts de Saragosse)


St. Joseph

Spouse of the Blessed Virgin Mary and foster-father of Our Lord Jesus Christ.

Life

Sources

The chief sources of information on the life of St. Joseph are the first chapters of our first and third Gospels; they are practically also the only reliable sources, for, whilst, on the holy patriarch's life, as on many other points connected with the Saviour's history which are left untouched by the canonical writings, the apocryphal literature is full of details, the non-admittance of these works into the Canon of the Sacred Books casts a strong suspicion upon their contents; and, even granted that some of the facts recorded by them may be founded on trustworthy traditions, it is in most instances next to impossible to discern and sift these particles of true history from the fancies with which they are associated. Among these apocryphal productions dealing more or less extensively with some episodes of St. Joseph's life may be noted the so-called "Gospel of James", the "Pseudo-Matthew", the "Gospel of the Nativity of the Virgin Mary", the "Story of Joseph the Carpenter", and the "Life of the Virgin and Death of Joseph".

Genealogy

St. Matthew (1:16) calls St. Joseph the son of Jacob; according to St. Luke (3:23)Heli was his father. This is not the place to recite the many and most various endeavours to solve the vexing questions arising from the divergences between both genealogies; nor is it necessary to point out the explanation which meets best all the requirements of the problem (see GENEALOGY OF CHRIST); suffice it to remind the reader that, contrary to what was once advocated, most modern writers readily admit that in both documents we possess the genealogy of Joseph, and that it is quite possible to reconcile their data.

Residence

At any rate, Bethlehem, the city of David and his descendants, appears to have been the birth-place of Joseph. When, however, the Gospel history opens, namely, a few months before the Annunciation, Joseph was settled at Nazareth. Why and when he forsook his home-place to betake himself to Galilee is not ascertained; some suppose — and the supposition is by no means improbable — that the then-moderate circumstances of the family and the necessity of earning a living may have brought about the change. St. Joseph, indeed, was atekton, as we learn from Matthew 13:55, and Mark 6:3. The word means both mechanic in general and carpenter in particular; St. Justin vouches for the latter sense (Dialogue with Trypho 88), and tradition has accepted this interpretation, which is followed in the English Bible.

Marriage

It is probably at Nazareth that Joseph betrothed and married her who was to become the Mother of God. When the marriage took place, whether before or after the Incarnation, is no easy matter to settle, and on this point the masters of exegesis have at all times been at variance. Most modern commentators, following the footsteps of St. Thomas, understand that, at the epoch of the Annunciation, the Blessed Virgin was onlyaffianced to Joseph; as St. Thomas notices, this interpretation suits better all the evangelical data.

It will not be without interest to recall here, unreliable though they are, the lengthy stories concerning St. Joseph's marriage contained in the apocryphal writings. When forty years of age, Joseph married a womancalled Melcha or Escha by some, Salome by others; they lived forty-nine years together and had six children, two daughters and four sons, the youngest of whom was James (the Less, "the Lord's brother"). A year after his wife's death, as the priests announced through Judea that they wished to find in the tribe of Juda a respectable man to espouse Mary, then twelve to fourteen years of age. Joseph, who was at the time ninety years old, went up to Jerusalem among the candidates; a miracle manifested the choice God had made of Joseph, and two years later the Annunciation took place. These dreams, as St. Jerome styles them, from which many a Christian artist has drawn his inspiration (see, for instance, Raphael's "Espousals of the Virgin"), are void of authority; they nevertheless acquired in the course of ages some popularity; in them someecclesiastical writers sought the answer to the well-known difficulty arising from the mention in the Gospel of"the Lord's brothers"; from them also popular credulity has, contrary to all probability, as well as to the tradition witnessed by old works of art, retained the belief that St. Joseph was an old man at the time ofmarriage with the Mother of God.

The Incarnation

This marriage, true and complete, was, in the intention of the spouses, to be virgin marriage (cf. St. Augustine, "De cons. Evang.", II, i in P.L. XXXIV, 1071-72; "Cont. Julian.", V, xii, 45 in P.L. XLIV, 810; St. ThomasIII:28III:29:2). But soon was the faith of Joseph in his spouse to be sorely tried: she was with child. However painful the discovery must have been for him, unaware as he was of the mystery of the Incarnation, his delicate feelings forbade him to defame his affianced, and he resolved "to put her away privately; but while he thought on these things, behold the angel of the Lord appeared to him in his sleep, saying: Joseph, son of Davidfear not to take unto thee Mary thy wife, for that which is conceived in her, is of the Holy Ghost. . . And Joseph, rising from his sleep, did as the angel of the Lord had commanded him, and took unto him his wife" (Matthew 1:19, 20, 24).

The Nativity and the flight to Egypt

A few months later, the time came for Joseph and Mary to go to Bethlehem, to be enrolled, according to the decree issued by Caesar Augustus: a new source of anxiety for Joseph, for "her days were accomplished, that she should be delivered", and "there was no room for them in the inn (Luke 2:1-7). What must have been the thoughts of the holy man at the birth of the Saviour, the coming of the shepherds and of the wise men, and at the events which occurred at the time of the Presentation of Jesus in the Temple, we can merely guess; St. Luke tells only that he was "wondering at those things which were spoken concerning him" (2:33). New trials were soon to follow. The news that a king of the Jews was born could not but kindle in the wicked heart of the old and bloody tyrant, Herod, the fire of jealousy. Again "an angel of the Lord appeared in sleep to Joseph, saying: Arise, and take the child and his mother, and fly into Egypt: and be there until I shall tell thee" (Matthew 2:13).

Return to Nazareth

The summons to go back to Palestine came only after a few years, and the Holy Family settled again atNazareth. St. Joseph's was henceforth the simple and uneventful life of an humble Jew, supporting himself and his family by his work, and faithful to the religious practices commanded by the Law or observed by piousIsraelites. The only noteworthy incident recorded by the Gospel is the loss of, and anxious quest for, Jesus, then twelve years old, when He had strayed during the yearly pilgrimage to the Holy City (Luke 2:42-51).

Death

This is the last we hear of St. Joseph in the sacred writings, and we may well suppose that Jesus's foster-father died before the beginning of Savior's public life. In several circumstances, indeed, the Gospels speak of the latter's mother and brothers (Matthew 12:46Mark 3:31Luke 8:19John 7:3), but never do they speak of His father in connection with the rest of the family; they tell us only that Our Lord, during His public life, was referred to as the son of Joseph (John 1:456:42Luke 4:22) the carpenter (Matthew 13:55). Would Jesus, moreover, when about to die on the Cross, have entrusted His mother to John's care, had St. Joseph been still alive?

According to the apocryphal "Story of Joseph the Carpenter", the holy man reached his hundred and eleventh year when he died, on 20 July (A.D. 18 or 19). St. Epiphanius gives him ninety years of age at the time of his demise; and if we are to believe the Venerable Bede, he was buried in the Valley of Josaphat. In truth we do not know when St. Joseph died; it is most unlikely that he attained the ripe old age spoken of by the "Story of Joseph" and St. Epiphanius. The probability is that he died and was buried at Nazareth.

Devotion to Saint Joseph

Joseph was "a just man". This praise bestowed by the Holy Ghost, and the privilege of having been chosen byGod to be the foster-father of Jesus and the spouse of the Virgin Mother, are the foundations of the honourpaid to St. Joseph by the Church. So well-grounded are these foundations that it is not a little surprising that the cult of St. Joseph was so slow in winning recognition. Foremost among the causes of this is the fact that "during the first centuries of the Church's existence, it was only the martyrs who enjoyed veneration" (Kellner). Far from being ignored or passed over in silence during the early Christian ages, St. Joseph's prerogatives were occasionally descanted upon by the Fathers; even such eulogies as cannot be attributed to the writers among whose works they found admittance bear witness that the ideas and devotion therein expressed were familiar, not only to the theologians and preachers, and must have been readily welcomed by the people. The earliest traces of public recognition of the sanctity of St. Joseph are to be found in the East. His feast, if we may trust the assertions of Papebroch, was kept by the Copts as early as the beginning of the fourth century. Nicephorus Callistus tells likewise — on what authority we do not know — that in the great basilica erected at Bethlehemby St. Helena, there was a gorgeous oratory dedicated to the honour of our saint. Certain it is, at all events, that the feast of "Joseph the Carpenter" is entered, on 20 July, in one of the old Coptic Calendars in our possession, as also in a Synazarium of the eighth and nineth century published by Cardinal Mai (Script. Vet. Nova Coll., IV, 15 sqq.). Greek menologies of a later date at least mention St. Joseph on 25 or 26 December, and a twofold commemoration of him along with other saints was made on the two Sundays next before and after Christmas.

In the West the name of the foster-father of Our Lord (Nutritor Domini) appears in local martyrologies of the ninth and tenth centuries, and we find in 1129, for the first time, a church dedicated to his honour at Bologna. The devotion, then merely private, as it seems, gained a great impetus owing to the influence and zeal of suchsaintly persons as St. BernardSt. Thomas AquinasSt. Gertrude (d. 1310), and St. Bridget of Sweden (d. 1373). According to Benedict XIV (De Serv. Dei beatif., I, iv, n. 11; xx, n. 17), "the general opinion of the learned is that the Fathers of Carmel were the first to import from the East into the West the laudable practice of giving the fullest cultus to St. Joseph". His feast, introduced towards the end shortly afterwards, into theDominican Calendar, gradually gained a foothold in various dioceses of Western Europe. Among the mostzealous promoters of the devotion at that epoch, St. Vincent Ferrer (d. 1419), Peter d'Ailly (d. 1420), St. Bernadine of Siena (d. 1444), and Jehan Charlier Gerson (d. 1429) deserve an especial mention. Gerson, who had, in 1400, composed an Office of the Espousals of Joseph particularly at the Council of Constance (1414), in promoting the public recognition of the cult of St. Joseph. Only under the pontificate of Sixtus IV (1471-84), were the efforts of these holy men rewarded by Roman Calendar (19 March). From that time the devotionacquired greater and greater popularity, the dignity of the feast keeping pace with this steady growth. At first only a festum simplex, it was soon elevated to a double rite by Innocent VIII (1484-92), declared by Gregory XV, in 1621, a festival of obligation, at the instance of the Emperors Ferdinand III and Leopold I and of King Charles II of Spain, and raised to the rank of a double of the second class by Clement XI (1700-21). Further,Benedict XIII, in 1726, inserted the name into the Litany of the Saints.

One festival in the year, however, was not deemed enough to satisfy the piety of the people. The feast of the Espousals of the Blessed Virgin and St. Joseph, so strenuously advocated by Gerson, and permitted first by Paul III to the Franciscans, then to other religious orders and individual dioceses, was, in 1725, granted to all countries that solicited it, a proper Office, compiled by the Dominican Pierto Aurato, being assigned, and the day appointed being 23 January. Nor was this all, for the reformed Order of Carmelites, into which St. Teresa had infused her great devotion to the foster-father of Jesus, chose him, in 1621, for their patron, and in 1689, were allowed to celebrate the feast of his Patronage on the third Sunday after Easter. This feast, soon adopted throughout the Spanish Kingdom, was later on extended to all states and dioceses which asked for the privilege. No devotion, perhaps, has grown so universal, none seems to have appealed so forcibly to the heart of the Christian people, and particularly of the labouring classes, during the nineteenth century, as that of St. Joseph.

This wonderful and unprecedented increase of popularity called for a new lustre to be added to the cult of the saint. Accordingly, one of the first acts of the pontificate of Pius IX, himself singularly devoted to St. Joseph, was to extend to the whole Church the feast of the Patronage (1847), and in December, 1870, according to the wishes of the bishops and of all the faithful, he solemnly declared the Holy Patriarch Joseph, patron of the Catholic Church, and enjoined that his feast (19 March) should henceforth be celebrated as a double of the first class (but without octave, on account of Lent). Following the footsteps of their predecessor, Leo XIII and Pius X have shown an equal desire to add their own jewel to the crown of St. Joseph: the former, by permitting on certain days the reading of the votive Office of the saint; and the latter by approving, on 18 March, 1909, alitany in honour of him whose name he had received in baptism.

Souvay, Charles. "St. Joseph." The Catholic Encyclopedia. Vol. 8. New York: Robert Appleton Company, 1910. 19 Mar. 2016 <http://www.newadvent.org/cathen/08504a.htm>.

Transcription. This article was transcribed for New Advent by Joseph P. Thomas. In memory of Father Joseph Paredom.

Ecclesiastical approbation. Nihil Obstat. October 1, 1910. Remy Lafort, S.T.D., Censor. Imprimatur. +John Cardinal Farley, Archbishop of New York.

Copyright © 2023 by Kevin Knight. Dedicated to the Immaculate Heart of Mary.

SOURCE : http://www.newadvent.org/cathen/08504a.htm

Saint Joseph et l'enfant Jésus, tableau de l'École de Cuzco, v.1700


Joseph, Husband of Mary (RM)

1st century; declared patron of the Universal Church by Pope Pius IX in 1870, patron of workers by Pope Benedict XV, patron of social justice by Pope Pius XI; name added to the canon of the Mass by John XIII in 1962; second feast at Saint Joseph the Worker on May 1.

"How can a truly virtuous man fail in anything? In what situation will he not be powerful; in what state of poverty will he not be rich; in what obscurity will he not be brilliant; in what inaction will he not be industrious; in what infirmity will he not be vigorous; in what weakness will he not be strong; in what solitude will he not be accompanied? for he will have for company the hope of a happy eternity; for clothing, he will have the grace of the Most High; for ornament, the promises of a halo of glory!

"Let us recollect that the saints were not of a more excellent nature than ours, but were more orderly and regular: that they were not exempt from sins, but that they took pains to correct their faults."

--Saint Ambrose in De Joseph.

All that is known about Joseph is found in the Gospels (primarily Matthew 1-2, but also in Luke 1-2). Matthew broadly represents Joseph's viewpoint, while the Infancy narratives in Luke seem to come from Mary's.

Descended from the royal line of David, Saint Joseph was the husband of the Blessed Virgin Mary, who defended her good name, and foster father and protector of the God Who made him, yet Who wished to be known throughout His life as the son of Joseph.

He saw to Jesus's education and taught him his trade of carpentry or building. Joseph's disappointment upon learning of Mary's pregnancy was said to be assuaged by an angelic vision, and he was the recipient of two more visions: one telling him to seek refuge in Egypt to escape Herod's persecution, and the second, to return to Palestine.

Saint Joseph bore the responsibilities of a father perfectly. A dream told him that King Herod planned to kill the infant Jesus. Joseph took Mary and Jesus away by night to Egypt and thus saved the life of the Savior. He kept the child hidden from Herod's son in case he, too, would have harmed Jesus.

Joseph was with Mary in the stable at Bethlehem when Jesus was born. He was looking after the mother and child when the shepherds and the Magi came to worship him. He took Mary and Jesus to Jerusalem to present him to God in the Temple. He shared Mary's anxieties for her son when Jesus was presumed lost, after their visit to the Temple when he was 12.

After this no more is heard of Joseph in the New Testament except in Luke 4:22, where he is named as the father of Jesus. He is not mentioned as being present at the crucifixion, a fact that persuaded many artists to portray him as an old man who had presumably died by the time Jesus was in his early thirties.

The few Biblical particulars give an impression of a just, kind, dignified and level-headed man, prompt in action but self-effacing. The apocryphal Protoevangelium of James holds that he was an old man when Jesus was born, but this appears unlikely when one considers the fact that he reared Jesus and fulfilled the family duties.

Special veneration to Joseph began in the East, where the apocryphal History of Joseph the Carpenter enjoyed great popularity in the fifth to seventh centuries. It led to devotion from the 17th century to Joseph by all those desiring a happy death because the History tells that Joseph was afraid of death and filled with self-reproach, but was comforted by the words of Mary and Jesus, who promised protection and life to all who do good in the name of Joseph.

Martyrology entries in the West date from the 8th century (Rheinau) and slightly later Irish martyrologies. The 9th-century Irish metrical hymn Félire of Saint Aengus mentions a commemoration, but it was not until the 15th century that veneration of Saint Joseph became widespread in the West, when his feast was introduced into the Roman Calendar in 1479.

Carmelite breviaries from 1480 commemorate his feast, as does the Roman breviary of 1482 and the Roman Missal of 1505.

The notion of Joseph as the foster-father of Jesus fired the imagination of the medieval Church. Saint John Chrysostom pointed to the anxieties of Joseph as a pattern of the trials of all Christians--relieved as they are by God's intervention. Saints Vincent Ferrer (d. 1419), Bridget of Sweden (d. 1373), and Bernardino of Siena (d. 1444) all propagated his devotion, partially in reaction against Medieval mystery plays, in which he is the channel for comic relief.

In the 15th century the French churchman Jean Gerson wrote twelve poems in his honor. Saint Teresa of Ávila chose him as the practical saint who should be patron of the Discalced Carmelite friars and nuns [see her paean, Go to Joseph]. Pope Gregory XV made his feast a day of obligation, but this is not widely observed today. In Quanquam pluries (1889), Pope Leo XIII declared Joseph a model for fathers of families and confirmed that his sanctity was second only the that of the Blessed Virgin. In 1989, Pope John Paul II issued Redemptoris custos (Guardian of the Redeemer) (Attwater, Attwater2, Benedictines, Bentley, Delaney, Encyclopedia, Farmer, Filas, Rondet, White).

Saint Joseph is generally pictured as an elderly man holding a flowering rod with the Christ Child in his arms or led my his hand (this emblem is also associated with Saint Joseph of Arimathea). According to an ancient legend, Mary and the other virgins of the Temple were commanded to return to their homes and marry. When the Blessed Virgin refused, the elders prayed for guidance and a voice from the sanctuary instructed them to call together the unwed males of the House of David. In accordance with the voice, the priest Zacharius instructed the gathered males to leave their staffs on the altar of the temple overnight. Nothing happened. So Zacharius next included those of the widowers, including Joseph.

When Joseph's rod was found the next morning, in flower ("the flower of the rod of Jesse"), he was told to take the Blessed Virgin to wife and keep her for the Lord (Appleton, Tabor). Many times the flowering rod is replaced by a stalk of lilies (Appleton).

At times he may be shown (1) with the Christ Child, two doves in a cage, and a lily; (2) with the Christ Child and a lily; (3) in scenes with the Holy Family; (4) with carpenter's tools; (5) as the angel appears to him in a dream; (6) working in a carpenter's shop with the boy Jesus near him; or (7) dying, supported by Christ and the Virgin (Roeder).

As head of the Holy Family, Saint Joseph is the patron of the Universal Church, of fathers, of opposition to atheistic Communism (he was a worker), of workers, doubters (he married Mary despite her pregnancy), of a happy death (he is said to have died before Jesus and Mary), Austria, Bohemia, Canada, Mexico, Belgium, Peru, Russia, South Vietnam, missions to the Chinese (Sandoval, White), bursers, procurators (Farmer), as well as of carpenters, confectioners (Naples), the dying, engineers, the family, married couples, house-hunters, pioneers, and travellers (Roeder). He is invoked when in doubt, hesitation or when looking for a house (Roeder).

SOURCE : http://www.saintpatrickdc.org/ss/0319.shtml

St. Joseph

Everything we know about the husband of Mary and the foster father of Jesus comes from Scripture. We know he was a carpenter, a working man, for the skeptical Nazarenes ask about Jesus, “Is this not the carpenter’s son?” (Matthew 13:55). He wasn’t rich for when he took Jesus to the Temple to be circumcised and Mary to be purified he offered the sacrifice of two turtledoves or a pair of pigeons, allowed only for those who could not afford a lamb (Luke 2:24).

Despite his humble work and means, Joseph came from a royal lineage. Luke and Matthew disagree some about the details of Joseph’s genealogy but they both mark his descent from David, the greatest king of Israel (Matthew 1:1-16 and Luke 3:23-38). Indeed the angel who first tells Joseph about Jesus greets him as “son of David,” a royal title used also for Jesus.

We know Joseph was a compassionate, caring man. When he discovered Mary was pregnant after they had been betrothed, he knew the child was not his but was as yet unaware that she was carrying the Son of God. He planned to divorce Mary according to the law but he was concerned for her suffering and safety. He knew that women accused to adultery could be stoned to death, so he decided to divorce her quietly and not expose her to shame or cruelty (Matthew 1:19-25).

We know Joseph was man of faith, obedient to whatever God asked of him without knowing the outcome. When the angel came to Joseph in a dream and told him the truth about the child Mary was carrying, Joseph immediately and without question or concern for gossip, took Mary as his wife. When the angel came again to tell him that his family was in danger, he immediately left everything he owned, all his family and friends, and fled to a strange country with his young wife and the baby. He waited in Egypt without question until the angel told him it was safe to go back (Matthew 2:13-23).

We know Joseph loved Jesus. His one concern was for the safety of this child entrusted to him. Not only did he leave his home to protect Jesus, but upon his return settled in the obscure town of Nazareth out of fear for his life. When Jesus stayed in the Temple we are told Joseph (along with Mary) searched with great anxiety for three days for him (Luke 2:48). We also know that Joseph treated Jesus as his own son for over and over the people of Nazareth say of Jesus, “Is this not the son of Joseph?” (Luke 4:22)

We know Joseph respected God. He followed God’s commands in handling the situation with Mary and going to Jerusalem to have Jesus circumcised and Mary purified after Jesus’ birth. We are told that he took his family to Jerusalem every year for Passover, something that could not have been easy for a working man.

Since Joseph does not appear in Jesus’ public life, at his death, or resurrection, many historians believe Joseph probably had died before Jesus entered public ministry.

Joseph is the patron of the dying because, assuming he died before Jesus’ public life, he died with Jesus and Mary close to him, the way we all would like to leave this earth.

Joseph is also patron of the universal Church, fathers, carpenters, and social justice.

We celebrate two feast days for Joseph: March 19 for Joseph the Husband of Mary and May 1 for Joseph the Worker.

SOURCE : http://www.ucatholic.com/saints/joseph/

5 Reasons Every Man Should Love Saint Joseph

Sam Guzman

St. Joseph often slips under the radar because of his quiet demeanor and hidden life. However, he has much to teach us about growing in holiness. Here are 5 reasons to discover St. Joseph.

1. He is the Patron Saint of Workers.

As men work takes up a great portion of our lives. Often we struggle to work in a way that honors God. St. Joseph can teach us how to work well if we ask him. One way to do this is to start your work day with a prayer to St. Joseph.

St. Joseph is also good to invoke if you are having difficulty finding a job. He was commissioned to provide for the Son of God, so he fully understands the pressure men face to provide for their families. In my own life, I have seen the power of St. Joseph’s intercession in finding my friends jobs.

2. His Intercession is Powerful.

A seminarian once told me of the powerful intercession of St. Joseph. He explained that whenever he needed something, he asked for St. Joseph’s help, and his needs were met. Over the past few years, I have witnessed this in my own life. St. Joseph has answered many of my prayers ,whether it be finding a job or starting a family. In her autobiography, St. Teresa of Avila gives us some insight into why St. Joseph’s intercession is so powerful.

“To other saints the Lord seems to have given grace to succor us in some of our necessities, but of this glorious saint my experience is that he succors us in them all, and that the Lord wishes to teach us that, as He was Himself subject to him on earth, (for, being His guardian and being called His father, he could command Him) just so in Heaven He still does all that he asks.”

3. He Models Fatherhood for Us.

God the Father chose St. Joseph from all men to be the foster-father of Jesus. That truly says something about his character, for he was entrusted with leading, providing for and protecting the Son of God and God’s greatest creature, Our Lady. Joseph faithfully served the Holy Family and protected them from danger so that they could fulfill God’s mission.

St. Joseph taught Jesus in his humanity how to be a man. No doubt he taught him how to be a faithful Jew, as well as the trade of carpentry. He models well for us fathers how to be the spiritual leaders of our families. Like St. Joseph, we are called to show the love of God the Father to our wives and children.

4. He was an obedient man

Every time God asked him to do something, Joseph was eager to say yes. Whether that was taking Mary as his wife, going to Bethlehem for the census, or fleeing with his family to Egypt, Joseph always followed God’s will immediately. In an age where we are told to do things our own way, Joseph is a great reminder that true greatness is found in following God’s will, not our own.

5. He was a man of silence

We never hear a word from St. Joseph in the Bible for he was a man of great silence. Because of this silence, he was able to hear God’s voice and discern his will for the Holy Family. In an age of noise and many words, Joseph reminds us that if we wish to hear God’s voice, we must quiet our hearts and enter into the silence.

Go to Joseph!

These are just a few of the many reasons why every Catholic man should develop devotion to St. Joseph. With his feast day coming up in March, it is the perfect time to learn about this great saint and ask for his intercession to live a holy life.

“Some Saints are privileged to extend to us their patronage with particular efficacy in certain needs, but not in others; but our holy patron St. Joseph has the power to assist us in all cases, in every necessity, in every undertaking.” – St. Thomas Aquinas

reprinted with permission from The Catholic Gentleman

SOURCE : http://ucatholic.com/blog/5-reasons-every-man-should-love-saint-joseph/

La mort de saint Joseph, ossuaire de Saint-Thégonnec


SAINT JOSEPH, Spouse of the Blessed Virgin and Patron of the Universal Church.

ST. JOSEPH was by birth of the royal family of David, but was living in humble obscurity as a carpenter when God raised him to the highest sanctity, and fitted him to be the spouse of His Virgin Mother, and foster-father and guardian of the Incarnate Word. Joseph, says the Holy Scripture, was a just man; he was innocent and pure, as became the husband of Mary; he was gentle and tender, as one worthy to be named the father of Jesus; he was prudent and a lover of silence, as became the master of the holy house; above all, he was faithful and obedient to divine calls. His conversation was with angels rather than with men. When he learned that Mary bore within her womb the Lord of heaven, he feared to take her as his wife; but an angel bade him fear not, and all doubts vanished. When Herod sought the life of the divine Infant, an angel told Joseph in a dream to fly with the Child and His Mother into Egypt. Joseph at once arose and obeyed. This sudden and unexpected flight must have exposed Joseph to many inconveniences and sufferings in so long a journey with a little babe and a tender virgin, the greater part of the way being through deserts and among strangers; yet he alleges no excuses; nor inquires at what time they were to return. St. Chrysostom observes that God treats thus all His servants, sending them frequent trials to clear their hearts from the rust of self-love, but intermixing seasons of consolation. "Joseph," says he, "is anxious on seeing the Virgin with child; an angel removes that fear. He rejoices at the Child's birth, but a great fear succeeds: the furious king seeks to destroy the Child, and the whole city is in an uproar to take away His life. This is followed by another joy, the adoration of the Magi; a new sorrow then arises: he is ordered to fly into a foreign unknown country, without help or acquaintance." It is the opinion of the Fathers that upon their entering Egypt, at the presence of the child Jesus, all the oracles of that superstitious country were struck dumb, and the statues of their gods trembled and in many places fell to the ground. The Fathers also attribute to this holy visit the spiritual benediction poured on that country, which made it for many ages most fruitful in Saints. After the death of King Herod, of which St. Joseph was informed in another vision, God ordered him to return with the Child and His Mother into the land of Israel, which our Saint readily obeyed. But when he arrived in Judea, hearing that Archelaus had succeeded Herod in that part of the country, and apprehensive that he might be infected with his father's vices, he feared on that account to settle there, as he would otherwise probably have done for the education of the Child; and therefore, being directed by God in another vision, he retired into the dominions of Herod Antipas, in Galilee, to his former habitation in Nazareth. St. Joseph, being a strict observer of the Mosaic law, in conformity to its direction annually repaired to Jerusalem to celebrate the Passover. Our Saviour, now int the twelfth year of His age, accompanied His parents thither. Having performed the usual ceremonies of the feast,they were returning with many of their neighbors and acquaintance towards Galilee; and never doubting but that Jesus was with some of the company, they travelled on for a whole day's journey before they discovered that He was not with them. But when night came on and they could hear no tidings of Him among their kindred and acquaintance, they, in the deepest affliction, returned with the utmost speed to Jerusalem. After an anxious search of three days they found Him in the Temple, discoursing with the learned doctors of the law, and asking them such questions as raised the admiration of all that heard Him, and made them astonished at the ripeness of His understanding; nor were His parents less surprised on this occasion. When His Mother told Him with what grief and earnestness they had sought Him, and asked, "Son, why hast Thou thus dealt with us? Behold Thy Father and I sought Thee in great affliction of mind," she received for answer, "How is it that you sought Me? Did you not know that I must be about My Father's business?" But though thus staying in the Temple unknown to His parents, in all other things He was obedient to them, returning with them to Nazareth, and there living in all dutiful subjection to them. As no further mention is made of St. Joseph, he must have died before the marriage of Cana and the beginning of our divine Saviour's ministry. We cannot doubt that he had the happiness of Jesus and Mary attending at his death, praying by him, assisting and comforting him in his last moments; whence he is particularly invoked for the great grace of a happy death and the spiritual presence of Jesus in that hour.

Reflection. -St. Joseph, the shadow of the Eternal Father upon earth, the protector of Jesus in His home at Nazareth, and a lover of all children for the sake of the Holy Child, should be the chosen guardian and pattern of every true Christian family.

SOURCE : http://jesus-passion.com/St.Joseph.htm

March 19

St. Joseph

THE GLORIOUS St. Joseph was lineally descended from the greatest kings of the tribe of Juda, and from the most illustrious of the ancient patriarchs; but his true glory consisted in his humility and virtue. The history of his life hath not been written by men; but his principal actions are recorded by the Holy Ghost himself. God intrusted him with the education of his divine Son, manifested in the flesh. In this view he was espoused to the Virgin Mary. It is an evident mistake of some writers, that by a former wife he was the father of St. James the Less, and of the rest who are styled in the gospels the brothers of our Lord: for these were only cousin-germans to Christ, the sons of Mary, sister to the Blessed Virgin, wife of Alphæus, who was living at the time of our Redeemer’s crucifixion. St. Jerom assures us, 1 that St. Joseph always preserved his virgin chastity; and it is of faith that nothing contrary thereto ever took place with regard to his chaste spouse, the Blessed Virgin Mary. He was given her by heaven to be the protector of her chastity, to secure her from calumnies in the birth of the Son of God, and to assist her in his education, and in her journies, fatigues, and persecutions. How great was the purity and sanctity of him who was chosen the guardian of the most spotless Virgin! This holy man seems, for a considerable time, to have been unacquainted that the great mystery of the Incarnation had been wrought in her by the Holy Ghost. Conscious therefore of his own chaste behaviour towards her, it could not but raise a great concern in his breast, to find that, notwithstanding the sanctity of her deportment, yet he might be well assured that she was with child. But being a just man, as the scripture calls him, and consequently possessed of all virtues, especially of charity and mildness towards his neighbour, he was determined to leave her privately, without either condemning or accusing her, committing the whole cause to God. These his perfect dispositions were so acceptable to God, the lover of justice, charity, and peace, that before he put his design in execution, he sent an angel from heaven not to reprehend anything in his holy conduct, but to dissipate all his doubts and fears, by revealing to him this adorable mystery. How happy should we be if we were as tender in all that regards the reputation of our neighbour; as free from entertaining any injurious thought or suspicion, whatever certainty our conjectures or our senses may seem to rely on; and as guarded in our tongue! We commit these faults only because in our hearts we are devoid of that true charity and simplicity, whereof St. Joseph sets us so eminent an example on this occasion.

  In the next place we may admire in secret contemplation, with what devotion, respect, and tenderness, he beheld and adored the first of all men, the new-born Saviour of the world, and with what fidelity he acquitted himself of his double charge, the education of Jesus, and the guardianship of his blessed mother. “He was truly the faithful and prudent servant,” says St. Bernard, 2 “whom our Lord appointed the master of his household, the comfort and support of his mother, his foster-father, and most faithful cooperator in the execution of his deepest counsels on earth.” “What a happiness,” says the same father, “not only to see Jesus Christ, but also to hear him, to carry him in his arms, to lead him from place to place, to embrace and caress him, to feed him, and to be privy to all the great secrets which were concealed from the princes of this world.”

 “O astonishing elevation! O unparalleled dignity!” cries out the pious Gerson, 3 in a devout address to St. Joseph, “that the mother of God, queen of heaven, should call you her lord; that God himself, made man, should call you father, and obey your commands. O glorious Triad on earth, Jesus, Mary, Joseph, how dear a family to the glorious Trinity in heaven, Father, Son, and Holy Ghost! Nothing is on earth so great, so good, so excellent.” Amidst these his extraordinary graces, what more wonderful than his humility! He conceals his privileges, lives as the most obscure of men, publishes nothing of God’s great mysteries, makes no further inquiries into them, leaving it to God to manifest them at his own time, seeks to fulfil the order of providence in his regard, without interfering with any thing but what concerns himself. Though descended from the royal family which had long been in possession of the throne of Judæa, he is content with his condition, that of a mechanic or handicraftsman, 4 and makes it his business, by labouring in it, to maintain himself, his spouse, and the divine child.

We should be ungrateful to this great saint, if we did not remember that it is to him, as the instrument under God, that we are indebted for the preservation of the infant Jesus from Herod’s jealousy and malice, manifested in the slaughter of the Innocents. An angel appearing to him in his sleep, bade him arise, take the child Jesus, and fly with him into Egypt, and remain there till he should again have notice from him to return. This sudden and unexpected flight must have exposed Joseph to many inconveniences and sufferings in so long a journey, with a little babe and a tender virgin, the greater part of the way being through deserts, and among strangers; yet he alleges no excuses, nor inquiries at what time they were to return. St. Chrysostom observes that God treats thus all his servants, sending them frequent trials, to clear their hearts from the rust of self-love, but intermixing seasons of consolation. 5 “Joseph,” says he, “is anxious on seeing the Virgin with child; an angel removes that fear; he rejoices at the child’s birth, but a great fear succeeds; the furious king seeks to destroy the child, and the whole city is in an uproar to take away his life. This is followed by another joy, the adoration of the Magi: a new sorrow then arises; he is ordered to fly into a foreign unknown country, without help or acquaintance.” It is the opinion of the fathers, that upon their entering Egypt, at the presence of the child Jesus, all the oracles of that superstitious country were struck dumb, and the statues of their Gods trembled, and in many places fell to the ground, according to that of Isaiah xix. And the statues of the Egyptians shall be shaken in his presence. 6 The Fathers also attribute to this holy visit the spiritual benediction poured on that country, which made it for many ages most fruitful in saints. 7

After the death of King Herod, which was notified to St. Joseph by a vision, God ordered him to return with the child and his mother into the land of Israel, which our saint readily obeyed. But when he arrived in Judæa, hearing that Archelaus succeeded Herod in that part of the country, apprehensive he might be infected with his father’s vices—cruelty and ambition—he feared on that account to settle there, as he would otherwise probably have done, for the more commodious education of the child. And therefore, being directed by God in another vision, he retired into the dominions of his brother Herod Antipas, in Galilee, to his former habitation in Nazareth, where the wonderful occurrences of our Lord’s birth were less known. St. Joseph being a strict observer of the Mosaic law, in conformity to its direction, annually repaired to Jerusalem to celebrate the passover. Archelaus, being banished by Augustus, and Judæa made a Roman province, he had now nothing more to fear at Jerusalem. Our Saviour being advanced to the twelfth year of his age, accompanied his parents thither; who, having performed the usual ceremonies of the feast, were now returning with many of their neighbours and acquaintance towards Galilee, and never doubting but that Jesus had joined himself with some of the company, they travelled on for a whole day’s journey without further inquiry after him, before they discovered that he was not with them. But when night came on, and they could hear no tidings of him among their kindred and acquaintance, they, in the deepest affliction, returned with the utmost speed to Jerusalem: where, after an anxious search of three days, they found him in the temple, sitting among the learned doctors of the law, hearing them discourse, and asking them such questions as raised the admiration of all that heard him, and made them astonished at the ripeness of his understanding: nor were his parents less surprised on this occasion. And when his mother told him with what grief and earnestness they had sought him, and to express her sorrow for that, though short, privation of his presence, said to him: “Son, why hast thou thus dealt with us? Behold, thy father and I sought thee in great affliction of mind;” she received for answer, that being the Messias and Son of God, sent by his Father into the world in order to redeem it, he must be about his Father’s business, the same for which he had been sent into the world; and therefore that it was most likely for them to find him in his Father’s house: intimating that his appearing in public on this occasion, was to advance his Father’s honour, and to prepare the princes of the Jews to receive him for their Messias; pointing out to them from the prophets the time of his coming. But though in thus staying in the temple, unknown to his parents, he did something without their leave, in obedience to his heavenly Father, yet in all other things he was obedient to them, returning with them to Nazareth, and there living in all dutiful subjection to them.

Aelred, our countryman, abbot of Rieval, in his sermon on losing the child Jesus in the temple, observes that this his conduct to his parents is a true representation of that which he shows us, whilst he often withdraws himself for a short time from us to make us seek him the more earnestly. He thus describes the sentiments of his holy parents on this occasion: 8 “Let us consider what was the happiness of that blessed company, in the way to Jerusalem, to whom it was granted to behold his face, to hear his sweet words, to see in him the signs of divine wisdom and virtue; and in their mutual discourse to receive the influence of his saving truths and example. The old and young admire him. I believe boys of his age were struck with astonishment at the gravity of his manners and words. I believe such rays of grace darted from his blessed countenance as drew on him the eyes, ears, and hearts of every one. And what tears do they shed when he is not with them?” He goes on considering what must be the grief of the parents when they had lost him; what their sentiments, and how earnest their search: but what their joy when they found him again. “Discover to me,” says he, “O my Lady, Mother of my God, what were your sentiments, what your astonishment and your joy when you saw him again, and sitting, not amongst boys, but amidst the doctors of the law: when you saw every one’s eyes fixed on him, every one’s ears listening to him, great and small, learned and unlearned, intent only on his words and motions. You now say: I have found him whom I love. I will hold him, and will no more let him part from me. Hold him, sweet Lady, hold him fast; rush on his neck, dwell on his embraces, and compensate the three days’ absence by multiplied delights in your present enjoyment of him. You tell him that you and his father sought him in grief. For what did you grieve? not for fear of hunger or want in him whom you knew to be God: but I believe you grieved to see yourself deprived of the delights of his presence even for a short time; for the Lord Jesus is so sweet to those who taste him, that his shortest absence is a subject of the greatest grief to them.” This mystery is an emblem of the devout soul, and Jesus sometimes withdrawing himself, and leaving her in dryness, that she may be more earnest in seeking him. But, above all, how eagerly ought the soul which has lost God by sin, to seek him again, and how bitterly ought she to deplore her extreme misfortune!

As no further mention is made of St. Joseph, he must have died before the marriage of Cana, and the beginning of our divine Saviour’s ministry. We cannot doubt but he had the happiness of Jesus and Mary attending at his death, praying by him, assisting and comforting him in his last moments. Whence he is particularly invoked for the great grace of a happy death and the spiritual presence of Jesus in that tremendous hour. The church reads the history of the patriarch Joseph on his festival, who was styled the saviour of Egypt, which he delivered from perishing by famine; and was appointed the faithful master of the household of Putephar, and of that of Pharaoh and his kingdom. But our great saint was chosen by God the saviour of the life of him who was the true Saviour of the souls of men, rescuing him from the tyranny of Herod. He is now glorified in heaven, as the guardian and keeper of his Lord on earth. As Pharaoh said to the Egyptians in their distress: “Go to Joseph;” so may we confidently address ourselves to the mediation of him, to whom God, made man, was subject and obedient on earth.

The devout Gerson expressed the warmest devotion to St. Joseph, which he endeavoured by letters and sermons to promote. He composed an office in his honour, and wrote his life in twelve poems, called Josephina. He enlarges on all the circumstances of his life by pious affections and meditations. St. Teresa chose him the chief patron of her order. In the sixth chapter of her life she writes thus: “I chose the glorious St. Joseph for my patron, and I commend myself in all things singularly to his intercession. I do not remember ever to have asked of God anything by him which I did not obtain. I never knew any one, who, by invoking him, did not advance exceedingly in virtue: for he assists in a wonderful manner all who address themselves to him.” St. Francis of Sales, throughout his whole nineteenth entertainment, extremely recommends devotion to him, and extols his merits, principally his virginity, humility, constancy, and courage. The Syrians and other eastern churches celebrate his festival on the 20th of July; the western church, on the 19th of March. Pope Gregory XV. in 1621, and Urban VIII., in 1642, commanded it to be kept a holiday of obligation.

The holy family of Jesus, Mary, and Joseph, presents to us the most perfect model of heavenly conversation on earth. How did those two seraphim, Mary and Joseph, live in their poor cottage! They always enjoyed the presence of Jesus, always burning with the most ardent love for him, inviolably attached to his sacred person, always employed and living only for him. What were their transports in beholding him, their devotion in listening to him, and their joy in possessing him! O heavenly life! O anticipation of the heavenly bliss! O divine conversation! We may imitate them, and share some degree of this advantage, by conversing often with Jesus, and by the contemplation of his most amiable goodness, kindling the fire of his holy love in our breasts. The effects of this love, if it be sincere, will necessarily appear in our putting on his spirit, and imitating his example and virtues; and in our studying to walk continually in the divine presence, finding God every where, and esteeming all the time lost which we do not spend with God, or for his honour.

Note 1. L. adv. Helvid. c. 9. [back]

Note 2. Hom. 2. super missus est, n. 16. p. 742. [back]

Note 3. Serm de Nativ. [back]

Note 4. This appears from Matt. xiii. 55. St. Justin, (Dial. n. 89. ed. Ben. p. 186.) St. Ambrose, (in Luc. p. 3.) and Theodoret (b. 3. Hist. c. 18.) say he worked in wood, as a carpenter. St. Hilary (in Matt. c. 14. p. 17.) and St. Peter Chrysologus (Serm. 48.) say he wrought in iron as a smith; probably he wrought both in iron and in wood; which opinion St. Justin favours, by saying: “He and Jesus made ploughs and yokes for oxen.” [back]

Note 5. Hom. 8. in Matt. t. 7. p. 123. ed. Ben. [back]

Note 6. This is affirmed by St. Athanasius, (1. de Incarn.) Eusebius, (Demonstrat. Evang. l. 6. c. 20.) St. Cyril, (Cat. 10.) St. Ambrose, (in Ps. 118. Octon. 5.) St. Jerom, (in Isai. 19.) St. Chrysostom, St. Cyril of Alexandria, (in Isai.) Sozomen, (l. 5. c. 20.) &c. [back]

Note 7. See the Lives of the Fathers of the Desert. [back]

Note 8. Bibl. Patr. t. 13. [back]

Rev. Alban Butler (1711–73).  Volume III: March. The Lives of the Saints.  1866.

SOURCE : http://www.bartleby.com/210/3/191.html

Francisco de Herrera, San José y el Niño Jesús,, 1648, 116 x 112


San Giuseppe Sposo della Beata Vergine Maria

19 marzo

Questa celebrazione ha profonde radici bibliche; Giuseppe è l'ultimo patriarca che riceve le comunicazioni del Signore attraverso l'umile via dei sogni. Come l'antico Giuseppe, è l'uomo giusto e fedele (Mt 1,19) che Dio ha posto a custode della sua casa. Egli collega Gesù, re messianico, alla discendenza di Davide. Sposo di Maria e padre putativo, guida la Sacra Famiglia nella fuga e nel ritorno dall'Egitto, rifacendo il cammino dell'Esodo. Pio IX lo ha dichiarato patrono della Chiesa universale e Giovanni XXIII ha inserito il suo nome nel Canone romano.

Patronato: Padri, Carpentieri, Lavoratori, Moribondi, Economi, Procuratori Legali, Poveri, Esuli, Afflitti

Etimologia: Giuseppe = aggiunto (in famiglia), dall'ebraico

Emblema: Giglio

Martirologio Romano: Solennità di san Giuseppe, sposo della beata Vergine Maria: uomo giusto, nato dalla stirpe di Davide, fece da padre al Figlio di Dio Gesù Cristo, che volle essere chiamato figlio di Giuseppe ed essergli sottomesso come un figlio al padre. La Chiesa con speciale onore lo venera come patrono, posto dal Signore a custodia della sua famiglia.

All’inizio della Scrittura è scritto: “In principio Iddio creò il cielo e la terra” (Gn 1,1); e il catechismo spiega: “li creò ex nihilo, cioè dal nulla”.  Si affermano due cose importanti: da un lato, la contraddittorietà del divenire e l’inesistenza del nulla; e, dall’altro, la immobilità e l’eternità dell’Essere Divino. Una delle difficoltà del versetto sembra costituita dall’interpretazione dell’espressione “In principio”.

Qualsiasi spiegazione letterale o temporale, - come “prima del tempo” o “al principio o all’inizio del tempo” e simili, - risulta semplicemente falsa, perché razionalmente non si può né pensare né immaginare che anteriormente alla creazione ci fosse qualcosa. Il tempo, infatti, nasce con la stessa creazione. Prima della creazione, quindi, non c’è nulla, ossia non c’è nessun elemento, nessuna energia, nessuna immagine, nessun motivo, neppure un impulso arcano verso l’esistenza, ma esclusivamente il nulla! Per definizione, il nulla è inimmaginabile e impensabile! Questo, il significato negativo del creare dal nulla.

Positivamente, invece, si afferma l’esistenza dell’Essere Creatore, nella sua intrinseca beatitudine di amore, che, in seguito, si rivelerà come stupenda realtà misterica di Unità e Trinità insieme: Padre Figlio e Spirito Santo. Di conseguenza, ad extra Dei, cioè al di fuori di Dio, non esiste nulla. E tutto ciò che altrimenti è, deriva unicamente dalla esclusiva libertà e dalla potenza onnipotente di Dio. Ora, Dio, nella sua Unicità di Natura e nella Trinità delle Persone, che si amano perfettamente di amore infinito, non ha bisogno di niente, perché in sé è semplicemente semplice e perfetto assolutamente; e ancora, poiché ciò che Dio fa è Divino, come dice anche Platone nel Timeo (41c 3-5), allora razionalmente la creazione non può essere opera diretta e immediata di Dio, ma solo indiretta e mediata, ossia di un Dio Umanizzato, che, liberamente, “prima” crea e sublima la materia con l’assunzione della “natura umana”, e, poi, orienta la sua azione creatrice dell’universo mondo per la sua venuta storica sulla terra. La materia, per sé, è sede della necessità, della contingenza, della finitudine, del movimento, dell’imperfezione, del limite, della corruzione; mentre Dio, della libertà necessaria e della necessità libera, dell’immobilità perfetta, della incorruttibilità eterna, della perfezione semplice assoluta e infinita.
Come spiegare, allora, la creazione?

Per mezzo dell’unica opera ad extra di Dio, ossia dell’Incarnazione del Verbo, il Summum Opus Dei, come la chiama Duns Scoto (Reportata Parisiensia, III, d. 7, q. 4, n. 4), e tradotto nella lingua italica con il Capolavoro di Dio, (Duns Scoto, Antologia, a cura di G. Lauriola, Ed. AGA - Alberobello 2007, 2 ed., p. 187). Cristo Venturo, quindi, in quanto vero Dio e vero Uomo, crea tutto ciò che esiste sia nell’ordine soprannaturale sia nell’ordine naturale; e, “nella pienezza del tempo, nasce [storicamente] da donna” (Gal 4, 4), per compiere liberamente e volontariamente il disegno divino e rivelare con amore il mistero di Dio, Uno e Trino: “Cristo è l’immagine [sostanziale] del Dio invisibile…” (Col 1, 15-17). Allora, l’espressione “In principio” non significa altro che “In Cristo”, come viene interpretato anche dai Padri; e il versetto genesiaco, quindi, afferma, nel suo significato più profondo, la preesistenza di Cristo, che si espande in tutta la Scrittura, dalla preistoria ontologica alla metastoria escatologica attraverso la storia esistenziale della sua avventura divino-umana: “In principio [In Cristo], Dio creò il cielo e la terra” (Gn 1,1); “Alfa e Omega, Principio e Fine, il Primo e l’Ultimo” (Ap 1, 8; 22, 13); “In principio [In Cristo] era il Verbo…” (Gv 1,1).

Disegno di Dio

Il disegno della salvezza, rivelato nella massima libertà dal mistero di Dio, manifesta ad extra la pienezza di vita e d’amore che Dio contiene in sé e per sé, rendendo Parola Incarnata il suo Silenzio Trinitario. Tutto ciò che esiste fuori-di Dio e diverso-da Dio è opera della Parola Incarnata. Ora, tra l’azione efficace della Parola e ciò che è prodotto si costituisce un legame di dipendenza originale che tiene unita ogni creatura al suo Creatore, perché nell’effetto riluce sempre qualcosa della sua causa: hanno la stessa natura o origine (cf Eb 2, 11).

La perfezione dell’effetto creato dipende dal grado di partecipazione dello stesso alla causa creatrice: quanto più è vicino o simile alla causa, tanto più è perfetto. Tra le creature razionali, l’uomo, per la sua autoconsapevolezza e libertà, possiede la capacità di riconoscere la sua dipendenza dalla causa originante e di modellare la sua vita su di essa: la sua perfezione, quindi, è direttamente proporzionale alla sua vicinanza e somiglianza alla causa.

In questo modo, la Parola Incarnata, che rende “visibile il mistero di Dio invisibile” (Col 1, 15), si auto-rivela come causa efficiente, come causa formale e anche come causa finale dell’universo mondo e di ogni singolo essere, specialmente dell’uomo, creato a immagine di Cristo e chiamato alla partecipazione massima con il suo Creatore. E la stessa Parola Incarnata si propone come norma e regola dell’essere in qualsiasi modalità esistenziale esso si realizzi. Difatti, una realtà è quella che è, non in quanto è in sé stessa, ma in quanto è più o meno vicino alla Parola Incarnata, che l’ha causata. La “vicinanza alla Parola Incarnata” diventa, perciò, principio di perfezione e di santità per l’uomo.

Principio di vicinanza a Cristo

Ogni essere, presente come idea nel disegno d’amore infinito di Dio, viene chiamato all’esistenza da un atto libero e gratuito della Volontà divina, che lo fa esistere concretamente nel mondo storico, secondo il principio della vicinanza a Cristo, che Duns Scoto ha formulato nel momento in cui ha considerato il Cristo nella sua triplice causalità. Di conseguenza, dell’essere si possono avere diversi gradi di partecipazione: come immagine, come vestigio e come ombra. La sua importanza, allora, non dipende dalla semplice natura d’essere, ma dal grado di vicinanza a Cristo, perché Cristo è regola e norma di perfezione dell’essere sia universale che singolare.

Principio che si applica anche ai personaggi chiamati a compiere una missione particolare alla realizzazione storica del disegno divino. Dal Silenzio Trinitario si concretizza la Parola, che, per rivelarsi fuori di sé, necessita della materia, ossia di un corpo visibile; onde, il dono libero dell’Incarnazione. Per questo, dalla Parola viene sublimata prima la materia, che per sé è contingente, e, assumendola in sé, apre la possibilità alla stessa creazione dell’universo mondo spirituale e materiale.

L’essere più vicino a Cristo Venturo è certamente la Madre, Colei che gli parteciperà direttamente e concretamente il corpo umano, visibile e perfetto, secondo le modalità che Lui stesso organizzerà nell’arco storico fino alla “pienezza del tempo” (Gal 4, 4). E insieme alla Madre, è logico supporre anche la figura del “padre” storico, che garantisse l’attuazione dell’avventura umana del Nascituro nel rispetto delle leggi esistenziali del tempo. Così, anche se in momenti logici differenti e con diverse modalità funzionali, nel mistero dell’Incarnazione della Parola sono presenti, a vario titolo, sia la “madre” Maria sia il “padre” Giuseppe.

Ora, nell’esecuzione storica del disegno divino, secondo la felice intuizione di Duns Scoto, è presente da sempre e contemporaneamente a Cristo anche la Madre, uniti nel medesimo e identico decreto di predestinazione da parte di Dio. Idea che, nell’evoluzione storica del mistero dell’Immacolata Concezione, troverà conferma con Pio IX nel 1854, con la definizione dogmatica Ineffabilis Deus, che proclama Immacolata la Madre di Cristo, fondandosi sia sull’unico e medesimo atto di predestinazione, e sia sulla redenzione anticipata o preservativa di Maria, ugualmente proposta da Duns Scoto, come “prima redenta” nella previsione dei meriti futuri di Cristo.

Così, nel disegno divino è già presente la costituzione della “coppia” originale e originante, da cui ogni essere, soprannaturale e naturale, riceverà vita esistenza e grazia. È una coppia tutta speciale, perché formata dal Figlio e dalla Madre, da Cristo e da Maria. La funzione di Cristo è di natura, quella di Maria è di grazia. L’azione del Figlio è diretta, quella della Madre è mediata. Si apre così il corso dell’avventura umana di questa coppia, che dal Genesi abbraccia tutto l’arco storico fino ad arrivare all’Apocalisse, attraverso le due precisazioni storiche del profetismo, con Isaia (7, 13-14) e Micheia (5, 1-3), e del vangelo dell’infanzia con Luca (2, 1-52) e Matteo (1, 1-25; 2, 1-23). E proprio “nella pienezza del tempo” (Gal 4, 4), quando Cristo deve iniziare la sua avventura umana, “emerge” tutta la grandezza della personalità storica di Giuseppe, “sposo” di Maria e “padre” putativo di Gesù.

Significato del nome “Giuseppe”

Come Cristo è il cuore del Silenzio-di-Dio e Maria il cuore del Silenzio-Parola-di-Cristo, così Giuseppe, che etimologicamente significa “aggiunto (da Dio)” alla coppia originale, viene a gravitare totalmente nella sfera di questo silenzio sponsale e particolarmente del silenzio della sua dolce Sposa, alla cui ombra esprime e realizza tutta la sua forte e delicata personalità sia come “custode” delle origini esistenziali di Cristo e sia come “protettore” della verginità della sua Sposa.

Le due annunciazioni

Alla luce del principio scotista della vicinanza a Cristo, piace leggere sia l’annunciazione lucana della Vergine (Lc 1, 26-27) sia quella matteana di Giuseppe (Mt 1, 16-25), così da cogliere più da vicino alcuni aspetti della volontà di Dio, espressa nel suo disegno di salvezza. Lasciando per ovvie ragioni la prima, si fermi l’attenzione sulla seconda annunciazione, per evidenziare la estrema sensibilità di Giuseppe alle cose divine, che si sono manifestate apertamente nella configurazione della speciale ed esclusiva coppia del Figlio-Madre, nella cui orbita viene a gravitare chiaramente la sua personalità di “uomo giusto”, perché più vicino di tutti a Cristo e a Maria. La storica vicinanza di Giuseppe a tale “coppia” dà origine anche alla sua particolare missione di custodire il nascituro Bambino e di garantire anche la scelta della verginità della Madre, come segno della stessa divinità del Figlio.

Per analogia a quella lucana, l’annunciazione giuseppina di Matteo  si svolge in due tempi: uno, anteriore alle spiegazioni angeliche, è costituita dai segni della maternità di Maria, di fronte ai quali Giuseppe “tace e pensa” nel tentativo di discernere sulla decisione da prendere circa la promessa Sposa, e alla fine decide di lasciarla in segreto; l’altra, invece, è il chiarimento angelico che assicura sul fatto meraviglioso, che si sta compiendo in Maria, per opera dello Spirito Santo, cui fa seguito l’immediata proposta di “prendere con sé la sua Sposa”.

Il silenzio di Maria

Davvero sconcertante il comportamento di Maria!

Perché non disse nulla a Giuseppe?

La risposta ancora una volta riposa nel silenzio!

Maria tace. Difatti, chi avrebbe creduto alla sua parola? Maria si rifugia nel silenzio e costringe il suo promesso sposo a progettare la mossa del libello di ripudio (Mt 1, 16-25), perché egli non poteva credere ai suoi occhi: la dolce fanciulla di Nazaret, la sua promessa Sposa, è incinta! E nel mistero, Maria si chiude nel silenzio adorante del suo Frutto verginale.

Nel suo sconcertante tacere, Maria, come catturata dall’enorme mistero che si sta compiendo in lei, trascina anche Giuseppe nell’arcano silenzio, accettato da lui solo per divina proposta: “e la prese con sé”. E così dalla coppia originale e originante di Cristo-Maria, Figlio-Madre, scaturisce ugualmente un matrimonio sui generis, Giuseppe-Maria. Tutto si svolge lontano da ogni ingerenza della sfera umana: Maria rispetta il silenzio di Dio, e Giuseppe i corrispondenti silenzi di Maria.

Ciò che viene messo in luce in questa seconda annunciazione è la fede di Giuseppe, che accetta con amore, con serenità e con gioia tutto il mistero che si sta realizzando nella sua Sposa, per custodirlo. Ecco, il senso del termine biblico a lui riferito di “uomo giusto”. Bisogna interpretare come duplice l’intervento divino provocato dal silenzio di Maria. Da un lato, il Signore viene in aiuto alla sua “serva”, che si era dichiarata fedele fino in fondo: “avvenga di me quello che hai detto” (Lc 1, 38). Come a dire: di fronte alla scelta del voto di verginità perpetua di Maria e alla voluta maternità divina, il Signore doveva trovare una via di uscita all’intrica situazione venuta a crearsi.

Dall’altro, deve intervenire anche su Giuseppe, assicurandolo in modo inequivocabile circa la natura dell’evento nella sua Sposa, e lo fece attraverso il sogno: “Giuseppe, non temere di prendere con te Maria tua sposa, perché quel che è generato in lei viene dallo Spirito Santo” (Mt 1, 20). In questo modo a Giuseppe è affidata la custodia, la protezione e la memoria del grande mistero che si compie in Maria, sua sposa. E così il Signore si manifesta ben superiore alla legge da lui stesso data alla natura! Per logica conseguenza, è da supporre che, come a Giuseppe fu chiesto di “non temere di prendere Maria come sposa”, così anche Maria fu assicurata di non temere di prendere Giuseppe come suo sposo. In questo modo, commenta Duns Scoto, rivolgendosi a Maria: “Lo Spirito ti dona Giuseppe come custode e testimone della tua verginità, perché come te è impegnato nel voto di continenza” (Ordinatio, IV, d. 30, q. 2, n. 5).

Matrimonio con Maria

Certo, il matrimonio tra Giuseppe e Maria ha del singolare. Ci si potrebbe chiedere: è valido un matrimonio in cui uno dei coniugi fa voto assoluto di castità? La questione è di natura sia teologica che giuridica: l’una, perché implica l’azione dello Spirito Santo che pone Maria in una condizione privilegiata di verginità assoluta; e l’altra, perché comporta dei chiarimenti circa un matrimonio valido, rato ma non consumato. Molte le ipotesi e le conclusioni che si sono avvicendate nello spiegare la delicata e complessa situazione. Si possono raccogliere a tre principali: 1) chi accetta la validità del matrimonio e rende il voto “condizionato”, se piace a Dio; 2) chi accentua il voto e ridimensiona il consenso matrimoniale, considerandolo come una relazione amicale; 3) chi riesce a conciliare le due tesi, della validità del matrimonio e del voto assoluto di Maria. Questa terza possibilità è proposta da Duns Scoto.

Secondo questa terza ipotesi, contratto matrimoniale e voto di castità possono stare insieme. Nel contratto matrimoniale è inclusa la mutua donazione dei corpi, che, però, è sottoposta a un’implicita condizione, cioè ‘se viene richiesta’. Difatti, i contraenti, se, dopo la cerimonia matrimoniale, volessero fare voto di castità, il loro matrimonio è valido a tutti gli effetti, a meno che quella condizione ‘se venga richiesto’, non venga posta in atto. Perché la condizione ‘se venga richiesto’ possa salvare il contratto nei confronti del voto, è necessario che i contraenti sappiano con certezza che essa non sarà mai posta in atto. Ora, che Maria e Giuseppe abbiano avuto tale certezza, è sicuro.

Difatti, così si esprime il Cantore dell’Immacolata: “Se vi è assoluta certezza che la detta condizione, non verrà esercitata, il contratto matrimoniale non pregiudica in nessun modo il voto di castità. Nel nostro caso vi fu tale certezza. Si legge che l’angelo informò Giuseppe ‘Non temere di prendere Maria in moglie’ (Mt 1, 30). A maggior ragione e senza ombra di dubbio alcuno, si può dire che anche Maria, prima di promettersi a Giuseppe, fu resa sicura dall’Angelo o da Dio stesso: ‘Non temere Maria di prendere Giuseppe, uomo giusto, come tuo marito’. Anzi egli ti viene dato dallo Spirito Santo come Custode e Testimone della [tua] verginità, essendosi legato anche lui con pari voto” (Ordinatio, IV, d. 30, q. 2, n. 5).

Alla questione: il contratto di matrimonio è avvenuto prima o dopo l’Incarnazione storica? Il voto di castità di Maria - risponde sempre Duns Scoto - precede l’Annunciazione, come questa precede il matrimonio. E così continua: Maria ha ricevuto da Dio un mandato speciale di contrarre il matrimonio con Giuseppe, e ne enumera i motivi: per la salvaguardia della Madre e per la tutela del Bambino. In questa interpretazione, sembra più facile comprendere come Maria, già illuminata su tutto il mistero dell’Incarnazione, abbia potuto dare il suo assenso al matrimonio, senza includervi alcuna clausola di consumarlo. Per cui, il suo matrimonio è valido a tutti gli effetti. I fini principali del matrimonio vengono rispettati: procreazione educazione della prole e amore reciproco.

Importanza della decisione di Giuseppe

Al di là delle singole interpretazioni, che sottendono sempre e comunque un mistero, sembra utile riflettere alquanto sulla decisione di Giuseppe di sposare ugualmente Maria, pur essendo incinta, in relazione non solo a Lei, ma soprattutto al Nascituro e alla sua missione. Secondo le leggi vigenti dell’epoca, non solo Maria non avrebbe avuto vita facile, perché rischiava addirittura la “lapidazione”; mentre al Bambino non si assicurava una evoluzione serena e dignitosa né alla sua crescita personale né al suo ministero di portare la buona novella agli uomini.

La decisione coraggiosa di Giuseppe, quindi, salva Madre e Figlio da situazioni critiche in un piccolo paese, quale era Nazaret, in cui ogni cosa passava di bocca in bocca: una ragazza madre e un figlio senza padre! Invece, Giuseppe, con l’aiuto dell’intervento divino nel sogno, manifesta ferma decisione e delicata fermezza, da essere confermato nella sua “giustizia”, secondo l’agire proprio della fede che non lascia mai in pace il cuore, pur lasciando la pace nel cuore. Prima che i segni della gravidanza fossero evidenti, Giuseppe, sempre su indicazione “dell’angelo del Signore, prese con sé la sua sposa...” (Mt 1, 24), e si affrettò alla celebrazione del matrimonio.

La nascita del Bambino

La personalità di Giuseppe si rivela non solo nella delicatissima decisione di custodire e garantire la verginità perpetua di Maria, ma soprattutto nell’assicurare un futuro dignitoso e sicuro al Bambino, che doveva nascere, secondo il disegno di Dio, proprio a Betlemme, dalla radice di Iesse, da cui lui discendeva (Mt 1, 20; Lc 1, 27). Con quali sentimenti dovette condurre la sua Sposa incinta dalla Galilea in Giudea, per adempiere al dovere del censimento, dove si realizzerà la profezia di Michea: “E tu Betlemme, così piccola per essere un capoluogo di Giuda, da te uscirà colui che che dev’essere il dominatore d’Israele” (5, 1). Le circostanze della nascita dovettero consolidare nella fede la decisione voluta fortemente da Giuseppe. E come Maria serbava nel suo cuore ogni evento e circostanza, così anche Giuseppe pensava e rifletteva su ogni particolare che attorniava l’evento del Nascituro e lo meditava con gioia nel suo cuore.

Una gioia sofferta

Gioia, però, messa a dura prova da tante altre circostanze profetiche ed esterne che si manifestarono attorno al Bambino. Dalla “presentazione al tempio”, in cui sentì quelle strane profezie del vecchio Simeone, quando elevando al cielo il Bambino in segno di offerta e di consacrazione insieme, lo chiamò “segno di contraddizione” (Lc 2, 34); e alla Madre venne profetizzata “una spada trafiggerà la sua anima” (Lc 2, 35). Il cuore di “padre” si sentì profondamente scosso dalle fondamenta, eppure Giuseppe conservò padronanza e serenità per sé e per la Sposa, che, come dondolava il Bambino per addormentarlo, così nel suo cuore sentimenti contrastanti bollivano in continuazione. La presenza matura e adulta sia umana che di fede di Giuseppe costituiva un punto di sicuro riferimento per Maria, anche se le ansie e le preoccupazioni per il Bambino non cessavano mai di pulsare nel suo cuore, immerso nel profondo silenzio arcano del volere divino.

Non è difficile indovinare i pensieri e i contrastanti sentimenti che travagliavano sia Giuseppe che Maria alla notizia, circa la necessità di mettere al sicuro il Bambino, ricercato da Erode per ucciderlo, che da “buon politico” vuole eliminare il “rivale”, appena spuntato alla luce del sole. Il potere politico, quando è totalitario, non si smentisce mai. Essere avvertiti, notte tempo, del pericolo che il Bambino correva, è il massimo della sofferenza umana per i due cuori semplici e pieni di fede e di amore. E così la via dell’esilio egiziano si apre. Quale prova umana e di fede insieme abbiano vissuto Giuseppe e Maria, non lo può descrivere se non chi l’ha provato. Il Signore, in questo modo, ha voluto forgiare nel crogiuolo della sofferenza più profonda e amara anche il cuore di Giuseppe, nel portare il peso della famiglia e nell’assicurarle il necessario in terra straniera, senza lavoro sicuro né stabile dimora. Unica certezza, la fiducia nella Parola dell’angelo.

Difficoltà d’ogni genere, disagi oltre misura, incertezze fuori ogni immaginazione dovettero essere compagni stretti di Giuseppe in quei pochi anni trascorsi nell’antica e nobile terra egizia, da dove ha origine il popolo eletto con Mosé. Sembra una coincidenza fortuita, eppure, forse, dietro c’è un segreto disegno divino. Per analogia, si può paragonare - mutatis mutandis - Giuseppe a Mosé, chiamato a ricondurre il perfezionatore e dominatore del Popolo, Gesù, in terra sicura e nella sua terra. Difatti, il messaggero divino non si fece attendere, non appena le circostanze storiche mutarono con la morte di Erode (Mt 1, 19-23). In questo passo evangelico, ancora una volta, è palese tutta la portata della maturità di fede di Giuseppe, che si abbandona sempre e completamente alla volontà celeste, nonostante tutte le contrarietà della vita.

Rientro a Nazaret e ansia per il Bambino

Sembrava essere tornato il sereno dopo il rientro nella Galilea, dove la vita finalmente scorreva nella normalità più assoluta: lavoro famiglia e religiosità. E proprio in un momento di sentita religiosità partecipata per la Pasqua a Gerusalemme, Giuseppe condusse la Sposa e il Dodicenne con sé. L’immensa gioia pasquale ben presto però si tramutò in tragica situazione, molto angosciosa con l’inspiegabile smarrimento di Gesù. Cosa prova un cuore di padre e di madre alla constatazione che il loro Bambino non è con loro! Tre giorni veramente angoscianti e struggenti, anche per un cuore addestrato al soffrire e a vivere nell’incognito. La percezione fisica della mancanza del Bambino è la massima fonte di profondi turbamenti interiori e non solo. La ricerca affannosa e senza esiti positivi poteva lanciare lontano i pensieri di Giuseppe e di Maria, al fallito tentativo di Erode.

Qualche reminiscenza del timore erodiano si sarà risvegliata, e avrà reso ancora più tragica l’affannosa ricerca del Bambino tra le file della carovana del ritorno. Ma invano. E più cupo diventava la sera senza del Bambino. Preghiere, ansie e silenzi prolungati dovettero riempire tutto il tempo dei tre giorni sia di Giuseppe che di Maria.  L’avventura come era nata nel silenzio, così sembrava terminare nel silenzio. La speranza è dura a morire. E venne premiata quando trovarono Gesù a discutere nel tempio tra i dottori della legge. Finalmente, il silenzio della mancanza venne riempito e ritornò la calma. E Gesù si comportò “con più riguardo” verso i suoi genitori terreni.

Il sipario su Giuseppe

Con questo episodio, cessano le notizie rivelate su Giuseppe. La sua vita si apre con il silenzio e termina nel silenzio. La chiave di lettura sembra essere proprio questa: dal silenzio di Dio in Cristo al silenzio in Dio con Cristo.  Giuseppe è fedele a Cristo in Maria e in Cristo con Maria.

Autore: Padre Giovanni Lauriola, ofm

Il nome Giuseppe è di origine ebraica e sta a significare “Dio aggiunga”, estensivamente si può dire “aggiunto in famiglia”. Può essere che l’inizio sia avvenuto col nome del figlio di Giacobbe e Rachele, venduto per gelosia come schiavo dai fratelli. Ma è sicuramente dal padre putativo, cioè ritenuto tale, di Gesù e considerato anche come l’ultimo dei patriarchi, che il nome Giuseppe andò diventando nel tempo sempre più popolare. In Oriente dal IV secolo e in Occidente poco prima dell’XI secolo, vale a dire da quando il suo culto cominciava a diffondersi tra i cristiani. Non vi è dubbio tuttavia che la fama di quel nome si rafforzò in Europa dopo che nell’Ottocento e nel Novecento molti personaggi della storia e della cultura lo portarono laicamente, nel bene e nel male: da Francesco Giuseppe d’Asburgo a Garibaldi, da Verdi a Stalin, da Garibaldi ad Ungaretti e molti altri ancora.

  San Giuseppe fu lo sposo di Maria, il capo della “sacra famiglia” nella quale nacque, misteriosamente per opera dello Spirito Santo, Gesù figlio del Dio Padre. E orientando la propria vita sulla lieve traccia di alcuni sogni, dominati dagli angeli che recavano i messaggi del Signore, diventò una luce dell’esemplare paternità. Certamente non fu un assente. È vero, fu molto silenzioso, ma fino ai trent’anni della vita del Messia, fu sempre accanto al figliolo con fede, obbedienza e disponibilità ad accettare i piani di Dio. Cominciò a scaldarlo nella povera culla della stalla, lo mise in salvo in Egitto quando fu necessario, si preoccupò nel cercarlo allorché dodicenne era “sparito’’ nel tempio, lo ebbe con sé nel lavoro di falegname, lo aiutò con Maria a crescere “in sapienza, età e grazia”. Lasciò probabilmente Gesù poco prima che “il Figlio dell’uomo” iniziasse la vita pubblica, spirando serenamente tra le sue braccia. Non a caso quel padre da secoli viene venerato anche quale patrono della buona morte.

  Giuseppe era, come Maria, discendente della casa di Davide e di stirpe regale, una nobiltà nominale, perché la vita lo costrinse a fare l’artigiano del paese, a darsi da fare nell’accurata lavorazione del legno. Strumenti di lavoro per contadini e pastori nonché umili mobili ed oggetti casalinghi per le povere abitazioni della Galilea uscirono dalla sua bottega, tutti costruiti dall’abilità di quelle mani ruvide e callose.

  Di lui non si sanno molte cose sicure, non più di quello che canonicamente hanno riferito gli evangelisti Matteo e Luca. Intorno alla sua figura si sbizzarrirono invece i cosiddetti vangeli apocrifi. Da molte loro leggendarie notizie presero però le distanze personalità autorevoli quali San Girolamo (347 ca.-420), Sant’Agostino (354-430) e San Tommaso d’Aquino (1225-1274). Vale la pena di riportare soltanto una leggenda che circolò intorno al suo matrimonio con Maria. In quella occasione vi sarebbe stata una gara tra gli aspiranti alla mano della giovane. Quella gara sarebbe stata vinta da Giuseppe, in quanto il bastone secco che lo rappresentava, come da regolamento, sarebbe improvvisamente e prodigiosamente fiorito. Si voleva ovviamente con ciò significare come dal ceppo inaridito del Vecchio Testamento fosse rifiorita la grazia della Redenzione.

  San Giuseppe non è solamente il patrono dei padri di famiglia come “sublime modello di vigilanza e provvidenza” nonché della Chiesa universale, con festa solenne il 19 marzo. Egli è oggi anche molto festeggiato in campo liturgico e sociale il 1° maggio quale patrono degli artigiani e degli operai, così proclamato da papa Pio XII. Papa Giovanni XXIII gli affidò addirittura il Concilio Vaticano II. Vuole tuttavia la tradizione che egli sia protettore in maniera specifica di falegnami, di ebanisti e di carpentieri, ma anche di pionieri, dei senzatetto, dei Monti di Pietà e relativi prestiti su pegno. Viene addirittura pregato, forse più in passato che oggi, contro le tentazioni carnali.

  Che il culto di San Giuseppe abbia raggiunto in passato vette di popolarità lo dimostrano anche le dichiarazioni di moltissime chiese relative alla presenza di sue reliquie. Per fare qualche esempio particolarmente significativo: nella chiesa di Notre-Dame di Parigi ci sarebbero gli anelli di fidanzamento, il suo e quello di Maria; Perugia possiederebbe il suo anello nuziale; nella chiesa parigina dei Foglianti si troverebbero i frammenti di una sua cintura. Ancora: ad Aquisgrana si espongono le fasce o calzari che avrebbero avvolto le sue gambe e i camaldolesi della chiesa di S. Maria degli Angeli in Firenze dichiarano di essere in possesso del suo bastone. È sicuramente un bel “aggiunto” di fede.

Autore: Mario Benatti

Giuseppe rappresenta il padre, non per discendenza biologica, ma nel significato più vero. Il padre è colui che custodisce i figli, li ama, li protegge, se ne prende cura seguendoli nel loro cammino. Le virtù conosciute di San Giuseppe sono la pazienza, l’equilibrio, la dignità, l’ascolto, la bontà, l’ubbidienza. E per ubbidienza accetta la Parola di Dio, assumendo il ruolo di capo famiglia con tutte le responsabilità verso chi gli viene affidato.

Giuseppe, uomo giusto, umile, silenzioso (i Vangeli non riportano nessuna sua parola), pronto ad agire, ma piuttosto schivo, vive a Nazareth in Galilea ed è il fidanzato di Maria. È un artigiano falegname discendente della stirpe di Davide. Venuto a sapere della gravidanza della promessa sposa, Giuseppe decide in segreto di ripudiarla. Nella notte, però, un angelo gli appare in sogno e gli dice di prendere in sposa Maria perché il figlio che ha in grembo, che si chiamerà Gesù, è frutto dello Spirito Santo. Giuseppe crede e ubbidisce sposando Maria. La protegge anche quando dovrà scappare in Egitto per sfuggire alla persecuzione di re Erode, per poi ritornare con Maria e Gesù di nuovo a Nazareth.

Giuseppe è un grande lavoratore ed educa Gesù insegnandogli il mestiere di falegname. La figura di Giuseppe a fianco di Maria è importante per le sue azioni di uomo proteso alla ricerca della legge di Dio, dedito alla custodia della sua famiglia. Un uomo che non vuole essere il detentore del comando, ma l’esempio del padre saggio e amorevole. Non si hanno notizie sulla data della sua morte, ma si presume che si sia spento quando Gesù aveva circa trent’anni. Sulla croce Gesù non avrebbe, infatti, affidato sua madre al suo discepolo Giovanni se Giuseppe fosse stato ancora in vita.

Il suo simbolo è il bastone fiorito di gigli, segno di purezza. È protettore della famiglia, dei papà, delle ragazze da marito, dei lavoratori in genere tra i quali, in particolare, artigiani, operai, falegnami, carpentieri, decoratori. Protegge pure i senzatetto, gli esiliati, i viaggiatori e i Monti di Pietà. Dichiarato patrono della Chiesa cattolica, viene invocato per ottenere un buon matrimonio. San Giuseppe si celebra il 19 marzo, giorno in cui si festeggiano i papà, ma anche il Primo Maggio, festa dei lavoratori.

Autore: Mariella Lentini

Note: La data di culto di San Giuseppe in alcuni anni viene trasferita. Questo avviene quando il 19 marzo cade nella Settimana santa (ad esempio, nel 2008) o coincide con una Domenica di Quaresima (nel 1995, nel 2017 e nel 2023) o con la Domenica delle Palme. (Decreto Congregazione per il Culto Divino e la Disciplina dei Sacramenti del 22.04.1990).

SOURCE : https://www.santiebeati.it/dettaglio/20200

Juan de Valdés Leal, Le Couronnement de Saint Joseph, 1665


VISITA PASTORALE NEL FUCINO E AD AVEZZANO

SANTA MESSA SUL SAGRATO DELLA CATTEDRALE DI AVEZZANO

OMELIA DI GIOVANNI PAOLO II

Domenica, 24 marzo 1985


1. “Tu sei mio padre . . . roccia della mia salvezza” (Sal 89, 27).

Con queste parole della liturgia desidero, insieme con voi, cari fratelli e sorelle della Marsica, adorare la paternità di Dio nella grande e umile figura dello sposo di Maria santissima, San Giuseppe, che noi ricordiamo in questa domenica, immediatamente successiva alla sua festa.

Da quanti secoli e generazioni la paternità di Dio è adorata dai figli e dalle figlie di questa terra! Da quanti secoli e generazioni essa è qui invocata come la “roccia della nostra salvezza”!

La Chiesa dei Marsi ha un suo lungo passato.

Qui giunse l’annuncio del Vangelo fin dai tempi immediatamente successivi a quelli apostolici; qui la fede mise radici profonde, suscitando una fioritura di vita cristiana, di cui sono tuttora visibili i segni in chiese e monasteri di notevole valore storico e artistico; qui la fede persevera vigorosa anche oggi.

2. Animati da questa fede, ci troviamo oggi raccolti intorno all’altare per celebrare insieme i divini misteri davanti a questa cattedrale sorta, come l’intera città di Avezzano, dopo il terremoto del 1915. Saluto il vescovo, monsignor Biagio Vittorio Terrinoni, col clero, i religiosi e le religiose della diocesi; saluto i laici delle varie associazioni e movimenti di impegno cristiano; e saluto tutti voi, fratelli e sorelle, che siete qui convenuti per questo incontro di fede e di preghiera; un pensiero particolare rivolgo agli ammalati, che con le loro sofferenze tanto contribuiscono al bene spirituale dell’intera comunità.

Esprimo la mia viva gioia di poter oggi, come Vescovo di Roma e successore di San Pietro, adorare insieme con voi il Dio dell’alleanza, che la Chiesa venera con le parole del salmista:

“Ho stretto un’alleanza con il mio eletto, / ho giurato a Davide mio servo: / stabilirò per sempre la tua discendenza . . .” (Sal 89, 4-5).

Il salmista parla di Davide-re, ma la liturgia indica Giuseppe di Nazaret, il carpentiere.

Dio ha stretto proprio con lui un’alleanza particolare, che la Chiesa paragona con quella stretta da Dio con Abramo e con Davide.

Ad Abramo il Dio dell’alleanza dice: “Padre di una moltitudine di popoli ti renderò” (Gen 17, 5). E a Giuseppe di Nazaret Dio dice: ti ho reso padre . . . il padre del mio Figlio!

Davanti agli uomini ho fatto di te il padre di colui “il quale fu concepito da Spirito Santo”; di te, che come Abramo “avesti fede sperando contro ogni speranza” (Rm 4, 18; cf. Gen 15, 6). E in questa fede hai accolto sotto il tetto della tua casa colui che fu speranza e attesa di tutti i popoli: Gesù, figlio di Maria.

In questa liturgia la Chiesa professa e loda questa particolare alleanza nella paternità, nella quale Giuseppe di Nazaret ha avuto parte ancor più che Abramo.

3. Abramo credette “contro ogni speranza” al fatto di poter diventare “padre di una moltitudine di popoli”, “contro ogni speranza”, perché, umanamente, non poteva aspettare un figlio.

Giuseppe credette che al suo fianco avrebbe avuto luogo il compimento della speranza. Credette che “per opera dello Spirito Santo” Maria, la sua promessa sposa, la Vergine di Nazaret, era diventata madre “prima che andassero a vivere insieme” (Mt 1, 18).

Ecco le parole del messaggero di Dio alle quali Giuseppe credette: “Giuseppe, figlio di Davide, non temere di prendere con te Maria, tua sposa, perché quel che è generato in lei viene dallo Spirito Santo. Essa partorirà un figlio e tu lo chiamerai Gesù: egli infatti salverà il suo popolo dai suoi peccati” (Mt 1, 20-21).

Quanto simili sono queste parole dell’“annunciazione dell’angelo”, udite da Giuseppe, a quelle dell’annunciazione che aveva udito Maria! Si completano reciprocamente e insieme spiegano il mistero divino dell’incarnazione del Verbo, Figlio di Dio.

4. Giuseppe, che aveva creduto a queste parole, strinse con Dio un’alleanza particolare: l’alleanza nella paternità.

D’ora in poi avrebbe saputo che cosa dovevano significare nella sua vita e nella sua vocazione le espressioni del salmo: “Egli mi invocherà: Tu sei mio padre” (Sal 89, 27).

Infatti Gesù lo chiamava così. E tutto l’ambiente diceva lo stesso chiamando Gesù “il figlio del carpentiere” (Mt 13, 55). Ed egli, Giuseppe, sapeva che queste parole si riferivano al Padre eterno, Creatore del cielo e della terra.

Sapeva che si era compiuta la più sacra alleanza. Sapeva che la sua povera casa di Nazaret era stata riempita con l’imperscrutabile mistero della paternità divina, di cui lui stesso, Giuseppe, era divenuto il fiduciario più vicino e il servo fedele.

Lui, lo sposo di Maria, la serva del Signore.

E quando ogni giorno si accostava al suo banco di lavoro, sapeva che il suo lavoro si univa in una sola cosa col mistero della famiglia nella quale l’eterno Figlio di Dio era divenuto bambino. Sapeva e credeva, “ebbe fede sperando contro ogni speranza”.

5. Sono lieto di adorare oggi insieme con voi, cari fratelli e sorelle, la paternità divina che si è rivelata in modo mirabile nella vita e nella vocazione di Giuseppe di Nazaret.

In lui il lavoro umano s’unisce in modo coerente con la vita della famiglia. E perciò la celebrazione di San Giuseppe è, nello stesso tempo, la festa della famiglia e del lavoro.

Abbiamo reso a ciò testimonianza incontrandoci precedentemente con l’ambiente del multiforme lavoro umano, qui nella vostra terra, nel piazzale antistante Telespazio: con i lavoratori della terra e quelli della fabbrica, con gli uomini dediti alle attività più antiche e quelli impegnati nei settori della tecnologia più avanzata.

E adesso, mediante la liturgia di San Giuseppe, uniamo il lavoro e la famiglia, riflettendo su queste due realtà alla luce della parola di Dio.

6. L’alleanza tra lavoro e famiglia, che si attuò nella vita di San Giuseppe, trova il suo riflesso nella vita di ogni famiglia e nella vicenda umana di ogni lavoratore. Nel piano di Dio, infatti, l’uomo ha il naturale diritto di formarsi una propria famiglia e questa, per sostentarsi, deve poter contare sull’apporto del lavoro umano. Su questi due cerchi di valori, l’uno congiunto al lavoro, l’altro conseguente al carattere familiare della vita umana, mi sono soffermato nell’enciclica Laborem exercens (Giovanni Paolo II, Laborem exercens, 10).

È necessario che i due ambiti di valori si colleghino fra loro correttamente, e correttamente si permeino. Se è vero infatti, che il lavoro rende possibile la fondazione e la vita di una nuova famiglia, è vero anche che nella famiglia ci si educa al lavoro e mediante il lavoro ci si matura come esseri umani. Occorre dunque affermare con chiarezza che “la famiglia è, al tempo stesso, una comunità resa possibile dal lavoro e la prima interna scuola di lavoro per ogni uomo” (Ivi).

Voi vedete, allora, carissimi fratelli e sorelle, la conseguenza immediata che deriva da quanto ora affermato. La conseguenza è che “la famiglia costituisce uno dei più importanti termini di riferimento, secondo i quali deve essere formato l’ordine socio-etico del lavoro umano” (Giovanni Paolo II, Laborem exercens, 10). Questa dimensione familiare del lavoro costituisce uno dei capisaldi della dottrina sociale della Chiesa.

Ed è un caposaldo confermato dalla vicenda di San Giuseppe e della Sacra Famiglia: lì i due ambiti di valori si sono incontrati e mirabilmente congiunti. Non è senza significato che il Figlio di Dio abbia voluto nascere in una famiglia e caricarsi della fatica di un lavoro pesante come quello del carpentiere. In un certo senso può dirsi veramente che il mistero dell’incarnazione “passa” attraverso queste due realtà umane: la realtà della famiglia e quella del lavoro. Di tale mistero San Giuseppe divenne il fiduciario più intimo e il servo più fedele, lui che la Provvidenza aveva destinato a rivestire i ruoli di padre di famiglia e di uomo del lavoro. Nell’onorare oggi la figura di San Giuseppe, noi rendiamo omaggio alla santità della famiglia e del lavoro, queste due dimensioni umane fondamentali, che in lui trovarono attuazione tanto alta e singolare.

7. Il ricordo di San Giuseppe non è la festa soltanto del lavoro e della famiglia. Essa è anche una festa particolare della Chiesa: di questa Chiesa che è nella terra dei Marsi.

Sul mistero divino dell’“alleanza nella paternità” riflettono oggi anche coloro che sono i ministri dell’altare e dell’Eucaristia nella Chiesa dei Marsi, e che sono oggi qui riuniti intorno al loro vescovo e al successore di Pietro.

Anch’essi hanno stretto con Dio un’“alleanza nella paternità” grazie alla quale tante anime hanno potuto essere generate alla vita nuova in Cristo. È una vera paternità spirituale quella del ministro di Dio. Ad essa si richiamava San Paolo, quando con fierezza esclamava: “Potreste avere anche diecimila pedagoghi in Cristo, ma non certo molti padri, perché sono io che vi ho generato in Cristo Gesù, mediante il Vangelo” (1 Cor 4, 15). E, poiché anche sul piano soprannaturale come su quello naturale, la missione della paternità non si esaurisce con l’evento della nascita, ma si estende ad abbracciare in certo modo tutta la vita, l’Apostolo poteva rivolgersi ai suoi cristiani con quell’altra vibrante apostrofe: “Figlioli miei, che io di nuovo partorisco nel dolore finché non sia formato Cristo in voi!” (Gal 4, 19).

Il ministero del sacerdote è ministero di paternità. Comprenderlo significa comprendere anche il senso profondo di quella speciale alleanza con Dio che è il celibato. Si tratta di un’alleanza nella paternità che, se vissuta nella fede “sperando contro ogni speranza”, si rivela straordinariamente feconda: come Abramo, anche il sacerdote diventa “padre di molti popoli” (Rm 4, 18), e trova nelle generazioni di cristiani che gli fioriscono intorno la ricompensa alle fatiche, alle rinunce, alle sofferenze di cui è intessuto il suo quotidiano servizio.

Cari sacerdoti dell’antica e gloriosa Chiesa dei Marsi! Sappiate vivere con generosità ogni giorno rinnovata questa alleanza con Dio nella paternità spirituale, ad essa orientando ogni adempimento del vostro ministero. Date buona testimonianza alla santità della parola di Dio, annunciandola con cura e con amore, affinché sia compresa e vissuta dal popolo a voi affidato. Celebrate con convinzione interiore i sacramenti della salvezza, specie quelli dell’Eucaristia e della Riconciliazione, portando i fedeli a gustare i tesori della liturgia e a nutrirsene per una vita cristiana sempre più intensa. Guidate con senso di responsabilità le comunità che siete chiamati a presiedere, partecipando attivamente alle gioie e ai dolori della gente e avvalendovi sempre più e sempre meglio della collaborazione dei laici impegnati. Io voglio dire a voi tutti la mia stima cordiale e il mio sincero apprezzamento per la costanza con cui restate al vostro posto, a volte in paesi piccoli e disagiati, testimoniando a persone spesso anziane e isolate la sensibilità di Dio, che non cessa di preoccuparsi amorevolmente di ogni suo figlio, anche il più povero e dimenticato.

8. Il mio pensiero si volge ora ai religiosi e alle religiose, che in questa Chiesa dei Marsi vivono la loro consacrazione a Dio nella professione dei voti di povertà, castità e obbedienza. Quale esempio mirabile è per tutti voi, carissimi fratelli e sorelle, il casto sposo della Vergine santissima, Giuseppe, il povero carpentiere di Nazaret, l’esecutore attento e fedelissimo delle volontà del Padre celeste! La sua alleanza con Dio nella paternità si riflette nella vostra vita di consacrati, perché ciascuno di voi, adempiendo al rispettivo carisma, contribuisce alla generazione e alla crescita del Cristo totale. La vita di Giuseppe, consacrato a Dio accanto a Maria per svolgere le funzioni di padre nei confronti del Verbo incarnato, vi ispiri e vi sostenga nel quotidiano impegno di corrispondenza alla vocazione ricevuta.

Col grazie sincero per la vostra presenza attiva nella vita pastorale di questa Chiesa - nelle parrocchie, negli ospedali, negli asili, nelle scuole, nelle opere caritative e assistenziali - desidero rivolgervi un’esortazione pressante a essere fedeli alle esigenze della vita consacrata. Si esprima, questa vostra fedeltà, nell’adesione gioiosa alla vita comunitaria; nella testimonianza in mezzo al popolo dei rispettivi carismi; nel servizio paziente e premuroso verso ogni persona in difficoltà; nel fare di voi stessi, in mezzo ai fratelli, un segno profetico del primato di Dio su tutto e su tutti.

9. Questo primato Giuseppe testimoniò con tutta la sua vita. La liturgia mette in un certo senso nel suo cuore e sulle sue labbra le parole del salmo:

“Canterò senza fine le grazie del Signore, / con la mia bocca annunzierò la tua fedeltà nei secoli, / perché hai detto: “La mia grazia rimane per sempre”, / la tua fedeltà nei cieli” (Sal 89, 2-3).

Giuseppe, uomo giusto, sposo castissimo di Maria, carpentiere di Nazaret, proclama la grazia straordinaria di Dio, che gli fu partecipata a somiglianza di Abramo; la grazia dell’alleanza nella paternità!

E proclama la fedeltà di Dio a quest’alleanza, che si compie nel silenzio della povera casa in Galilea, dove il lavoro riempiva i giorni della vita della Sacra Famiglia.

E noi guardando la figura del carpentiere di Nazaret, preghiamo affinché la grazia dell’eterno Padre:

- accompagni il nostro lavoro quotidiano;

- unisca nella comunione le nostre famiglie;

- fruttifichi nel servizio della Chiesa di cui Giuseppe è protettore e padre, così come fu protettore e padre sulla terra dell’eterno Figlio di Dio.

Dopo il canto finale del “Tu es Petrus” il Santo Padre così saluta quanti hanno partecipato al significativo incontro di fede e di pietà.

Voglio ancora ringraziare tutti per questo invito cordiale e significativo che non si è potuto realizzare nel giorno della festa di San Giuseppe ma che abbiamo potuto celebrare oggi. San Giuseppe ci ha portato oggi la sua serenità e ci ha dato il dono di ricordarlo come patrono delle famiglie e del lavoro umano nella vicinanza immediata della vigilia dell’Annunciazione. I due misteri sono così vicini: la maternità divina di Maria intimamente unita alla mente e al cuore del suo sposo. Ringrazio tutti i confratelli nell’episcopato, i sacerdoti, i religiosi, le religiose, tutti i presenti, tutto il popolo di Dio di Avezzano e tutta la Marsica con le sue tradizioni civili e religiose. Ringrazio voi tutti che rappresentate queste tradizioni e le avete a cuore. Voi famiglie tutte, voi lavoratori e voi lavoratrici, le comunità e i movimenti che portano tanta vita nella Chiesa di Dio: Azione cattolica, Neocatecumenali, ACLI. Ma una parola particolare desidero rivolgere ai cari ammalati che hanno portato il loro sacrificio sull’altare. Saluto poi i seminaristi che sono la speranza di questa Chiesa. Forse ho dimenticato qualcuno. Ma tutti si sentano nominati, ringraziati, abbracciati. Grazie per questa bellissima esperienza di Chiesa. Ringrazio la Provvidenza per questa splendida giornata. Le montagne ci hanno offerto uno spettacolo meraviglioso, il coro ci ha dato la possibilità di lodare Iddio insieme. Sia lodato Gesù Cristo. Arrivederci a Roma.

Copyright © Libreria Editrice Vaticana

SOURECE : http://www.vatican.va/holy_father/john_paul_ii/homilies/1985/documents/hf_jp-ii_hom_19850324_cattedrale-avezzano_it.html

Voir aussi https://www.youtube.com/watch?v=sZriekmIn0E

http://saint-joseph.fr/

http://www.josemariaescriva.info/docs/dans-l-atelier-de-joseph.pdf